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  • Alias Annika

    19 octobre 2023 à 22:17 • Review vers le futur •

    SkyShowtime (une plateforme qui rappelons-le est l’équivalent de Paramount+ dans certains pays nordiques et européens, mais sans la marque Paramount+ parce que pourquoi se simplifier la vie) a lancé en ce mois d’octobre une co-production entre la Finlande et la Suède, et c’est l’occasion pour moi de remarquer que je regarde beaucoup de moins de séries scandinaves depuis quelques temps. Tiens, je me demande à quoi ça tient. A part quelques fictions Viaplay, on dirait que je suis devenue difficile.
    Enfin bon, on adressera ce problème ultérieurement ; en attendant, constatons avec un plaisir non dissimulé que Kodnamn: Annika est pour une fois une série d’espionnage, pas spécialement un genre dans lequel la région s’est distinguée ces dernières années. Plus intéressant encore, l’intrigue démarre dans le monde de l’art ! Voilà qui est original ! Kodnamn: Annika avait, au moins sur le papier, retenu mon attention.

    Tout part d’une toile de Helene Schjerfbeck, une œuvre qui s’apprête à être proposée lors d’enchères très haut de gamme dans une maison de ventes suédoise. Une opération de grande envergure est organisée à cette occasion ; la jeune agente finlandaise Emma Haka, pourtant encore en formation, est recrutée pour en faire partie, et dépêchée en Suède séance tenante.
    Alors qu’elle apprenait encore à maîtriser les nuances complexes du travail d’infiltration, la voilà donc qui en quelques heures doit s’inventer une légende, s’adapter aux méthodes de travail sur le terrain, et surtout, maîtriser sa nervosité. Et ce dernier point, en particulier, n’est pas gagné d’avance, en partie parce que le nom qu’elle s’est trouvé, « Annika Stormere », lui est personnel. Mais ne lui a-t-on pas appris qu’il était plus simple de mentir de façon réaliste lorsqu’on utilise des éléments qui sont vrais ?

    On a un peu de mal à comprendre, au début, certains des enjeux du premier épisode de Kodnamn: Annika. Le côté professionnel est assez évident, bien-sûr : Emma/Annika est appelée à se faire passer pour une experte en art lors de l’opération, afin de vérifier si l’œuvre mise aux enchères est authentique ou s’il s’agit d’un faux. Côté personnel, il n’y a pas non plus des masses de complexité : dans la vie, Emma vit avec son compagnon Sampo, un comédien. Si j’ai bien compris, il ignore qu’elle travaille pour les renseignements et croit qu’elle travaille effectivement dans l’art.
    Où est le problème, me direz-vous ? Eh bien c’est le problème : je n’arrive pas à déterminer où exactement se situe le problème. Est-ce la nervosité palpable d’Emma lorsqu’elle endosse la personnalité d’Annika qui est contagieuse ? Est-ce le fait que la série semble entretenir le flou sur la backstory d’Emma ? Est-ce le fil rouge (…sans jeu de mot) qui est établi au fil de cette opération ? Peut-être un mélange de tout cela ; toujours est-il que j’ai eu plusieurs fois l’impression d’avoir du mal à discerner certaines choses dans cette exposition. Sans parler de la possibilité que les sous-titres ne soient pas parfaitement traduits ; ça s’est vu avec Netflix, et je connais encore mal la qualité moyenne des sous-titres de SkyShowtime dont d’ailleurs c’est la première série originale scandinave.

    Par exemple, j’ai cru comprendre qu’Emma avait été faussaire avant de rejoindre les services finlandais… mais c’est ce que j’ai déduit de certaines allusions, ce n’est pas clairement affirmé dans un sens ou dans l’autre. Un autre moment qui m’a un peu mélangée est mon incapacité à dire précisément dans quelle mesure Sampo connaît la profession d’Emma ; au début je pensais qu’il l’ignorait ; sur la fin de l’épisode j’ai été prise par le doute. Ce ne sont pas en soi des choses qui empêchent de comprendre l’action de cet épisode, mais ce sont plein de nuances qui changent l’interprétation des dynamiques auxquelles on assiste.
    Cette confusion est aggravée par ce que traverse Emma/Annika dans ce premier épisode, c’est-à-dire que cette opération réveille quelque chose d’intime. On ne sait juste pas précisément quoi. Le choix de légende qu’elle fait sur le moment, quand sa supérieure lui intime de choisir « quelque chose qui te ferait réagir si je le criais dans la rue », fait tiquer son supérieur direct ; vers la fin de l’épisode, on apprendra qu’Emma connaissait une Annika Storm qui est aujourd’hui décédée. Qui était-elle pour Emma ? Ne comptez naturellement pas sur le premier épisode pour nous le révéler tout de suite, vous plaisantez j’espère. Plus tard pendant l’opération, Emma/Annika croise une femme suédoise dans la foule de la maison de ventes, qui croit la reconnaître. Approchant la jeune agente avec curiosité, la Suédoise prononce des paroles en apparence sibyllines, avant de finalement s’éloigner, mais qui ont l’effet de réveiller quelque chose de traumatique en Emma, ce qui manque de lui faire foirer l’opération. Ces mots ont-ils été utilisés à dessein pour déclencher quelque chose, s’agit-il d’un conditionnement ancien ? Vous en savez autant que moi.
    Et puis, il y a ces flashs rouges qui défilent devant les yeux d’Emma, ajoutant à sa désorientation pendant toute cette journée. Sa supérieure pensait bien faire en essayant de donner à la jeune femme des outils pour ne pas lâcher sa légende pendant cette opération : « as-tu une ancre ? un rappel visuel, une couleur, une formule ? » ; Emma a choisi le rouge. Mais le rouge semble être évocateur pour elle de choses bien avant cette opération, ce qui ne fait qu’ajouter à la cacophonie dans sa tête pendant une journée si importante.

    Bref, Kodnamn: Annika fait un travail formidable lorsqu’il s’agit de décrire à quel point Emma/Annika s’emmêle ; pas de chance, elle fait aussi du bon boulot pour ne pas rendre les choses claires à ses spectatrices. Et au stade de ce premier épisode, je n’arrive même pas à cerner dans quelle mesure c’est voulu.
    Pendant ce temps, l’intrigue progresse. L’opération réserve quelques surprises, notamment parce qu’Emma n’avait pas été informée de tous les tenants et aboutissants, mais qu’elle réussit à les déduire, et s’appuie sur ses conclusions pour prendre de l’initiative. Un risque que personne ne lui a demander d’endosser, et qui alerte un peu sa hiérarchie, mais qui donne des résultats ! Emma/Annika parvient à s’introduire auprès des deux personnes les plus importantes de la vente aux enchères : le galleriste Rasmus Ståhlgren, que tout le monde lui présente comme très dangereux, et l’acheteuse finale de la toile, une mystérieuse française. Ignorant les avertissements de ses collègues plus expérimentées, Emma/Annika entreprend de se rapprocher de Rasmus… et tout cela est parfaitement compréhensible. On peut sentir à la fois la nervosité de la jeune agente, son désir de bien faire, et son zèle lorsqu’elle pense percevoir une opportunité. Trois facettes qui semblent en contradiction les unes avec les autres, mais qui créent un personnage cohérent tout de même, paradoxalement.
    Trois facettes qui en évoquent trois autres : Emma Haka, Annika Stormare et… Annika Storm. Le vrai mystère sur lequel la série porte, en réalité.

    J’espère qu’au-delà de cet épisode inaugural de Kodnamn: Annika, l’impression de confusion s’estompera. Il est difficile pour moi de le jurer, par contre il m’est également difficile d’affirmer que cette impression de brouillard est nécessairement une mauvaise chose. La série semble appartenir à cette race assez récente de thrillers qui jouent moins de retournements de situation à couper le souffle que de la difficulté à maîtriser les détails complexes de son univers. Honnêtement ? Si mon premier réflexe est souvent la répulsion face à ces séries (ne suis-je pas supposée comprendre ce que je regarde ?! c’est frustrant de ne pas être en mesure de le faire immédiatement), eh bien, ma foi… à la condition que cette désorientation soit volontaire et temporaire, j’apprécie aussi l’ambiguïté que cela apporte, moins spectaculaire que des twists renversants, plus psychologique. Et plus moderne dans ce qu’elle dit à la fois du monde et des identités que l’on y croise, lesquelles nous échappent plus souvent qu’il n’est confortable de se l’avouer.

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  • Show business for ugly people

    15 octobre 2023 à 22:21 • Review vers le futur •

    Connaissez-vous le terme de « candidate poteau » ? Les lectrices québecoises sont disqualifiées, c’est de la triche, le terme est de chez vous.
    Pour ma part, je l’ai appris ce weekend, en regardant le premier épisode de la série La Candidate, lancée fin septembre sur ICI tou.tv, et dont le point de départ est précisément de s’intéresser à une candidate poteau… c’est-à-dire une candidate parachutée, généralement sans espoir de victoire, juste histoire d’avoir un nom sur les bulletins.

