Guts lacking

12 janvier 2013 à 23:42

Bon alors, je vous la refais brièvement : défi avec whisperintherain, regarder tous les pilotes, review systématique. J’oublie quelque chose ? Non, je crois qu’on a tout. Mais sincèrement à ce stade, vous connaissez l’histoire. Rappelons quand même, parce qu’on est entre gens civilisés, qu’au bas de ce post se trouvera très bientôt un lien vers le post équivalent de mon camarade whisper, à propos du pilote abordé aujourd’hui.
Voilà, on est parés. Vous êtes prêts ? On est partis !

A partir de quand n’est-il plus pertinent de regarder des séries policières ? Ce moment n’est-il pas passé depuis longtemps, d’ailleurs ? Suis-je encore capable de me mettre devant un pilote de ce genre sans avoir le sentiment d’en vomir quasiment chaque minute ?
Oh, l’emballage peut changer ; c’est même très souvent le cas. Loin de moi l’idée de prétendre que regarder Les Experts et Ripper Street revient au même, évidemment. Mais, de la même façon que s’enfoncer un clou dans la main et se cogner le petit orteil dans un meuble, les deux sont tout aussi douloureux. Aujourd’hui, je vous chante donc l’homélie de l’orteil, mais ne nous faisons point d’illusions : sans le clou dans la main, la douleur serait probablement plus supportable…

Ripper Street se déroule en 1889, et cela fait six mois que Jack l’Eventreur a disparu des radars. Sauf qu’on ne sait pas pourquoi. Qu’est-il arrivé à Jack the Ripper qui le fasse cesser ses atroces meurtres sur des prostituées ? Tant qu’on ignore qui il est, il est possible à chaque instant qu’il réapparaisse. C’est l’angoisse qui dort dans les ruelles sales du district de Whitechapel, et celle qui anime également l’inspecteur Reid, un homme qui a poursuivi le criminel avant de se retrouver le bec dans l’eau. Mais quand une nouvelle prostituée est retrouvée morte, présentant de nombreuses marques laissant penser que Jack a repris du service, le quartier succombe sous la terreur et la colère. A charge pour Reid, aidé de son fidèle homme de main Drake, et avec la participation de l’ex-chirurgien américain Jackson, de déterminer si Jack l’Eventreur a bel et bien repris du service, ou si au contraire, on a ici affaire à un vulgaire copieur désirant maquiller son crime.

Le problème numéro un de Ripper Street, c’est paradoxalement son ambiance. Oui, c’est soigné, détaillé, on s’y croirait ; mais justement c’est très énervant parce qu’on se perd généralement dans le volet reconstitution. C’est la raison pour laquelle le pilote est si long à démarrer : le production en fait des tonnes, au détriment du scénario qui est épouvantablement basique pour ce qui concerne à la fois l’exposition et le lancement de l’enquête. Ce qui n’aide pas du tout cette impression, c’est que, si on a regardé Copper quelques mois plus tôt, les deux séries semblent avoir été tournées dans les mêmes décors ; du coup c’est bien la peine de frimer, c’est du déjà vu de A à Z !
Mais forcément, pour moi qui suis allergique à la fois aux séries policières et aux séries historiques, j’étais mal barrée.

Une bonne partie du pilote sera ensuite consacrée à reposer une dizaine de fois, sur un ton différent et par le biais de divers personnages (le légiste « officiel », un journaliste…) la question essentielle et incontournable : Jack the Ripper est-il responsable du meurtre de cet épisode ?
Mais à force de poser la question, celle-ci se vide de tout son sens. Car les personnages ont, en définitive, beaucoup de mal à tous donner la mesure de la gravité de la question.
Et pire encore : si c’est bien Jack, alors quoi ? Qu’est-ce que ça change pour l’enquête ? Ne faut-il pas faire preuve de la même tenacité, du même soucis du détail, de la même patience pour comprendre tous les tenants et aboutissants des circonstances de la mort de la défunte, avec peut-être, l’espoir de ne pas dénicher un tueur, mais LE tueur… Alors après, c’est peut-être l’accent qui m’a destabilisée et j’ai laissé s’échapper une réplique capitale à la compréhension de l’enjeu, c’est possible aussi. Mais si, pour la population de Whitechapel, le retour de Jack signifie que l’on n’est plus en sécurité nulle part (surtout si l’on pratique le sexe tarifé), pour Reid et son équipe, cela donne exactement le même résultat.

