Take Five Onze

30 novembre 2023 à 20:21

Oui bonjour, c’est l’avant-dernier Take Five de l’année. Savourez-les bien, je n’ai pas encore décidé du sort de cette rubrique inaugurée début 2023 ! Pour cette nouvelle fournée de « pilotes » qui n’ont pas trouvé leur place dans des reviews individuelles, on trouve vraiment de tout, y compris des séries dont j’espère pouvoir reparler à l’avenir si j’en trouve le temps. Mais, vous le savez, le mois de décembre est en général assez chargé dans ces colonnes (du moins, quand tout va bien !), alors je ne vous fais pas de promesse…

BLACK FAMILIA (2023)

C’est pas super bien joué, c’est pas super bien filmé, c’est pas super bien écrit. Mais quelque part là-dessous se cache un revenge drama qui ne manque pas d’idées, paradoxalement. Tout part de la mort de Riria Shindou, une adolescente promise à de grandes choses qui venait d’obtenir son tout premier rôle en tant qu’actrice. Sa carrière débutait à peine, mais elle faisait la fierté de sa famille : sa grande soeur Sana, qui se destine à devenir journaliste ; son oncle Yuuma, un informaticien en recherche d’emploi ; son père Kousuke, coiffeur-maquilleur dans un bar à hôtesses ; et sa mère Kazuha, une femme au foyer dévouée. Ce soir-là, les Shindou avaient prévu une soirée au restaurant pour célébrer les débuts de Riria, avant de recevoir un appel paniqué de celle-ci ; réussissant à grand’peine à comprendre qu’elle est, en pleine nuit, encore dans les murs de son lycée, tout le monde se précipite sur place… pour la voir chuter depuis le toit du bâtiment. Très vite, la police décide qu’il s’agit d’un suicide et boucle l’affaire. Mais les Shindou ne peuvent accepter cela : Riria était pleine de vie et pleine de projets ! Cette conclusion leur est inconcevable.
Jusque là, BLACK FAMILIA pourrait à peu près se faire passer pour un drame familial, mais ce n’est pas du tout son intention. Il s’agit d’un thriller, et une fois n’est pas coutume, ce n’est pas une membre de la famille mais le clan Shindou tout entier qui se met en quête de vérité. L’idée ? La famille ne peut compter que sur elle-même, et chaque membre endosse donc une nouvelle identité qui permette de se rapprocher de l’objectif. Quant à l’objectif en question, c’est certainement ce qu’il y a de plus intéressant dans BLACK FAMILIA, la série mêlant le monde politique à celui du divertissement, semblant s’orienter vers une satire des petits arrangements de la classe aisée et de la classe dirigeante (et dans le cas qui nous préoccupe, c’est carrément de la même famille qu’il s’agit). C’est un aspect intéressant, à plus forte raison parce qu’à la base les Shindou sont vraiment des gens parfaitement quelconques, d’une certaine naïveté vis-à-vis de ce genre de choses, et que la mort de Riria est une sorte d’éveil politique indirect sur ce qui gangrène notre monde.
Avec tout ça, si BLACK FAMILIA n’était pas tournée au kilomètre et pleine de scènes super cliché, ça vaudrait vraiment le coup de la regarder. En l’état, je pense que si je n’avais rien d’autre à voir, je pourrais justifier de lui dédier quelques heures… mais qui de nos jours n’a rien d’autre à voir ?!

