Le verre à moitié plein

2 octobre 2013 à 19:52

On a beaucoup parlé de rentrée américaine, et on va parler de rentrée japonaise vendredi, alors dans l’intervalle changeons un peu d’air et partons… pour la France. C’est bien, c’est pas le décalage horaire qui va nous tuer.
Ça fait un bien fou de regarder une série française qui n’est pas policière, mais une série d’espionnage. On peut pinailler, et protester que c’est un peu de la même famille, puisqu’après tout on a toujours l’éternelle lutte des autorités contre le crime… ou bien on peut voir le bon côté des choses et se dire que France 2 a essayé de varier un peu notre quotidien téléphagique.

Et bien, avec ça. Je ne m’attendais pas à grand’chose et je me suis surprise à trouver, à plusieurs reprises, l’épisode convaincant, voire même bon ; voir La Source m’a même mis de bonne humeur, parce qu’il y a plein de choses que j’ai décidé de considérer d’un oeil bienveillant.
Cette bonne humeur, je la dois en grande partie aux dialogues, qui ont le mérite (assez exceptionnel en France à mes yeux) de ne pas sonner faux, et d’être délivrés avec une relative fluidité. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup : ça veut dire que les scénaristes m’invitent à entrer dans la série, plutôt que d’être aussi rébarbatifs que la majorité des séries françaises, où tout le monde ressemble plutôt à un élève d’école primaire récitant du Prévert, sans trop y croire, sans peut-être même tout comprendre. Les personnages sont bien incarnés ici, quand bien même ils ne sortent pas du pitch en 2 phrases qui est probablement à l’origine de leur création. Je ne sais pas si en 6 épisodes ils auront le temps de s’extirper du cul-de-sac où beaucoup sont enfermés, mais étrangement, ça a assez peu d’importance, du moment que chaque rouage fonctionne.

Ces rouages, ce sont Marie, une jeune étudiante qui, à l’issue d’un stage dans la multinationale Aloe Vera, est devenue jeune fille au pair pour l’un de ses dirigeants, John Lacanal (…mémo personnel, offrir un dictionnaire des prénoms à Laurent Burtin et Nathalie Suhard). C’est alors qu’elle est approchée par Claire, agent de la DCRI qui travaille sur les détournements de déchets toxiques d’Aloe Vera, afin de lui fournir des renseignements prélevés dans le domicile de Lacanal.
En utilisant la videosurveillance pour suivre les personnages dans leur quotidien, La Source s’autorise un regard omniscient, évitant le cliché de la série qui suit uniquement le point de vue de la pauvre jeune femme plongée dans une affaire qui la dépasse. Paradoxalement, ça tue un peu le suspense (cependant vous allez voir que ce n’est pas le but de ce pilote), mais ça permet d’être moins le nez dans le guidon, à ressentir un peu moins le stress perpétuel de son héroïne. De voir the big picture.

LaSource-650
Bon, il y a quand même de gros problèmes dans La Source. Qu’un des personnages, en 2013, joue encore aux Sims 1 au lieu des Sims 3 est par exemple le plus gros souci que je vois, de toute évidence.

Mais pas le seul. Le pilote est assez prévisible, et reste dans les clous de ce qui est mis en place. Vraisemblablement, La Source n’a pas l’intention de mêler le thriller à l’espionnage ici : le suspense est totalement absent. D’emblée, notamment de par l’interprétation de Lambert, les « gentils » et les « méchants » se placent vite sur la grille, et n’en bougeront pas de tout l’épisode, même quand on cherche à faire des mystères.
Par moments, on dirait que la mission qui incombe à Marie est secondaire, et qu’il est plus intéressant pour les scénaristes de suivre la façon dont l’héroïne va être piégée dans son rôle de source. Et très franchement c’est un choix que je respecte et qui se tient : les manipulations opérées par Claire pour obtenir l’aide, avec ou contre son gré, de sa jeune recrue, sont intéressantes, d’autant plus qu’elles illustrent un conflit au sein de l’équipe de la DCRI. J’espère aussi que la relation entre Claire et Marie sera plus approfondie par la suite, car la valse hésitation de Claire, et les appels à l’aide de Marie qui n’est pas plus méfiante qu’un chiot, offrent des possibilités de dynamique intéressantes, et dramatiquement riches. De la même façon que le lien entre Marie et la famille Lacanal illustre bien le dilemme de la jeune femme à les espionner pour le compte de la DCRI, j’attends plus d’ambivalence dans les rapports entre la source et son contact.
Le problème c’est que dans ce cas, il fallait coller à cet angle un peu plus régulièrement ; or le cliffhanger du premier épisode montre bien que ce n’est pas toujours le cas, et c’est problématique. La série a trop peu de temps pour s’amuser à ces hésitations de ton, réinjectant ponctuellement des questions qui n’ont pas vraiment lieu d’être, qui n’en sont en fait pas, sur la vraie nature de ci ou de ça. Il y a même carrément overkill avec l’état psychologique d’un des enfants que garde Marie.

Et en plus, ce cliffhanger de fin d’épisode est brutal, ce qui n’arrange rien. Là où généralement les dialogues parvenaient à maintenir une certaine impression de finesse, et là où l’exposition de la plupart des personnages évitait l’explicitation grossière de beaucoup de séries (oui, je vais répéter l’adjectif « française »), cette dernière séquence va exactement dans le sens contraire. Ce qui est dommage parce que j’avais envie de revenir en deuxième semaine, et là je finis sur une note plus pessimiste.

Dans l’ensemble, j’ai quand même envie de suivre La Source. Déjà parce que c’est plutôt pas mal comparé aux fictions habituelles de France 2 qui me donnent de l’urticaire (…je citerais bien des exemples mais il me faudrait énumérer toutes les séries de France 2 que j’ai vues ces dernières années). Et surtout parce que c’est pas mal tout court. Mais aussi parce que l’investissement en temps sera minime, ce qui joue aussi, soyons honnêtes. Mais je vous l’ai dit, je suis de bonne humeur.
Sans parler de coup de coeur, La Source commence, en dépit de quelques hésitations, d’un plutôt bon pied. Rendez-vous dans 6 épisodes (je sais, je ne suis pas en avance) pour voir où tout ça nous aura menés.

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