    Le PPDQ (ou « Parti Progrès et Démocratie du Québec ») fait le choix, lors d’une élection de députées, de placer plusieurs poteaux dans différentes circonscriptions, dont Alix, une manucure qui est mère célibataire, et n’a aucun intérêt pour la politique. Face à Fortin, le député sortant du PAQ (« Parti Alliance Québec) pour la circonscription de Dufferin, elle n’a aucune chance, de toute façon. Et comme c’est une femme plutôt jeune, son visage est un changement bienvenu au milieu des sept cent douze candidats masculins de plus de 50 ans que présente le PPDQ.
    Bon. Du coup, ya pas de problème, pas vrai ? Pas vrai ?!

    Le premier épisode de La Candidate reprend pas mal de tropes devenus courants en matière de fiction politique lorsqu’il s’agit d’imaginer comment des personnes qui ne sont pas du sérail, et qui n’avaient aucune intention d’y entrer, se retrouvent à évoluer dans ce milieu. Au cours de cette introduction, Alix va enchaîner les déconvenues, découvrant que le staff du PPDQ n’a aucun respect pour elle, que les journalistes sont odieux (…croyez-moi, masculin volontaire), et que les commentaires déplaisants vont bon train à son sujet un peu partout. Cela ne fait que la conforter dans l’idée que la politique, ce n’est vraiment pas pour elle. D’autant que les retombées sur elle sont une chose, mais sur sa fille, Lou, c’est insupportable. Et puis ses projets étaient bien différents, Alix ayant décidé que pour ses 30 ans elle allait ouvrir sa propre onglerie.
    Comment s’est-elle retrouvée dans cette élection, alors ? Eh bien à la base, elle n’avait même pas l’air au courant qu’il y allait y avoir un vote, mais un ami qu’elle n’avait pas vu depuis l’adolescence, Ben, l’a contactée. Ben est séduisant, il parle bien, il est intelligent, il cuisine bien aussi (…oui, elle est allée chez lui). Ben est aussi un membre du PPDQ, et pense qu’elle fera une parfaite candidate poteau. Elle voulait dire non ; après une nuit avec lui (et sur l’insistance de Lou), elle a fini par dire oui.

    Mené tambour battant, l’épisode d’exposition parvient à nous donner une idée de qui est Alix, à quoi ressemble sa vie, qui fait partie de son entourage… tout en commençant à diriger notre regard sur la vie politique du pays, qui continue pendant qu’Alix visite les locaux qu’elle espère louer pour son futur salon. C’est que, dans le microcosme politique, juste avant une élection majeure, un député du PAQ a été pris la main dans le pot de configure dans une situation sordide. C’est le branle-bas de combat dans les autres partis, et en particulier au PPDQ où l’on veut se saisir de cette opportunité pour s’affirmer, et peut-être même se placer comme un parti d’opposition !
    Alors, vous pensez bien que les projets d’onglerie d’Alix, ça n’intéresse personne au PPDQ. Les bénévoles du parti travaillent d’arrache-pied pour gagner autant d’élections que possible. Les têtes de parti bossent jour et nuit pour installer leur parti. Même pas Ben est focalisé sur the big picture. Et c’est essentiellement de ce conflit que vit La Candidate : de la façon dont les intérêts individuels de cette femme qui n’avait rien demandé entrent en collision avec les intérêts politiques. Pas avec les idées politiques (dont cet épisode est totalement dépourvu, ce qui colle bien avec la perspective d’une candidature poteau après tout), notez bien. On parle ici de politique politicienne.

    On s’attend que le bon sens commun de cette manucure humble venue de nulle part vienne tout renverser. Que son expérience de la vraie vie remette les points sur les i. Que l’agacement, la frustration puis la colère qu’elle ressent aient des conséquences. Dans la plupart des séries, ce serait le cas. Mais La Candidate ne mange (au moins pour le moment) de ce pain-là. C’est là que les tropes habituels sur ce type de dynamique semblent trouver leur limite : dans ce premier épisode au moins, puisqu’il ne s’agit pas de prendre des décisions mais juste de calculs politiques, Alix n’accomplit rien. Elle ne renverse pas l’équilibre en sa faveur. Elle n’a aucun vrai pouvoir.
    Derrière l’énergie de ce premier épisode, sa légèreté (relative) par moment, et sa protagoniste centrale un peu naïve voire simple, il y a l’impression perturbante que la politique est un rouleau compresseur inarrêtable. Que ce microcosme phagocyte tous les autres, quoi qu’on fasse. Que quand les gens les plus importants du pays ont décidé qu’il se passait quelque chose d’important pour eux, les citoyennes doivent se plier au jeu (jamais l’inverse).
    On espère pour Alix qu’elle réussira à tirer quelque chose de cette expérience, quand même, sur le long terme. Au moins pour elle-même. Pour le moment, rien n’est moins sûr.

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  • Double jeu

    14 octobre 2023 à 21:58 • Telephage-o-thèque •

    En 1958, la télévision mexicaine diffuse pour la toute première fois une telenovela ; un genre né… ma foi, on pourrait revenir une fois de plus sur la généalogie du genre, mais disons pour résumer que la telenovela est née ailleurs. Voilà donc qu’en juin, Telesistema Mexicano tente prudemment de lancer sa propre série, Senda Prohibida, une histoire imaginée par la scénariste Fernanda Villeli et qui s’apprête à devenir la première d’une longue, longue liste de productions nationales.
    La série s’intéresse à Nora, une femme de condition humble qui, déterminée à faire évoluer son statut social, commence une idylle avec son riche patron, pourtant marié et père. Dans les 50 épisodes qui suivent, la jeune femme tente d’utiliser sa beauté pour parvenir à ses fins, mais connaît finalement un sort tragique, punie pour le « chemin interdit » qu’elle a voulu prendre en tentant de s’enrichir au détriment d’autrui.

    1958, c’est aussi l’année pendant laquelle se déroule l’intrigue de Senda Prohibida, une série dramatique lancée par la plateforme de streaming VIX/VIX+ en juin 2023. L’un des remakes de cette telenovela emblématique, et le plus récent en date, au moins pour le moment. Alors bien entendu, vu qu’il s’agit d’un remake, idéalement il aurait fallu que je parle de la Senda Prohibida des années 50, celle par laquelle tout (mais alors, vraiment tout) a commencé. Ne serait-ce qu’en raison de mon légendaire intérêt pour les comparaisons. Seulement, voilà : ce n’est pas possible. Du coup, il faudra faire sans.

    Ce n’est un secret pour personne, les soaps ne sont pas exactement ma tasse de thé ; et d’un certain côté, je le regrette, parce que je pense qu’il peut s’y passer des choses intéressantes. Ne serait-ce que socialement : beaucoup de « premières fois » symboliques de la télévision se sont déroulées dans des séries quotidiennes. Et cela inclut, donc, les telenovelas. Mais si, sur le papier, je reconnais volontiers ce genre d’avantages, j’ai du mal avec les codes du genre. Vous me direz : pas de danger que ça se produise avec une série de la SVOD : sur ces plateformes, la télévision quotidienne, ça n’existe pas ! Ou plutôt toutes les séries peuvent être quotidiennes. Enfin, c’est comme vous voulez, en fait. Les séries soapesques de ces plateformes sont produites à peu près dans les mêmes conditions que n’importe quelles autres ; on pourrait dire que le soap en tant que format de production en une espèce en voie d’extinction.
    Pourtant on retrouve bien dans cette mouture 2023 de Senda Prohibida plusieurs des standards du genre, quand bien même en surface le format semble changé. Car même si l’adaptation est tournée en single camera et mise en ligne par blocs d’épisodes comme tant de séries modernes… le rythme de ses scènes, le jeu des actrices, et même l’écriture des dialogues, évoquent sans aucune ambiguïté les telenovelas classiques.

    En fait cela fait partie d’une démarche plus large de cette adaptation : elle n’essaie pas vraiment de mettre grand’chose au goût du jour. Pour commencer, le fait qu’elle se déroule en 1958 spécifiquement fait appel à la série originale, de toute évidence. L’intrigue était alors contemporaine non par fétichisation de 1958, mais parce que c’était l’année de production de la série, tout simplement ! Les protagonistes qui sont présentées dans la série sont aussi, volontairement, des archétypes.
    Cela tient presque de l’hommage, pour un peu ! On n’a pas vraiment l’impression de nostalgie ou de clins d’œil meta (cependant, il est possible qu’ils m’aient échappé), mais plutôt d’une déférence, d’un retour aux classiques, quand bien même ils se trouvent, ici, simplifiés, pour ne pas dire caricaturés. Beaucoup de séries adaptées de légendes de la télévision se proposent d’apporter une nouvelle lecture des faits, et/ou un angle novateur, et/ou une rédemption des représentations datées de l’œuvre d’origine. Senda Prohibida 2023 n’a pas l’air intéressée (peut-être éééventuellement pour le personnage tertiaire dont elle suggère qu’il serait gay, mais on le voit si peu que je ne saurais le promettre). Elle assume d’être un peu vieillotte, légèrement ringarde, et d’enfoncer des portes ouvertes. Les protagonistes sont telles qu’elles se présentent, et la plupart d’entre elles auraient été écrites relativement à l’identique en 1958.

