The other side of the looking-glass

12 janvier 2014 à 19:30

Tout a commencé avec un fun fact. J’ai découvert (un peu par hasard) qu’il y a 10 ans exactement, en ce 12 janvier, avait débuté une série canadienne du nom de This is Wonderland, et que je ne connaissais pas. Je me suis dit que, ah tiens, une date anniversaire, c’est plutôt sympa ; mais que s’il y avait une anecdote intéressante et/ou marrante sur la série en sus, ça pouvait être pas mal de creuser la question. Me voilà donc à lire plein de choses sur This is Wonderland, dont j’ignorais l’existence quelques minutes plus tôt.
Je n’ai pas vraiment trouvé d’anecdote croustillante. Par contre j’ai trouvé l’envie de découvrir la série, et du coup, aujourd’hui, en remplacement du fun fact que j’aurais pu consacrer à cette série canadienne, je vous propose une review du pilote !

ThisisWonderland-650

De quoi s’agit-il ? This is Wonderland est une série légale qui débute alors qu’Alice De Raey est une jeune avocate qui vit son premier jour au tribunal de Toronto. La jeune femme n’a absolument aucune expérience d’une cour, ou même aucune expérience tout court, et elle va vite découvrir qu’elle est complètement seule dans cette aventure où personne n’a le temps de l’aider, ni même l’aiguiller. Plongée dans ce système impitoyable, Alice tente de faire son travail plus ou moins correctement, en dépit de son manque de confiance en elle… ou de sa manie de ne jamais être capable de garder pour elle les choses désagréables qu’elle peut penser dans la folie de l’instant.

Présentée par toutes les sources que je trouvais comme une dramédie, This is Wonderland n’a cependant pas le grain de folie qu’on pouvait imaginer a priori, au sens où on est loin, très loin, de l’étrangeté d’un Ally McBeal, par exemple, ou alors, uniquement dans les épisodes les plus dramatiques de celle-ci. Alice De Raey est un personnage plein d’énergie, qui cavale dans ce pilote d’un bout à l’autre du palais de Justice en tentant de comprendre ce qui se passe et, si possible, d’y trouver sa place, et c’est plutôt le rythme incroyable de sa journée, ainsi que sa repartie, qui donnent du piquant à l’épisode.
En dépit des gens qu’elle rencontre, Alice ne va pas non plus découvrir que les couloirs du tribunal sont peuplés de personnages hauts en couleur, non plus ; il n’y a pas de caricature dans cet épisode, en fait c’est même assez frappant de voir comment les personnages sont écrits et interprétés ici, éloignés de tout stéréotype. Hormis un avocat apparaissant dans la scène finale du pilote, tout le monde est extrêmement « normal ».
Pour finir, ce ne sont certainement pas plus les plaidoiries qui apportent du piquant : elles sont courtes, brouillonnes car peu préparées par les avocats, et ne recèlent pas vraiment de plaisanterie. Si vous espérez que les avocats vont ici retourner les juges comme des chaussettes (ce pilote ne montre aucun procès avec jury) avec une tirade excellente, un mot d’esprit brillant, une démonstration pertinente, ou encore un magnifique détournement de la loi ou d’un point de détail, vous avez également frappé à la mauvaise porte.
Il ne faut donc surtout pas vous attendre à vous taper sur les cuisses, ni même à trouver des gags à proprement parler ; si on veut absolument dire que le pilote de This is Wonderland est celui d’une dramédie, alors il faut l’envisager comme une dramédie plutôt pince sans rire, voire même carrément acide.

Ici, on est dans un legal drama quasiment aussi sombre que The Practice, en fin de compte. Le portrait du système judiciaire est cinglant ; l’épisode, à la fois de par son rythme et de par les rebondissements proposés, va de nombreuses fois pendant ces 45 premières minutes dresser un constat déplorable du fonctionnement de la Justice. Personne n’a le temps, personne n’a la possibilité, et peu de monde a même l’envie, de passer du temps sur ce qui se passe. Les juges des différentes cours sont débordés et voient passer des prévenus à la chaîne ; les avocats jonglent entre des dossiers qu’ils n’ont même pas le temps de travailler ; les agents font circuler un ballet incessant d’accusés sur les bancs ; les erreurs administratives sont pléthore ; les prévenus sont trimbalés sans comprendre ce qui leur arrive ni avoir le temps d’être véritablement entendus… c’est sûrement l’un des cercles de l’Enfer que décrit Dante !

Or, je crains que ça n’ait rien de propre au système judiciaire canadien. C’est en fait la qualité numéro 1 de ce pilote : on n’a aucun mal à voir la situation décrite par This is Wonderland comme quelque chose d’universel… hélas. Le premier épisode accomplit, avec son rythme échevelé, une sacrée performance, d’ailleurs : sans jamais laisser un seul temps mort au spectateur comme à l’héroïne, il soulève des questions intéressantes sur la façon dont le système broie ceux qui l’approchent, d’une façon ou d’une autre. C’est un système, mais il ne fonctionne pas ; le manque de temps met tout le reste en péril. Il faut faire énormément d’efforts, avoir énormément de bonne volonté pour accomplir quelque chose en dépit du système, parfois même contre lui. Beaucoup des intervenants sont blasés, sans pour autant être totalement résignés, et font leur travail du mieux qu’ils peuvent avec les moyens qui leur sont donnés, mais sans le zèle d’une jeune idéaliste comme Alice, qui n’est pas encore rompue aux défauts de ce système…
Bref, This is Wonderland est absolument terrifiant dans son propos !

Et pourtant, derrière cette réalité glaçante, la série parvient à conserver une forme de légèreté, de lumière, qui apparaît comme véritablement unique. Il ne fait pas grand doute que dans les épisodes suivants, Alice va se trouver confrontée à d’autres absurdités, d’autres difficultés, d’autres raisons d’être découragée, mais on n’a pas l’impression qu’elle va nous faire une dépression nerveuse comme Bobby Donnell, et broyer du noir dans son bureau le soir (d’un autre côté, elle n’en a pas, de bureau !). Je ne suis pas convaincue que cela suffise à qualifier une série de dramédie (en même temps, ce genre un peu fourre-tout manque de définitions), mais clairement, c’est rédempteur. Le spectateur ne ressent pas tant l’étouffement ou le désespoir, que l’impression d’assister à une catastrophe. Je doute qu’on puisse regarder This is Wonderland comme on regarde la majorité des dramédies légales : sans une certaine prise de conscience.

Ce premier épisode est à la fois une bouffée d’air frais et une claque. J’ai terriblement hâte de regarder la suite ; je n’arrive pas à croire que pendant si longtemps j’ai ignoré que cette série existait ! D’autant qu’elle a gagné plusieurs Gemini Awards, y compris pour son interprète principale, qui effectivement se dépense sans compter pendant cet épisode inaugural.
A ce jour, seule la première saison de This is Wonderland est sortie en DVD ; je ne suis pas loin de penser que c’est criminel.

…Voilà, et pour le vrai fun fact de ce 12 janvier, rendez-vous dans quelques minutes !

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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