My love from the stars

9 avril 2022 à 23:28

Le printemps est clément pour Empreinte Digitale : après Para//èles sur Disney+ fin mars, et avant le lancement de la série Les 7 Vies de Léa sur Netflix à la fin avril, la société de production a aussi casé Infiniti sur Canal+ en ce début de mois. Et du coup, le printemps est aussi pas mal clément envers les séries de genre françaises, et ça fait drôlement plaisir.

Trigger warning : tentative de suicide.

Je cite le nom de la production parce que je vous avoue que, surtout associé à la science-fiction, il me met tout de suite de bonne humeur : je fais partie de celles qui ont adoré Missions. La comparaison s’arrête toutefois là, car en-dehors du thème de l’espace, les deux séries ont finalement assez peu en commun. Mais disons qu’il y a des antécédents comme ça qui donnent confiance, et je me suis donc ruée dessus suite à son lancement sur Canal+. Parlons donc de son premier épisode.

Ce qui d’emblée caractérise Infiniti, c’est que la série se passe presqu’exclusivement ailleurs. Cet ailleurs, c’est aussi bien l’ISS que les steppes du Kazakhstan, où se trouve la base aérospatiale de Baïkonour. Il n’y a vraiment que deux scènes se déroulant en France (l’une dans une ambulance traversant Paris, l’autre dans une chambre d’un hôpital militaire de la capitale). Tout le reste a lieu soit au milieu de nulle part, à plusieurs kilomètres au-dessus de la Terre, soit au milieu de nulle part, dans les plaines arides de l’Asie centrale.
Dans les deux cas, on a l’impression que cet ailleurs est hostile ; ce n’est pas là où devraient se trouver des êtres humains, mais malgré tout, les y voilà, persévérant à y vivre. Ou en tout cas à essayer : quand démarre Infiniti, une des dernières opérations de routine consistant à ravitailler l’ISS dégénère, et un accident conduit à la destruction de la station. L’équipe internationale au sol pense avoir perdu les astronautes se trouvant à bord (des hommes russe, chinois et étasunien), et tente de comprendre ce qui a pu se passer. Leur seul indice ? Avant que les communications ne soient rompues, l’astronaute américain Anthony Kurz a crié le nom d’Anna Zarathi, une astronaute française qui a failli faire partie du voyage. Elle est donc convoquée pour faire la lumière sur ce qui a pu se passer.
Pendant ce temps-là, toujours au Kazakhstan, un officier de police peu recommendable du nom d’Isaak Turgun mène illégalement une enquête sur un corps retrouvé mutilé au sommet d’un immeuble abandonné. Et, naturellement, ces deux intrigues sont liées.

Ce à quoi je ne m’attendais pas vraiment, c’est qu’avant d’être un thriller ou une série de genre, Infiniti est avant tout une histoire d’amour. Mais pas exactement dans le sens d’une romance. Son premier épisode (puisque je n’ai pas encore vu les suivants) insiste d’ailleurs beaucoup sur le double deuil qui afflige Anna : elle a, à la fois, dû renoncer à son voyage dans l’espace, et à son amour pour Kurz. Leur idylle était interdite pour des raisons professionnelles, et maintenant c’est (selon toute vraisemblance…) la mort qui les sépare.
Pour Infiniti, l’amour se mesure non dans l’attraction mais dans la séparation : c’est du lien qui unit deux personnes séparées, intimement, que dépend l’intrigue. L’épisode commence à explorer cela, et j’imagine que cela va continuer ensuite, poussant Anna à interroger ses expériences communes avec Anthony Kurz pour comprendre ce qui s’est passé alors qu’il était loin d’elle, et ce qui va se passer dorénavant.
L’enquête officieuse d’Izaak semble au départ déconnectée de tout cela, mais on comprend par paliers que non. Au travers de ses découvertes successive, on aborde la mythologie d’Infiniti (fortement liée à Zarathroustra), mais aussi une autre histoire d’amour : celle d’Izaak pour son fils, aujourd’hui décédé. Il y a une très belle scène à ce sujet, liant intimement ces deux aspects, vers la fin de ce premier épisode.

Et quel épisode ! Clairement, Infiniti a des moyens largement supérieurs à ceux de Missions, et elle sait s’en servir. La beauté de cette introduction est à couper le souffle. L’envergure internationale de la série a de surcroît de quoi chatouiller la fibre voyageuse de votre humble serviteuse ; tournée en grande partie on location et avec une distribution incroyablement hétéroclite, Infiniti voit grand. Mon seul regret c’est que cette ambition n’aille pas jusqu’à laisser chaque protagoniste parler sa propre langue ; c’est triste de regarder une série française avec autant de doublage… mais bon, je suppose qu’à l’impossible aucune chaîne n’est tenue.
C’est une série qui prend également au sérieux l’angle culturel de cette diversité ; il est quand même rare qu’en France on produise une série dont certains personnages sont musulmans sans que ça ne se passe dans une cité ou qu’on parle terrorisme (et encore, même comme ça on trouve le moyen de ne pas trop l’expliciter), et sans que la série ne parle de religion. Comme ça, ça n’a l’air de rien, mais qu‘Infiniti montre une prière, ou ponctue ses dialogues d’échanges en arabe (que même le doublage ne gomme pas), juste parce que c’est naturel dans un pays qui est aujourd’hui à majorité musulmane, c’est incroyablement précieux.
Je suis particulièrement impressionnée, je dois dire, par l’interprétation de Daniar Alshinov dans ce premier épisode ; je ne connaissais pas l’acteur, mais je suis époustouflée par sa présence, ses nuances, ses émotions. Il incarne un rôle pour l’instant un peu chiant, celui d’un flic brisé et blasé, mais il arrive à lui insuffler quelque chose de vulnérable qui fonctionne incroyablement. J’espère que ce rôle international lui ouvrira des portes pour qu’on le puisse le voir dans d’autres configurations. Et puisque je suis là, si quelqu’un veut me filer des séries kazakhes, c’est pas de refus non plus ; qui ne tente rien…

Il me semble très difficile de deviner où se dirige Infiniti après cet épisode initial, mais je suis à peu près sûre que c’est vers quelque chose que je vais aimer. Je n’avais vraiment pas besoin d’une nouvelle série à regarder (qui en manque, par les temps qui courent ?), mais je suis ravie de la découverte. Le printemps n’est pas que clément, il est généreux.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. Tiadeets dit :

    Oh, ce que tu dis me titille, pour l’instant je ne suis pas d’humeur pour ce genre de séries, mais je vais me la noter.

    • ladyteruki dit :

      Le timing c’est important ! Et je pense qu’en plus celle-là, tu peux pas trop la regarder entre deux portes, par exemple. Enfin tu peux, en théorie, mais tu perds au change.

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