    Bon, alors, encore une fois, je n’ai pas vu l’original. Mais je pense que c’est un choix conscient… parce que des choix, cette version en a quand même fait. Elle a par exemple changé la profession de son héroïne ! Nora/Corina n’est plus l’employée d’un homme riche, mais une danseuse dans un nightclub ; cela change, en surface au moins, plusieurs dynamiques, puisqu’elle n’est donc pas l’employée du riche et respectable Federico Rubio.
    Au contraire, elle a d’abord rencontré son fils, le séduisant mais naïf Roberto Rubio. Le jeune homme est fou amoureux de « Corina » (son nom de scène), mais techniquement il n’a pas d’argent, puisque la fortune appartient à son père. Il ronge donc son frein en attendant d’avoir les moyens de proposer monts et merveilles à sa bien-aimée, et dans l’intervalle, vient la voir danser tous les soirs, un bouquet à la main. Apprenant par un ami que son fils s’est bêtement entiché de ce qu’il considère sans l’avoir rencontrée comme l’équivalent d’une fille de joie dangereuse (et il a raison, accidentellement mais il a raison), Federico fait transmettre à « Corina » un chèque, en échange de sa promesse de rompre sa relation avec Roberto… Mais parce que la jeune femme a d’autres ambitions que 10 000 pesos, elle pense que refuser pourrait faire grimper les enchères ! Peu de temps après, alors qu’elle se trouve dans le magasin de fleurs où travaille sa meilleure amie, elle croise par hasard un séduisant hommes d’affaires venu acheter un bouquet pour son épouse, pour célébrer leurs 24 ans de mariage ; cet homme n’est autre que Federico. En se présentant sous son véritable nom de Nora, la jeune femme l’approche avec la ferme intention de le charmer, lui. Après tout, c’est lui qui signe les chèques, autant remonter à la source !
    Bien que changeant les données de départ, la série reste construite sur un malentendu soigneusement entretenu par la protagoniste centrale, qui se présente donc au père et au fils sous deux identités… qui sont chacune fausse à leur façon ! Elle n’est pas « Corina » la danseuse, et elle n’est certainement pas Nora « la fleuriste ». Et surtout, aucune des deux n’a vraiment de sentiments pour ces hommes ; tout le secret est simplement de le leur faire croire…

    Malgré ces changements, pourtant, les intrigues de Senda Prohibida se déroulent exactement selon les plans de la série originale.

    Nora est une arriviste sans état d’âme (la souffrance de la pauvreté n’est pas vraiment considérée comme une motivation intéressante par ce premier épisode, d’ailleurs, qui n’en fait que peu de cas), prête à écraser les hommes qu’elle trouve aisément manipulables, au détriment des femmes dont de toute façon elle ne se préoccupe pas. Elle méprise même un peu sa meilleure amie et colocataire, Clemen (qui pourtant cumule au moins deux emplois différents pour aider à payer leurs factures). Nora est, sans aucun doute possible, une femme fatale cruelle. Tout le monde est un moyen pour elle. La série s’assure que les spectatrices ont bien compris que la rédemption n’était pas d’une grande probabilité : Senda Prohibida, c’est avant tout, comme son titre le souligne, un conte moral…
    Dans ce tableau, chaque figure est donc à sa place. Attention : cela ne veut pas dire que personne n’a d’épaisseur. Il y a même quelques scènes plutôt intéressantes pour le personnage de Federico ainsi que pour son épouse, l’élégante Martha (aux faux airs d’Eva Perón). Le premier épisode de Senda Prohibida met un soin appliqué, qui trahit son parti pris. à expliquer où ces deux personnes en sont, dans leur mariage. Et, par extension, dans leur relation à la séduction et à la sexualité. Alors que Federico et Martha semblent avoir un mariage parfait, chacune se découvre en effet insatisfaite. Martha comprend, en discutant avec son amie Clara (une conversation digne d’un remake de Sex & the City dans les années 50), que son absence de vie sexuelle n’est en fait pas du tout la norme à leurs âges. Federico, qui aimerait penser qu’il est un homme séduisant, réalise que cet avis n’est plus partagé par les femmes autres que la sienne. Ce sentiment de frustration similaire, mais séparée, qui tenaille les deux membres du même couple, est bien décrit ; il est même beaucoup plus l’événement déclencheur que l’intervention de Nora ! C’est plutôt finement joué.
    Et c’est, honnêtement, quelque chose de typique des soaps ; en particulier des telenovelas qui ont pour tradition, avec leur durée limitée et leur horizon bien défini, de savoir relever ce genre de détail intime tout en faisant progresser l’intrigue. Ou les intrigues, ici, puisque le premier épisode se fait un devoir d’introduire quelques vagues enjeux secondaires. En tout cas, c’est cette capacité à mélanger les tons et les densités qui fait permet aux spectatrices d’y voir de l’authenticité, malgré les protagonistes unidimensionnelles et les enjeux tirés par les cheveux. La crise de la cinquantaine de Federico, la crainte de Martha de n’avoir pas une vie aussi parfaite qu’elle le pensait, résonnent… même quand les chances de rencontrer une manipulatrice comme Nora/Corina dans la vraie vie restent (heureusement) minimes.

    Ces intrigues progressent d’autant plus que cette nouvelle Senda Prohibida a des saisons courtes… oui, j’ai dit « des saisons », pour une série qui a démarré cette année. VIX a déjà mis en ligne 3 saisons entre juin et septembre, pour un total de 21 épisodes ; cela donne des saisons brèves, comme c’est désormais la règle dans le streaming, mais ça permet de jouer un peu les prolongations quand même (et si je saisis bien l’essence des résumés, de structurer des arcs, aussi).
    On sent d’ailleurs bien que le format est un peu bâtard au fait qu’en septembre, VIX a sorti les saisons 2 ET 3 le même jour !
    La brièveté de Senda Prohibida 2023 est d’ailleurs, indirectement, un énième hommage à la série de 1958, qui ne comptait « que » 50 épisodes, là où le public moderne tient plutôt une durée de 120 épisodes pour acquise. Faire du neuf avec du vieux a rarement été aussi bien démontré qu’ici.

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  • La misère n’est mère de personne

    11 octobre 2023 à 21:27 • Telephage-o-thèque •

    En 1991, mes ex-parents m’ont emmenée à Mogador pour voir Les Misérables. La comédie musicale faisait son retour sur la scène parisienne, et il avait été entendu que comme j’aimais le théâtre et les comédies musicales (toutes deux considérées dans ma famille comme des formes « nobles » de divertissement… surtout quand elles étaient l’adaptation d’un œuvre littéraire comme ici !), on ferait l’effort d’acheter des places pour le spectacle et de sortir toutes les trois, ce qui n’arrivait vraiment, vraiment pas souvent. Nous voilà donc sur nos fauteuils et je suis en-chan-tée ; comme souvent, mes meilleurs souvenirs de moments passés avec mes parents sont ceux dans lesquelles elles jouent juste le rôle de facilitatrices, mais où j’interagis peu avec elles.
    Peu, et non « pas du tout ». Car est venu le moment de la mort de Fantine, lorsque Valjean lui promet pour qu’elle parte l’esprit tranquille qu’il prendra soin de Cosette dorénavant ; je devais froncer les sourcils ou quelque chose, parce que mon ex-père se penche vers mon épaule et me murmure : « Il va s’occuper de Cosette parce que c’est son vrai père ». Je me remémore avec une étrange clarté ma sensation d’illumination : ah, ok, je suppose que la scène a du sens comme ça.
    …Sauf que Valjean n’est pas le « vrai » père de Cosette, bien-sûr. Ni dans la comédie musicale (qui ne fait qu’une allusion brève et vague au personnage), ni dans le roman d’origine (où le père biologique porte le nom de Félix Tholomyès, si vous êtes curieuse). Mon père n’ayant jamais lu le roman, ni, évidemment, vu la comédie musicale avant de venir à mes côtés, et ayant, dans l’ensemble, une culture extrêmement limitée (d’où l’obsession pour la consommation de médias « noble »), il n’avait tout simplement pas plus la même culture générale que la gamine de 9 ans assise à ses côtés. Alors il avait interprété quelque chose qui faisait sens pour lui, et qui permettait de continuer de suivre l’histoire sans obstacle de compréhension. C’est juste que ça le faisait complètement passer à côté de ce qui se jouait, dramatiquement, pour Valjean le forçat dans cette scène… mais ça, je ne l’ai réalisé que des années plus tard.

