Like fine wine

19 mai 2023 à 12:24

Pour reprendre l’expression consacrée (aussi clichée soit-elle) : Grand Crew est l’une des comédies les plus douces que vous ne regardez pas.
Suite à une première saison plus fine que ce que son pitch pourrait laisser penser (« un groupe d’amies se retrouve dans un bar à vin »), Grand Crew revenait en mars sur NBC pour une nouvelle cuvée, certes dans un certain anonymat, le network étasunien étant allergique à la promotion de la série. Je persiste à dire que c’est bien dommage, et cela portera tôt ou tard préjudice à la longévité d’une série qui pourtant n’a rien à se reprocher, bien au contraire. En tout cas, pour le moment, elle n’est pas incluse dans les grilles pour l’automne et n’a semble-t-il pas été mentionnée pendant les Upfronts.

Quel que soit l’avenir qui attend Grand Crew, on peut en tout cas parler de sa saison 2, et c’est donc le sujet du jour.

Si pour quelque raison vous avez fait le choix de ne pas lire la review de la saison précédente, ou que, dans le même ordre d’idées, vous voulez regarder cette nouvelle mouture sans avoir vu les épisodes de l’an dernier (il y a des gens bizarres, je ne juge presque pas), rappelons que les plus grandes qualités qui émanent de Grand Crew tiennent dans son parti pris assumé. La comédie en single camera fait ainsi le choix de parler de personnages, noirs et majoritairement masculins, d’une façon qui célèbre à la fois leur joie, leur excentricité, leur maturité, et leur complexité intérieure. Tout cela, bien-sûr, en sirotant un verre de vin.
Noah, Wyatt, Anthony, Sherm, Nicky et Fay représentent un choix conscient, même si les leurs ne le sont pas toujours, et que les intrigues sont plus l’illustration de ce principe qu’une occasion de disserter à son sujet.

Cette nouvelle saison emprunte un chemin similaire à la précédente (quoique l’aspect feuilletonnant soit irrégulier), en proposant des choses un peu farfelues, souvent teintées de romance, et généralement en créant des combinaisons de personnages variées, pour raconter des histoires sur la joie d’être trentenaire à Los Angeles. Même si cela inclut aussi quelques déconvenues… Il faut noter que cette fois, TOUTES les protagonistes ont droit à des intrigues dignes de ce nom, ce qui n’était pas forcément le cas de certaines précédemment (Sherm ayant été très souvent traité comme un comic relief et pas grand’chose d’autre).
La saison commence sur les énièmes déboires amoureux de Noah. Et une fois de plus, il est question de demande en mariage ! En tant que serial monogamist, Noah est en effet confronté à un choix compliqué : sa petite amie Simone, qui est canadienne, doit quitter les USA pour des raisons administratives d’immigration, mais un mariage pourrait lui permettre de rester. Noah a-t-il appris de sa précipitation passée ? Ou va-t-il se ruer à la mairie, embarquer ses meilleurs potes dans une aventure rocambolesque à travers Los Angeles (y compris le métro…), pour épouser une quasi-inconnue ? Le suspense est… en fait, plus présent que ça n’en a l’air dans mon résumé, héhé ! C’est, comme on dit, la saison de la maturité pour Noah, maturité relative mais maturité quand même, et l’occasion de se poser les bonnes questions.
De leur côté, Anthony et Fay continuent leurs chassé-croisé, d’autant plus complexes qu’Anthony est dans une relation prometteuse avec Talia (la scène de brossage de dents était l’un des meilleurs moments du début de saison). Les hauts et les bas vont se poursuivre pendant plusieurs épisodes de la saison, jouant avec des tropes très familiers, mais prouvant aussi que Grand Crew continue d’être très intentionnelle dans sa façon d’éviter les écueils des séries auxquelles elle pourrait être comparée (oui, c’est une référence à une intrigue de Friends, et c’est tout ce que je vous dirai à ce sujet sans spoiler). Dans le même temps, chacune d’entre elles a aussi des intrigues secondaires relevant du professionnel et du financier…
Nicky a aussi, et ça fait du bien, droit à une storyline plutôt intéressante, qui la force à sortir de sa zone de confort et assumer, au grand jour, qu’elle a un petit ami. Pour une femme qui refusait de se montrer vulnérable, c’est un grand pas ! Là où la jeune femme servait souvent de caution humoristique ou de sage guide à ses amies dans la saison précédente, elle doit donc affronter la vie de couple, d’autant plus que Michael (le frère de Wyatt) n’étant pas angeleno, il doit cohabiter avec elle lorsqu’il lui rend visite. Un épisode proprement délicieux en ressortira !
Wyatt et sa femme Kristen (qui apparait sporadiquement ; j’apprécie qu’elle ait sa vie de son côté, mais qu’elle ne soit pas absente de plusieurs grands rendez-vous de la bande) se posent aussi la question de la parentalité. Le couple a toujours tenu pour acquis qu’il aurait des enfants un jour, mais Kristen commence à avoir des doutes, ce qui ébranle un peu Wyatt. Plus tard dans la saison, il accueille sa nièce adolescente chez lui, ce qui donne une opportunité d’apprendre quel genre de parents Wyatt et Kristen pourraient être… si. Ce n’est pas un angle majeur de la saison, mais il fonctionne bien !
Et même Sherm trouve donc une raison d’être, en s’interrogeant sur son avenir professionnel. Il a toujours été celui qui a le moins d’éducation, le moins de réussite, le moins d’avenir en un sens ; il est devenu, un peu par la force des choses, le colocataire d’Anthony, mais il semblait un peu vivre à ses crochets. Dans cette nouvelle saison, il s’investit dans sa nouvelle affaire (il est devenu chauffeur à son propre compte), et se passionne plus que jamais pour l’entrepreunariat. La rencontre fortuite d’un multimilliardaire célèbre le met, presque par accident, sur une nouvelle voie, et il commence à envisager d’apprendre sérieusement l’œnologie !

