Avec assurance(s)

1 novembre 2011 à 23:00

Ca faisait des mois que je voulais tenter Cra$h & Burn, mais vous savez ce que c’est. Pourtant, quand j’ai regardé Last Money, j’ai décidé que je n’avais que trop attendu, et je me suis lancée.
C’est d’ailleurs une chose curieuse, parce qu’on pourrait penser que les assurances, c’est pas franchement sexy du point de vue des scénaristes, et finalement on se retrouve avec deux séries, chacune d’un côté du Pacifique, qui s’y intéressent à quelques années d’écart (Cra$h & Burn a démarré en 2009). Mais sous un angle très différent.


Jimmy Burn, le héros de Cra$h & Burn, ne paye pourtant pas de mine. C’est un homme parmi tant d’autres dans un métier petit, dont les pratiques sont petites. Un type ordinaire dans un job médiocre, pourrait-on dire.
Donc bien-sûr il a un secret, mais le pilote ne part pas du principe qu’il va bâtir son suspense là-dessus, ce qui fait un bien fou. Cela se découvre par petites touches très légères qui permettent de ne pas empiéter sur le vrai propos de Cra$h & Burn : dans les assurances, si on veut réussir, il faut être un peu pourri quelque part. L’épisode va nous servir d’introduction à ce monde peu reluisant avec une affaire qui commence bien mal.

Car à l’instar de beaucoup de séries policières procédurales, Cra$h & Burn commence par nous présenter le déroulement de l’accident qui va requérir les services de Jimmy : la voiture d’un petit vieux se fait emboutir une autre. Sauf qu’au volant de l’autre voiture, il n’y avait personne : son occupant était trop occupé à s’envoyer en l’air avec sa copine, actionnant ainsi malencontreusement le frein à main. On attend donc de savoir comment Jimmy va mener l’enquête pour conclure que le tort vient de ce conducteur et non du petit vieux (le conducteur prétend que son frein a lâché), puisque sur le moment les deux assureurs, à savoir Jimmy et celui de l’autre conducteur, partent du principe qu’il vont chacun indemniser leur client. Sauf qu’au lieu de se battre pour faire tout payer à l’assureur d’en face, Jimmy ne va pas du tout remonter la piste de ce mensonge. Et là encore, ça fait un bien fou.
Je vous avais prévenus, les assurances, ce n’est pas sexy et ça ne l’a jamais été ! Mais au moins le sujet est original, et change du point de vue légal ou policier qui nous ont nourri ces dernières années dés qu’il se passe quelque chose.

Tout en continuant d’essayer de s’arranger pour que sa compagnie d’assurances paye le moins possible pour l’accident, Jimmy va devoir faire face aux autres réalités de son métier : il n’a pas qu’une seule affaire sur le feu. Et on découvre le lieu de travail peu chaleureux qui est le sien, et qui rappelle celui qui est dépeint dans de nombreuses séries pour les vendeurs de voiture : chacun pour soi et Dieu pour tous, pourvu de faire du chiffre, ou, dans le cas des assurances, pour essayer d’éviter d’en faire. L’atmosphère de bureau est d’autant plus tendue que très tôt, le boss annonce la couleur : il va devoir virer du monde. Et Jimmy, qui n’est là que depuis un an dans la boîte et dont les résultats ne sont pas mirobolants, est donc parmi les premiers visés.

Le pilote de Cra$h & Burn va donc pas mal exploiter cet axe, l’affaire initiale prenant alors une importance secondaire. C’est que, Jimmy a besoin de son job : il veut se marier avec sa copine, ou, comme on le comprend assez vite, se marier avec la famille de sa copine. Le grand secret de Jimmy Burn est quelque part par là, dans son envie d’avoir une famille normale, une vie normale, des revenus normaux ; on sent que ça a quelque chose à voir avec le fait qu’il ait grandi en foyer d’accueil et n’ait pas vraiment de famille. Ce ne sera pas vraiment explicité, mais la piste apparaita de façon plus claire en toute fin d’épisode, et là encore, ça fait un bien fou de voir cet axe, a priori feuilletonnant, ne pas nous être balancé à des fins de dramatisation brute, genre « ohlala en fait Jimmy n’est pas celui qu’on croit ». Et c’est ce qui permet de voir que Jimmy n’est ni tout-à-fait fier, ni tout-à-fait honteux du métier qu’il fait, et d’ailleurs, de l’avis de tous y compris du sien, il le fait bien. Il y a une raison à ça et elle n’est pas présentée comme un mystère à décortiquer, mais simplement comme une piste de réflexion. C’était bien amené.

Ainsi donc, Cra$h & Burn et Last Money parlent de la même chose, mais différemment. Il s’agit toujours de polices d’assurances, de rencontrer les clients assurés par la compagnie pour essayer de verser la « bonne » somme, mais c’est la définition de ce qui est bon qui varie. Dans Last Money, on veut que l’argent aille à la personne à qui il revient légalement et si possible moralement, c’est la question de la qualité. Dans Cra$h & Burn, on veut que la somme soit la plus petite possible, c’est la question de la quantité. Forcément, le second est plus adapté au cynisme occidental que l’autre.
Pour ceux qui ont vu Call Me Fitz, Cra$h & Burn rappellera (même si en réalité ce devrait être dans l’autre sens, chronologiquement parlant) un certain nombre de thématiques sur la déchéance morale et la rédemption. Mais Cra$h & Burn n’est pas drôle du tout, quand Call Me Fitz est une dramédie un peu loufoque.

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