Camping Enfer

10 décembre 2021 à 23:30

On ne parle quasiment jamais d’elles, mais chaque fois qu’elles se rappellent à notre bon souvenir, les séries belges savent faire la démonstration de leur qualité (…ok, peut-être pas à chaque fois, mais presque). Nos voisines aiment, comme nous, le genre policier et/ou le thriller, mais elles parviennent très souvent à y apporter une approche unique, et à sortir des chemins battus.

Coyotes, série de l’audiovisuel public diffusée au printemps dernier, en est la parfaite illustration. C’est un thriller, mais c’est aussi un teen drama qui prend la forme d’une série-chorale bucolique… et par-dessus le marché, la série a su se trouver un univers peu exploité dans la fiction télévisée, celui des scouts ! Rien que sur le papier, ça fait plaisir. Et en pratique ?

En pratique, je suis ravie de vous confirmer que le premier épisode se tient, dans l’ensemble. Il fournit un excellent travail d’exposition tout en faisant preuve de beaucoup de retenue, afin de ne pas tout de suite brûler toutes ses cartouches. Quand s’achève cette introduction, on a le sentiment de savoir dans les grandes lignes ce qui se passe, tout en ayant assez peu d’informations ; dans le fond, c’est surtout ledit sentiment qui prime.
Il faut dire que Coyotes se donne vraiment du mal pour créer des impressions. Une impression oppressante de danger, dans sa toute première scène. Une impression de perdition, notamment en suivant son personnage le plus désœuvrée. Et une impression diffuse de traumatismes à venir, lors d’un montage très bref mais très efficace. Il ne fait aucun doute que quelque chose de tragique va se produire, à l’intersection de tous ces indices, mais à ce stade, bien malin qui peut exactement prédire quoi.

Ce sont les vacances et une troupe de scouts s’installe dans le jardin d’un château situé à Warnaffe. Anne-Françoise de Préalle, la propriétaire des lieux, a autorisé le groupe à y planter ses tentes, sous la supervision du pasteur Julek, lequel est également son ami ; elle a également une fille, Marie, avec laquelle les rapports semblent tendus.
Les ados présentes dans le camps sont supervisées par deux cheffes, Impala et Doberman (dit « Dob »), et sont divisées en quatre patrouilles différentes : les Fennecs, les Pangolins, les Ecureuils, et… les Coyotes. C’est évidemment à ce groupe que la série va s’intéresser. Menés par Mangouste, qui prend son rôle de leader très au sérieux (voire trop), les Coyotes comptent Furet, un grand gaillard pas bavard mais loyal, Panda, qui semble s’être investie dans sa foi récemment, Mouss, son petit-ami et qui aime les jeux videos, et enfin Kevin, qui n’est pas encore officiellement initié, et est là essentiellement parce qu’il est le petit frère de Doberman et l’ami de Furet. Vous l’aurez compris, dans la série tout le monde s’appelle par un nom d’animal (sauf si l’on n’est pas encore officiellement un scout), et Coyotes ne nous dira d’ailleurs pas, pendant ces présentations, les noms administratifs de ces protagonistes.

L’attention de ce premier épisode se porte en particulier vers Kevin. Il est là à son corps défendant, mais son père ne lui a pas laissé le choix, vu qu’il semble s’être attiré de nombreux problèmes et que le mode de vie scout est supposé le faire filer droit. D’ailleurs Kevin a tenté de rejoindre la troupe avec un petit sachet caché sur lui, que son père (dans une fouille au corps humiliante) a réussi à découvrir au dernier moment. Ledit père a l’air un peu maltraitant, d’ailleurs, mais on le voit si peu qu’il est difficile de déterminer ce qui est dû à l’exaspération, et ce qui est vraiment angoissant. Doberman, le frère aîné de Kevin, est donc à la tête du groupe de scouts, n’est guère plus tendre ; il est bien décidé à s’assurer que Kevin ne sort pas du rang pendant cette expédition (en grande partie parce qu’il ne veut pas avoir affaire à leur père en cas d’échec… vous voyez ce que je veux dire par maltraitant ?). Fort heureusement, Kevin peut compter sur Furet, l’un de ses potes de longue date, et par extension sur Mangouste qui, prenant une fois de plus son rôle au sérieux, est bien décidée à protéger « sa » patrouille.
Cela n’empêche nullement Kevin, dés le premier soir, de sortir du camps pour aller au village en quête de quelque drogue à consommer… mettant sans le savoir le doigt dans un engrenage terrible.

Oscillant entre le réalisme (quand les scouts sont impliquées, surtout) et l’éthéré (et pas seulement lorsqu’il est question de drogues), Coyotes essaie de pousser sa réalisation dans plusieurs directions, comme pour nous désorienter. C’est également vrai de son ton, et des genres qu’elle s’est choisi ; même si certains de ses aspects sont prévisibles (notamment la rencontre entre Kevin et Marie), elle parvient préserver une part de surprise, et à brouiller les cartes. Ainsi, derrière le côté « colonie de vacances » d’une partie de l’intrigue, va se révéler progressivement quelque chose de plus sombre.
Comme si la série essayait de nous prouver que ce qui est tangible et évident, cache une réalité plus insondable et terrifiante ; une jolie métaphore de l’adolescence, en un sens.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

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