Pas de porte

16 janvier 2022 à 22:24

Cette semaine, on apprenait que la série québécoise Le 422 avait été acquise par le groupe Canal+ pour une diffusion en France. Certes, je ne surveille pas de très près les acquisitions des chaînes françaises, mais la nouvelle m’a surprise parce que Le 422 est une série pour la jeunesse. Or, à ma connaissance, rares sont les fictions francophones destinées à cette tranche d’âge qui traversent l’Atlantique. Pourquoi celle-ci a-t-elle réussi à nous parvenir ?
Eh bien ça m’a donné envie de vous en parler. Bon, avant de me lancer, une note en petits caractères, quand même : j’avais vu le premier épisode il y a environ un an et demi… Aussi j’espère que vous me pardonnerez : il s’agit là d’impressions « de seconde main », vu que je n’écris ces quelques lignes qu’après un revisionnage de l’épisode. Ce genre de reviews a facilement tendance à être plus tiède, ce qui ne va pas trop aider notre affaire.

Le « 422 » est le surnom d’une maison abandonnée que tout le monde dans le coin connaît. Il faut dire qu’elle a une histoire un peu sinistre : une fillette a disparu là, et lorsque sa famille s’est lancée à sa recherche… elle a disparu aussi. Depuis la maison reste abandonnée, et, forcément, exacerbe l’imagination des enfants du quartier. Lou et Sacha sont les meilleurs amis au monde, et vivent non loin de là ; évidemment ils connaissent bien l’histoire de cette maison. Avec leur semi-pote Luc, ils décident d’essayer de s’introduire sur les lieux, dans l’espoir de se trouver un endroit où jouer tranquillement aux jeux videos, loin des perturbations des adultes. Luc est un gosse un peu fragile, encore en deuil de son père, mais très intelligent ; Sacha, épris de hip hop, est plutôt peureux ; quand à Luc, geek irrécupérable, ils ne le fréquenteraient probablement pas s’il n’avait pas une console de jeu.
Le jour où les trois garçons s’aventurent au 422, ils découvrent un domicile dont les habitantes se sont comme évaporées. Tout est resté en place comme si personne n’était jamais parti. Et bonne nouvelle, il y a l’électricité pour brancher une console ! Ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’était de tomber nez-à-nez avec deux sœurs, Sophie et Lucie, qui sont les nièces des habitantes de la maison. Elles cherchent à percer le mystère de la porte qui se trouve au sous-sol, et qui est fermée par une centaine de cadenas. Menaçant les garçons de les dénoncer, elles les enrôlent pour les aider à ouvrir la porte, sauf que pile au moment où l’opération réussit… deux étranges adultes aux airs peu recommandables s’introduisent eux aussi sur les lieux. Ils ont l’air louche pour ne pas dire menaçants, et semblent prévoir une sorte de chasse au trésor, à l’aide d’une carte abandonnée sur la table de la cuisine du 422, où apparemment ils vivent en cachette. Mais que cherchent-ils ? Pas le temps de trop s’en inquiéter, parce que les deux malfaiteurs semblent bien décidés à se débarrasser de tout témoin.

Le 422 ne part pas d’un sujet extraordinairement original : avant la fin du premier épisode, il nous sera (en partie) révélé ce qui se cache derrière la porte et, surprise, c’est une sorte de monde parallèle. On en ignore encore la nature exacte, mais en tout cas il y a tout un univers à découvrir derrière la porte, ce qui n’est pas exactement le summum de l’innovation en matière de séries pour la jeunesse, vous en conviendrez.
Mais, évidemment, ce qui fait l’intérêt de ce genre de séries, ce sont les détails de ce monde étrange et inconnu, pas sa simple existence. A cet égard, tout reste encore à découvrir ! Pour l’instant, tout ce qu’on sait, c’est que les jeunes protagonistes de la série n’ont d’autre choix que d’entrer dans ce monde sans rien en connaître ; on n’en voit absolument rien quand finit cet épisode introductif. Le suspense est entier (pourvu de ne pas vous êtes spoilée en cherchant des illustrations pour la review…) quant à ce qui attend toute la petite bande, à l’exception notable de Sacha qui a eu trop eu peur de passer la porte.

