Masochisme

17 octobre 2008 à 19:06

Difficile à expliquer ; je ne sais pas trop ce qui s’est passé… mais j’ai cagoulé le pilote de Forever Knight. Ouais, je sais. Je suis une tordue ! Je flippe à mort sitôt que je vois deux crocs vaguement aiguisés, et pourtant je me cagoule des trucs pareils… c’est à se demander, hein…

Je l’ai soigneusement rangé à côté de mon pilote de Kindred que je n’ose même pas regarder alors que la petite date dit que ça fait depuis 2005 que j’ai fait main basse dessus (ça veut tout dire), oui-oui, juste là, à côté de l’épisode de Moonlight dont je parlais il y a peu. Si j’ai eu assez de tripes pour l’un, je devrais pouvoir m’occuper des autres, non ?

En fait, si je suis certaine de trouver de bonnes choses dans ces séries (surtout Kindred, série à propos de laquelle j’ai lu et entendu tant de choses), j’avoue que l’idée de me payer quinze jours de terreurs nocturnes, de cauchemars atroces et de nuit passées la lumière allumée… me freine quelque peu. Les vampires, c’est ma phobie, comme vous le savez (ça et les abeilles… d’ailleurs ça doit être un peu Freudien dans le fond), et j’avoue que je comprends mal qu’on ait envie de jouer avec ses peurs, comme ça, qu’on regarde quelque chose juste pour flipper comme une malade devant la télé.
Evidemment que c’est une fiction, évidemment que ça n’existe pas les vampires (comment ça, « jusqu’à preuve du contraire » ?! merci de votre aide, hein), évidemment que ce qui se passe dans ma télé ne va pas m’arriver. Ca va, j’ai pas 5 ans, non plus ! Je sais bien tout ça. M’enfin il n’empêche que la peur fait partie de ces choses irrationnelles qu’on ne peut pas contrôler, alors pas la peine de jouer avec et se créer des problèmes psychologiques (les mauvaises langues diront qu’un de plus, un de moins…).

Je ne conçois pas tellement qu’on aime se faire peur comme ça. Mais d’un autre côté, tout le monde n’est pas caninophobique que moi, vous me direz. Il y a, quelque part, des gens (des inconscients !), qui pensent que les vampires, c’est marrant. QUE C’EST MARRANT ! Des fous, vous dis-je. Mais du coup, ils peuvent regarder du vampire à la télé sans appeler leur maman ensuite dans la nuit en serrant très fort leur nounours. Nan j’déconne, je n’appelle pas la mienne (elle a une prédisposition génétique qui lui donne des canines très pointues, c’est la dernière que j’appelerais ; je suis contente d’avoir hérité de mon papa sur ce coup). Mais vous saisissez l’idée.

Cela dit, je crois que c’est l’invocation métaphorique de la peur qui me laisse perplexe. Les vampires, et dans une moindre mesure, les loup-garous, les fantômes, les je-sais-pas-quoi-d’autre encore (Seigneur, pourquoi les scénaristes ont-ils donc tout un bestiaire dans ce genre ? comme si une seule espèce de créatures démoniaques, ce n’était pas assez), ça me semble, d’une certaine façon, trop évident.
Genre on voit un type avec les yeux qui virent au jaune fluo, ou une nana à laquelle poussent des griffres de 12m de long, et pouf, ça y est, on sait qu’on doit avoir peur. Nan mais arrêtez quoi. C’est hyper codifié, comme peur !
Et surtout on a l’impression que pour faire peur aux gens, il faut utiliser ces êtres dont il est si évident qu’ils font peur, puisqu’ils sont difformes, ou vaguement maléfiques (ou les deux s’ils ont de la chance). Ca doit être pour ça qu’on s’en sert : ils font peur, mais pas trop.