    Je repense souvent à cet épisode, pour diverses raisons ; l’une d’entre elles, c’est que très souvent, regarder des séries de la planète entière, ça a l’air formidable sur le papier, mais ça oblige parfois à des interprétations qui peuvent être en fait contreproductives. La culture générale, comme on dit, n’est jamais totale ; il en manque toujours des bouts, en particulier lorsqu’on a affaire à une série provenant d’un pays dont l’accès aux codes culturels, historiques, religieux et/ou politiques sont peu naturels.
    Cela s’applique particulièrement à la review du jour, qui porte sur le premier épisode de la série pakistanaise Jhok Sarkar. Si j’ai un peu tâté de la télévision pakistanaise au fil des années (en partie grâce à la présence de quelques chaînes sur Youtube), il reste quand même très difficile d’avoir le même aisance avec elle que, disons, la fiction étasunienne, pour caricaturer.
    Et ça peut freiner la compréhension de ce que l’on regarde. Alors parlons-en.

    La série a pour sujet un jeune officier de police, qui est affecté à diriger un commissariat de district à Jhok Siyal, un village du désert du Punjab pakistanais. Jusque là, c’était un propriétaire terrien du nom de Peeral qui y faisait la loi. Et du coup, la loi, bah, yen avait pas ! Surtout avec des flics locaux complètement corrompus et serviles… Peeral est donc un petit despote local, dont les hommes de main sont armés jusqu’aux dents et guidés par son fils, Meerab, qui a tous les attributs de l’odieux personnage. Les personnes les plus vulnérables de la région sont considérées par lui comme, pour reprendre leurs propres mots, des « esclaves », et c’est ce qui conduit dans ce premier épisode une jeune femme du nom de Noori et son petit ami secret Shaukat à s’échapper en pleine nuit.
    Lorsque Peeral apprend cela, il organise une littérale chasse à l’homme et à la femme, mitraillettes à l’appui ; je vous rassure, il précise quand même à ses subordonnés qu’il les veut vivantes (…parce qu’il y a besoin de le préciser ?!). Une battue lancée moins pour laver l’honneur « perdu » du père de Noori, qui est parfaitement insignifiant, que pour récupérer deux jeunes personnes dont Peeral considère qu’elles lui appartiennent, mais bon, ça tombe bien que le code de l’honneur traditionnel incite aussi à la colère parmi les clampins du village. Il promet même une récompense à qui les ramènera !

    En tant que spectatrice européenne, rien ne m’avait vraiment préparée à la première moitié de l’épisode inaugural de Jhok Sarkar, dans lequel absolument tout le monde (à part la meilleure amie de Noori… dont évidemment la parole n’a aucun poids parce que c’est une jeune femme pauvre) est d’accord pour prendre les armes. Et agit dans la perspective de punir le couple quand on aura mis la main dessus.
    Dans ce premier épisode, l’officier Arsalan n’a pas encore été affecté à Jhok Siyal. Il vient d’achever sa formation dans la police en tant qu’ASP (pour « Additional Superintendent of Police », un grade relativement bas dans l’échelle de la police pakistanaise semble-t-il), certes en tête de sa promotion, mais il est tout frais quand même. Ses scènes dans le premier épisode se focalisent, chose intéressante, non pas sur ses qualifications, ses états de service naissants, ou quoi que ce soit de professionnel, mais sur sa vie personnelle. Il n’y a, en fait, pas vraiment d’intrigue pour lui dans cet épisode d’exposition.
    On apprend seulement, au fil des scènes, qu’il est l’unique fils d’une famille de trois enfants dont le père a pris sa retraite, et que tout la maisonnée est très fière qu’Arsalan soit devenu flic surtout avec d’aussi bons résultats. Vers la fin de l’épisode, il s’avère également qu’Arsalan a une petite amie, et celle-ci l’invite à prochainement rencontrer son riche père, ce qui semble suggérer un mariage prochain. La vie d’Arsalan a l’air plutôt sympa en ce moment… et c’est par ce biais, et exclusivement ce biais, qu’on découvre le protagoniste. Il n’a strictement aucune scène hors de ce faisceau.
    Toutefois, à travers ses interactions avec les femmes de sa famille, dont ses deux jeunes sœurs qu’il asticote mais couvre de cadeaux, ou les plaisanteries échangées avec sa petite amie, on découvre aussi, indirectement, un attitude très différente vis-à-vis des femmes de celle à laquelle on assiste en parallèle à Jhok Siyal. En gros, ce qu’implicitement la série accomplit ici pour son personnage central, c’est une introduction à ses valeurs.

    Alors, voilà le problème : devant une série reposant moins sur des codes narratifs classiques, et plus sur des constructions morales, le voyage téléphagique est plus difficile que la moyenne.
    On pourrait très bien se dire, en découvrant Jhok Sarkar, qu’on est devant une intrigue qui repose pour tout ou partie sur la question des crimes d’honneur. Que l’ASP Arsalan va venir mettre dans l’ordre dans la vie de Noori et Shaukat, et qu’à terme, l’enjeu, il est là : dans le fait que l’honneur de cette femme ne devrait pas être remis en question parce qu’elle a choisi d’épouser l’homme qu’elle aime. Il serait assez raisonnable d’interpréter ça comme quelque chose qui ferait sens pour nous, et qui permettrait de continuer de suivre l’histoire sans obstacle de compréhension.
    Sauf que ce n’est pas le cas ici. Ce qui manque, c’est du contexte. Or, le contexte, ça ne se tire pas d’un chapeau. Que faire ?

    Je ne suis vraiment, vraiment pas la personne la mieux placée pour parler d’usages ou de culture pakistanaises, de tout évidence. Par contre, il y a quelque chose dont je sais parler : l’histoire télévisuelle.
    En 1973, la télévision publique pakistanaise lance une série basée sur un roman de l’auteur Shabbir Shah. A l’époque, PTV est encore jeune (ses premières émissions datent de 1964), et transmet en noir et blanc ; mais cela n’empêche pas cette série de devenir l’une des plus emblématiques de l’histoire de la télévision pakistanaise. Son sujet ? Elle se déroule dans le Punjab rural, au cœur d’un petit village pauvre, et explore les complexités découlant du féodalisme moderne au Pakistan. Comme l’œuvre littéraire qui l’avait précédée, la série s’intitule Jhok Siyal.
    Une fois qu’on a cette information (et qu’on se renseigne un peu sur la portée de cette problématique dans le Pakistan moderne), on perçoit mieux certaines choses de cet épisode introductif de Jhok Sarkar. Et, de toute évidence, on comprend aussi la référence dans le nom du village !

    Ainsi, le père de Noori doit d’immenses dettes à Peeral ; ce sont en fait ces ramifications qui ont de l’importance. Si Noori s’est enfuie, c’est parce qu’il a refusé sa main à Shaukat, trop pauvre pour rembourser ces fameuses dettes ; il a besoin de… bon, la série ne parle pas de « vente » mais le sous-texte est là. Dans les faits, il a besoin que Noori épouse quelqu’un qui puisse éponger ses dettes. C’est bien pour ça qu’il se présente, contrit, à Peeral, pour signaler que sa fille s’est enfuie : il vient de perdre de l’argent qui n’était même pas à lui.
    Peeral a immédiatement perçu, de son côté, que l’évasion de Noori est d’une part, une menace à son autorité, et plus directement d’autre part, à ses perspectives d’être remboursé. Il n’en a rien à foutre, du père, et quant à l’honneur de celui-ci, bon, vu comment il lui parle… De ce point de vue, traiter la jeune femme comme une possession n’est pas tellement déconnant : elle constitue, à bien des égards, une possession directe comme indirecte pour lui.
    Il y a une scène pendant laquelle, brièvement, Noori essaye d’expliquer cela à Shaukat. A quel point son sort est lié aux dettes de son père, et ce, depuis sa naissance : un homme qui n’a pas d’argent… a des filles à marier. Elle appartient à son père, et donc à la personne à laquelle son père doit de l’argent.
    Aussi Jhok Sarkar n’est-elle pas tant une série sur le droit d’une femme à choisir son époux, que le droit d’une personne pauvre à exister hors du bon vouloir des personnes riches. C’est… eh bien, une série sur le féodalisme moderne au Pakistan.

    Quand on regarde l’épisode à travers ce prisme, on comprend que cette histoire d’honneur est plus une fable qu’on raconte aux villageois pour leur faire prendre les armes, qu’une véritable valeur à laquelle tout le monde croit. Qu’il y a une influence culturelle qui se joue, en plus d’une influence financière (la fameuse récompense en monnaie sonnante et trébuchante promise à quiconque met la main sur les deux amoureuses), et qu’en fait la première découle de la première. Qu’il y a toutes sortes de mécanismes par lesquels la toute-puissance de Peeral ne saurait être contestée, et quand bien même on le voudrait qu’on ne le pourrait pas ! Certainement pas avec une police qui répond aux ordres du suzerain local. Par conséquent, on perçoit mieux le rôle plus vaste que s’apprête à jouer ASP Arsalan dans cette situation.
    Sûrement qu’on ne perçoit, même avec ces éléments de contexte, pas toutes les nuances. Mais suffisamment pour sortir des stéréotypes et interprétations de surface, en tout cas. On ne répare pas les fossés culturels sur la base de seulement deux séries… mais enfin, ça permet au moins de ne pas passer à côté de ce qui se joue dramatiquement. Pour aujourd’hui, c’est déjà bien.

