Rule of three

4 mars 2023 à 19:57

Une prise d’otage dans un cabinet médical : une femme nerveuse pénètre en tirant sur quiconque se place sur sa route, pour emmener avec elle la psychiatre qui y exerce. Les autorités sont prévenues et le capitaine Solana arrive bientôt avec toute une équipe d’intervention. Une fusillade conduit l’otage à être blessée, et la femme est laissée pour morte. En arrivant sur les lieux pour examiner le corps de la preneuse d’otage, toutefois, l’inspectrice Rebecca Fuentes a une bouleversante révélation : la femme lui ressemble parfaitement. Et, plus intrigant encore étant donné que tout le monde la pensait morte, elle a le temps d’articuler quelques syllabes qui indiquent qu’elle connaît le nom de Rebecca.

Malgré certaines ressemblances de surface avec Orphan Black (dont le look d’une des protagonistes), le premier épisode de Tríada semble se diriger vers une série un peu plus ancrée dans le réel, privilégiant une approche dramatique.

Ainsi ce n’est pas le capitaine Solana, chargé de diriger l’enquête, que nous suivons, mais Rebecca, qui est (et on la comprend) troublée que la femme qui a pris en otage la psychiatre soit sa copie la plus exacte.
Comme elle est flic, et qu’en plus elle est une ex de Solana, elle obtient toutefois des renseignements plus vite que la citoyenne moyenne. Elle apprend avec facilité que cette femme s’appelle Aleida Trujano, et que quelques mois plus tôt, elle était une personnalité du monde des affaires avec une vie remplie de succès. Quelqu’un qui, osons le dire, avait l’air d’être parfaitement équilibrée… Quelque chose s’est produit, pourtant, de toute évidence, et la digue semble s’être rompue. Nous avons vu, nous, Aleida Trujano faire irruption dans le cabinet de la psychiatre au début de l’épisode, l’accusant à mots couverts de lui avoir causé du tort (évidemment la série ne va pas nous dire comment dés la première scène, ce serait trop facile !). Nous avons lu la douleur sur son visage. Nous l’avons aussi entendue dire qu’après avoir tué la psychiatre, elle avait l’intention de se donner la mort.
En l’espace de quelques mois, donc, Aleida Trujano est devenue profondément désespérée, et visiblement elle tenait la psychiatre pour responsable de son tourment. Alors que s’est-il passé ?

Eh bien Tríada n’est pas tout de suite intéressée par la réponse à cette question, et personnellement je pense que c’est tout à son honneur. Celle qui prime dans ce premier épisode, c’est une autre question, celle que se pose Rebecca quant à l’identité d’Aleida : qui est-elle, et plus précisément qui est-elle qui justifie qu’elle lui ressemble autant ? D’ailleurs, chose encore plus troublante, elles partagent aussi le même anniversaire !
Mais même cet aspect-là n’est pas vraiment conduit comme une enquête policière, plutôt comme une quête de sens. L’un des premiers réflexes de Rebecca sera ainsi de se rendre chez sa mère et de lui demander ce qu’elle cache. Malheureusement, Rebecca et sa mère n’ont pas la meilleure des relations ; comme c’est souvent le cas entre une alcoolique et sa famille, il y a un déficit de confiance entre les deux femmes. Il faut dire que quelques mois plus tôt encore, Rebecca n’avait pas encore arrêté de boire, et que les mauvais souvenirs sont frais. Cela vient, qui plus est, s’accumuler avec les difficultés que ressent Rebecca depuis sa rupture aver Solana, un homme marié qui pendant de longs mois lui avait promis qu’il allait quitter sa femme et, devinez quoi, il n’a pas quitté sa femme (je sais, incroyable). Après s’être faite trimbaler, la voilà donc qui doit fréquenter au quotidien l’homme qu’elle a aimé, y compris quand sa famille vient le chercher au commissariat après une journée de travail…
Elle aussi est en souffrance.

Bref, Tríada se lance avant tout dans une exploration de ce que tout cela signifie pour Rebecca que de découvrir, le jour de ses 33 ans, qu’elle a une double quelque part, alors qu’on ne peut pas dire que sa vie était simple jusque là. Et il y a fort à parier que celle d’Aleida n’ait pas été plus lisse non plus, même avant la prise d’otage, si l’on en juge par la plaque qui surplombe la sienne dans le caveau familial, entrevue pendant son enterrement. Tout ça, sans compter sur le fait qu’à la fin de l’épisode, sans que Rebecca n’en ait connaissance, une troisième femme apparaît qui lui ressemble parfaitement. Bon, pour les spectatrices on ne peut pas dire que ça relève de la surprise (…on connaît le titre de la série, et on a forcément vu son matériel promotionnel en cliquant sur Netflix), mais pour Rebecca ça va de nouveau faire un choc, c’est sûr.
Il est évident que Tríada aurait parfaitement pu ne pas mettre en scène une énième protagoniste qui soit flic (en gros, pour le moment, ce milieu professionnel fournit juste à l’intrigue un peu d’impulsion régulière, aux limites du deus ex machina, pour faire avancer l’intrigue). Son sujet est ailleurs, et semble réellement interroger la santé mentale de ses protagonistes. Pour avoir vu passer quelques synopsis peu scrupuleux (des fois on a l’impression que la presse parlant de série voudrait remplacer le visionnage desdites séries, plutôt qu’informer à son sujet ou le compléter…), je pense comprendre pourquoi. Tout ce que j’ai à dire c’est que le mystère de Tríada ne relève pas de la science-fiction (et le reste, je vous laisse le découvrir).
Mais honnêtement ? C’est peut-être ça le plus dérangeant.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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