Builders (2023)

Petite comédie sans prétention, mais alors vraiment aucune, Builders se déroule dans une salle de sport éponyme, et suit plusieurs des habituées et employées. Ce n’est pas exactement ce que j’appellerais de l’humour de haut vol, et ce premier épisode a même des moments de flottement assez embarrassants pendant lesquels le scénario n’a pas l’air bien certain de savoir où se trouve la blague. Et c’est le premier épisode ! Faut espérer que la série se trouve, plutôt qu’elle n’empire… mais je vous l’avoue, je ne suis que pessimisme à son sujet.
Builders démarre alors que Mandar, qui est plus ou moins le personnage central, est mis face à un ultimatum par son patron, qui est également son beau-frère. Mandar travaille à Builders, mais s’il est relativement musclé, en revanche il est complètement abruti ; en outre il a fait acheter des équipements neufs dont il a promis qu’ils seraient un argument de vente, et pour le moment il ne s’est rien passé. Son beau-frère lui annonce donc que, si avant la fin du mois, il n’a pas vendu au moins 5 abonnements annuels, il perdra son job. Mandar se confie à ses meilleures potes, le célibataire chronique Kaameshwar et l’actrice ratée Parul, mais chacune a des préoccupations plus importantes. Kaameshwar, en particulier, se lamente qu’en dépit de son excellent boulot dans une banque et de ses résultats décents à la salle, il n’ait encore jamais réussi à approcher une femme. Fort heureusement, il a un plan : trouver une adhérente de Builders qui soit grosse, l’encourager pendant qu’elle perd du poids… et quand elle sera mince, il est convaincu qu’elle lui tombera dans les bras par reconnaissance de l’avoir aimée « pour elle-même ». Ce plan grossophobe vous est proposé par Builders.
Et bien-sûr, qui entre à la salle ce jour-là ? Une femme grosse, Vishakha. Entre Mandar qui veut absolument lui vendre un abonnement (avec des équipements neufs qui ne fonctionnent pas), Kaameshwar qui veut lui montrer qu’il est body positive pour la charmer (or on sait bien qu’il ne l’est pas), et Parul qui passe son temps à l’espionner pour ses potes (pas d’intrigue en propre, donc)… elle va passer une journée assez pénible à la salle de gym. Et c’est sans compter sur « Uncle », un vieux type qui traine à Builders parce qu’il n’a pas d’autre moyen d’avoir une vie sociale, qui va également semer le chaos. Builders a l’air convaincue que tout cela est drôle ; que les blagues téléphonées, les clins d’œil à la grossophobie-mais-si-je-reconnais-que-c’est-de-la-grossophobie-alors-ça-va, les personnages stupides, et le décor étroit, ça fait une comédie. Je m’estime heureuse qu’au moins il n’y ait pas de rires enregistrés, vous me direz. J’ai passé tout l’épisode à supplier Vishakha de quitter la série, mais non, hélas pour elle, je la vois sur le poster promotionnel. C’est terrible parce qu’en plus de tout le reste, elle est le seul personnage à ne pas se couvrir de ridicule tout en étant réellement drôle, comme si elle s’était trompée de série. Moi en tout cas, j’ai fait une grave erreur.

Estonia (2023)

Estonia revient sur le naufrage du navire de croisière du même nom en 1994, le troisième accident maritime le plus coûteux en vies humaines de l’Histoire.
Pourtant, pas de série-catastrophe à la Titanic ici : bien qu’étant la série la plus chère de l’histoire de la télévision finlandaise (mais co-produite avec la Suède, l’Estonie, et la Belgique pour alléger un peu la facture), Estonia s’attache avant tout à parler de l’après, et passe très peu de temps sur le naufrage lui-même. En fait, c’en est même perturbant, tant on en voit peu ; cet épisode introductif passe si rapidement dans les conséquences du naufrage qu’on en est comme en état de choc, de la même façon que les familles de victimes. Perturbées par l’aspect soudain et incompréhensible des faits (le discours officiel passe de « il y a eu un accident » à « on va essayer d’en sauver le plus possible mais on n’est pas optimistes » en très peu de temps…), elles réalisent progressivement la gravité de l’événement. Pendant ce temps, les unités de sauvetage s’affairent en mer, de nuit, sous une pluie glaciale. Mais dés le lendemain, les questions commencent à se poser : sur les raisons de l’accident, bien-sûr, mais aussi sur la façon dont les secours sont intervenus.
Je ne vous cache pas que le premier épisode d’Estonia est dur, moralement. Ce qui est presque paradoxal vu la façon très digne choisie pour présenter l’accident, sans voyeurisme. L’impression de chaos se mêle à un grand sentiment d’impuissance de la part des protagonistes (un plongeur secouriste, une pasteure assistant les familles…). Et puis, faire quelque chose, c’est quand même en faire trop peu, devant l’ampleur de la tragédie ; l’épisode inaugural suit le principe de « look for the helpers« , mais ça ne signifie pas nécessairement que cela donne beaucoup d’espoir. Toutefois, cela ne devrait pas durer : la série semble attachée à une narration linéaire, et la fin de son épisode a, déjà, pris une orientation politique (et internationale), en suivant le comité d’enquête trinational. Les questions devraient se poser dans des termes différents maintenant que le plus dur est passé… mais je vous avoue qu’après m’avoir bien plombé le moral, cet épisode m’a un peu coupé l’envie de regarder la suite.

