Ton moulin, ton moulin…

20 mai 2009 à 11:03

Avec un peu de persistance, effectivement, je suis un peu plus à même de comprendre que The Tudors revête de l’intérêt.

Sur le principal, néanmoins, je n’ai absolument pas changé d’avis : pas mal de facilités voire de gratuité en font un divertissement sans grande prétention. Sept épisodes plus tard, l’aspect soapeque n’a pas cillé, il est là, fidèle au poste. Cela dit, au moins, les choses sont claires et on sait à quoi s’en tenir.

Mais The Tudors, et je m’en aperçois à présent après avoir passé plus d’épisodes d’observation (soit est-ce cela, soit ai-je cerné enfin la petite nuance qui me maintient malgré tout devant mon écran), ne vaut en fait ni par ses intrigues de cour, ni pour ses histoires de coeur ou de chair, ni pour le côté « téléfilm catastrophe » de l’épidémie de suette du dernier épisode en date, mais bien par son personnage principal, et uniquement lui.

Le Roi Henry VII est en effet le stéréotype du dirigeant trop puissant pour parvenir à ses fins. Il n’est que péché d’orgueil, il ne vit que dans le paraître et, prisonnier de ses passions, il est proprement incapable d’une vision à long terme. Si effectivement il jouit d’un pouvoir immédiat et absolu sur ses sujets, ce dernier est aussi son pire ennemi dans le sens où il l’empêche de s’apercevoir que d’aucuns, dans son entourage, ont la vue moins courte. Ils exploitent donc cette faiblesse en lui, et il leur suffit d’être outrancièrement obséquieux pour en obtenir tout ce qui leur chante, à l’instar évidemment du cardinal Wolsey.

Par-dessus le marché, comme le roi n’a aucun recul sur ses actes ou ceux des autres, il se montre d’une folle inconstance. Ses alliances diplomatiques en sont un bon exemple : il les tisse et les détruit sans vraiment réfléchir, en général suite à un coup de sang et à cause de propos rapportés, si fiant aveuglément à ce qu’on lui dit sans chercher à analyser les choses par lui-même. Et puisqu’il est toujours dans la réaction au lieu de l’action, il se sent obligé de prouver sa puissance là où souvent il lui serait préférable de faire montre de finesse, de stratégie ou juste d’autorité. D’ailleurs invariablement, s’il y a la moindre chance pour que ce jeune coq s’humilie en cherchant à prouver sa force, invariablement, il ne finira que par montrer qu’il est incapable de mesurer sa force et/ou l’ampleur du danger. A tant vivre de son ego, il le met d’ailleurs en péril, puisqu’il ne prouve que sa fougue, ainsi que son tempérament caractériel et sanguin.

Il est terrifié à l’idée de ne rien laisser à la postérité, et par association d’idées, hanté par la perspective de sa propre mort (et plus tard quand même un peu par celle de lady Boleyn), mais il se montre pourtant incapable de bâtir quoi que ce soit, justement à cause de ces travers.

Donc en fin de compte, le choix de cette gravure de mode qu’est Rhys-Meyers, tout en muscles saillants et en yeux habités par la folie, s’avère finalement cohérent. De cette façon, l’homme a l’air superficiel, pour mieux montrer qu’il l’est totalement. Tout torturé qu’il soit, il résonne creux, et cette beauté surfaite et aggressive en est finalement un élément à part entière. Cette apparence tape-à-l’oeil n’est là que pour mieux souligner, finalement, sa totale impuissance. Sa façon de perdre le peu de contrôle qu’il a de lui-même à la moindre contrariété est également révélatrice.

De ce fait, le portrait dépeint (et les éventuelles réflexions que le personnage peut apporter sur le métier de dirigeant, y compris aujourd’hui) donne une saveur insoupçonnée, sitôt qu’on considère toutes les intrigues sous cet angle.

Ainsi, je révise mon jugement : The Tudors est une plutôt bonne série, et ses faiblesses sont compensées par ce portrait sordide mais pertinent des excès et écueils qui guettent les puissants.
Je continue donc ma découverte de la saison 1, et après avoir vu le prix vert collé sur le coffret saison 2 hier, je sens arriver le tour pendable qui me guette. Il ne s’agira jamais de ma série préférée, ni même d’une de mes dix préférées, mais je suis, finalement, plutôt contente de lui avoir donné sa chance. Du moment qu’on sait qu’il ne faut pas s’attendre à des intrigues hors du commun ou à des relations d’une profondeur folle, on reste tout de même en de bonnes mains.

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2 commentaires

  1. Nakayomi dit :

    L’épisode de la suette est l’épisode qui m’a le plus plu, je l’avoue (après, c’est notamment là où je crois n’avoir pas trop compris le repère temporel qu’il n’y justement pas)…

  2. ladyteruki dit :

    Concernant cet épisode en particulier, j’ai aussi aimé le portrait de Thomas Tallis qui en a été fait. Les ailes de l’ange se sont déployées pour mieux brûler… et le retour a la terre ferme a été particulièrement touchant.

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