Un monde complexe

16 avril 2007 à 18:56

Une fois n’est pas coutume, je vais parler politique. Je suis heureuse d’avoir toujours à ma disposition cette tribune qu’est mon blog personnel, même si je ne m’en sers qu’à ma guise et pas sur la base de posts réguliers. Il y a quelque chose de libérateur dans l’idée qu’il existe un endroit, quelque part, où je peux dire le fond de ma pensée sur le sujet qui me sied.

Poutant il est ancré en moi que parler de politique est utile, mais expliciter ses intentions de vote est dangereux. Ou peut-être juste mauvais. Pendant près de vingt années, ma conscience politique était réduite à l’état zéro et les seuls gens que ça semblait intéresser, c’étaient mes parents. Parents dont le crédo a toujours fermement été : « on ne dit pas pour qui on vote, on ne dit pas pour qui on va voter ». Cette logique fait partie de ces choses qui sans raison apparente, se sont tatouées en moi. J’ai tendance à croire que c’est sage, mais j’ai aussi tendance à croire que parfois, donner son avis sans masquer le côté vers lequel on penche, ça peut être salutaire.

En ce lundi, j’avais décidé de prendre les derniers renseignements nécessaires en vue de l’élection. Je ne fais pas partie des indécis, loin de là, mais j’estime que pour être une citoyenne avertie il me faut prendre une maximum de renseignements. C’est sans doute ce qui a conduit le représentant local du Parti des Travailleurs à sonner à ma porte plusieurs fois ces dernières semaines, simplement parce que la première fois j’avais posé des questions sur Schivardi et qu’il a pensé qu’il y avait une ouverture. Mais si je n’entends pas un maximum sur le programme de chacun, même si je sais bien ce qui me tente le plus, puis-je me dire en toute honnêteté que j’ai voté en mon âme et conscience ? J’ai vraiment du mal à m’imaginer être de ceux qui, leur avis fait, partent du principe qu’ils ne leur reste qu’à ignorer ou démolir les autres programmes et/ou candidats. J’ai peut-être aussi du temps à perdre, allez savoir.

L’élection qui se profile me fait peur.

Peur parce que la première fois que j’ai voté, c’était en 2002. C’étaient mes premières élections, et donc mes premières élections présidentielles. Au premier tour, je n’avais pas trop d’idées arrêtées. Je ne m’étais pas intéressée à la politique, je partais du principe que c’était pareil : quel que soit le bord du président, il finissait par ne tenir aucune promesse ; la seule chose qui changeait à mes yeux, c’était le genre de mensonges. Des mensonges de droite et des mensonges de gauche. Alors au premier tour de 2002, ma technique pour voter a été : « qui n’aurais-je pas honte qu’un journal étranger affiche comme étant à l’Elysée après l’élection ». Je fais partie de ceux qui ont voté pour un « petit parti ». Un vote perdu. Au second tour, comme beaucoup de gens, c’est là que ma conscience politique s’est éveillée. On nous demandait de choisir entre nous couper un bras et nous couper une jambe. C’est pas pareil, évidemment, mais dans le fond on ne veut aucun des deux. J’ai pourtant dû voter Chirac comme 82% d’entre nous, Français.

Lorsque Bush a été réélu pour son second mandat, un site internet a vu le jour sur le thème « on est désolés, on n’a pas voté pour lui ». Et je me suis toujours dit : ne vous inquiétez pas les gars. Nous non plus. C’est comme ça que j’ai commencé à réfléchir au rôle du vote blanc, comment le système électoral devrait être réformé pour qu’un vote contestataire ne soit pas nécessairement un vote pour un candidat extrême, comment le système électoral n’est pas représentatif, à cause de l’existence-même du second tour avec deux candidats, des choix de vote des Français.

L’élection qui se profile me fait aussi peur parce que grâce à ce qui était en grande partie un vote contestataire, un vote désespéré, Jean-Marie Le Pen a l’impression d’avoir pris de l’importance. Je peux avoir tort, mais je pense qu’en le qualifiant de quatrième homme, on lui donne plus d’importance qu’il n’en a. Je ne pense pas que la population française ait la mémoire si courte ou, autre possibilité, qu’elle adhère à ses idées, dans de telles proportions. Je crois qu’en 2007, le vote contestataire ne se situe pas nécessairement chez Le Pen et qu’on semble l’oublier. Quand ses affiches clament que « droite, gauche, ils ont tout cassé », je me dis que Le Pen a senti que le vote contestataire de la bipolarisation de la politique, il ne lui était pas acquis cette année. Mais médiatiquement, 2002 sert tout de même son élection en 2007, en dépit du fait que je ne pense sincèrement pas que la France ait envie que ce type soit à l’Elysée, il se comporte comme s’il était un vrai présidentiable et les dérives que ça entraîne chez d’autres candidats, et en particulier Nicolas Sarkozy, sont véritablement terrifiantes.

Pour ce que je sais, pour ce que je vois, ce que je connais des gens, aucun n’a besoin de ce raccolage à droite toutes. Mais Nicolas Sarkozy croît qu’il y a des voix à récolter et il oriente le débat sur ces terrains-là, pour cette portion de la population qui sait déjà très bien ce qu’elle en pense, mais qui ne sait forcément qui la représente le mieux. Et ça me fait peur. Laisser penser aux gens que les idées d’extrême-droite sont ceux qui doivent guider la phase finale de la campagne, c’est à la fois un paravent et une erreur qui peut conduire loin de par la puissance des retombées médiatiques inévitables.