L’épisode initial remplit son office avec diligence, exposant sommairement les personnalités de ses héroïnes et les circonstances de départ de l’intrigue. Ce n’est pas du tout mauvais, mais ce n’est vraiment pas le genre d’épisode de départ qui donne envie de poursuivre, parce qu’on n’a encore aucune indication quant à ce qui ferait l’intérêt de la série. Tout ce qu’on sait du trou noir, c’est que ça s’appelle « la huitième dimension ». Mais qu’est-ce qui la distingue des autres en son genre ? Pourquoi est-elle porteuse d’aventures ? Par exemple, je pensais beaucoup à Nowhere Boys en revoyant cette exposition aux fins d’écrire ma review, et au moins, Nowhere Boys nous dit quel est la dimension dramatique du monde où sont envoyés ses 4 héros : c’est leur monde, sauf que dans cette dimension ils n’ont jamais existé. Ou alors, comparez avec The Odyssey (certes plus ancienne), qui insiste sur le fait que Jay soit dans le coma pendant qu’il vit des aventures post-apocalyptiques. Ou avec Spellbinder, qui tout simplement pose les bases d’un univers steampunk. Ou encore avec Gostya iz Budushchevo, où l’aspect futuriste s’affiche dés le moment du voyage.
Ici on ne sait pas trop ce qui est supposé fasciner dans ce premier épisode, parce que la seule chose que l’on voit sur l’autre côté de la porte… c’est le néant. Par définition : la carte est la seule chose permettant de voir dans le noir, grâce à une incantation magique (que fort heureusement Lou a retenue). Je vous ai mis une capture d’écran ci-contre, du moment où la porte est ouverte et ce qu’elle cache « révélé », pour que vous constatiez que je n’exagère pas ! Oui, la porte, c’est le petit rectangle…
Alors, attention, ça ne veut pas dire que la série sera sans intérêt. C’est juste que son premier épisode est mutique. Seule la carte découverte dans la cuisine pourrait éventuellement servir d’indication… sauf qu’elle est énigmatique non seulement en ce qui concerne le message incantatoire cryptique qu’elle porte, mais aussi sur la forme, qui ne semble appartenir à aucun « thème » défini. Ce qui attend Lou et ses amies pourrait être un voyage aussi bien chez des pirates, vers le futur, sur une autre planète, absolument n’importe où. A peu près sûre qu’on peut éliminer l’hypothèse de dinosaures, mais c’est bien tout.

La première fois que je l’ai testée, je n’ai jamais poursuivi la série parce que je ne ressentais aucune excitation quant à ses promesses opaques ; encore une fois ça ne veut pas dire qu’elle n’a pas de qualités, simplement qu’elle en réserve la découverte pour l’épisode suivant. A mon sens, ce n’est pas comme ça que fonctionne un premier épisode solide : pour le moment, les jeunes spectatrices ne se voient pas délivrer de raison tangible de revenir.
Pour être tout-à-fait honnête, cependant, maintenant que je me suis en partie spoilée en faisant quelques recherches sommaires… je vois légèrement mieux où on veut en venir, et ça n’est pas dénué d’intérêt. En outre j’ai vu quelques plans de la série, et les effets spéciaux (quasiment invisibles pour le moment) semblent très convaincants. Quand on a dans sa manche des plans comme ceux que j’ai vus, c’est dommage de ne pas en donner un aperçu pour jouer sur l’émerveillement.
Il faudra donc sûrement s’armer de patience pour apprécier Le 422 ; une qualité que je ne possède pas, et dont j’ignore si les jeunes spectatrices sont plus dotées que moi.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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