That escalated quickly

7 mai 2021 à 23:02

C’est toujours sympathique de lancer une série d’un diffuseur dont on ignore tout. Voir son logo s’afficher pour la première fois à l’écran. Se demander quelle est son identité (…si elle en a une), qui transparaît probablement dans son choix de série originale.
MagentaTV, quelle genre de plateforme VOD es-tu ? Bon, outre le fait que tu mettes à disposition les programmes de la télévision publique allemande en replay… Eh bien apparemment, une plateforme qui propose en exclusivité des séries comme Roadkill, Condor, Romulus, Quartier des Banques, The Handmaid’s Tale, Cardinal, Pustina, Godfather of Harlem, Valkyrien… que du fun, donc. Et ça explique pas mal la gueule de sa série originale Wild Republic, qui ne déconne pas du tout.

Trigger warning : maltraitance de mineurs, violences sexuelles.

Du tout du tout.

Le principe de départ de Wild Republic vous évoquera plusieurs autres séries similaires, à n’en pas douter : un groupe de jeunes (dont l’âge n’est pas spécifié mais qui semblent vers la fin de l’adolescence ou le tout début de l’âge adulte) avec des antécédents criminels se retrouve dans les montagnes du Tyrol pour un séjour de plusieurs semaines. Elles vont se retrouver coupées du monde, forcées de survivre alors que des tensions animent le groupe depuis les premiers instants. Wild Republic propose son petit twist personnel, bien-sûr : l’expédition est une tentative de rééduquer ces jeunes à la dérive.
L’initiative revient à Lars, un éducateur et auteur qui a théorisé que l’éducation non-violente était plus productive que le système de punition actuel ; sa compagne Rebecca, également éducatrice, est une accompagnatrice de la randonnée, avec deux autres adultes. La randonnée est épique, non seulement de par son décor (et il faut le dire, celui-ci coupe le sifflet), mais aussi son organisation : les jeunes sont supposées être autonomes, gérer leur équipement, leurs repas, leur tente, et ce dés le premier jour. La coopération est aussi requise, même si elle est beaucoup plus difficile à implémenter au sein du groupe. Et bien-sûr des fouilles, tests urinaires, et autres mesures de contrôle, continuent d’être menées à plusieurs étapes de l’expédition.

Dans tout ça notre héroïne est nettement Kim, qui est omniprésente pendant ce premier épisode. La façon dont elle nous est présentée est sommaire : des scènes ambigües nous montrent différentes situations stressantes et/ou traumatiques pour elle, mais sans nous en donner le contexte ni même la timeline. L’épisode va, progressivement, souvent par allusion, nous donner une à une les clés de la compréhension du personnage : qui est-elle, et pourquoi est-elle là ? Au départ, le fait qu’elle s’occupe de son frère handicapé et qu’elle tombe amoureuse du beau Attila ne semble pas trop coïncider avec les profils d’autres randonneuses, comme la droguée Jessica avec qui elle partage une tente.
C’est là que Wild Republic m’a un peu perdue, en fait. Plus on en apprend, plus ça devient délirant. Je ne vous révèle pas la backstory de Kim, mais à un moment je me suis dit qu’on avait un peu sauté le requin quand même.

Pire, quasi-exactement au moment où nous comprenons ce que Kim vient faire dans le Tyrol et pourquoi elle a l’air de porter la misère du monde sur ses épaules… c’est là qu’intervient un autre twist. Que je ne vous gâcherai pas plus.

Et au final, c’est presque dommage. Même pas presque : C’EST dommage. Ce premier épisode essaie tellement d’en faire, qu’on perd un peu de vue ce qui faisait sa spécificité : cette histoire d’éducation non-violente, c’était particulièrement inédit. Il y a toute une scène dans ce premier épisode, plutôt vers le début (c’est-à-dire avant qu’on n’en sache beaucoup sur Kim), qui force Lars à expliquer ses théories éducatives sur un plateau de télévision, face à une journaliste et un contradicteur ; on y apprend que Lars a grandi sous le toit d’un père violent, et que c’est la maltraitance dont il a fait l’objet qui a forgé ses convictions. La violence éducative, c’est plus complexe qu’il n’y paraît ; et punir un jeune, ça n’a pas toujours les effets escomptés. Plus tard, quelques échanges téléphoniques entre Lars et Rebecca nous donneront une vague idée des conséquences réelles de l’éducation qu’a reçue Lars, et c’est à la fois compréhensible et dérangeant… mais vu le twist de fin du premier épisode, je ne vois pas comment cet axe peut conserver le peu d’importance qu’il a pendant l’exposition. Lars, d’ailleurs, ne fait même pas partie de l’expédition, et vous l’aurez compris, dans les montages du Tyrol, on n’envoie pas des textos à longueur de journée pour le consulter sur des théories éducatives.
Bon alors ne nous mentons pas, je vais jeter un oeil aux épisodes suivants pour voir si, sur le fond, Wild Republic prend le temps de finir ce qu’elle a commencé sur ce sujet, mais je suis pessimiste vu la tournure des choses. C’est dommage, ce discours nuancé et terrible était profondément unique.

Mais alors, à la fin de cet épisode inaugural, que reste-t-il ? Eh bien une micro-société constituée de jeunes perdus en pleine nature qui, euh, pardon d’utiliser toujours la même référence hein, mais bon ya pas trop le choix, évoque un peu Sa Majesté des Mouches, et d’après le synopsis de la série c’est en fait précisément ça le but.
La violence assumée des jeunes protagonistes de Wild Republic (et qui, à en voir le matériel promotionnel, ne va sûrement pas s’arrêter là) m’a évoqué deux autres séries allemandes récentes : Wir Kinder vom Bahnhof Zoo, et surtout Wir sind die Welle. Des séries où non seulement la violence est partie intégrante de la jeunesse des protagonistes, mais aussi, presque, une certaine forme d’expression plus profonde de maux divers. J’ai l’impression qu’on a l’air de rien assisté à une petite révolution de la représentation de la jeunesse allemande sur le petit écran (ou plutôt sur les écrans connectés à diverses plateformes nouvellement arrivées sur le marché : Amazon Prime, Netflix, et maintenant MagentaTV, même si elle devrait débarquer sur arte ultérieurement), même si je ne suis pas encore totalement sûre de la conclusion à en tirer. Je serais en tout cas curieuse de savoir si le public-cible de ces séries s’y retrouve.
Moi en tout cas, je vais essayer très fort de me concentrer sur l’aspect carte postale pour avancer dans les épisodes, mais franchement le moral n’est pas aussi haut que les montagnes tyroliennes.


par

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

1 commentaire

  1. Tiadeets dit :

    L’idée de départ est intéressante, mais pas sûr que ce soit suffisant pour me convaincre de regarder la série.

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