95C

18 août 2005 à 18:44

Je risque un peu la « réputation » de mon blog sur ce coup-là, mais je me risque quand même.

Tout a commencé il y a quelques semaines lorsque ma mère, pendant un séance de shopping (=10mn dans une boutique, et mon quota de magasin de fringues est dépassé pour l’année) me fait la réfléxion que ma lingerie devient un peu juste pour moi.

Soyons clairs tout de suite : à part quand je ressens de la souffrance, mon corps, je n’en ai cure. Je veux dire : je n’y accorde pas de soin superflu (nan parce que quand même, j’entretiens le matériel, pas de méprise, mais juste le nécessaire pour faire tourner la machine). Je ne ressens pas le moindre plaisir à me fagoter avec des bouts de tissus exotiques, me faire des coiffures compliquées, etc… Le seul extra que j’offre à mon enveloppe physique c’est un coup de maquillage tous les matins (plus par réflexe qu’autre chose). Et on peut à la rigueur considérer être de la coqueterie le fait que j’aime à prendre plusieurs douches par jour (mais en vérité c’est pas pour me faire belle, juste pour me sentir propre) Et pus bien sûr, pour les entretiens j’ai une belle veste de costard et un beau chignon, mais au civil, vraiment, rien d’exubérant. Sur l’iar de « on va pas se torturer et devenir esclave de son corps, quand même ! »

Je ne dis pas : je remarque les changements qui s’y opèrent, mais je ne m’acharne pas dessus ; exemple : j’ai pris du poids il y a deux ans, je ne me suis pas mise à un régime draconnien pour autant. (C’est pas non plus que je m’empiffre, j’aimerais quand même bien reprendre forme humaine un jour, mais ya pas l’feu et j’vais pas me mettre en quatre pour pareille connerie)

Il faut peut-être, pour expliquer cela, remonter au collège où tout le monde (y compris mes parents) me traitait en/de parfait laideron (tout en condamant systématiquement toute tentative d’amélioration). J’ai vite pris le parti de penser que j’étais laide, grosse et moche et ça a réglé l’affaire.

Au lycée je souffrais bien du manque de regard des autres, mais il était déjà bien ancré que ça n’avait rien d’extraordinaire : je me suis toujours considérée comme peu avenante. Ca faisait mal, mais c’était normal. On appelle ça, j’imagine, un acquis.

Ce qui explique que lorsqu’on me fait un compliment, je suis et reste convaincue que soit la personne n’en pense pas un mot, soit elle n’a pas les yeux en face des trous. Soit les deux. Ce qui est forcément un problème lorsqu’on a quelqu’un dans sa vie qui vous dit des compliments : j’ai l’impression qu’il s’agit de quelqu’un qui s’aveugle sur ma réelle apparence.

Bref, je suis partie de l’idée que j’étais laide, que j’avais peu de chance de devenir un canon un jour, et que si jamais ça devait être le cas, ça m’aurait coûté cher ! (bien que si je devais un jour passer sur le billard d’un chirurgien esthétique, je changerais quoi, en fait ? La liposuccion est une douloureuse mascarade qui bien souvent n’a qu’un temps, le silicone une superficialité extrême, et quant à mon visage, dans le fond… j’aime bien mes yeux, mon nez a du caractère, et ma bouche… bon bah tant que les muscles me permettent encore de papoter, ça me convient. Je crois qu’au pire je ferais une chirurgie des mains, j’ai toujours eu très honte de l’apparence des mes doigts, tous plats et carrés. Mais ça me priverait tellement de n’avoir pas mes mains pendant la convalescence que c’est même pas la peine d’y penser !)