Le futur est à nous (2022)

A intervalles plus ou moins réguliers, la chaîne Youtube de Canal+ Afrique a l’excellentissime idée de mettre en ligne le premier épisode de l’une de ses séries, généralement plusieurs mois après son lancement d’origine. Je ne sais pas qui il faut remercie pour cette idée, et c’est pas tous les jours que j’ai de l’appréciation pour Canal+, alors profitez-en. Admettons-le bien volontiers : regarder ces épisodes n’est pas pour tout le monde. On court le risque d’apprécier une série dont on ne verra jamais la suite, et ça peut être frustrant. Mais pour moi qui consomme des centaines de pilotes par an juste par curiosité, c’est une expérience délicieuse parce que ces séries ne nous arrivent presque jamais autrement. Surtout en n’ayant accès aucune chaîne du groupe… Ce mois-ci Canal+ Afrique s’est fendu de TROIS épisodes, pour changer, de sa série Le futur est à nous. Il s’agit de sa toute première fiction quotidienne, initialement lancée à l’automne 2022. Et il faut reconnaître que le titre de la série sonne un peu « Ici tout nous appartient« … ce qui n’est pas exactement un hasard, le créateur de la série est Olivier Szulzynger, scénariste français pour Plus belle la vie et Un si grand soleil (et pour répondre à votre question : bien-sûr qu’il l’est). La série dispose aussi d’une équipe d’écriture locale, quand même.
La série démarre alors qu’Aby, son mary Henri et son fils adolescent Milel, se rendent en Côte d’Ivoire pour l’anniversaire de Henri. Il s’agit du pays natal de celui-ci, qui n’y a pas mis les pieds depuis des années et s’est installé au Sénégal, dont Aby est originaire et où elle est journaliste. Ce voyage longtemps réclamé par Milel, toutefois, a mis son époux à cran : il redoute de revenir dans le pays où se trouve sa famille, avec laquelle Henri a coupé les ponts car elle serait dangereuse… sans plus s’étendre sur les détails. En outre, Henri partage un anniversaire avec son frère jumeau, Paul, rendant cette journée d’autant plus sensible. De son côté, Paul dirige un hôtel luxueux et mène la grande vie avec son épouse Imane et leur fille adolescente Ada, et s’occupe de sa mère âgée, Adjoua. Celle-ci est toujours attristée (et encore plus en cette date anniversaire) du départ de son fils Henri des années plus tôt, dont elle est sans nouvelle.
L’intrigue de ce premier épisode n’en est qu’à moitié une : on est dans le temps du soap, les impératifs y sont différents quand il y a un autre épisode dés le lendemain. Ainsi, Le futur est à nous prend le temps pour son exposition, insistant à la fois sur l’absence de réponse claire quant au danger présent (les scènes avec Paul ne laissent rien imaginer de dangereux de sa part, et Adjoua est une mère au coeur brisé), et sur les dynamiques familiales de ces deux bouts de famille qui ne sont pas entrés en contact depuis des années. Nul doute que cela changera à l’avenir ! L’épisode se conclut par un cliffhanger qui laisse augurer de choses, qui, je le disais, relèvent plus du mystère que de l’intrigue interpersonnelle. Dans Le futur est à nous, le soap a des airs de thrillers, et ça fonctionne plutôt bien. En outre je trouve les interprètes des deux épouses (Aby et Imane) vraiment convaincantes.

