Say yes, say yes

1 janvier 2021 à 21:45

On va avoir besoin de toute l’énergie positive qu’on pourra générer cette année, alors je voulais commencer mon premier visionnage de l’année par une série qui me ferait autant de bien que possible. Il s’avère que s’il y a bien une série qui pouvait coller à pareille attente, c’est Ted Lasso, dont je n’avais pas lu grand’chose mais quand même cru comprendre qu’elle était bienveillante et affirmative. Par les temps qui courent, les séries de ce genre (a fortiori si on ne veut pas du pur escapisme) sont rares, c’était donc l’occasion parfaite de m’y mettre.

L’histoire de Ted Lasso est pourtant assez basique, sur le papier : un coach de football américain commence une nouvelle carrière après avoir été embauché par un club de football britannique, quand bien même il n’a aucune expérience de ce sport. Le club est (évidemment) à la dérive, comme dans à peu près toutes les séries sportives de la création, et son arrivée est globalement assez mal vue par les joueurs, la presse et les fans.
Alors, va-t-il pouvoir malgré tout triompher et porter l’équipe d’AFC Richmond vers les sommets ?

Pour commencer, je dois dire que j’aime profondément la façon dont ce premier épisode est écrit. Vous le savez, des épisodes inauguraux, j’en regarde deux à trois centaines par an selon les années (cette review de Ted Lasso est en fait ma 1401e review du genre, et je ne reviewe pas tout ce que je vois). Alors je pense pouvoir dire sans trop me tromper qu’on est ici devant l’une des introductions les plus fines qu’il m’ait été donné de voir, à plus forte raison pour une série dont les épisodes durent une demi-heure.
Tout dans l’épisode consiste à nous présenter Lasso et son attitude, sans jamais pointer du doigt l’attitude en question pour nous hurler dans l’oreille : « HEY, CE MEC EST UN CHIC TYPE, FRANCHEMENT IL EST GENTIL, TU AS VU COMME IL EST GENTIL ? ON A ECRIT UN PERSONNAGE VRAIMENT SYMPA, TU DEVRAIS L’AIMER ». Chose que font beaucoup d’autres séries plus ou moins scrupuleuses sur les décibels à employer. Au contraire, à l’image de son personnage éponyme, Ted Lasso ne veut pas nous forcer à apprécier son héros, mais laisser son charme agir sans même essayer. Sa force, c’est de ne jamais forcer.
A mesure que l’épisode se déroule et que nous prenons conséquence de la situation et son contexte (ce que, naturellement, toute série se doit de faire un minimum dans un premier épisode), le personnage, lui, s’impose l’air de rien. Plus fort encore : sa capacité à se tourner vers les autres est précisément ce qui le rend incontournable.

Plus je voyais la façon dont ce pilote, et ce personnage, se présentaient, plus je pensais à un extrait de Bossypants, de Tina Fey, dans lequel la comédienne (et anciennement collègue de Jason Sudeikis, qui incarne Lasso) explique ce qui est à ses yeux la règle d’or en matière d’improvisation : dire OUI. Ca m’a beaucoup impressionnée comme position de principe, en partie parce que lorsqu’on me propose quelque chose de nouveau dans la vie, mon mouvement initial est au contraire de dire non, que ce ne sera pas possible, que je ne me sens pas de faire telle ou telle chose. Je me suis dit en la lisant que quelqu’un qui pratique cette technique du OUI, au moins dans quelques domaines (même pas tous) de sa vie, doit considérablement avoir plus d’opportunités de s’épanouir que moi. Je n’ai pas (encore ?) réussi à me changer pour dire OUI plus souvent, mais j’admets être admirative de cette disposition.
Evidemment je ne suis pas en train de dire que Ted Lasso soit une série d’improvisation. En revanche, je pense bel et bien que son personnage principal adopte très exactement cette attitude dans tous les recoins de sa vie. Sa façon de s’intéresser à autrui, de toujours rester attentif aux émotions des gens qui l’entourent, de s’inquiéter de faire les choses positivement… c’est dire OUI.

Est-ce que ça résout tous ses problèmes ? Bien-sûr que non. La fin de l’épisode nous apprend par exemple qu’il y a une bonne raison pour laquelle il a déménagé au Royaume-Uni sans sa famille. Mais cette attitude, en tout cas, semble lui avoir apporté une certaine dose de satisfaction dans la vie, entre ses victoires avec son équipe précédente aux USA, sa relation avec son jeune fils, ou son amitié complice avec son bras droit, Coach Beard. Des relations attachantes, enrichissantes. D’où l’introduction si naturelle du personnage, qui brille par ses interactions avec les autres, et pas par la façon dont il se mettrait en avant. Lasso ne sait pas qu’il est le héros. Il évolue dans le monde pour vivre des expériences, et plus précisément des interactions, pas pour obtenir quelque chose (d’ailleurs ce premier épisode est incroyablement muet quant à des motivations pour ce personnage, quand d’autres voient les leurs explicitées).
Mais plus que tout, cet épisode donne l’impression que cela offre à Lasso une certaine capacité à rebondir. Ce qui là encore ne signifie pas qu’il ne ressent jamais d’émotion négative (Ted Lasso ne serait pas la série bienveillante dont j’ai entendu parler si son protagoniste était écrit de cette façon). Par contre cela lui procure une grande capacité de résilience, parce que quand un obstacle se dresse sur sa route (lors d’une conférence de presse surprise par exemple), il lui « suffit » de faire de son mieux et de s’en remettre à la bonne volonté des autres pour atténuer le choc. Ce qui est difficile n’est pas traumatique quand on sait dire OUI même à ce qui peut embarrasser ou heurter de premier abord. Ca fait une différence énorme.

Et du coup tous les poncifs de cette intrigue, et ils sont nombreux, sont complètement retournés par cette approche. Ted Lasso est une série qui n’est pas positive juste pour le principe de mettre des arcs en ciel et des licornes sur votre écran, mais plutôt pour vous donner un modèle de personnage capable d’aller de l’avant quoi qu’il arrive. Parce que quand on se repose sur la bienveillance et le respect, plutôt que sur la peur ou la rancune, on fait autant du bien autour de soi qu’à soi, sûrement.
Du coup, on pouvait difficilement faire mieux comme premier visionnage de l’année. Pour moi, c’est OUI.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

2 commentaires

  1. Ah, si heureux que tu te sois mise à Ted Lasso, avec une review encore une fois brillante. Grand fan de cette série reflétant tout l’humanisme optimiste cher à Bill Lawrence (N° 6 de mon top 2020). J’adore ton approche, je crois que tu as mieux cerné la série que la plupart des commentateurs. J’espère que les épisodes suivants te conquerront autant que moi !

  2. Tiadeets dit :

    Oh, c’est une belle série que tu présentes ici. En te lisant, ça me fait penser au j-drama Cherry Magic qui est un peu dans la même dynamique dans sa présentation au public d’une série bienveillante et qui présente des personnages qui essaient toujours de faire de leur mieux. Parfois ça rate, mais il faut toujours essayer d’aller de l’avant. En tant que grande optimiste, ça me fait toujours plaisir de voir des œuvres de fiction qui vont dans ce sens-là aussi.

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