Pretty Awesome !

21 juin 2008 à 21:39

Les qualificatifs me manquent pour faire l’éloge du pilote de Pretty Handsome, pilote au générique fabuleux qui plus est : Ryan Murphy à la barre, Joseph Fiennes et Carrie-Ann Moss devant la camera… Mais ça ne s’arrête pas là, croyez-moi, voilà une série qui a bien mieux que son affiche à offrir, et il ne faut pas deux minutes pour s’apercevoir qu’on tient là un des meilleurs pilotes du moment.

On aurait pu penser que regarder pendant plus d’une heure un personnage se questionner à propos de son identité sexuelle serait assez difficile à suivre pour le commun des mortels, et je craignais de souffrir du manque d’identification, vu qu’il s’agit d’un sujet très particulier. Mais pas du tout. Le brio de Pretty Handsome, c’est de mettre en parallèle de la crise identitaire de Bob celle de tous ses proches… et en particulier des autres hommes de la famille.

Là où la série est à la fois cruelle et truculente, c’est lorsqu’elle dénonce quelque chose qu’elle déploie en parallèle : Bob voudrait qu’on ne le regarde pas comme un homme, mais il ne parvient pas à trouver le courage de se montrer tel qu’il est. Il vit une blessure parce qu’il a l’impression de vivre caché. Mais par contre, il attend que ses fils soient parfaitement conformes à l’idée qu’il se fait d’eux et ne les voit pas non plus tels qu’ils sont. Ce qui ronge Bob s’apprête à ronger ses fils exactement de la même façon : être soi en cachette… quitte à vivre dangereusement.
Qui mettra Bob face à sa vraie contradiction ? Pas sa femme ni sa mère qui ne semblent rien voir. Ici, la seule femme qui a le beau rôle… c’est Bob.

Et qu’il est beau et puissant, Joseph Fiennes, lorsqu’il fixe son regard dans le miroir et tente d’y voir tantôt ce qu’on attend de lui, tantôt ce qu’il voudrait être ! Si Pretty Handsome avait été tourné au temps du cinéma muet, les scènes de Fiennes auraient eu l’exact même effet qu’ici. Qui a besoin de dialogues quand on a un excellent acteur ? Il porte le show sur ses épaules, et le fait à la perfection. En dépit de la multiplicité des scènes qui nous font entrer dans le monde torturé de Bob, on n’a pas un seul instant l’impression d’une redondance quelconque, chaque scène atteint sa cible. En plein coeur !

Plusieurs scènes sortent encore plus du lot : les entrevues de Bob avec le couple de transsexuels, d’une sincérité rare, les quelques interactions de Bob avec ses fils où subitement, notre homme se comporte avec un poil de machisme ce qui n’apporte que plus de nuances au personnage, et évidemment, le moment où chacun se révèle à lui-même, l’apogée de ce pilote… rha non, je ne veux surtout pas vous spoiler sur ce coup, c’est trop énorme. Sachez juste que si Pretty Handsome finit par se trouver une saison à mettre derrière ce pilote (et hélas je n’ai pas trouvé beaucoup de bonnes nouvelles allant en ce sens), il faudra vraiment être un putain de génie pour surpasser cet instant d’une frénésie, d’une intensité et d’une perversité déconcertantes.

Mon esprit malade sans cesse en quête de séries dérangeantes sans taper dans le provocateur (et Dieu sait que c’est exactement ce que la plupart d’entre nous attend très exactement de Ryan Murphy d’ordinaire… attendez-vous à revoir votre opinion sur lui à la hausse), où la dureté se trouve dans la forme tant que dans le fond, a vraiment été ébloui, et maintenant, il lui faut la suite. Fallait pas commencer, aussi…

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. Nakayomi dit :

    Là, moins de problème pour le ton !
    Par contre, j’sais pas ce que ça peut donner sur la durée (et on sait que Ryan Murphy peut très vite déraper sur la durée… Non, parce que derrière le côté trash provocateur de Nip/Tuck, y’avait quelque chose au départ… Il n’en reste plus rien à l’heure actuelle, mais quand même quoi)…

  2. Grandeur et déception

    Commençons par le commencement : un grand merci à toi d’avoir insisté pour que j’aille à la découverte de ce formidable pilote qu’est celui de Pretty/Handsome !

    Même si on sait que Ryan Murphy est capable de frapper très fort pour commencer avant de tomber dans le n’importe quoi le plus complet, force est de reconnaître que nous avons là un premier – et trois fois hélas, unique – épisode d’excellente facture dans lequel tout sonne absolument juste et où l’on a très vite fait de se prendre d’affection pour les personnages. Bien entendu, l’interprétation irréprochable de l’intégralité du casting n’y est pas pour rien, avec effectivement un gros coup de cœur pour Joseph Fiennes à la clef et l’immense plaisir de retrouver une Carrie-Anne Moss en grande forme.

    En découvrant ce pilote seulement maintenant, j’ai également pu me prêter au petit jeu du « tiens, je t’ai pas déjà vu quelque part, toi ? » que j’affectionne particulièrement, puisque le casting regorge d’acteurs vus ultérieurement dans Nip/Tuck, Glee ou d’autres séries sans lien avec Ryan Murphy.

    Si l’on déplorera que cet épisode se soit heurté à la frilosité de F/X, il n’en reste pas moins un superbe exercice de style. Les thèmes de la dualité et de la quête identitaire m’ont toujours énormément intéressé, et leur traitement très fin dans cet épisode ne pouvait que m’enthousiasmer. Ce que l’on est au plus profond de soi et l’image que l’on présente de soi au monde, ce dont on se sait dangereusement capable et qu’on ne souhaite pas devenir, ces vérités que l’on crève d’envie d’assumer et que l’on se résout à dissimuler devant la laideur du monde réel, ces choses que l’on ressent au contact d’autrui et ces mensonges que l’on préfère croire pour ne pas affronter la dure réalité… quelle richesse de sujets abordés au cours de ces bien trop courtes 66 minutes ! La déception résulte clairement de la frustration de savoir qu’aucune suite n’existe. Mais je me console en me disant qu’au vu de la propension de Murphy à s’éparpiller, c’est peut-être un mal pour un bien.

    Pour finir, quelques mots sur la B.O. Puisque nous sommes face à un pilote sans fausse note, la musique y est logiquement parfaitement intégrée, de ces thèmes de cinéma en versions instrumentales à cette sublime chanson qu’a toujours été et que sera toujours « Bohemian Rhapsody » qui s’impose comme une conclusion évidente, parce qu’elle dépeint si bien l’étrangeté de ce monde et que je ne pense pas me tromper en disant qu’on s’est probablement tous un jour reconnu dans son « I sometimes wish I’d never been born at all ».

    Je te remercie une fois de plus car ce fut vraiment une très belle découverte, et je serais probablement passé à côté sans toi. Pour le coup, même si je me doute que l’expérience n’est pas nécessairement aussi plaisante pour tous les pilotes sans suite qu’elle a pu l’être pour celui-ci ou pour 17th Precinct, je retiendrai quand même la leçon que ce n’est pas parce qu’un projet n’a pas abouti qu’il ne vaut pas la peine de se pencher dessus.

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