Midnight in Tokyo

26 août 2011 à 23:23

Est-il possible de tomber amoureux d’un dorama en 25 minutes ? La réponse est oui.

Encore une fois, mes attributions sur SeriesLive m’ont permis de découvrir une perle. C’est que, lorsque j’ai commencé les séries asiatiques, je n’avais personne pour me recommander de bonnes séries. A l’époque, Livia ou Eclair n’avaient pas de blog, par exemple, et tout ce qu’on trouvait, c’étaient des références aux séries les plus citées de tout le web nipponophile, en général par des adolescents et donc selon leurs goûts. Ce que je recherchais était un peu différent, toutefois, et si occasionnellement j’apprécie une comédie familiale ou un drame-dramatique-qui-fait-pleurer, voire éventuellement un thriller efficace, j’ai une nette préférence pour ces drames un peu indéfinissables qui sont profondément humains, et dont l’Asie a le secret, plus particulièrement le Japon.
Si j’avais eu un senpai dans le domaine des dorama, j’aurais fait beaucoup moins de découvertes par moi-même, c’est vrai. Mais j’aurais aussi pu ne pas passer à côté de perles qui m’étaient pourtant, quelque part, destinées.

Shinya Shokudou est de celles-là.
Mon coup de coeur est tel qu’encore une fois, le post consacré à Koukousei Restaurant s’en trouve repoussé, mais la vie est une question de priorités, mes amis. Quand on a un coup de foudre pareil, ça ne se commande pas. On obéit. Et en l’occurrence, quand on compare les deux, il n’y a pas photo.

Fait peu banal, Shinya Shokudou s’ouvre sur son générique : une remontée des rues illuminées de la ville, sur fond de ballade mélancolique nocturne.
Lorsqu’on a circulé dans les rues de la ville, qu’on s’est bien imprégné de son ambiance noctambule que seuls les citadins insomniaques connaissent vraiment, entre désoeuvrement et nostalgie, on trouve le chemin illuminé par la lune d’une petite échoppe discrète, ouverte de minuit à sept heures du matin, où un homme cuisine calmement, et nous explique qu’il n’a qu’un seul plat à son menu. Mais qu’il aime à cuisiner ce qu’ils demandent aux clients de passage ou aux réguliers.
Dans cette petite brasserie anonyme cachée dans une minuscule ruelle se croisent des gens qui ne se rencontreraient jamais ailleurs. Chacun arrive avec ses petites histoires du moment, et ses envies de mets plus ou moins curieux, mais fleurant bon les fumets de la cuisine familiale. Le charme du petit resto de quartier est à peine troublé par des explications sur la vie « extérieure » de ces clients qui défilent dans la boutique, et offrent un éclairage, parfois, sur l’étrange plat qu’ils ont commandé au patron.

Les portraits sont tous d’une tendresse incroyable. De la strip-teaseuse coeur d’artichaud au yakuza insondable, en passant par le patron du bar gay ou le commercial en quête de contrats à sceller par texto interposé, tous sont à la fois drôles, touchants et intéressants, même si tout le monde n’est pas exploré de la même façon. Et comme ils se mélangent, on assiste dans le pilote à l’étrange et improbable relation qui se noue entre le yakuza et le gay, par exemple. L’un et l’autre sont émouvants dans tout ce qu’ils ne disent pas, et que la petite musique souligne avec émotion mais mesure. Et ils se sont trouvés, aussi incroyable que ça puisse paraître.

Au chaud, près des casseroles, parfois absorbé dans la contemplation de sa cigarette qui se consumme, le patron du restaurant regarde, amusé mais jamais railleur, aimable mais jamais obséquieux, ces étranges personnes ordinaires qui défilent et s’ouvrent, un peu, juste un peu, devant une assiette de leur plat favori, celui qui en secret les ramène dans un lieu qui n’appartient qu’à eux, à un souvenir, un être du passé, quelque chose qui s’éveille peut-être plus facilement à la nuit tombée.

Si l’on récapitule, on a une série japonaise qui se passe la nuit, où les personnages sont des noctambules, où l’on passe une bonne partie assis dans la cuisine d’un petit restaurant convivial, et avec des personnages attachants. Sérieusement, peut-on imaginer une série qui me soit plus destinée encore ? Quand je pense que sans cette news, je serais passée à côté… Et quand je pense qu’il va y avoir une saison 2 ! Voilà une belle histoire qui commence.
…Vous croyez qu’une fois que j’aurai déménagé, le mois prochain, je trouverai un endroit ouvert après minuit où on me cuisine des saucisses en forme de poulpe ? Je regarde Shinya Shokudou et c’est tout ce que je rêve de trouver dans un restaurant de quartier : de bons petits plats, un cuisinier avare de ses paroles, et la compagnie d’anonymes échouant, comme moi, dans un lieu qui leur permette à la fois d’être eux et d’être un autre, d’être ici et d’être ailleurs, d’être seul dans ses pensées et d’échanger quelques mots avec des inconnus.

La poésie simple qui se dégage de Shinya Shokudou m’a émue aux larmes. Je lance le deuxième épisode dés que possible, et je ne saurais que trop vous conseiller d’en faire autant.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. Watcher dit :

    Tu m’as convaincue ! Peut-être ma première série asiatique alors…

  2. Watcher dit :

    Vu le premier épisode également et je te rejoins. Très agréable, simple et touchant, proche de l’expérience de lecture d’un Taniguchi. Merci pour la découverte !

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