J’avais prévu de prendre de plus amples informations sur des candidats moins proéminents. Je l’ai un peu fait d’ailleurs. Mais consulter certains sites me glace le sang et je ne m’en sens pas le courage. J’ai l’idée confuse que je vais aller lire des choses qui me font peur de toutes façons, par la violence qu’elles expriment. Je suis tombée sur le blog de plusieurs frontistes (modérés, pas des nazis) au cours de ces dernières semaines. Ca me terrifie rien que d’y penser. Rien de bon ne guide ces partis. Et l’idée seule que dans mon historique se glisse ces adresses de sites, j’avoue qu’elle me fait peur aussi.

Il y a un homme qui pourtant répond parfaitement à ce que j’attends d’un homme politique. Cet homme ne ment pas. Il ne promet pas absolument de tout résoudre avec une formule magique. Il ne promet pas absolument que tout ira mieux. Il ne promet pas que ce qu’il a l’intention d’améliorer se fera sans que les Français aient à lever le petit doigt. Il ne simplifie pas les choses. Il reconnaît que nous vivons dans un monde complexe, un monde fait de diversité et notamment de diversité d’opinion. Que nous ne pensons pas tous pareil. Mais que la plupart d’entre nous qui ne sommes pas dans le secret des Dieux, nous avons besoin de changement et d’améliorations. Ce qu’il dit est simple : vous pensez ce que vous voulez, ce n’est pas la question. L’essentiel, c’est la vie que vous voulez mener. Et c’est pas facile d’y arriver. Et cinq ans, ce n’est que le minimum pour stopper l’hémorragie de la dette de l’état, et apporter quelques réformes simples pour respirer un peu. La vie idéale, elle n’est pas si vous votez pour moi, elle est si vous votez pour moi, si vous élisez aux législatives des gens qui voudront bosser au lieu de s’en mettre plein les fouilles à rien foutre, si vous remontez vos manches avec moi et que vous admettez qu’au bout de ce mandat, ça ira peut-être un peu mieux, mais ce ne sera pas encore ce dont on a rêvé.
Cet homme touche ce qu’il y a de plus humain en nous, il ne renie rien, ni les différences d’opinion ni les différences tout court, il dit simplement qu’elles doivent cesser de nous diviser et nous permettre de mettre nos forces en commun pour faire véritablement quelque chose et nous sortir du bourbier avant qu’il ne se transforme en sables mouvants. Cet homme fait appel à ce qu’il y a de plus humain en chaque Français, il lui dit qu’il a conscience que ce ne sera pas facile, qu’il a conscience que les résultats ne seront pas providentiels, mais que si on n’essaye pas, soit les choses ne changeront pas, soit elles changeront vers le mauvais.

Avec des mesures qui, oui, ne sont pas spectaculaires, mais assumées comme telles parce qu’à leur échelle, elles étrangleront un peu moins tout le monde, du chef de PME au simple étudiant, je crois que cet homme a la possibilité de faire quelque chose de la France que je puisse regarder sans honte.

Cet homme a la réaction que tout homme sain devrait avoir : ne pas blâmer quelqu’un d’autre pour ce qui ne va pas, ne pas espérer que quelqu’un d’autre le résoudra. J’admire la position de cet homme.

Le principe, ce qui compte, ce n’est pas de savoir si cet homme a été ou est de droite, ni s’il bascule à gauche. On s’en fiche. Ce qui compte c’est que cet homme est le plus désireux de faire que chacun reçoive de l’Etat le coup de pouce nécessaire à améliorer un peu sa propre vie et, par voie de conséquence, à son échelle, à améliorer un peu la vie économique de ce pays. C’est le seul homme qui pour le moment ait le courage de dire que ce qui compte, ce n’est pas ce qu’on pense, c’est la façon dont on veut vivre dans ce pays. Pensez à droite, pensez à gauche, pensez à l’extrême… mais quoi que vous pensiez, travaillez avec ceux qui ne pensent pas comme vous. Sortez de la pensée sectaire abstraite et allez de l’avant.

Ca peut paraître utopique et je le reconnais. Mais quand un homme a de bons objectifs, de véritables idéaux, et des idées raisonnables, quelque chose en moi s’éveille et dit que c’est le choix le plus juste. C’est à la fois un véritable vote contestataire, et un vote avisé sur l’avenir d’un pays qui ne semble pas beaucoup avancer sans cette forme d’union.

Un homme qui admet que le monde est complexe, qui ne cherche pas à le simplifier en pensant que je ne suis pas capable de le comprendre, et qui admet que la complexité ne nous simplifie pas la vie, mais peut aussi être tournée à notre avantage, est peut-être une chance pour la France. Je ne suis pas militante, mais pour un homme qui porte en lui de telles valeurs, je ne peux qu’admettre mon profond respect.

Vous voterez vous aussi, dimanche, pour la personne qui appelle à vos idéaux et qui vous semble aussi avoir les propositions adaptées. Mais s’il vous plaît, soyez sûr que c’est bien votre candidat.
Dimanche : votez.
François Bayrou
Olivier Besancenot
José Bové
Marie-George Buffet
Arlette Laguiller
Jean-Marie Le Pen
Frédéric Nihous
Ségolène Royal
Nicolas Sarkozy
Gérard Schivardi
Philippe de Villiers
Dominique Voynet

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