Passé imparfait

23 décembre 2012 à 22:49

whisperintherain a un peu du mal, en ce moment, avec notre défi. Combien je le comprends. Quand on voit certaines des séries qu’il faut s’enfiler cette saison, ça a de quoi démoraliser… Allez, on est partis pour une nouvelle séance de masochisme…
*soupir*

« Ok, ça ne peut pas être très difficile…
Tout ce que j’ai à faire, c’est reprendre l’histoire d’un bouquin qui exploite un sujet à la fois historique et mystique se déroulant entre deux époques. C’est comme avoir une chance d’adapter le Da Vinci Code ! …Sauf que c’est pas le Da Vinci Code, et c’est pour la télé, bon. Mais quand même, tous les éléments y sont, la conspiration, les mystères archéologiques, tout ! Ah nan mais je vois ça d’ici ! Je vais aussi rajouter quelques scènes de sexe parce que, eh bien, Game of Thrones est passé par là… l’enfance de l’art, vraiment ! Je vais même avoir du mal à n’écrire qu’une mini-série en deux parties, tellement ça s’annonce captivant !

Bon, eh bien, puisqu’écrire Labyrinth s’annonce tellement simple, je vais me faire un ptit café d’abord, moi… »

C’est ainsi que, je présume, a commencé la plus grande séance de procrastination de l’histoire de la procrastination (vous ne le saviez pas jusque là parce que le livre sur l’histoire de la procrastination n’a pas encore été publié, naturellement).

L’idée semblait simple, trop simple. Les éléments s’emboitaient parfaitement, entre le matériau d’origine, la richesse des légendes cathares et la dramatique persécution dont ses représentants ont été les victimes, les fantasmes divers autour des mouvements religieux secrets capables de s’infiltrer dans les institutions d’un pays… c’était trop beau, vous comprenez. Trop facile.
Le problème c’est qu’écrire sans douleur, c’est loin d’être motivant. Ecrire sans effort, ce n’est pas vraiment écrire. Et je ne dis pas ça parce que le post que vous avez sous les yeux est ma troisième version de la review de Labyrinth.

Résultat ? Eh bien résultat, le premier des deux volets de Labyrinth est… rha, comment le décrire ? Comment vous expliquer que… En fait, là, tout de suite, je ne vois qu’un mot.
Snoozefest.

Car avec tous les éléments en présence, comment est-il concevable d’écrire une exposition aussi bavarde, poussive et molle ? Ca défie l’entendement ! Je ne sais pas si ça vient du bouquin (mais si c’est le cas, ce n’est pas une excuse) ou d’autre chose, mais très sincèrement, je ne comprends pas comment expliquer qu’une femme vivant dans le présent, et une autre vivant en 1200 et des brouettes, reliées par quelque breloque retrouvée dans des fouilles archéologiques, et mettant à jour à la fois le sort tragique des Carthares et l’existence d’une communauté cathare encore active, bien que secrètement, de nos jours, puisse conduire à un enchaînement de scènes du plus profond ennui.
Que ce soit téléphoné, passe encore : l’une des héroïnes est une jeune femme qui n’a rien à faire là, qui n’a même aucune notion du contexte historique des fouilles sur lesquelles elle passe quelques jours, va mettre le doigt dans l’engrenage (et accessoirement dans une bague) d’une terrible machination. C’est cliché, mais admettons. Pour avoir regardé mon lot de fictions produites par Robert Halmi dans ma prime jeunesse, je ne vais certainement pas m’élever contre ce procédé simpliste consistant à plonger une héroïne candide (c’est le terme poli pour « ignorante ») dans un thriller mystique. Mais s’il ne peut pas toujours exiger l’originalité, le spectateur a au moins le droit de réclamer quelque frisson.
Or l’exposition de Labyrinth est d’une paresse incroyable, les deux héroïnes passant leur temps à papoter avec Pierre, Paul et Jacques pendant, allez, une bonne moitié de l’épisode… Sauf que l’épisode dure 91 minutes ! Donc c’est à celle qui va réussir à mieux endormir le spectateur, lequel croyait naïvement qu’il allait se passer quelque chose. Grave erreur. Il faudra attendre la toute fin de ce premier épisode pour assister à la moindre scène d’action (spoiler alert : les Cathares se font massacrer), alors que dans l’intervalle, l’héroïne dans le présent lance des regards affolés toutes les dix secondes, et celle dans le passé… euh, aussi, mais pour d’autres raisons.

