Monnaie de singe

22 mai 2016 à 19:19

Il y a quelques mois, je regardais Continuum et quelqu’un en a profité pour me recommander de jeter un oeil à 12 Monkeys, puisque je baignais dans les histoires de voyage dans le temps, et que c’était similaire.

Maintenant que j’ai effectivement tâté du premier épisode de 12 Monkeys, je pense qu’il faut vraiment qu’on ait une conversation sérieuse sur la similarité entre deux séries données. Et sur les recommandations se basant sur ces ressemblances, par la même occasion. En fait, ça va être une conversation très courte : il faut vraiment arrêter. Alors je sais que j’ai déjà dit quelque chose de ce genre lorsque tant de monde a commencé à faire des comparaisons entre Game of Thrones et The Shannara Chronicles en janvier, mais je pense que la répétition et l’insistance s’imposent, parce qu’on est face à une épidémie de raccourcis simplistes. Et outre la paresse intellectuelle qui se trahit (pardon de le dire) à travers ces comparaisons indigentes, faire passer deux séries pour jumelles lorsqu’elles ne sont que cousines par alliance, ça ne rend service à personne. Il faut bien comprendre que, bon, à partir du moment où on recommande une série à quelqu’un sur la base d’une autre série que cette personne a déjà vue et appréciée, si ce rapprochement se base sur du vent, on est en gros en train de programmer une future déception. Ce qui est supposément l’inverse du but recherché. Donc je ne dis pas ça pour vous casser les pieds : les comparaisons simplistes, c’est objectivement mauvais. Ça ne fait que desservir tout le monde.

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Démonstration par l’exemple : en soi, 12 Monkeys n’est pas mauvaise. Elle s’annonce en revanche vierge de toute réflexion politique ; or, la réflexion sur l’activisme politique, les différentes formes de militantisme des plus violentes aux plus discrètes, et le regard de l’Histoire sur les mouvements révolutionnaires, était au contraire au centre de beaucoup d’interrogations de Continuum (et pas que). Du coup, 12 Monkeys à côté semble faire pâle figure, forcément.
C’est précisément ce qui rend la recommandation de 12 Monkeys par rapport à Continuum injuste : en elle-même, 12 Monkeys ne manque pas d’idées, et ses inspirations en termes de genre sont ailleurs. Là où Continuum emprunte volontiers au policier (limite au procédural), 12 Monkeys penche du côté du thriller.

Au cœur de 12 Monkeys, il y a doublement l’impression que le temps est une donnée centrale : d’abord parce que l’un des protagonistes est capable de voyager dans le temps, certes, mais aussi parce qu’il a pour objectif d’arrêter une catastrophe qui doit se dérouler en 2017. Il y a donc urgence pour comprendre les origines de la maladie qui va décimer quasiment toute l’Humanité, et pour stopper les responsables.
Parce qu’il y a des responsables : 12 Monkeys part d’un principe conspirationniste que la série embrasse totalement, surtout à la fin de son premier épisode. La maladie qu’il faut empêcher ne doit rien au hasard, et ce n’est donc pas exactement contre un virus ou sa propagation qu’on se bat, mais contre un groupe de personnes (dont l’identification reste à effectuer en majeure partie), l’Armée des 12 Singes, qui aurait une responsabilité dans la poursuite des évènements. On ne connaît pas non plus la motivation de ce groupe ; le premier épisode 12 Monkeys, soit par excès de zèle soit par manque de profondeur, ne s’interroge pas un instant sur la question… même lorsque ses deux personnages centraux sont face à un homme qu’ils suspectent d’avoir la main sur l’épidémie, et que les circonstances sont assez idéales pour s’aventurer sur le sujet.

L’idée motrice de 12 Monkeys est donc qu’on n’a pas le temps de poser des questions, ce qui est paradoxal pour une série qui repose en grande partie sur une quête de vérité : qui est cette Armée ? Apparemment la seule chose qui compte à ce stade, c’est de les arrêter, comme si comprendre ce qui dirige les gestes de cette organisation n’avait pas une incidence directe sur la façon de trouver ses membres, de les pister, et éventuellement de les éliminer.
Cela semble d’autant plus intéressant de s’interroger sur ce genre de choses, que 12 Monkeys a décidé très vite de ne pas s’encombrer de complications sur l’autre aspect central de son intrigue, le voyage dans le temps. On nous explique ainsi rapidement que le personnage capable de retourner dans le passé est immunisé contre les paradoxes temporels, comme c’est commode. Clairement ici la science-fiction se met au service du thriller, et surtout pas l’inverse.

Le premier épisode de 12 Monkeys ne s’embarrasse donc pas de nuances ; c’est son droit le plus strict pour un épisode d’exposition, mais la nécessité d’étoffer certains angles s’impose comme vitale à l’avenir. Il ne suffit pas de faire courir ses héros de gauche à droite (ou plutôt d’avant en arrière) pour donner de la substance à une série, bien au contraire…

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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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