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  • Si j’avais un marteau

    10 octobre 2023 à 17:53 • Dorama Chick •

    Après Yuru Camp△, qui accompagne plusieurs adolescentes dans la découverte des joies du camping, apprêtez-vous à vous trouver un nouveau hobby : le bricolage ! C’est, comme son nom l’indique plus que clairement, l’objet de DIY!!, une série à la formule très similaire (et qui trouve également ses origines dans un format dessiné : une série animée et un manga ont précédé le dorama). Qu’importe ! Ce n’est vraiment pas le genre de fiction à laquelle on vient en quête d’originalité : Yuru Camp△ comme DIY!! brillent plutôt par leur aspect feelgood, et leur chronique innocente de joies simples.
    Honnêtement, si cela devait devenir une nouvelle tendance à la télévision japonaise, vous ne me verriez pas me plaindre.

    L’histoire de la série est extrêmement simple : Miku et Serufu sont voisines et amies d’enfance, mais leurs chemins se séparent lorsqu’elles sont acceptées dans deux lycées différents.
    Aparté : il y a toutes sortes de jeux de mots dans les noms des protagonistes de la série, assez anecdotiques dans l’ensemble ; mais si ça vous intéresse, le premier épisode en utilise un explicitement dans ses dialogues, qui porte sur Serufu.

    Miku, qui est studieuse et organisée, a été admise au sein de la prestigieuse école Yuyu Girls’ Vocational High School (ou « YuVoc »), dont le cursus en sciences appliquées et le programme exigeant semblent la mettre en bonne voie pour devenir ingénieure en impression 3D. De son côté, Serufu est… disons qu’elle est brave. Elle passe le plus clair de son temps la tête dans les nuages, est très étourdie, et n’a pas vraiment de but dans la vie. Ah, et elle est pathologiquement maladroite, aussi (elle est comme ça depuis l’enfance, et s’est infligé toutes sortes de blessures à cause de ce trait de caractère au fil des années). Cela étant, elle est d’une jovialité à toute épreuve ; ça ne la mènera pas bien loin dans les études, mais enfin, c’est une qualité quand même, je suppose. Et de fait, Serufu a un peu foiré son examen d’entrée, et s’est retrouvée à la Gatagata Girls’ High School, un lycée un peu moins poussé.
    Les deux établissements, il faut noter, appartiennent au même campus, et leurs bâtiments se font face (ou plutôt, YuVoc fait littéralement de l’ombre à Gatagata). Mais rien à faire, pour Miku, c’est comme si Serufu avait disparu de la surface de la Terre du jour au lendemain… même si, en parallèle, son amie lui manque. Alors qu’elle continue de la croiser tous les jours, vu qu’elles sont voisines et vont dans des écoles elles aussi voisines ! Bref, la situation est étrange.
    Serufu, toute tête en l’air soit-elle, a quand même vaguement remarqué que quelque chose clochait, et est un peu triste de ne plus parler aussi souvent à Miku qu’auparavant.

    Fort heureusement, il y a plein de nouvelles expériences à faire.
    En particulier, un jour qu’elle rêvasse sur son vélo et fait une chute sur le chemin de l’école, Serufu fait la connaissance impromptue de Rei, une élève plus âgée qui lui répare son guidon en deux temps, trois mouvements. Serufu, qui certes s’émerveille d’un rien, est ébahie que cette lycéenne non seulement trimbale des outils avec elle, mais en plus, qu’elle sache s’en servir. Elle finit par trouver sa trace dans une cabane à outils à l’arrière du lycée, où elle surprend Rei en pleine création d’une étagère. Une étagère ! Alors que ça se trouve dans le commerce ! Serufu, à qui certes il n’en faut pas beaucoup, est épatée. Mais Rei n’est pas du genre à se satisfaire d’expliquer ce qu’elle fait : elle propose à Serufu de manier elle-même la scie électrique et de l’aider dans son projet ! Et Serufu, qui il faut l’admettre est impressionnable, est ravie de cette perspective.
    …Dans une série réaliste, c’est le moment où Serufu se coupe tous les doigts de la main et commence à utiliser le text-to-speech pour sa prise de notes en cours. Mais non. Rappelez-vous : série feelgood. Elle a donc, quand même, la présence d’esprit d’être intimidée par l’engin, et à la place, se contente de visser une vis dans un trou. Et ne se fait presque pas mal ! Une vocation est née. Le lendemain, désireuse de poursuivre l’expérience, elle rejoint le club de bricolage de Rei. Son projet ? Être capable de créer un banc, l’installer entre sa maison et celle de Miku, et avoir un lieu où retrouver (dans tous les sens du terme) sa meilleure amie.
    Les enjeux de DIY!! sont de toute évidence humbles, mais ils ont le mérite d’exister. Et de soulever quelque chose d’intéressant.

    Le bricolage n’est pas exactement populaire au Japon ; les loisirs créatifs sont, comparativement, des activités plus courantes pour qui s’intéresse aux travaux manuels. De leur côté, les « home centers » (l’équivalent nippon des magasins de bricolage) ont tendance à vendre majoritairement des plantes, des objets de décoration, des produits pour animaux, et du matériel de camping, contre assez peu d’outils et de matières premières (qui même si elles existent, forment une minorité du chiffre d’affaires). Le bricolage n’a pas non plus été normalisé dans la popculture comme une occupation courante, et plus j’y réfléchis plus les personnages de séries japonaises que j’ai vus se servir d’outils étaient des professionnels plutôt que des amateurs, ou alors les utilisaient par nécessité plutôt que goût personnel. Avec aucune nuance entre les deux.
    …Mais il y a un avantage à cela : cette absence signifie que les représentations genrées sur le bricolage sont également absentes de la popculture. « Papa bricole », ce n’est pas vraiment un truc qui existe à la télévision japonaise. Parce que personne ne bricole, certes… mais ça compte quand même !
    De ce fait, avec DIY!!, voilà que ce loisir manuel, pas spécialement élégant ni mignon qui plus est, et donc comme je l’ai dit assez peu populaire, est promu ici comme une activité fascinante… à des jeunes filles. Il n’y a en effet pas un seul personnage masculin au générique de DIY!!, puisque même la prof qui encadre le club de bricolage est une femme ; à la réflexion, je crois que je n’ai même pas vu de figurant masculin de tout cet épisode. Cette magnifique non-mixité est incroyable, parce que du coup la transmission du savoir se fait exclusivement de personnage féminin à personnage féminin. En l’occurrence, c’est surtout Rei (avec son aura de grande sœur… mais aussi, et je sais que vous comprenez ce que je dis ici, son énergie de Sailor Uranus), qui détient les clés du savoir, et sert d’instructrice à Serufu. Cela dit, je suis à peu près certaine que dans les épisodes suivants, d’autres protagonistes vont sûrement se montrer capables.
    Car, ah oui, c’est ça le prétexte narratif à un fil rouge narratif entre les épisodes : pour que le club subsiste, il doit avoir au moins 5 membres, donc Rei et Serufu vont se mettre en tête de recruter d’autres jeunes filles pour bricoler à leurs côtés. Et au vu du générique, je ne doute pas que ces jeunes filles existent, et qu’elles aient des compétences et profils complémentaires.

    Avec Yuru Camp△ et dans une certaine mesure Ryousangata Riko, on est assiste donc dans DIY!! à un embryon de tendance encourageant des protagonistes féminines à se passionner pour des activités loisirs manuels. Et donc à des séries éloignées des clichés de ce que normalement les jeunes filles et femmes sont supposées adorer ; dans une industrie audiovisuelle où les rôles genrés restent extrêmement codifiés, c’est vraiment appréciable. En fait, n’ayant pas ou peu de représentations de ces loisirs dans la popculture, ces séries sont quasiment en train de créer un engouement pour ces loisirs exclusivement féminin !
    Bon, alors, il faut raison garder. Je ne sais pas si ce phénomène va dépasser le succès de cette poignée de séries somme toute assez confidentielles (ce sont des séries diffusées après minuit, comme les séries high concept). Mais peu importe, tout est bon à prendre. Jusqu’à présent, dans les séries nippones, les protagonistes féminines n’ayant pas les attributs de la féminité parfaite avaient tendance à être codées comme étant autistes, des girlbosses ou des garçons manqués, et quasiment rien d’autre, donc un peu de variété fait du bien dans le panorama.

