I kissed a someone and I liked it ?

7 mars 2020 à 22:11

Saviez-vous qu’il existait une branche sud-coréenne à la chaîne étasunienne Lifetime ? Bah moi je l’ignorais encore récemment, et puis je suis tombée sur le premier épisode de Yeonnamdong Kiss Scene, une charmante petite websérie que Lifetime Korea compte parmi ses fictions originales. Bien que profondément allergique aux romcoms (et le Dieu de la Téléphagie sait qu’il n’est nul besoin d’aller chercher une chaîne s’adressant principalement au public féminin pour tomber sur une romcom en Corée du Sud…), j’ai été charmée par son concept simple, mais différent.
L’histoire est celle d’une jeune femme Sol Yoon, qui n’a aucune expérience en amour, mais qui se réveille un matin en réalisant que, à un moment, pendant la nuit écoulée, elle a partagé son premier baiser avec quelqu’un. MAIS QUI ? A elle de mener l’enquête !

Il se disait pendant longtemps que dans les romcoms asiatiques, le baiser n’était jamais délivré avant le dernier épisode.
Bon, c’était là une généralisation un peu facile, et aujourd’hui il est certain que les choses sont plus complexes que ça, mais l’idée directrice était que le baiser devait représenter le couronnement d’une relation qui avait eu le temps de s’établir pendant le reste de la saison (qui souvent était aussi le reste de la série : elles sont rares les romcoms de plus d’une saison en Asie). Le fameux lip-lock, qui normalement désigne un baiser mais par extension est aussi ce qui « verrouille » la relation, était une conclusion, pas un geste banal comme dans nombre de séries occidentales. Un rapport télévisuel aux embrassades qui évidemment, a quelque chose de culturel (on ne se bécote pas en public dans la plupart des pays asiatiques, déjà), auto-entretenu par ces romances chastes… Mais l’autre avantage est à trouver du côté de l’intérêt commercial : en procédant ainsi on est sûr de ne pas avoir à se soucier de restrictions d’âge et donc des horaires de diffusion, sans parler de caresser dans le sens du poil (en tout bien tout honneur) les spectateurs les plus conservateurs.
Par la suite, certains pays asiatiques exportateurs de séries (dont la Corée du Sud) ont découvert, ô merveille, que cette retenue collait parfaitement avec les attentes en la matière de nombreux autres pays eux-mêmes conservateurs. Qui, eux, n’avaient aucune envie de consommer les décadentes séries venues de nations débauchées comme, disons, au hasard, les USA.
Du coup pourquoi changer une équipe qui gagne ? Ca a pris pas mal de temps pour détricoter ces habitudes télévisuelles, qui se heurtent à des obstacles culturels (et des nécessités industrielles) invisibles à l’œil nu, et laisser des personnages exprimer quelque chose ressemblant de près ou de loin à de la sexualité. Mais ce parcours n’est pas notre thème du jour.

A la place je voudrais souligner combien il est fascinant de voir comment le baiser est devenu, au fil des décennies, un sésame suprême dans beaucoup de séries romantiques d’Asie. Et par extension dans la tête de pas mal d’ados de ces pays.
Si cela vous semble un peu old fashioned, je ne le vous reproche pas, mais je crois aussi que ça participe pas mal à l’attrait de la fiction asiatique, et a fortiori sud-coréenne, qu’il existe un repère dans le panorama téléphagique, où certains spectateurs et certaines spectatrices trouvent quelque chose qui convienne à leur orientation asexuelle, leur vision de la romance, leur timidité peut-être. Quelle qu’en soit la raison, il y a une part non-négligeable de la communauté regardant des dramas qui apprécie cette approche. Ou plutôt, cette non-approche.

Et donc Yeonnamdong Kiss Scene débarque là-dedans avec un concept qui, quelque part, est révolutionnaire, parce que le baiser est ce qui ouvre la série… mais qu’il va falloir le mériter, c’est-à-dire s’en souvenir.

Au départ, Sol pense même en avoir rêvé, comme elle a rêvé de son premier baiser depuis toute petite. L’essentiel de cet épisode introductif est même consacré à la voir désespérément essayer d’acquérir toute l’expertise possible quant à l’art secret du baiser, quand bien même elle n’a aucune expérience. Mais entre s’acharner à apprendre comment nouer une queue de cerise avec la langue et passer sa vie sur les réseaux sociaux à discuter technique avec des inconnus, elle pense enfin savoir à quoi doit ressembler le premier baiser idéal.
Cette obsession (qui comme vous le voyez ne doit rien au hasard dans un univers où le baiser est vu comme rare et précieux) est évidemment totalement gâchée par une nuit de beuverie dont Sol ne se souvient pas, et pendant laquelle son premier baiser se produit réellement. L’effet de l’alcool en a donc gommé quelques détails… dont, notamment, l’identité de la personne avec laquelle elle a partagé ce moment unique. Et donc bien-sûr, le moment est incomplet, parce que ce qui compte, ce n’est pas tant d’avoir embrassé que d’avoir eu un premier baiser avec quelqu’un qui compte. Est-ce ce qui est arrivé à Sol ? C’est embarrassant pour elle-même de ne même pas savoir. Alors elle va devoir remonter la piste, sans trop en avoir l’air, et interroger les personnes avec lesquelles elle a passé la soirée : ses suspects.

L’idée de Yeonnamdong Kiss Scene est vraiment charmante, essaie de renverser les codes sans trop les bousculer en même temps, et s’appuie en plus sur une réalisation extrêmement efficace. Le rythme de l’épisode (qui ne dure qu’une douzaine de minutes) est enlevé, l’évolution de l’obsession pour le baiser à travers les années est extrêmement amusante et tendre, il y a plein de façons dont cette exposition dit de façon futée ce qui, en soi, est une ironie simple : Sol est obsédée depuis toujours par quelque chose qui a fini par totalement échapper à son contrôle. Elle s’en veut, mais elle est aussi pleine d’assurance et d’énergie, et ce premier épisode le retranscrit bien. On ne doute pas qu’elle va lève le voile sur l’identité de son premier baiser, et tout ce qu’on peut espérer, c’est que rétroactivement, elle ressente les papillons dans le ventre qu’elle a toujours espéré ressentir. Car rien ne pourrait être pire que de découvrir qu’elle a vécu ce moment avec quelqu’un à qui elle ne tient pas !
Une conclusion que je n’ai pas vue, mais qui a été diffusée (ça ne s’invente pas) le 14 février dernier. Alors a priori, je dirais que les chances sont du côté de Sol.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

1 commentaire

  1. Tiadeets dit :

    Oh, ça a l’air tout doux comme série et puis à 10 minutes par épisode, ça se mange vite.

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