Les ficelles du métier

1 octobre 2004 à 13:31

Je pense très souvent à ce que mon éducation m’a donné, et que je trimbale sans m’en rendre compte.

L’un des exemples les plus flagrants, c’est ce réflexe d’analyser les gens. J’ai parfois l’impression de les passer au scanner. Le moindre de leurs mots semble enregistré dans ma base de données secrète, et je suis capable de ressortir n’importe quelle information « importante » sur cette personne. Y compres (et c’est bien là que c’est le plus angoissant) quand ça peut me servir.

Ce qui me fait faire des cauchemards, c’est que tout cela se fait de façon instinctive. J’ai ça sous ma peau, dans mes veines, presque dans mes gènes. J’ai fini par passer un peu de temps à réfléchir dessus et ça s’est imposé à moi : c’est mon enfance qui veut ça.

J’ai tout de même passé les quelques 18 premières années de ma vie à comprendre (ok, je corrige : tenter de comprendre) mon père et son comportement. Je cherchais à lep révoir. C’était nécessaire. Un simple mot avait de complètement différentes implications selon que, par exemple, il était bien ou mal levé. De bon poil ou non. Qu’il s’était engueulé avec quelqu’un au boulot dans la journée ou pas. Qu’une nouvelle facture avait atterri sur le coin de la table dévolu à ce genre de petites piques du quotidien, ou au contraire une liasse de photo venant de ses parents. Ca semble pourtant évident. Mais pas avec mon père. Car chez lui, tout se passe toujours sous un masque sévère. Il fallait comprendre le vrai pourquoi, pas celui qui semblait évident : en réalité, croiser les couverts ne met personne dans une rage noire. Pasmême lui contrairement à ce que j’ai cru au départ. En réalité, vous êtes juste la goutte qui fait déborder le vase.

Conséquence directe : vous passez votre temps à vous surveiller, vous et vos congénères. Et j’ai remarqué que c’est quelque chose que je fais toujours. Au milieu de la plus insignifiante conversation, je me surprends à penser « ah, c’est bon à savoir ça », commm si au fond de moi une âme bien plus noire était à l’oeuvre et que je l’intercepte de temps à autres.

C’est réellement effrayant d’être si peu souvent en Paix, d’épier les autres contre son propre gré.

Mais pourtant, voilà une partie de mon éducation : je suis rompue à cet exercice de surveillance, de détection de faiblesses, de qualités, de défauts, d’opinions, de désirs, de rêves, de projets, de souvenirs…Chaque fois que quelqu’un me dit quelque chose qui réponde à l’une de ces catégories, tout se grave dans mon cortex, prêt à ressortir si besoin est.

L’exemple qui m’a frappée à ce sujet se déroule il y a deux semaines. Un ami, appelons-le Joker, vient me voir alors que je suis en larmes suite à certains problèmes personnels que je dévoilerai sans doute ultérieurement, mais qui, pour résumer, m’obligent à déménager sous peu, alors que je n’ai aucun revenu ni personne chez qui aller. Joker me dit donc « il doit bien y avoir une solution, on ne peut pas te laisser à la rue ». On parle pendant 5 mn en tentant de trouver une solution, et alors une petite lampe s’allume en moi, juste une sorte de conscience supplémentaire, et je dis quelque chose du style « je sais pas quoi faire, j’ai plus de famille, plus rien » et j’ai eu un petit regard larmoyant style cocker abandonné au bord de l’A6. Et Joker a répondu « Ecoute, si ça ne va vraiment pas… ». Et là, une part de moi a pensé « tu es là où je voulais t’emmener ». Alors que je n’avais pas du tout conscience de cela, je venais tout de même d’accomplir ce miracle de comprendre son mode de pensée et de prévoir quelle réponse il donnerait à cela. De fait, j’ai dit merci mais je comtpe refuser tant que je pourrais. Pas question de profiter de cela sur un ami.

A la suite de cet incident, je me suis remise en question. J’ai réanalysé certains moments de ma vie et j’ai réalisé que je faisais toujours ça, mais complètement inconsciemment. Je comprennais mieux les accusations d’une certaine personne, nommons-le Lord T, qui était certain que je l’avais manipulé.

D’où que cela me vienne, je suis terrifiée à l’idée de recommencer. Et captivée en même temps. Avoir un tel pouvoir sur les gens, c’est tellement exaltant. D’où ma peur !!! Je me demande à quel point tout cela m’a servie et desservie dans ma vie jusqu’à présent, et si ma soeur, par exemple, expériemente les mêmes choses, bien que je sache pertinemment qu’elle n’a pas du tout eu la même vie que moi, ni lam ême éducation. C’est un nouveau vice à rajouter sur la liste de ce qui me reste de mon enfance…

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