    Et puis vous me connaissez : j’aime lorsque la télévision japonaise nous sert des séries calmes, avec peu voire pas d’enjeux.
    C’est quelque chose que peu de télévisions du monde savent faire, et plus encore avec sincérité. Il y a quelque chose de révolutionnaire à mes yeux dans les choix que font ces fictions ; ces séries-à-hobby (on pourrait aussi inclure dans cette dénomination des titres comme Meikenchiku de Chushoku wo ou Tetsu Oota Michiko, 2 Man Kilo ; les tags sont là si vous ne visualisez pas trop à quel dorama je fais référence) ainsi que le genre entier de la « série d’appétit« , sont des fictions basées sur le plaisir ! Celui à la fois ressenti par leurs héroïnes, et celui transmis aux spectatrices. Décrire la satisfaction du montage d’un objet, d’une soirée au coin du feu, d’une belle visite architecturale, ou d’un bon petit plat, ce n’est pas juste une parenthèse escapiste : c’est une proposition qui va à l’encontre des séries sombres et/ou traumatiques et/ou hors de prix, qui sont souvent celles qu’on considère, ailleurs dans le monde, comme de facto plus importantes. C’est un courant sériel incitant à la joie… c’est pas important, la joie, peut-être ? C’est pas une denrée rare, la joie ? Et une joie constructive, qui plus est : selon les occupations montrées, regarder une de ces séries peut inciter à tenter des expériences similaires, c’est-à-dire simples mais positives. Ou, faute de temps/moyens/accès, au moins garantir une petite demi-heure de satisfaction, auquel cas, voilà délivrée une demi-heure de dopamine sans aucun inconvénient. Pour ma part, c’est le genre de bonheur par proxy auquel j’accroche.
    Si ça ne tenait qu’à moi, on en aurait même beaucoup plus, des séries comme celles-là.

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  • Bien mal acquis

    9 octobre 2023 à 20:18 • Telephage-o-thèque •

    « Hm c’est quand même bizarre, je sais que je regarde cette série pour la première fois, mais… tout est familier. Enfin non, pas tout, c’est surtout l’histoire qui l’est. La réalisation et la distribution, pas vraiment. De quoi ça peut bien venir ? »

    Bon, ça m’a pris une petite heure pour trouver la réponse, mais votre temps est plus précieux que le mien, et je vais vous délivrer sans plus attendre la solution : en regardant la série kényane Faithless, en fait je regardais un remake de la série sud-africaine AboMama ! Enfin… je n’ai trouvé aucune source pour le confirmer (certes je n’attends pas de Deadline que la publication perçoive ce genre de nuances, l’expertise internationale y est limitée ; mais dans la presse africaine en tout cas, je n’ai rien vu). Cependant, vous me connaissez, je garde trace de tout ce que je regarde dans mes archives, rendant les comparaisons possibles. Et là, ça ne fait aucun doute.
    Qui plus est, ce sont toutes les deux des séries originales de Showmax. Elles sont produites pour deux pays différents, mais ce ne serait pas la première fois que Showmax déclinerait ses propres séries pour plusieurs territoires ; commercialement, ça a du sens pour une plateforme panafricaine. Elle a déjà fait cela, par exemple, avec les romcoms Unmarried (Afrique du Sud), Unmarried (Nigeria) et Single Kiasi (Kenya).

    Or, j’adore ça, les remakes internationaux ! C’est un sujet passionnant, comme en attestent les dizaines d’articles que j’ai écrits sur leurs vertus. Pensez au comparatif de Gran Hotel avec ses nombreuses versions aux quatre coins du monde, par exemple ; à mon plaidoyer au moment de parler du premier épisode de Temple ; aux reviews comparatives des adaptations indienne, étasunienne et française de Kvodo (qui d’ailleurs pourrait être une expérience à renouveler, puisque d’autres remakes ont émergé depuis). Or justement, je n’ai quasiment jamais l’opportunité de faire ce travail de comparaison sur des remakes produits en Afrique !
    Alors, si vous m’autorisez l’effet de redite (puisque j’ai déjà brièvement reviewé AboMama dans mon article-test de Showmax l’an dernier, que je recommande d’autant plus chaudement vu la conclusion de la présente review d’ailleurs), prenons le temps de nous arrêter sur ce que cette adaptation fait.

    Car une adaptation, vous le savez à force de me lire sur le sujet, ce n’est jamais une copie : ce sont toujours des choix.

    Lancée en juin dernier, Faithless met en scène quatre femmes respectables qui tiennent le bureau du SACCO de leur paroisse. De ce que j’ai compris, un SACCO (pour Savings And Credit Cooperative Organisation) est une pratique assez courante dans des communautés (généralement religieuses, mais apparemment pas toujours) de certains pays d’Afrique. Ainsi, outre le Kenya, j’en ai trouvé trace au Rwanda ou en Uganda. Dans le cas présent, ces bonnes dames du SACCO gèrent bénévolement une cagnotte qui sert de banque communautaire, capable d’offrir des prêts à des taux minimes (ou parfois sans intérêt du tout), de procéder à des achats groupés, ou d’apporter de l’aide d’urgence à certains foyers de la paroisse. Cet argent est collecté à la fois grâce à la participation financière des ouailles, et à des initiatives de charité. Le SACCO n’a pas pour mission de financer l’église, et tourne sur un budget différent de celui des dons.
    Esther, une serveuse dans un restaurant qui élève aussi la fille de son frère Benja ; Ruth, l’épouse du pasteur qui a pris en charge la responsabilité du SACCO ; Deborah, qui chante également dans la chorale de l’église ; et Hope, sont donc nos bienveillantes protagonistes. Or, les temps sont durs : la caisse du SACCO est à moitié vide. En fait, ça commence à être très inquiétant.

    Dés cette introduction de Faithless, vous aurez peut-être remarqué quelque chose : bien qu’ayant quatre héroïnes, la série en présente certaines mieux que d’autres. C’est la première d’une liste de différences avec AboMama, qui prenait grand soin d’introduire de façon relativement équitable ses protagonistes. A défaut d’avoir une stricte égalité (surtout vu le rôle de l’une d’entre elles dans l’événement déclencheur), il y avait en tout cas une attention portée à la réalité de chacune. Ici, ce n’est pas le cas ; il y a plusieurs foyers dans lesquels ce premier épisode ne pénètre tout simplement pas.
    Cela rejoint une autre différence : la plupart des protagonistes principales de Faithless sont préoccupées uniquement par le SACCO (qui n’existait pas vraiment dans la version sud-africaine). Il n’y a qu’Esther qui montre des signes d’inquiétude pour sa situation personnelle. Elle gagne en effet peu d’argent dans son boulot de serveuse, et n’a pas osé demander à son patron une augmentation, suite au renvoi récent de plusieurs autres serveuses : elle craint trop de connaître le même sort. Or, elle a bien besoin de son emploi : son foyer a trois bouches à nourrir, et elle est la seule à travailler. Elle héberge en effet son frère Benja, dont on comprend à demi-mots qu’il est considéré comme un bon à rien, ainsi que la fille de celui-ci, dont Esther assume tous les frais.
    Cela opère un changement de dynamique par rapport à AboMama, où les situations individuelles étaient plus complexes, et mettaient en avant des problématiques financières plus variées. D’autant que les quatre héroïnes formaient plus un groupe de prière qu’un bureau de bénévoles, et que leur dilemme financier ne concernait donc pas directement les activités religieuses.

    A la place de ces présentations détaillées des quatre femmes, Faithless opte de passer du temps avec Benja, ce que ne faisait quasiment pas la série d’origine. On le suit beaucoup plus, et ce dés la scène introductive de la série qui le montre, lui et deux complices, conduire un braquage… d’une ambulance. Sauf que cette ambulance transporte un sac dont on comprendra plus tard qu’il contient une petite fortune appartenant à un homme d’affaires douteux. L’un des complices est d’ailleurs le fils de cet homme d’affaires.
    L’épisode introductif passe plusieurs moments en compagnie de Benja, non seulement pendant le braquage ou dans ses retombées (le partage de butin avec les complices, la façon dont Benja envisage de dépenser l’argent, l’inquiétude d’être identifié et retrouvé par l’homme d’affaires véreux, etc.), mais aussi dans son quotidien avec sa fille, pour laquelle il apparaît comme un bon père, toutes proportions gardées (puisqu’évidemment il ne subvient pas à ses besoins matériels). C’est vraiment intéressant que Faithless passe autant de temps à humaniser ce personnage, plutôt qu’aux bénévoles du SACCO… quant on sait quel sort elle lui réserve avant la fin de l’épisode.

    Toutefois, la plus grande différence que marque Faithless par rapport à AboMama réside dans ce qu’elle révèle de son intrigue. Dans son épisode introductif, la série sud-africaine montrait efficacement le trajet de l’argent volé, puis abordait avec les quatre femmes la question épineuse de décider ce qu’elles en feraient ; les enjeux étaient posés avant la fin du premier épisode, dramatiquement et moralement. Et c’est une question d’autant plus gênante que c’est de l’argent volé : outre le danger qu’il représente, leur foi les éloigne naturellement de ce qui a été acquis de façon immorale… mais que, bon, l’argent, même illégalement obtenu, eh bah on va pas se mentir c’est important pour beaucoup de choses dans la vie. Ça reste de l’argent, quoi !
    La série kényane, quant à elle, achève son premier épisode sans que qui que ce soit ne connaisse l’existence du fameux sac plein de billets, si ce n’est Benja… qui a été retrouvé, capturé et exécuté par l’homme d’affaires. Le dilemme moral ne se pose donc pas du tout pour le moment, et dans l’éventualité (très probable) où Esther trouve l’argent dans l’épisode suivant, son origine malhonnête sera bien plus floue. Cela signifie aussi qu’il y a un plus grand suspense dans l’épisode de Faithless, qui ne permet pas de nécessairement comprendre où l’intrigue de la série se dirige, surtout si l’on n’a pas d’acquis sur AboMama contre lequel adosser son analyse des événements.

