L’amour en héritage

2 mars 2014 à 19:42

Il me faut produire tous les efforts du monde pour me mettre devant une série sud-coréenne et ça ne date pas d’aujourd’hui. Ma grosse allergie aux comédies romantiques n’y est pas pour rien, et la plupart de mes expériences « récentes » ne m’ont certainement pas encouragée à essayer de reproduire l’expérience trop souvent. Mais, comme en ce moment je suis d’humeur à regarder des séries asiatiques, il s’avère que j’ai décidé de me botter le train et de quand même me forcer à me mettre devant l’une d’entre elles, Sangsokjadeul.
Un peu au pif. Un peu parce que j’ai souvent vu passer son nom dans ma timeline sur Twitter. Un peu parce que le générique m’évoquait The OC et que j’espérais qu’elle serait originale (ne prenez pas ça pour une invitation à m’imiter).

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Eh oui, je vais pas vous faire mariner longtemps, ça n’a pas été une grande réussite. Quel dommage, j’avais si soigneusement choisi ma série, ahem…

En dépit de son titre, qui se réfère à de riches héritiers effectivement présents en nombre dans la série, Sangsokjadeul va encore une fois s’intéresser à une pauvre jeune fille au caractère impétueux, et c’est lassant.
Je crois que je pouvais tolérer l’idée de regarder une romance (…quand on regarde une série sud-coréenne, c’est plus que recommandé), mais le coup de la petite fille pauvre qui inexorablement va tomber sous le charme d’un gosse de riche menant la grande vie, ça m’a achevée dés les premières minutes.

Encore que, Sangsokjadeul fait mine d’entretenir le mystère pendant quelques instants. En esquissant la structure d’un ensemble show, comme le dévoile d’ailleurs aisément sa photo promotionnelle visible ci-dessus, la série essaye de semer le doute et la confusion dans l’esprit du spectateur : est-ce que par hasard il serait totalement impossible de deviner à l’avance comment vont s’articuler les relations amoureuses des personnages ?! Mais non, rassurez-vous, on n’aura pas besoin d’en arriver là, car assez rapidement, en décidant de privilégier le point de vue de la jeune fille pauvre et celui du riche héritier exilé en Californie, le premier épisode se fait fort de flécher en grosses lettres lumineuses la direction que va prendre la série par la suite. De même pour la plupart des personnages secondaires impliqués. La seule grosse originalité de Sangsokjadeul à ce stade, c’est surtout d’éviter la structure à 4 personnages qui a fait la notoriété internationale des romances sud-coréennes ; cependant, cette prouesse n’est accomplie que de façon assez sommaire : le riche héritier a quand même une fiancée, faut pas déconner. Pour le moment, il n’y a personne pour faire des yeux de merlan frit à la pauvre héroïne, mais eh, ce n’est que le premier épisode. On en a 19 autres pour donner une raison à notre jeune fille sans le sou de ne pas se ruer immédiatement dans les bras du riche homme qui lui est destiné.

Bon, je l’admets, je suis légèrement de mauvaise foi. Si le défaut que je vous cite en premier lieu est bel et bien présent dans la série, s’il est même voyant comme le nez au milieu du visage, il n’empêche pas totalement d’apprécier le premier épisode.
Ouais, bon, disons de relative mauvaise foi. Je m’explique.

Sangsokjadeul s’offre suffisamment d’intrigues annexes pour que la prévisibilité de la chose ne soit palpable que dans les pires moments ; surtout vers la fin du pilote, quand les deux héros se rencontrent enfin et commencent tout de suite à se quereller, sans raison apparente si ce n’est qu’ils ne peuvent quand même pas tomber amoureux dés le premier épisode. Le reste du temps, ce premier épisode, en grande partie parce qu’il prend très au sérieux sa vocation d’exposition, va nous parler de très, très nombreuses choses qui font que même quand on sait quelle est la finalité de la relation entre les deux personnages principaux, on a quand même de quoi s’intéresser à la série. C’est l’avantage de ne pas tout faire tourner autour d’eux et d’avoir une distribution pléthorique.
Et puis, l’autre truc bien sympa dans ce premier épisode de Sangsokjadeul, c’est que les dialogues sont VRAIMENT drôles. Et exprès. Je vous accorde qu’il y a sûrement des séries dramatiques étrangères dont l’humour, surtout s’il est fin, se perd au moment du sous-titrage. Il y a eu des cas de pilotes par le passé qui m’ont fait me poser la question, parce que même quand les sous-titres sont de qualité, il est parfois difficile de traduire un humour purement écrit (par opposition au comique de situation ou au slapstick, par exemple). Mais ici, beaucoup de piques, voire même, de jeux de mots (exercice de traduction difficile s’il en est) sont bien rendus et permettent de rire spontanément à plusieurs reprises. Ça fait du bien, surtout quand tant de passages tombent dans le mélodrama le plus appuyé, au moins aussi tragico-tragique que dans Cinderella Unni, ma référence sud-coréenne en matière de drame-dramatique-qui-fait-pleurer.