Le problème de Labyrinth, c’est aussi… son sujet. En bouquin, ça se trouve, ça passe très bien (j’en sais rien, je ne lis quasiment plus de fiction, c’est pas pour me cogner ce livre-là). Mais en série, ou en film d’ailleurs, aborder le sujet d’un mouvement secret, c’est hyper glissant. Je vous dis pourquoi ? PARCE QU’IL EST SECRET !
Bah oui, si tu en dis trop, ya plus de secret ! Et si tu n’en dis pas assez… eh bien en fait, c’est souvent l’option choisie. Résultat des courses, Labyrinth nous montre des gens au visage fermé qui font des mystères, qui se passent des coups de fil secrets où on se parle à demi-mots, et se réunissent secrètement pour des cérémonies… évidemment secrètes. Mais forcément mauvaises aussi, hein. Dans ce secret de polichinelle (l’épisode est truffé de références inquiétantes à l’organisation secrète dirigée par une femme… que tout le monde connaît vraisemblablement sauf l’héroïne), il faut donc essayer de maintenir une ambiance intrigante, mais sans en dire trop parce qu’on attend vraisemblablement le deuxième volet pour expliquer ce que tous ces Cathares veulent en réalité.
C’est un peu comme regarder les plus épuisants épisodes de X-Files, vous savez, les mauvais, sur la grande conspiration dont les scénaristes ne semblent pas eux-mêmes avoir une idée très précise, sauf que c’est encore plus condamnable que X-Files parce que là, c’est juste de la paresse. Se forcer à entretenir le suspense pour une série qui espère être renouvelée, c’est une chose, le faire bêtement et de façon creuse sur une mini-série en deux parties, c’en est quand même une autre.

Là-dessus, encore faut-il ajouter que le cast est à chier. Vous pouvez me lancer vos cailloux, je n’en retirerai pas un mot. Jessica Brown Findlay est toujours aussi scolaire (sérieusement quand je la vois jouer la comédie, j’ai l’impression de regarder une série française !), Vanessa Kirby est… blonde au-delà de tout doute, Emun Eliott et Tom Felton n’expriment leurs personnages respectifs que grâce à la graisse de leurs cheveux, et Tony Curran joue les vilains méchants à la perfection (être roux lui permettant de faire l’économie de son jeu), bref, c’est un savant mélange entre incompétents et compétents atteints de flemmingite aigue. Je me fiche complètement de savoir qui a joué dans quelle franchise ciné immense, qui est au générique de l’une des plus grosses séries britanniques du moment, qui a été Vincent Van Gogh, et qui est mon chouchou dans Threesome, même tarif pour tout le monde. Personne pour remonter le niveau.
A cela encore faut-il ajouter les horribles aléas qui accompagnent invariablement toute fiction se déroulant en France (un parfait exemple en est les deux hommes de main qui n’écoute que Ca plane pour moi à fond dans leur Peugeot…) et il y a de quoi saturer très vite…

Donc, 91 minutes à ce tarif-là, c’est inhumain. Pourtant les histoires en pays cathare, ça pourrait être intéressant, mais pas dans le cas de Labyrinth. D’ailleurs, à part le motif sur la bague, j’ai pas tout-à-fait compris pourquoi la série s’appelle Labyrinth, parce que de labyrinthe, point (mais comme je vous le disais plus haut, snoozefest oblige, j’ai parfois un peu piqué du nez.
91 minutes de ma vie, hein… Combien d’heures j’ai perdues à jamais devant des merdes cette année, ça vaut la peine de poser la question, quand même.

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