Scary not scary

18 janvier 2020 à 21:57

Vous ne trouverez pas des tonnes de reviews de séries d’horreur dans ces colonnes, et pour une bonne raison. Mais étant donné qu’il est si difficile d’avoir accès à des séries du Benelux, et que Netflix vient précisément de lancer sa première série néerlandaise, il était hors de question de passer à côté d’une opportunité pareille.
Couardise oblige, cette review ne se penchera que sur le pilote d’Ares. Faut pas pousser non plus ! Mais le simple fait d’avoir survécu à la scène d’introduction est déjà une preuve de ma bonne volonté.

Une scène d’introduction qui nous présente une jeune femme heureuse de quitter le cocon familial pour commencer sa vie à l’université, où très vite elle s’adapte particulièrement bien, rejoint une fraternité, s’amuse du bizutage, se fait une amie, trouve un petit ami, rejoint un groupe, puis déchante progressivement. Un montage bien orchestré et rythmé, entièrement muet, d’environ 3 minutes, nous entraîne dans son sillon, vivant avec elle ce qui ressemble à la fois à une expérience universitaire classique et… quelque chose qui l’est beaucoup moins. Le générique du premier épisode se lance en effet une fois que notre héroïne, une inconnue qu’en quelques minutes nous pensions avoir comprise, se saisit d’une paire de ciseaux, se crève les deux yeux et s’ouvre la gorge de long en large, devant le regard horrifié de plusieurs de ses camarades.
Bon, peut-être qu’on n’avait pas tout compris d’elle alors.

La véritable héroïne d’Ares se prénomme Rosa. Nous faisons sa connaissance au fil de scènes qui semblent se dérouler après l’introduction ci-dessus. C’est une étudiante de première année en médecine, brillante, curieuse, exigeante. Pas au point d’être sélectionnée pour le programme de recherche qui la fascine, toutefois. Qu’est-ce qui lui manque ? Peut-être de la disponibilité. Rosa doit en effet s’occuper de sa mère, dont les difficultés cognitives vont s’aggravant ; lorsque son père travaille de nuit à l’hôpital, c’est à la jeune femme de surveiller sa mère dans leur petit logement HLM, sans aide aucune. Une lourde responsabilité dont elle ne prend visiblement jamais congés.
Sauf que ce soir-là, c’est différent. Ce soir-là, son meilleur ami Jacob, qu’elle n’a pas vu depuis 3 mois, réapparaît et veut l’emmener dîner. Il semble nerveux, craintif peut-être même. Toutefois il apparaît aussi réfractaire à l’idée de répondre aux questions de Rosa, et notamment pourquoi il l’a ghostée pendant 3 mois. Où était-il ? Qu’est-ce qui lui arrive ? Il n’a pas le temps de s’expliquer que trois étranges étudiants s’insèrent dans leur soirée. Ils sont mystérieux, et Rosa pressent qu’ils ont un lien avec le comportement de son ami. Mais à mesure que la soirée avance, elle est aussi curieuse pour elle-même. Elle finit par comprendre qu’ils font partie d’une société secrète du nom d’Ares, qui réunit une forme d’élite. En dépit des avertissements de Jacob, elle décide de rejoindre Ares.

Vous l’aurez peut-être deviné : hormis cette fameuse scène d’introduction, il n’y a en réalité pas de quoi se faire dessus pendant l’essentiel du pilote d’Ares. Après cette scène choquante, la série opte en réalité plutôt pour une atmosphère de thriller intrigant, où ce qui est supposé donner des frissons, c’est de savoir ce qu’est exactement Ares. Le mystère qui entoure Carmen, qui est de toute évidence la leader du groupe, les interactions étranges ou l’angoisse palpable de Jacob, tentent d’instiller une peur de l’inconnu. Personne ne dit à Rosa (et donc aux spectateurs) ce qu’il y a d’effrayant dans les agissements des membres d’Ares, mais c’est précisément cela qui est supposé nous mettre à cran, et bien entendu, nous intriguer en même temps.

Le hic avec ce procédé, c’est qu’on a précisément eu droit à cette scène introductive que j’ai évoquée plus haut. Elle n’est pas juste gore, cette scène : elle délivre aussi des éléments de réponse. Dans la pratique, c’est donc assez étrange d’essayer de poser des questions d’un air mystérieux, quand des réponses nous ont déjà été délivrées ! Pas toutes les réponses, évidemment, loin s’en faut, mais cela crée en tout cas juste ce qu’il faut de paradoxe pour ne pas vraiment ressentir sa curiosité, ou même sa peur, lorsque finalement en fin d’épisode elle commence à passer par le même bizutage que l’inconnue qui nous a introduits à Ares. Cette rupture du contrat horrifique confère à quiconque regarde les événements l’impression que ce qui arrive à Rosa n’est même pas tellement grave, en fait… Pour le moment, qu’est-ce qui distingue réellement les scènes de bizutage d’Ares de celles que nous avons vues dans d’autres fictions du genre ? Ce n’est pas bien clair. Ce peut tout-à-fait le devenir par la suite, et encore heureux (et d’ailleurs peut-être que cette séquence introductive cache d’autres réponses à des questions que nous ne nous sommes pas encore posées). Toujours est-il qu’à l’heure actuelle, le pilote peine à instaurer l’ambiance promise.

Entendons-nous bien : il n’y a pas lieu de se plaindre de ne pas avoir eu l’occasion de pisser dans son froc. Et puis pour une exposition, Ares réussit plutôt bien son coup en-dehors du problème de l’ambiance : Rosa apparaît comme un personnage complexe, intéressant à suivre. On trouve aussi, disséminées dans les dialogues, quelques réflexions laissant augurer d’un discours, de la part de la série, sur les élites et le privilège ; étant donné la situation de Rosa, le contraste semble voué à être exploité par la suite. En tout cas, ce serait décevant s’il ne l’était pas vu les graines semées ici. Et c’est sans compter sur le fait que les épisodes d’Ares durent une demi-heure, et qu’une exposition d’une demi-heure se doit de faire des choix.
Ares peut, de toute façon, absolument monter en gamme à mesure que l’intrigue progresse. C’est probablement souhaitable, même ! Mais si l’on s’en tient uniquement à ce premier épisode, force est de constater qu’on est plus devant un Feuten qu’un American Horror Story, disons. Vous voilà prévenus… au risque d’atténuer le mystère.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. Mila ♥ dit :

    « se saisit d’une paire de ciseaux, se crève les deux yeux et s’ouvre la gorge de long en large, » Wow, that escalated quickly, comme diraient les jeunes o.o

    C’est vrai que c’est rare de te voir reviewer une série d’horreur (un pilote, certes) et du coup ça donne envie, malgré tes réserves sur l’effet de la scène d’introduction sur l’ambiance non-instaurée, mais j’ai un peu peur de cette histoire de mère aux fonctions cognitives sur le déclin… je garde dans un coin de ma tête pour le moment^^

    • ladyteruki dit :

      Ah oui hein, ça fait son petit effet quand même, surtout après un montage où tout avait été fait pour être perçu comme inoffensif !
      Ecoute, justement je serais ravie d’avoir ton opinion de conoisseuse sur ce pilote (je pousse pas le vice jusqu’à parler de la saison entière, même si franchement avec 8 épisodes de 30 minutes, ce n’est pas non plus la mort… hin hin hin). Mais ouais non, je m’attendais à avoir à faire une lessive après le visionnage, et c’est pas trop ça, quoi.

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