Mais en revanche, une peur dont je ne me repais jamais assez, c’est finalement la peur que peuvent susciter… mais c’est plus rare à voir, et sans doute difficile à produire… des gens tout-à-fait ordinaires dans des scènes tout-à-fait ordinaires de la vie tout-à-fait ordinaire.
Et cette peur-là, j’en redemande, en fait. De cette peur qui vous prend les tripes parce qu’elle n’implique pas d’élément fantastique, magique, maléfique, mystérieux… c’est une terreur glaciale qui s’empare de vous parce que la seule chose qui soit vraiment monstrueuse en ce bas monde, c’est la nature humaine.
Là, il y aurait matière à un véritable festival, jouissif et douloureux à la fois, de voir de vrais hommes et de vraies femmes donner toute la mesure de leur bestialité, de leur esprit malfaisant, de leur méchanceté cruelle. Pas de la petite perfidie de bas étage ou de la mesquinerie de quartier, je ne vous parle pas de sortir du placard un vieux JR tout rouillé, non, je vous parle de personnages qui accomplissent dans toute leur horreur la destinée humaine ! Donnez-moi un gamin planqué dans un placard… parce que son père le maltraite, pas par peur du croquemitaine. Donnez-moi une femme qui appelle sa mère, affolée… parce que son mari est hypra-jaloux, pas parce que l’appel vient de l’intérieur de la maison. Donnez-moi un cauchemar bien réel ! De la vraie violence, pas forcément figurative, mais sauvage, palpable ; pas de l’opérette pour épater la galerie avec des prosthétiques et du ketchup !

En ce moment je lis Les Bienveillantes, un bouquin pas jouasse qui s’applique à décrire ce qu’il y a de plus sombre en l’humain, à tous les niveaux. C’est facile de se dire que seul un bouquin sur le nazisme aurait pu proposer ça, mais quand on regarde le personnage principal, on s’aperçoit qu’il aurait sans doute été un monstre tout de même, dans sa folie si… normale. Il est tellement sûr d’être un humain raisonnable ! Si sincèrement horrifié que quelqu’un ait tué son beau-père et sa mère dans son sommeil, sans même s’attaquer à lui qui dormait paisiblement dans la pièce d’à côté, avec la hache qu’il utilisait quelques heures plus tôt, et alors qu’il n’a aucun souvenir de ses dernières heures dans la maison ! Tellement sûr de l’amour charnel qui le lie à sa soeur jumelle ! Le voilà le monstre ! En voilà des monstres que j’aimerais voir à la télévision plus souvent ! Et encore, c’est peut-être encore trop caricatural.
Où est la peur d’être seul, je parle la vraie terreur de finir ses jours seul, pas celle qui pousse à s’inscrire sur un site de rencontres hein, celle de perdre ceux qu’on aime, celle de ne plus être capable de faire ce que l’on sait faire, celle de vieillir, celle de devoir changer, celle de rester le même, celle de voir la vie défiler, celle de ne pas avoir d’existence, celle de voir sa banque faire faillite, celle de se faire exproprier, celle de perdre son travail…? Toutes ces terreurs qui nous assaillent vraiment, au moins une, un jour où l’autre ! Qui parle de ces vraies peurs-là ? Celles qui plus qu’aucune autre, sont capables de nous glacer le sang, de cette terreur qui trempe jusqu’à l’os, qui marque la chair à jamais, dont on ne se remet jamais vraiment ? Pourquoi s’abriter derrière deux crocs factices fixés avec un peu de Steradent ? Faites-nous peur pour de vrai ! Donnez-vous de quoi exorciser nos craintes véritables, plutôt que de nous fournir des poupées de chiffons qui ne nous atteignent jamais tout-à-fait !

Si la fiction ne le fait pas, qui le fera ?

Allez, c’est décidé ce soir, c’est Forever Knight ! Mempopeur ! Qu’est-ce que je risque, hein ? Franchement !
En plus ma connexion internet est morte (je vous écris du boulot, bravant les pires interdits, pour vous fournir mon contractuel post du vendredi), donc il n’y a rien de mieux à voir ce soir… je me sens d’humeur masochiste, que voulez-vous. Mais tant qu’à souffrir sans internet, autant y aller carrément.