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Il y a une dernière caractéristique de Sangsokjadeul dont je n’ai pas encore vraiment parlé. La série se déroule entre la Corée du Sud, où plusieurs de ses personnages commencent la série, et la Californie, où certains d’entre eux vivent de façon permanente, ou sont sur le point de visiter.
On est d’accord que ça n’a rien d’exceptionnel au départ : de nombreuses séries, à plus forte raison si elles ont un budget conséquent, s’amusent désormais à aller filmer hors des frontières sud-coréennes ; on pourrait citer la franchise IRIS en exemple, qui ne date pourtant pas d’hier. Eh oui les enfants, la première série de la franchise aura 5 ans cette année. L’idée est généralement de montrer qu’on a plein d’argent, et d’offrir dans la volée une touche d’exotisme. Et si au passage d’autres pays peuvent s’y reconnaître, ça simplifiera les ventes à l’international.

C’est bien d’exotisme ici qu’il va souvent être question… au moins dans un premier temps.
La Californie est le pays de Cocagne où tout est beau et magnifique (jusqu’à ce qu’évidemment, on y pose réellement les pieds, et qu’on s’aperçoive qu’il n’y a pas que le soleil et les vagues). Les jeunes personnages basés en Corée du Sud au début de Sangsokjadeul vont presque tous exprimer cet exotisme idéaliste à un moment où à un autre : c’est là que la vie est meilleure, point barre. On s’y imagine aller à la fac, ou vivre avec son fiancé, et tout y est forcément parfait. Evidemment quand on y est contre sa volonté, comme c’est le cas de notre riche héritier principal, ce n’est plus la même. Et surtout, quand notre pauvre héroïne va décider de liquider les fonds du foyer pour s’y enfuir, elle va découvrir que toute la Californie ne se résume pas aux plages de Malibu, qu’il y a des quartiers qui craignent à mort, avec concert de sirènes de police et groupe de mecs bizarres qui trainent dans les rues la nuit.
Au nom d’un principe de « réalité », Sangsokjadeul passe donc d’un cliché à un autre.

La réalité, c’est que Sangsokjadeul n’a pas choisi de se dérouler aux USA par hasard. La série est la toute première co-production entre la chaîne sud-coréenne SBS, et DramaFever, une société de distribution de séries asiatiques sur le continent américain qui a commencé comme un des rares fournisseurs de streaming légal de dramas coréens (en France, l’équivalent serait DramaPassion). L’idée est donc dés le départ d’offrir aux spectateurs étrangers, et américains en priorité, des choses qu’ils peuvent « reconnaître », et qui ne peuvent pas rester idylliques puisqu’ils en connaissent supposément la réalité. Cette réalité est certes pervertie par toutes sortes de clichés (et des acteurs américains absolument insupportables ; Jay, le meilleur ami blond de notre héros, est proprement insupportable), mais elle a le mérite d’offrir un décor relativement familier. Bon évidemment, la faille dans le plan, c’est que tous les Américains ne vivent pas en Californie, ne vivent pas dans une immense demeure à plusieurs millions de dollars (on en reparle dans la soirée), et ne vont pas faire du surf tous les matins. Mais le fait d’aller tourner une partie de la série sous le Santa Monica Pier n’implique pas d’avoir fait des recherches de folie en amont, hein.
N’empêche que ça fonctionne puisque la série a été achetée dans plusieurs pays asiatiques… pour son double exotisme.
Et bien-sûr, Sangsokjadeul a été diffusée sur DramaFever, avec sous-titres anglais quand ça parle coréen, de la même façon que SBS s’est fendue de sous-titres coréens quand ça parle anglais (ou que ça essaye, tous les acteurs n’étant pas égaux sur ce point). La série, connue sous des titres comme The Heir, mais aussi The Inheritors, est donc construite pour avoir un attrait à l’international… ce qui la rend beaucoup plus facile à regarder pour vous, même si vous n’êtes pas habitués des séries coréennes !

Avec cette formule, même si ses origines sont essentiellement financières et pratiques, et certainement pas artistiques, Sangsokjadeul parvient à offrir suffisamment de choses pour qu’on ne s’ennuie pas. Pour être plaisante à l’oeil. Pour être pleine de rebondissements parce qu’on passe notre temps à sauter d’un pays à l’autre, d’un milieu à l’autre. Evidemment que la pauvre héroïne au milieu des gens riches, on l’a vu trente fois, de même que les séquences de prises de bec avec son love interest riche et renfrogné. Mais l’ensemble finit par ressembler à un épisode suffisamment vivant pour être suivi sans peine.
Si je croyais aux guilty pleasures, je dirais que Sangsokjadeul en est un de qualité.

Ah, je vous ai pas dit : l’une des raisons pour lesquelles mon choix est tombé sur Sangsokjadeul pour me remettre en selle en matière de séries sud-coréennes, c’est que j’ai volontairement choisi parmi des séries achevées (lancée à l’automne dernier, Sangsokjadeul s’est terminée en décembre sur SBS), histoire d’avoir la liberté, le choix, et toutes les opportunités possibles, de poursuivre le visionnage si jamais le pilote me satisfaisait.
C’est ce que j’ai décidé de faire dans le cas présent. A condition de ne pas chercher un coup de cœur, d’admettre que je vais sûrement rouler des yeux plusieurs fois par épisode, et de supporter que mes personnages préférés sont pour l’instant tous restés en Corée, Sangsokjadeul est regardable. En plus, il n’y en a que pour 20 épisodes…
Et ouais, bon, d’accord : je faisais preuve au début de cette article de BEAUCOUP de mauvaise foi. Mais avouez, vous m’aimez aussi un peu pour ça.

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. Emmanuelle dit :

    Il faut avouer aussi que vous avez un certain talent pour choisir les séries moins bonnes/intéressantes… 🙂

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