Lorsque je me regarde dans un miroir, je pense que je vois encore mon corps d’adolescente. Je me vois petite, grosse, pas de poitrine et pleine de boutons. Mais dans le regard des autres je ne ressemble pas toujours à ça, apparemment. Il y a tous ces types qui se retournent (souvent des mecs de 30 ans et plus, d’ailleurs), me sourient, m’adressent la parole, tentent leur chance. Je ne comprends pas trop. J’avais coutume de dire, lorsque j’étais ado, que c’était parce que je bénéficiais de la comparaison par rapport à leurs femmes, mais vu qu’actuellement on me donne aisément du madame et qu’on m’octroie 30 ans allègrement, ça ne doit pas être l’apanage de mon âge. Bon. Je pensais que c’était parce qu’adolescente, je m’habillais souvent de façon moulante… actuellement c’est pas vraiment le cas non plus. Certes, ce n’est pas comme si je faisais la gueule mais je n’incite personne à m’adresser la parole, et je ne salue pas spécialement les inconnus. Donc ça ne doit pas être ça.

Il faut croire que tout ce monde voit quelque chose qui m’échappe totalement.

Donc avec ma mère qui, de but en blanc, m’annonce que j’ai pris des rondeurs bien placées, j’écarquille les yeux et pense « elle déraille la vieille ». Elle reporte ses espoirs sur sa fille (ce serait pas la première fois). C’est tellement pas possible que c’en est risible. Personne ne fait une poussée de croissance à 23 ans.

Je pensais l’affaire oubliée. Oui c’est sûr, j’ai pris des formes : quand on grossit ça a tendance à arriver. Mais vu que je faisais un malheureux 75A au lycée, il n’y avait certainement pas de quoi pavoiser.

Pourtant me voilà avec des fringues que ma mère (insistante) a cru bon de me faire parvenir, et l’évidence est là : je déborde de ce fichu 95C. O_o

Quand au juste est-ce arrivé ??? Comment ai-je fait mon compte ?

J’ai filé devant le miroir. Mais pas moyen : je vois toujours deux oeufs sur le plat. Deux vagues machins dont je veux bien reconnaître qu’ils ont changé de forme, mais certainement pas de taille (chose que j’attribue aux fluctuations de poids).

Incrédule, j’ai même vérifié si ma mère n’avait pas truqué l’étiquette (oh elle a eu de bien pires mensonges par le passé, elle n’en est plus à ça près et ce n’est que justice d’être parano à présent). Mais c’est là et bien là (j’ai vérifié sur Internet si les tailles dans les autres pays correspondaient bien, mais rien à faire, c’est bien ça). J’en ai profité pour vérifier si j’ai pris du poids partout mais non, pas de changement côté taille de pantalon par exemple.

Je n’ai pas pu m’en empêcher : j’ai pleuré. Mon corps et moi on est fâchés depuis si longtemps que je n’arrive pas à croire ça. Et surtout je n’arrive pas à croire que je ne le vois pas.

Je sais bien que j’ai tendance à faire comme si je n’avais pas de corps, à ne rien mettre en valeur, à ne pas chercher à toute haleine à ressembler à quelque chose de précis. Mes fringues je les achète (quand j’en achète) parce qu’elles me vont, parce qu’elles sont noires et que le noir c’est classe et sérieux (et que ça sera mieux en entreprise), avant tout parce qu’il faut s’habiller. J’ai des cheveux superbes mais je ne cherche pas à les montrer et il faut me prier pour aller me les faire couper (quoi, comme si j’avais pas mieux à faire d’une trentaine d’euros qu’égaliser une frange -je n’en ai plus depuis des lustres- ou faire une fichue couleur ou Dieu sait quoi d’autre), je ne me fais pas les ongles, rien. Je suis consciente de faire partie de ses filles qui préfèrent passer leur temps libre à autre chose que s’occuper de l’extérieur (parce que se polir les ongles, se faire des masques et tout le toutim, ça vous bouffe du temps comme rien en plus ! Et si au moins ça allait vite mais même pas ! Il y a des temps de pause, et tout !)

Mais même lorsque je prends le temps de m’observer, je ne vois rien de rien et ça, ça échappe à mes facultés de compréhension.

J’ai tendance à me dire « toi, un 95C ??? ça va t’as pas les chevilles qui enflent ?! »

J’en sais rien, je ne les vois plus.

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