Grand Crew continue d’explorer comment ces personnages peuvent grandir… et en même temps, cultive une certaine idée de l’innocence. Une innocence mûre : elle n’est pas aveugle aux réalités de la vie, mais elle est préférable aux prises de tête. Le fameux « passage à l’âge adulte » que dépeint Grand Crew implique aussi, voire surtout, un plus grand confort financier, une palette de choix élargie, et des possibilités de goûter à un raffinement nouveau. Du coup c’est plus compliqué qu’à la vingtaine, et en même temps plus facile de trouver de la joie, et d’en exprimer toutes les facettes. Our multitudes got multitudes. Tout cela était présent dans la saison précédente, mais se retrouve renforcé par les intrigues de ce nouveau cru.
Tout cela, avec des dynamiques de groupe sans cesse mouvantes (ne serait-ce que parce que la saison, courte, a beaucoup de choses à raconter), des protagonistes occasionnelles bien choisies (c’est toujours un plaisir de retrouver Colton Dunn de Superstore, et il s’insère incroyablement bien dans les dynamiques de la série… Franchement si saison 3 il y a, il faut le faire passer au générique), et quelques coups de folie, comme la soirée dans laquelle les amies s’incrustent dans un club œnologique très select. Mon seul bémol s’adresse au cadre narratif des deux derniers épisodes, qui soudain décide d’employer Noah en voix-off (ses commentaires étant peu pertinents, en plus), ainsi que sur le traitement de Fay, mais visiblement je ne suis pas la seule à me poser des questions puisque même l’actrice a posté un message ambigu sur Instagram (je ne poste pas de lien, c’est spoiler).
Très franchement, ces deux légers inconvénients (celui de Noah trouvant, finalement, une explication, d’ailleurs) sont mineurs comparés au plaisir que représentent ces retrouvailles avec la crew. C’est plein de bonne humeur, de tendresse et de folie douce. Que demander de plus à une comédie ?
Vous voilà donc dépourvues d’excuse si vous n’avez pas encore jeté un oeil à Grand Crew. Et au pire, ça fera un complément de visionnage thématique aux Gouttes de Dieu. Que je sais que vous regardez, n’est-ce pas ?!

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1 commentaire

  1. Mila dit :

     » Et au pire, ça fera un complément de visionnage thématique aux Gouttes de Dieu. Que je sais que vous regardez, n’est-ce pas ?! »

    … Sure *regard honteux*
    A ma décharge, j’avais pas trop aimé la première adaptation, alors j’ai pas encore trouvé la motivation de me lancer ;;

    Et j’admets qu’en effet je ne regarde pas Grand Crew, ce qui est d’autant plus con de ma part qu’au-delà de ton portrait élogieux, des fois je cherche une comédie à regarder et me retrouve devant toujours les cinq mêmes, que je connais par coeur à ce stade =_= Heureusement que tu ne juges (presque) pas !

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