    On pourrait supputer que plusieurs de ces changements sont dus à une question de timing.
    Très bien, parlons-en : le format a-t-il changé entre la série sud-africaine originale et son adaptation kényane ? Oui… mais pas comme on le croirait : Faithless a environ une dizaine de minutes de plus pour son premier épisode que n’en avait AboMama. Ce n’est donc pas par souci d’efficacité qu’on assiste à tous ces changements, mais bien par choix. Celui de raconter la même histoire, mais autrement.
    Voilà qui explique sûrement pourquoi, au début de mon visionnage, je n’ai pas tout de suite saisi qu’il s’agissait d’une (probable, vu que je n’en ai trouvé la confirmation nulle part) adaptation. Bien que l’histoire et les enjeux soient strictement les mêmes, tout cela est raconté de façon unique. On n’a pas l’impression d’assister deux fois à la même série… parce que, eh bien, ce ne sont pas du tout les mêmes séries ! Elles marquent des pauses sur des choses très différentes, sont intéressées par des thèmes différents, et ont aussi relégué aux épisodes suivants des projets différents. Par-dessus le marché, j’ai le sentiment que Faithless a joui d’un budget plus confortable, ce qui ne fait qu’ajouter à l’impression d’assister à un projet séparé de l’original.

    Je me tue à vous le dire : les remakes internationaux sont formidables. Et ils sont, plus souvent qu’on croit, le nid d’une forme de créativité insoupçonnée, comme lorsqu’ici ils permettent à des équipes de production de faire des choses très variées à partir d’un même cahier des charges initial. Les adaptations ont souvent mauvaise presse, surtout une fois que l’original a été vu et est tenu pour parole divine. Ce qui sépare Faithless d’AboMama prouve cependant qu’il y a des tonnes de choses possibles à partir des mêmes ingrédients. Mon amour fasciné pour les remakes internationaux se nourrit précisément de ce genre d’expérience !

    …Sur un sujet attenant, j’en profite pour signaler que, si vous voulez regarder des séries africaines gratuitement, non seulement la période d’essai de Showmax dure confortablement deux semaines… mais il va falloir en profiter rapidement. En effet, au 1er novembre, les abonnements à Showmax depuis l’Europe deviendront impossibles car la plateforme se retire de notre région au 1er décembre. C’est donc votre dernière chance pour faire des découvertes.

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  • Si l’herbe est plus verte

    8 octobre 2023 à 20:19 • Review vers le futur •

    On sait toutes que je ne suis pas la première lorsqu’il s’agit de regarder des séries adolescentes ; ce n’était déjà pas mon truc quand j’étais dans la cible… Cependant, d’un autre côté, j’ai aussi du mal à résister aux expérimentations.
    Après bien des hésitations (ahem), me voilà donc devant le premier épisode de Déter, une série lycéenne lancée par France.tv Slash cette semaine, curieuse de découvrir comment cette nouvelle fiction va relever les défis qui sont les siens.

    Déter se déroule dans un lycée agricole (fictif), un internat où l’on suit plusieurs personnages qui s’apprêtent à vivre une dernière année scolaire avant de passer leur Bac pro CGEA, pour « Conduite et Gestion de l’Entreprise Agricole ». Les élèves se destinent donc, dans leur majorité, à une vie professionnelle à la ferme, et les cours sont évidemment à l’avenant : le cursus inclut un volet pratique au contact des animaux, en plus de matières théoriques différentes de la voie générale.
    Pour nous plonger dans cet univers, le premier épisode suit l’arrivée d’un nouvel élève, Sohan, un Parisien qui ne connaissait rien de la vie à la campagne jusqu’à son premier jour de classe.

    Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce premier épisode est mené tambour battant. Les scènes sont courtes, vives, remuantes ; la camera ne tient pas en place, le montage est incisif, on n’échange que quelques paroles avant de passer à la scène suivante. C’est que, voyez-vous, il y a beaucoup à dire.
    D’abord parce qu’évidemment, c’est un épisode introductif, et qu’il lui faut donc procéder à l’exposition des protagonistes (qui sont pléthore), à la présentation du cadre atypique dans lequel celles-ci vont évoluer, et à l’introduction des dynamiques existantes… qui, naturellement, sont déjà en mouvement. Par-dessus le marché, Déter a aussi l’ambition d’introduire un mystère feuilletonnant (Sohan n’est pas là parce qu’il se passionne pour les poules, il est venu avec une intention bien spécifique). Tout ça en gardant quelques respirations plus légères et des moments relevant plutôt de la chronique adolescente, vous conviendrez que ça tient de la haute voltige.

    …Sauf que Déter s’est aussi convaincue que ça ne représentait encore pas un défi assez grand. Elle s’offre, cerise sur le gâteau, une contrainte supplémentaire. Et avant de l’expliquer, il me faut apporter une précision : Déter se destine à être une série quotidienne, à raison de 7 minutes par jour ! Cela explique bien la rapidité des scènes, qui doivent tenir dans des épisodes quotidiens courts, tout en faisant progresser l’intrigue de façon régulière. En plus de cela, chaque semaine, ces épisodes sont compilés en un omnibus de 35 minutes, disponible sur le site de france.tv Slash (pour la semaine de lancement, plusieurs épisodes omnibus ont déjà été mis en ligne, d’ailleurs).
    Et donc, Déter a décrété que la série et son intrigue auraient la même temporalité : chaque épisode de 7 minutes équivaut à une journée dans la vie de ses protagonistes. Par conséquent, chaque omnibus représente donc une semaine scolaire. Dans le cas présent, le premier omnibus mis en ligne (« Semaine 1 »), et celui que j’ai regardé pour cette review, commence donc le lundi avec la rentrée des classes, et il s’achève le vendredi, lorsque les élèves rentrent chez elles pour le weekend.
    Ce choix a du sens pour s’inscrire dans le quotidien de ses spectatrices, mais il était optionnel. Déter aurait parfaitement pu ne pas s’imposer cette contrainte, pour se garder un peu de marge de manœuvre pour des intrigues à densité variable. Toutefois, à ce stade, je pense que vous avez compris qu’on n’a pas affaire ici à une série qui veut se simplifier la vie. Elle mise haut, quand bien même l’ambition n’est pas toujours une qualité attendue d’une série quotidienne, ou d’une série adolescente d’ailleurs. C’est vraiment tout à son honneur, et je suis curieuse de savoir si pareil rythme tiendra sur le long terme. Je ne connais pas beaucoup de séries qui se l’imposent avec des épisodes aussi courts, en tout cas ; généralement les séries quotidiennes qui tentent cela ont des épisodes plus longs, comme BeTipul par exemple.

    Mais revenons à nos moutons (pardon, trop tentant), et parlons des intrigues en elles-mêmes. Parce qu’elle est en grande partie placée sous le signe de la légèreté (son rythme en témoigne), Déter met en place, pour l’instant au moins, des enjeux assez simples. Personne ne se présente d’emblée avec une tragédie grecque à jouer. Au cours de cette première semaine (encore une fois, je me base sur l’omnibus), on apprendra par exemple que Mehdi espère rejoindre un incubateur de talents dans la tech ; qu’Elsa n’a d’yeux que pour les bovidés du lycée et pas tellement les personnes humaines ; que son frère Basile n’est absolument pas sérieux et qu’il se contrefout de mettre en péril sa scolarité ; que Cloé est… euh, bon pour l’instant elle n’a pas trop d’intrigue perso, mais elle est instrumentale dans la vie sociale du bahut ; que Lia est en train de tomber sous le charme d’un étudiant plus âgé en BTS agricole, Noé ; et que Sohan a tout fait pour intégrer ce lycée à cause d’un ancien élève, Max. Cette première semaine est aussi l’occasion de voir comment Sohan s’intègre à ce monde auquel jusque récemment il était étranger, de le voir tisser des débuts d’amitié ou au contraire se mettre à dos certaines élèves.
    Ce sont des intrigues classiques pour une série adolescente (…j’admets, peut-être pas pour les bovidés), et je vous avoue qu’en un sens, ça m’a un peu déçue. Je ne doute pas que Déter en garde dans sa manche : encore une fois, elle a eu beaucoup à faire pour ses premières minutes d’existence, et à l’impossible nulle n’est tenue. Mais pour une série qui se targue (à raison) d’être l’une des rares à se dérouler dans le monde rural, bah j’espérais qu’on y verrait un peu plus de euh, vous savez, ruralité.
    Encore une fois je sais bien qu’on ne peut, ni ne doit, tout faire en littéralement une semaine, c’est juste que…