J’ai dit que Ripper Street n’était pas Les Experts, un peu plus tôt. Ce n’est qu’à moitié vrai : comme l’a fait également Copper, la série s’ingénie à truffer cette enquête de références plus ou moins explicites à l’état des technologies à disposition de la police à l’époque, et évidemment à avoir recours à la médecine légale, devenue un véritable incontournable de la plupart des procedurals modernes. Ces rappels sont certes bien vus pour la plupart, et parfois même très bien mis en image (comme lorsque le photographe est présent pour immortaliser la scène du crime), mais ils fonctionneraient infiniment mieux si… on n’avait pas vu dix variations de la même chose depuis une douzaine d’année. La nécessité d’en passer par là pour Ripper Street comme pour n’importe quelle autre série est indiscutable : c’est un acte de paresse scénaristique qui évite d’avoir à trouver de vrais indices, et donc de faire fonctionner la déduction des héros (un écueil que Sherlock a brillamment évité à plusieurs reprises, et c’est l’une des rares séries à avoir seulement essayé). Au lieu de ça, une petite incision ou deux et pouf ! Une piste. C’est magique. Ripper Street fonctionnant dans une atmosphère de peur ou au moins d’inquiétude, il aurait été intéressant qu’au lieu de marteler la problématique de la preuve, la série oppose les tentatives du détective Reid pour penser calmement, alors que lui-même, ni personne autour de lui, ne parvient à rester calme devant la perspective que Jack l’Eventreur frappe à nouveau. Mais au lieu de choisir la voie plus ardue, mais tellement plus payante dramatiquement, Ripper Street tombe dans le médical, laissant passer une belle occasion de tirer son épingle d’un jeu qui ressemble avec les ans à une motte de foin.

Il faudra attendre la toute fin de l’épisode pour que Ripper Street tire partie de ce qui a pourtant été mis en place dés le début du pilote, et offre une magnifique confrontation entre trois hommes hantés par le cas de Jack l’Eventreur… 55 minutes pour en arriver là ? La scène est formidable, mais elle arrive bien trop tard. Surtout qu’entre temps, l’intrigue sordide et limite raccoleuse n’aura vraiment pas fait s’élever le niveau de l’épisode. Et dans l’intervalle, la question de la fascination pour Jack l’Eventreur, ou au contraire, les modalités permettant éventuellement à un criminel de copier ses méthodes et semer le doute même dans l’esprit des policiers ayant suivi la piste du célèbre boucher de l’East End, ce qui aurait tout de même permis de tirer partie du sujet prétendument choisi par la série.

Et je crois que le pire dans tout ça, c’est quand je lis que les épisodes de Ripper Street ne sont pas feuilletonnants ! Apparemment, il y a des gens qui estiment qu’écrire une histoire ne serait-ce que vaguement cohérente sur une saison de 6 épisodes, c’est trop compliqué. Quant à ce que laisse présager le trailer du deuxième épisode, diffusé à la suite du pilote, on voit mal comment les évènements seront à nouveau liés à Jack l’Eventreur. En somme, le but de la série est surtout de prendre un point de départ comme prétexte, mais de virer au cop show classique derrière. On était en droit d’espérer mieux, non ?

Alors je le répète : je ne suis sûrement pas la personne qu’il faut venir voir pour se faire une opinion objective (si pareille chose existe) d’un pilote de série policière. Je n’ai jamais été très enthousiaste vis-à-vis du genre, mais je sens bien que ça ne fait que s’aggraver avec les années, et surtout, avec les ersatz qui fleurissent. Très, très peu de ces séries trouvent vaguement grâce à mes yeux, et je suis bien consciente du fait que, chaque fois que je démarre un pilote dans lequel je sais qu’il y aura une enquête au moins, je le fais en serrant les dents et en partant du mauvais pied. Alors forcément, je me cogne l’orteil.
Mais je crois sincèrement que, même en mettant mon antipathie envers les séries policières de côté, Ripper Street manque de personnalité et de courage. Libre à vous évidemment de le vérifier par vous-mêmes, mais vous n’y allez pas avec ma recommandation.

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