Froide matinée

6 février 2008 à 10:10

Ce matin, j’ai décrété que venir 1h15 plus tard me dédommagerait des 3h15 de rab’ d’hier. J’ai pas envie d’entrer dans des calculs d’apothicaires, alors voilà, disons simplement qu’on est quittes. J’ai dormi une heure de plus, j’ai eu le temps de m’occuper un peu de mon site, je suis contente, j’ai ma récupération.

Evidemment, moins contente de voir l’ambiance dans le bureau. Si on peut parler de chaleur, alors c’est en se cantonnant uniquement à la température des radiateurs (oui, deux, DOM THOM a du mal à maintenir une température de 25°C sans le renfort du radiateur mural, près de moi, et de son radiateur portatif, sous ses fesses ou presque). En entrant, j’ai dit bonjour, un bonjour sobre et monocorde, je n’ai eu aucune réponse, je m’en fiche.

J’ai été voir Monsieur Patron qui m’a dit qu’on attendait tel ou tel document, qu’on ferait un point tous les trois sur les dossiers à venir dans 5 minutes, je n’ai pas abordé le sujet, il ne l’a pas fait non plus, nous avons juste échangé une banalité sur le fait qu’il était encore au boulot quand je suis partie hier vers 20h15, c’est tout.

Pourquoi, en effet, revenir sur ce qui a été dit hier soir ? Oui, j’ai joué la gamine d’école primaire et j’ai cafeté, et oui, comme il l’a dit, ce Monsieur Patron auquel j’ai pu parler (je ne pense pas que tous les patrons entendent ce genre de choses), dans ce genre de situations, « personne ne sort grandi », et oui, je ne me sentais pas fière et je n’ai dit que la moitié de ce que j’avais sur le coeur, et oui, en plus je l’ai pas forcément très bien formulé (alors que pourtant je sais depuis des semaines ce qu’il y aurait à dire, et que j’avais préparé un certain nombre de choses importantes), mais enfin, voilà, c’est dit, le principal a été explicité. D’une certaine façon, ça me suffit.

Je ne cherche pas la commisération, je n’attends pas une compensation, je voulais juste, je crois, que la vérité soit dite. Avec DOM THOM, en fait, j’avais l’impression de vivre dans la même ambiance que chez mes parents, une ambiance où chacun demande implicitement à l’autre d’ignorer l’éléphant dans la pièce, par confort, où tout le monde se retrouve à accumuler les petits mensonges, et où on finit par s’étouffer avec. Quelque part, en faisant la démarche de dire ce qui n’allait pas, aussi mal formulé que ç’ait été, j’ai l’impression d’avoir cassé ce schéma. Je me sens mieux de ne pas vivre dans le mensonge, de ne pas couvrir une collègue lâche.

J’ignore s’il lui en a touché deux mots (après tout je suis aussi arrivée tard pour qu’il ait le temps de lui parler s’il le voulait), ou si elle fait la gueule uniquement parce que j’ai monté le ton hier, je m’en fiche à vrai dire. Elle a l’air de bosser, au final c’est tout ce que je voulais, et si on ne s’adresse plus la parole que pour le minimum eh bien au moins, je serai toute à mon aise pour travailler dans le calme.

Et puis, l’assurance que Monsieur Patron reconnaît ce que je fais, même s’il n’a pas forcément conscience de ce qu’elle ne fait pas, à travers certaines paroles qui m’ont énormément touchée, est aussi une sorte de force qui me permet de tenir en dépit des regards assassins de DOM THOM. Ce ne sera pas forcément l’Enfer que je m’étais imaginé si j’entretiens cette force-là, issue de la confiance qu’a Monsieur Patron en moi.

Quelque part, je suis aussi heureuse de découvrir à travers cette expérience que, dans le fond, je ressens en moi ce qu’est la « mission de service public », comme l’appellent les medias, cette envie de travailler pour quelque chose de plus grand que mon compte en banque. Je ne travaille pas simplement pour vivre, je travaille aussi pour exister. J’aime cette idée. J’aime l’idée de servir à quelque chose. D’avoir de la valeur et de la reconnaissance. Et puis, oui, j’aime aussi l’impression que mes poumons se gonflent d’un air nouveau depuis que j’ai ce travail, cette sensation de respirer enfin et de m’épanouir dans quelque chose qui me fait sortir la tête hors des contingences qui ne touchent que moi.

Après tout, y a-t-il quelque chose de plus extraordinaire que d’arriver à gagner de l’argent tout en se rendant utile ? Quelque chose de plus incroyable que de mériter jusqu’au moindre centime de salaire ? DOM THOM ignore certainement ce sentiment, ou ne s’en souvient plus, mais son son épouvantable contre-exemple, aurais-je réalisé à quel point, oui, Monsieur Patron, je voudrais rester dans ce ministère, et y servir à quelque chose.

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