Contact prolongé

2 décembre 2010 à 23:29

Au juste, je ne me rappelle plus trop bien pourquoi je n’étais pas allée au bout du pilote d’Untouchable. Certainement parce qu’au vu des premières images, j’avais eu l’impression de signer pour l’un de ces procedurals où l’ont remplace le fic par autre chose, histoire de faire genre « moi ? une série policière ? ah bah non, non alors, regardez, la preuve : mon personnage principal est une journaliste ! ». Ne riez pas, ça s’est déjà vu, hein. Donc en cherchant bien, je pense que l’explication est à chercher par là.

A la faveur d’un rangement, me voilà à me poser la plus épineuse question qui soit pour un téléphage atteint de collectionnite aiguë comme moi : je grave ou je jette ? Certes, dans 99% des cas, la réponse n’est pas favorable à la poubelle. Mais pour prendre une décision éclairée, ne valait-il pas mieux, au moins, regarder le pilote jusqu’au bout ? Ce qui fut dit fut fait, et me voilà, près d’un an après la diffusion de la série, devant le pilote pour une deuxième fois, celle-ci décisive, normalement.

Vous savez quoi ? Il n’est pas si mal, le pilote d’Untouchable. Je n’irai pas jusqu’à dire qu’il est parfait mais il est globalement prometteur.

Deux bons côtés, en essence :
– d’une part, le personnage de Ryouko Narumi n’est pas aussi prévisible qu’il n’y parait. C’est un peu énervant ces personnages gauches, gaffeurs, toujours dépassés par tout ce qui leur arrive. Finalement, notre journaliste n’est pas si empotée que ça, elle est même carrément dégourdie quand il le faut. Et puis, elle est sacrément butée, surtout. L’interprétation de Yukie Nakama n’est pas franchement mirobolante, mais tout compte fait, le personnage est bon ;
– d’autre part, et c’est certainement le plus important de ces deux points, le pilote d’Untouchable dépasse largement le seul domaine de l’enquête déguisée en reportage. C’est une vraie série sur le rapport entre la société japonaise et ses médias.

Je ne sais pas si les épisodes suivants seront aussi bons, parce que ça tenait en grande partie au sujet du premier épisode, dans lequel une femme médiatique tenant une chronique à la télévision annonce des catastrophes qui ont la curieuse faculté de se réaliser, et qui sont en rapport avec une entreprise de construction. L’épisode passe une partie du temps à hésiter entre dénonciation des abus de certaines entreprises peu scrupuleuses, et à soupçonner la chroniqueuse d’organiser des accidents mettant en difficulté la société de construction, dans le seul but de faire monter sa côte d’amour médiatique. Au bout du compte, ce ne sera pas aussi simple que ces deux axes semblent l’annoncer…
Mais surtout, les graines d’un arc mythologique sont semées avec brio, de façon à permettre au spectateur d’en deviner une partie, tout en lui donnant l’occasion de s’exclamer sur la fin : « mais c’est pas vrai, c’était là, sous mon nez ! », bref, histoire à la fois de construire quelque chose de fin et en même temps de ne pas s’interdire quelque chose de plus classique, voire grand public.
Quand se croisent plusieurs zones d’influences, forcément, on n’est pas loin des thèmes conspirationnistes, mais avec la presse en toile de fond, c’est franchement prometteur.

Au passage, l’éthique (journalistique ou autre), la religion et les connivences entre cercles de pouvoir en prennent pour leur grade, l’air de rien, sans dénonciation frontale d’une pratique ou d’une autre, simplement par quelques situations au cours desquelles l’attention du spectateur n’est pas braquée sur l’aspect critique, mais plus sur l’action. Les séries japonaises, lorsqu’elles s’y risquent, sont très fortes à ce petit jeu qui consiste à souligner les travers de la société nippone sans froisser personne ni même pointer quoi que ce soit du doigt trop ostensiblement. Et c’est, au final, bien plus fin, comme procédé.

Au bout du pilote, Untouchable n’est pas une révolution, mais c’est le genre de dorama qui répond parfaitement à l’expression « divertissement intelligent ». Un peu dans le genre de Hanchou, elle aspire en même temps à quelque chose de pointu et à une vocation mainstream, tout en pratiquant, comme l’a fait The Quiz Show, une sévère radiographie des médias japonais. Tout ça en restant accessible et pas prise de tête.
Rares sont les séries trouvant le bon équilibre. Untouchable y parvient plutôt bien.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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