[#Ozmarathon] 6×06, vaincre la misère et l’ombre

15 juin 2013 à 20:00

L’un des gros chocs de cette 6e saison, qui jusque là n’en a pas manqué, était la sortie de Beecher. En tant qu’Ozmarathoniens, nous avions alors la sensation que cela n’avait pas de sens : nous étions entrés avec lui entre les murs de la prison, nous ne pouvions pas nous passer de lui avant d’en sortir. Mais le voir revenir à la fin de l’épisode suivant ? C’est encore plus déroutant.
La raison est pourtant simple : sur le pas de la porte, Oz s’est rendu compte qu’elle avait encore quelque chose à dire. La moindre des choses serait d’écouter.

C’est un sujet qu’on a abordé plusieurs fois par le passé, et pourtant, avons-nous vraiment eu cette conversation ?
A la fin de l’épisode précédent, Beecher, rongé par la honte à bien des égards, murmurait : « Just like last time, I got fucked up in the ass ». L’un des temps forts de cet épisode va donc consister en un groupe de parole qui va échanger autour d’expérience à propos du viol en prison. Là où jusque là, le viol était un pur instrument de domination, de pouvoir ; il s’inscrivait dans les enjeux narratifs d’une saison, il mettait en scène les rapports d’un personnage avec tel autre de façon à leur donner une motivation. Pas cette fois. Cette fois, ce que ces témoignages disent, c’est tout simplement la souffrance et l’horreur. Parler du viol comme d’un traumatisme en soi, et non pas d’un mythe fondateur d’un personnage, comme ça a été le cas pour Beecher, est une idée poignante mais réussie.
Car en pointant du doigt à quel point la douleur est quotidienne, à quel point elle est banalisée par le système (chose que souligne aussi le fait que le viol d’un personnage ne nous émeuve plus qu’à moitié), Oz nous met quelque part face à la responsabilité de la société tout entière, qui ferme les yeux parce que, oui enfin, bon, ce sont des criminels, alors… c’est moins grave. C’est peut-être même normal, car ce sont des bêtes violentes !
Cet échange simple et pourtant violent sur la réalité du viol carcéral était nécessaire pour une série qui s’est souvent sentie investie de la mission de révéler des vérités désagréables. Celle-ci n’avait que trop attendu d’être dite haut et fort.

Dans sa lancée, Oz va aussi s’arrêter sur la question du commerce. L’intrigue autour du centre de télémarketing et de l’entreprise des musulmans en pose les jalons depuis plusieurs épisodes déjà. D’un côté, le centre de télémarketing, depuis que les homeboys sont partis en signe de révolte envers l’influence de Burr, est quasiment dépourvu de personnel ; à Burr qui s’inquiète justement que les salaires ne soient pas compétitifs pour attirer de nouveaux employés, la gérante, pas inquiète, affirme avec le plus grand des aplombs, et peut-être une pointe de cynisme, qu’elle ne se fait aucun soucis : il y a des centaines de prisonniers qui, même pour une somme dérisoire, finiront par changer d’avis et accepter un poste (elle est prête à travailler pour Veridian Dynamics !). Cette crise n’est que passagère, elle ne craint pas le turn-over. C’est l’avantage, en quelque sorte, quand on n’a rien à cirer des employés qui vont et viennent. A côté de ça, les revenus sont loin d’être ceux qu’espéraient les musulmans en matière d’édition ; les calculs de Kareem Saïd, qui voulait payer les prisonniers au salaire minimum, étaient très optimistes. La réalité des choses, c’est qu’Arif n’a pas l’argent nécessaire pour payer quelque salaire que ce soit. Par un diable de retournement de situation, l’entreprise qui voulait faire des affaires tout en traitant convenablement ses salariés est sur le point de fermer boutique, quand celle qui ne se soucie du confort de personne va finir par retomber sur ses pieds.
Que la conclusion de cette intrigue ne nous abuse pas : si Burr finit par donner un coup de mail aux lois économiques en faisant détruire l’atelier des musulmans, l’épisode nous dit en filigrane quelques vérités peu agréables sur le monde du travail (même pas spécialement en prison).

La troisième des grandes intrigues de cet épisode, et certainement pas la moindre, est évidemment celle de Cyril O’Reily. Je sais que j’ai tendance à mentionner Ryan, d’ordinaire, comme étant le héros des aventures irlandaises d’Oz, mais il faut bien reconnaître que ce sont les problématiques soulevées par Cyril qui sont à l’ordre du jour ici.
Ce n’est pas qu’Oz n’ait pas abordé le sujet auparavant. Bien au contraire : l’état psychiatrique de Cyril a régulièrement été au centre des débats, comme, encore récemment, avec l’affaire des électrochocs. Mais à l’heure où le petit garçon dans le corps d’un criminel boxeur vit ses derniers moments, il est temps d’attirer notre attention sur les conséquences de l’aveuglement répété, voire même obstiné, de tout un système.
Ryan n’est là que pour être le témoin affligé de ce spectacle : choisir comment Cyril va mourir, le lui annoncer et expliquer, l’accompagner alors qu’il doit faire couper ses belles mèches blondes, rester à ses côtés pendant son dernier repas…
En fin de compte, Cyril ne va pas mourir pendant l’épisode. Mais de justesse. L’espoir est relancé, et ça devient insupportable pour ceux (et ils sont nombreux, voire unanimes) qui aiment ce personnage. C’était cependant nécessaire pour parler du vrai problème ; ce que souligne d’ailleurs le speech d’Augustus Hill sur les différentes peines d’un état à l’autre.

Oz signe ici l’un de ses épisodes les plus engagés socialement. Une véritable réussite qui rappelle aussi la raison pour laquelle cette série est bonne. Du coup ça fait encore plus chier de devoir s’en séparer bientôt…

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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