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5 commentaires

  1. freescully dit :

    C’est pas beau ça, de braver tous les interdits pour donner leur dose de récits téléphagiques à tes lecteurs !
    Les peurs de la vraie vie dont tu parles sont généralement plus utilisées comme générateur d’émotion dans les drama et sont plutôt portées par des seconds rôles ou guests parce que bon quand même il ne faudrait pas rappeler leur vie aux gens… mais il est vrai, pas vraiment comme déclencheur de peur. En même temps c’est un peu comme les grands huit, on aime bien parce qu’on sait qu’il n’arrivera rien (moi je dis ça, je ne monte jamais dedans j’ai trop peur que ça casse…) mais qui voudrait monter dans une voiture de crash test ?

    Et puis d’abord oui, lady, les vampires c’est fun ! Moi perso ma peur irrationnelle de fiction, ce sont les tueurs en série (sauf Dexter parce qu’il est pas si méchant le Dex, hein ?)…

  2. ladyteruki dit :

    Moi non plus j’aime pas les grands huit… à bien y réfléchir, à peu près pour les mêmes raisons que je n’aime pas les séries/films d’horreur, en fait : c’est factice.

    ah mais je m’insurge, il ne s’agit pas de rappeler leur vie aux gens, mais de leur permettre d’exorciser leurs peurs ! Il n’y a que la fiction qui nous permette de prendre ce recul sans le prendre directement pour soi…

  3. freescully dit :

    Ne t’insurge pas Ce que je voulais dire c’est qu’on est quand même plus touché par quelque chose qui nous arrive/est arrivé, à nous ou à nos proches, d’où ma remarque sur le fait de rappeler leur vie aux gens… Sinon oui bien sûr la fiction permet de réfléchir avec du recul sur des sujets divers et variés mais nous réfléchissons plus sur ce qui nous touche que ce qui ne nous touche pas (ou moins) et qui reste justement dans la sphère de la fiction.

  4. Nakayomi dit :

    La peur factice, qu’est-ce que je peux aimer ça… ^_^ Nan, mais j’y peux rien, mais les grands huit, quand j’ai l’occasion, j’aime (et pourtant, dieu sait que je peux… comment dire ?… m’exprimer une fois dedans ! )… Et j’aime justement les horror-show pour me faire peur (ah X-Files et ces maudis épisodes traumatisants !!). Oui, j’suis bon client… Pas forcément que ce soit trop sanglant non plus (j’suis un sensible quand même… ).

    La peur continue d’un Silent Hill (le jeu vidéo, hein), par exemple… C’est fou, mais c’est vraiment le seul jeu vidéo où j’ai peur de découvrir ce qu’il y a derrière chaque porte. Pourtant, en général, il y a pas grand chose… Parfois des scènes un peu plus corsées, mais la plupart du temps, ce sont des endroits vides et tout… Et ben j’ai le coeur serré à chaque fois… C’est le seul truc qui me fait cet effet (et je peux pas jouer plus d’une heure, sinon, mon coeur lâche ! >_

    Après, quant à ce qui est de la peur plus « terre-à-terre » sans êtres difformes ou cachés derrière un masque, c’est p’têt parce que c’est plus traumatisant et dur à supporter (au final) que c’est un genre moins apprécié… Là, comme ça, j’ai de vagues souvenirs de ce genre de chose (à un degré peut-être moindre que ce que tu voudrais), mais j’arrive pas à remettre (effet traumatique sans doute, effacement de souvenirs pour continuer à vivre sereinement, et pas enfermé à double tour, avec plusieurs cadenas à la porte et sursautant au moindre petit bruit un peu étrange…).

  5. Jérôme dit :

    Mais Lady, ce genre de productions existe et ça a même un nom : le journal télévisé…
    Plus sérieusement, il y a déjà tellement de raisons d’avoir peur que c’est bon d’exorciser celles-ci devant des monstres factices, tout en sachant qu’on ne risque rien, sinon s’en remettre une fois le générique de fin achevé !

    Nous avons besoin de rêver pour survivre et le cauchemar est aussi un rêve après tout…

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