Survol

10 juillet 2022 à 21:48

Avant, lancer une série l’été, c’était la lancer en période creuse ; aujourd’hui ça veut juste dire la lancer. Parce que, de toute façon, des séries, il en démarre toutes les semaines ! Il n’y a plus vraiment de série de l’été, il n’y a que des séries qui se trouvent être lancées en été ; il n’y a plus de saison, comme on dit.
Malgré tout, courageusement, CBC lance en ce mois de juillet une vraie série de l’été avec SkyMed, une fiction d’intervention médicale qui se veut rythmée… et pas trop compliquée. De la vraie proposition estivale comme on n’en fait presque plus ! Et bien-sûr, je dis « presque » parce que devinez ce qu’on a reviewé le mois dernier, sur le même thème, et également lancée en été ? Exactement : sa cousine suédoise, Åreakuten.
Du coup, pour éviter la redite dans cette review, je vais me focaliser sur ce qui est unique chez SkyMed… ça devrait aller assez vite.

Même sur un plan visuel, SkyMed rappelle Åreakuten, de par ses grands espaces boisés. La série canadienne se déroule en effet dans la province du Manitoba ; ce n’est pas exactement la pointe nord du pays, mais les hivers n’en sont pas moins rudes. Fort heureusement, même si la série nous avertit que la saison froide n’est pas une partie de rigolade, au moins pour le moment l’intrigue se déroule en été, lorsque les choses sont encore à peu près fonctionnelles. A peu près, parce que même l’hôpital le plus proche est loin, et que tout n’est accessible qu’en avion, y compris le ravitaillement… Une grande partie des habitantes de la région sont des First Nations (Cree, si j’ai bien compris), et leur accès au confort moderne est donc largement dépendant des services de SkyMed, basés à l’aéroport de Thompson.
C’est dans cet univers que débarque Hayley Roberts, une infirmière qui vient d’être embauchée ; lors des interventions médicales d’urgence, ce sont en effet des infirmières qui administrent les premiers soins plutôt que des ambulancières ; la conduite de l’avion médical étant en effet la mission des pilotes de SkyMed. Hayley arrive de la grande ville, et on apprendra au cours du premier épisode qu’elle a jusque là été une infirmière en gynécologie obstétrique. Inutile de dire qu’elle ne semble pas avoir tout-à-fait sa place à Thompson, au moins sur le papier, mais évidemment le défi du premier épisode est à la fois de nous prouver qu’elle est capable, et nous faire comprendre que si elle est là, c’est qu’elle a une bonne raison. Sur ce second point, la série se contentera cependant d’allusions à un deuil encore frais, sans rentrer dans les détails. Mais sur le premier, cela devient d’autant plus un enjeu dans cet épisode introductif que sa partenaire, l’infirmière Crystal Highway, est native de la région. Elle se montre un peu hostile à Hayley, surtout après avoir assisté à défilé de recrues mal préparées aux réalités du terrain. Elle est, en outre, particulièrement protective de sa communauté, bien qu’étant tiraillée par des désirs de progression professionnelle qui pourraient l’en éloigner.

A un moment, le parcours de Crys m’a vaguement rappelé une intrigue de Hard Rock Medical, mais non. Car même si SkyMed voudrait nous intéresser à ces personnages et quelques autres, en leur donnant des intrigues tout au long de cet épisode d’introduction (Bodie, le pilote qui essaie de réussir les tests pour se faire embaucher à Air Canada ; Wheezer, le doyen de SkyMed qui va avoir un accident pendant ce premier épisode ; Lexi, qui voudrait faire autre chose que du transport de marchandises ; ou encore Chopper, un infirmier avec un énorme complexe d’infériorité qui va tomber sous le charme de Hayley), on n’est pas vraiment là pour les histoires personnelles. Ou disons qu’on n’a pas le temps d’être là, parce que les scènes sont très rapides, et que des urgences médicales se produisent, c’était à prévoir, à intervalles réguliers. Sauf qu’étrangement, SkyMed ne prend pas non plus beaucoup de temps pour ces cas médicaux : on arrive, on jauge la situation, on procède à des gestes médicaux qui sont à peine montrés, on évacue, on confie à l’hôpital de Thompson et on repart. J’ai été surprise de voir que, pour une série qui devrait a priori être médicale (…c’est dans son nom ?!), SkyMed est en réalité très peu intéressée par le détail de la médecine ainsi pratiquée. On nous répète qu’il faut faire avec les moyens du bord, mais hormis un bout de duct tape, personne ne va vraiment macgyveriser dans l’urgence. La série insiste verbalement sur des choses qu’elle ne montre pas vraiment, et je trouve ça déroutant. Et vu que même l’aspect humain est rarement développé (une seule des patientes de cet épisode aura vraiment l’occasion de parler de sa situation au-delà de l’urgence médicale traitée), on se demande un peu ce que, en définitive, SkyMed veut bien proposer.

Sauf qu’évidemment, c’est précisément ça, qu’elle veut proposer : un survol de plein de choses. Les intrigues personnelles sont survolées, les intrigues médicales sont survolées, le Manitoba est survolé ; vous voyez, c’est assorti. C’est en cela que SkyMed assume d’être une série estivale, avec des jolis décors, et des jolies actrices dans les jolis décors. Ce sont des images qui bougent, c’est un peu dépaysant tout en offrant une légère dose d’adrénaline, rien de dérangeant surtout. En plus, comme ça, c’est facilement exportable, et devinez quoi ? La série également démarré en ce même mois de juillet sur Paramount+ ! Là encore, une belle tradition estivale pour la fiction canadienne anglophone…
Entre parenthèses, à cause de la présence de la franchise Yellowstone sur la plateforme et maintenant l’arrivée de SkyMed, P+ vient de devenir l’air de rien le diffuseur étasunien avec le plus grand nombre de séries incluant des personnages First Nations. Je sais, je sais, et j’aurais jamais parié mon argent dessus non plus, mais on en est là.

Est-ce que SkyMed est indispensable ? Non, évidemment que non. Mais l’été, veut-on vraiment des séries indispensables ? Tout le monde ne peut en tout cas pas être Mad Men. Parfois, surtout s’il fait 40°C à l’ombre et qu’on n’a pas l’énergie de réfléchir, SkyMed est exactement la série qu’on cherche.


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Et pour ceux qui manquent cruellement de lecture…

1 commentaire

  1. tiadeets dit :

    C’est bien que tu précises parce que j’ai commencé l’article en pensant qu’il y avait un problème et que tu repostais le même article.

    Vive les séries pas prises de tête ! (Pas comme la série d’espionnage historique chinoise que je regarde en ce moment (The Wind Blows from Longxi) qui est très bien, mais qui est tellement complexe qu’il y a un gars à la fin avant le générique qui rappelle ce qu’il s’est passé dans l’épisode.)

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