Le saviez-vous ? Le whitewashing n’est hélas pas le propre de l’industrie audiovisuelle étasunienne. La preuve avec le cas de « Bony », un personnage de la littérature australienne (ou Detective Inspector Napoleon Bonaparte de son nom complet), dont la genèse imaginée par l’auteur Arthur Upfield dans les années 20 indique qu’il est l’enfant d’un homme blanc et d’une femme aborigène, à une époque où ces relations étaient interdites.
Lorsque la saga littéraire est adaptée pour la télévision en 1972, toutefois, c’est un acteur blanc qui est engagé : James Laurenson. La production de Boney (oui, son nom a légèrement été modifié) est allée le chercher en Nouvelle-Zélande, prétendant n’avoir trouvé personne d’aborigène ou métis en Australie qui puisse incarner le personnage. Malgré les protestations de nombreuses associations dont le Federal Council for Advancement of Aborigines and Torres Strait Islanders, deux saisons sont ainsi produites. Ironie du sort, la série est tournée en couleurs afin d’être vendue à des chaînes étrangères (la télévision australienne émet encore en noir et blanc à l’époque), ce qui est précisément ce qui lui permet de financer une seconde saison.
Ce n’est pas tout : 20 ans plus tard une autre adaptation est lancée, d’abord sous la forme d’un téléfilm, Bony. Là encore c’est un acteur blanc, Cameron Daddo (plus tard vu dans des séries comme Models, Inc. ou FX: The Series), qui incarne le rôle principal. Et la production s’est trouvé une excuse : la série se déroule à l’époque contemporaine de sa diffusion, et le héros est un descendant du détective Napoleon Bonaparte original ! Hop, perché ! Toutefois la levée de boucliers est telle que lorsqu’une série est commandée pour faire suite à ce téléfilm, également nommée Bony, le héros est désormais présenté comme simplement blanc pour éviter toute ambiguïté… mais effaçant au passage l’un des rares personnages aborigènes de la littérature australienne à se voir porté à l’écran.