Wasawes (2020)

Amal vient d’enterrer son mari, Hasan, décédé la veille dans un accident de voiture. Elle est en outre préoccupée par les répercussions de cette tragédie sur ses deux filles Sawsan et Waad, sans parler de tous les préparatifs alors que les proches de la famille s’apprêtent à venir défiler pour faire part de leurs condoléances. N’importe qui serait bouleversée et stressée à sa place. Mais peut-être que dans le cas présent, les choses sortent plus de l’ordinaire qu’il n’y paraît… Amal commence à entendre des sons étranges dans sa maison, elle reçoit un appel silencieux du téléphone de son mari, et tout cela se mélange à la foule de souvenirs qui l’envahit, au point qu’elle commence à douter de sa sanité.
Dans Wasawes, le deuil emprunte les codes de l’horreur et de la série fantastique, tout en conduisant un huis clos étouffant (la quasi-totalité de l’épisode se déroule dans la maison d’Amal, et en tout cas toujours dans des espaces fermés). Mais pas question de surnaturel ici : le seul fantôme de la série est celui du passé, et ce n’est qu’en découvrant ce que cachait Hassan qu’Amal va pouvoir démêler le mystère qui entoure la mort de son mari. Et peut-être, juste peut-être, pouvoir le laisser partir. Wasawes (diffusée internationalement par Netflix sous le titre Whispers) fait des choix intéressants pour une série qui semble avoir été filmée avec de sérieuses contraintes ; si ce n’est budgétaires, alors potentiellement celles de COVID. Ca donne un résultat étouffant à souhait, d’autant que le premier épisode fait le choix de suivre Amal, quelqu’un d’assez nerveux et qui part au quart de tour lorsque quelque chose la chiffone, alors un deuil, vous pensez bien… Cependant, la série est construite pour que chaque épisode adopte la perspective d’une protagoniste différente, toujours une femme apparemment. Cela promet une intéressante étude de personnages féminins ! Pour je ne sais quelle raison, je n’avais pas vu Wasawes à l’époque de sa sortie, et je dois dire que j’ai bien envie de me mettre un peu de temps de côté pour finir la saison si je le peux. Mais avec la fin d’année, c’est un peu tendu, et le timing pue un peu ; alors pour être sûre de ne pas la laisser oublier, la voici au moins ajoutée à un Take Five.

C’est tout pour mon mois de novembre… mais maintenant c’est à votre tour : qu’avez-vous regardé ? Je veux TOUT savoir !

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1 commentaire

  1. Kiddo dit :

    J’avais très envie de visionner Black Familia (surtout à cause du casting et de cette famille qui veut se venger) mais mon enthousiasme est vite redescendu.
    Wasawes m’intéresse avec ces personnages féminins, je la note vite! Estonia j’aurai bien aimé mais j’enchaine les séries (un peu) stressantes.
    Pareil pour Builders et Le futur est à nous, je n’ai pas le courage de les commencer, pas mal d’abandons cette année et de séries qui sont en pause pour la traduction.

    De mon côté, trop de dramas ce mois ci alors mes préférés : Gannibal, If It’s With You (oui on change radicalement d’ambiance), Iljin (traduction papago, en coréen > 일찐역전), Kimi ni Todokanai, About Youth, Crashing Eid (j’ai adoré lire ton article après mon visionnage!), Bye Bye my friend, High & Low saison 1 et 2, Lucky My Love, Don’t Mess With Senior, Come Closer, Alienated 🌙.

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