    …Rha, je suis obligée de l’admettre, en réalité j’aurais tenté Déter quoi qu’il arrive ! Il n’y a pas eu d’hésitation !
    Bien qu’étant une citadine pur jus, j’adooore regarder du « contenu » sur la vie à la ferme. Quelques unes de mes chaînes Youtube préférées sont tenues par des exploitantes agricoles ! Je ne loupe pas un seul agnelage effectué par Sandi Brock ! Je voulais vraiment regarder une série sur, bah, vous savez, la vie d’un lycée agricole, quoi ! Et de ce côté-là, l’introduction est très light.
    C’est surtout un lycée que Déter introduit dans sa première semaine, et si de temps à autres on trouve quelques animaux de ferme, ou une ligne de dialogue rappelant où l’on se situe, eh bien globalement la série n’affirme pas encore très bien la singularité de son cadre. Il y a une scène qui m’a beaucoup plu, pendant des travaux pratiques avec des vaches, dans laquelle Sohan (qui est parfait pour introduire ce genre de concept) a besoin de se faire expliquer pourquoi les vaches ne peuvent rester dans le pré quand il pleut… mais la brièveté des scènes de Déter fait qu’on a juste le temps de se faire délivrer l’explication, d’embrayer sur une interaction sans rapport entre deux élèves, et de passer à la scène d’après. Alors je sais bien que regarder Déter ne remplace pas une formation diplômante hein, mais, bon, moi j’aurais volontiers passé plus de temps dans ce pré, à apprendre des trucs, à comprendre l’avenir que ces jeunes se bâtissent, voilà. Avec des élèves comme Elsa, qui est sincèrement passionnée par ce qu’elle fait, j’aurais trouvé génial de la voir prendre fait et cause en classe pour le pâturage tournant ou contre l’élevage intensif ; voir des élèves réaliser que vu le coût d’une exploitation agricole, à moins d’un héritage il leur sera peut-être impossible de posséder leurs propres terre ; ou je sais pas, quelque chose. Pis c’est dommage de ramener à la vie un lycée agricole désaffecté pour les besoins de la production… pour au final nous montrer principalement des salles de classe qui ressemblent à beaucoup d’autres salles de classe.

    Malgré cette légère déception (je conçois que ce ne soit pas l’idée que le public-cible de Déter se fasse d’une intrigue glamour, honnêtement), qui en plus peut être corrigée ultérieurement, Déter tient plutôt bien la route pour cette mise en jambes. Naturellement, il faudra voir comment tout cela évoluera avec le temps ; je lis que 200 épisodes (de 7 minutes, donc) ont été commandés ! Il y a donc largement le temps d’en apprendre plus sur le milieu dont ses protagonistes comme sa production semblent si fières. Ne mettons pas la charrue… bref.
    Soyons honnêtes, ce qu’il y a déjà sous nos yeux est déjà pas mal. Beaucoup de séries quotidiennes et/ou adolescentes ne tenteraient déjà même pas la moitié des challenges que Déter s’est fixés.

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  • All checked out

    7 octobre 2023 à 16:14 • Dorama Chick •

    Une fois de temps en temps, j’aimerais débarquer le sourire aux lèvres et m’exclamer avec enthousiasme que j’ai trouvé une romcom qui me plait. Juste pour voir comment ça fait. J’envie un peu celles qui y parviennent, de temps en temps.
    Alors je ne sais pas. Peut-être que je choisis mal mes tentatives, ou que c’est sans espoir. Dans tous les cas me voilà ressortant du premier épisode de King the Land, une série sud-coréenne diffusée l’été passé, avec une seule préoccupation : est-il possible de se faire une luxation du nerf optique à force de rouler des yeux ?
    Pour être honnête, c’est un peu ma faute. J’étais tombée sur deux extraits de King the Land par hasard pendant une nuit d’insomnie passée dans les Youtube Shorts, et ces deux extraits étaient plutôt en rapport avec la vie de l’hôtel du groupe King, qui sert de décor principal à la série. Et ça me convenait parfaitement ! Je regarderais volontiers une série avec des enjeux professionnels humbles tels que « comment allons-nous gérer cette cliente odieuse » ou « dans combien de langues différentes l’héroïne peut-elle accueillir les clientes », même si elle devait inclure une intrigue romantique en arrière-plan.

    Sauf que ce n’est pas ce qui se trame ici, évidemment. King the Land est une énième série dans laquelle un fils de chaebol émotionnellement constipé et une pauvre jeune femme avec une attitude positive sont vouées à se rencontrer et s’amouracher l’une de l’autre. Naturellement, cette rencontre se fait sous des auspices négatifs, et cet amour doit se construire dans la confrontation permanente.
    Cette configuration est courante, en particulier dans les romcoms asiatiques ; et elle m’insupporte profondément. Objectivement, je comprends pourquoi elle existe : ce rêve de n’avoir rien en commun avec un homme riche et inaccessible, mais de finir par le conquérir grâce à des qualités qui lui manqueraient et qui proviendraient précisément d’une condition humble, est séduisant pour des spectatrices appartenant à un groupe socio-économique modeste. Même les conflits ne sont pas sans intérêt de ce point de vue : voir un couple résoudre ses différences avant de commencer la partie romantique de leur histoire ensemble paraît promettre un avenir radieux et sans le moindre accrochage. Si l’on se chamaille, ce n’est pas que l’on est incompatibles ! Il y a forcément une récompense derrière.
    Je comprends bien que ce soit rassurant.

    Dans les faits, toutefois, voilà ce que ça m’évoque une fois que je suis devant ces séries.
    On a deux protagonistes qui n’ont rien en commun, et rien à faire ensemble. Ce n’est pas juste leur condition sociale qui les oppose, ou leur personnalité, mais leurs préférences et même leurs valeurs, aussi. Si elles se retrouvent dans un même environnement, c’est parce que les scénaristes en ont décidé ainsi, mais elles ne s’y trouvent pas pour le même motif, c’est-à-dire que même leurs motivations divergent. On ne construit pas un couple comme ça, et dans le fond tout le monde le sait bien. Alors, comme elles doivent impérativement finir ensemble, les circonstances vont à tout prix les faire interagir, parce qu’il faut leur forcer la main. Et quand je dis à tout prix, c’est vraiment à tout prix, c’est-à-dire qu’on n’en finira pas de multiplier les coïncidences, les accidents et les malentendus. Il n’y a pas de ficelle assez grosse.
    On les aura à l’usure. Si on les oblige à se quereller pendant quelques épisodes de plus, elles finiront par reconnaître qu’elles sont vouées à être ensemble. Le fils de chaebol élevé dans une famille froide et distante va enfin apprendre ce que sont la gentillesse et la bonne volonté. La courageuse jeune femme partie de rien va, euh, enfin avoir le prince charmant dont parlent tous les contes, je suppose (…elle n’a en réalité pas grand’chose à gagner ici à part le statut social de son futur bienaimé, vu qu’il est d’une froideur à toute épreuve). C’est le grand amour sur lequel on écrit des romans !
    …Et je n’ai même pas encore abordé les dynamiques genrées de pareil trope.

    Dans King the Land, on a toutes les marques de ce type d’histoire, il n’en manque rien.
    Ah, si, peut-être. Le premier épisode a éventuellement oublié d’introduire des personnages qui pourraient se dresser en chemin de cette charmante histoire, comme, disons, un enjeu amoureux pour chacune des deux protagonistes, bien plus compatibles mais dont les scénaristes ont décrété que c’était sans espoir. Mais peut-être que cette formule, commençant à dater, commence à devenir obsolète ? Ce serait déjà un progrès.

    Et c’est dommage parce que, encore une fois, sous ces clichés se cache une série qui aurait pu, dans d’autres circonstances, m’être regardable.
    Le premier épisode est par exemple sympathique de par sa timeline : les événements démarrent en 2015, exposant les protagonistes et la situation initiale, mais sur le dernier tiers de l’épisode, on a droit à un montage sur les années suivantes. Bon, du héros on n’apprendra rien, il semble passer plusieurs années à dépenser de l’argent et avoir l’air émotionnellement constipé (à la toute fin on le voit soudainement recevoir un diplôme, euh, moi j’avais même pas compris qu’il faisait des études…). En revanche, c’est super intéressant de voir la vie de l’héroïne et de ses deux meilleures amies évoluer (l’une d’elle se marie, a un enfant…). Sa carrière avance, sa situation personnelle change (elle se trouve un petit ami sérieux), ce genre de choses. Cette séquence fait écho à une autre, plus tôt dans l’épisode, qui compare le quotidien de l’héroïne et ses deux meilleures amies, toutes trois embauchées dans des branches différentes du groupe King (hôtel, compagnie aérienne, boutique duty free), et leurs déboires en tant qu’employées tout au bas de l’échelle. Dans cet autre montage, on voit bien que le problème n’est pas tant d’avoir un job ingrat que d’avoir des supérieures qui les traitent comme des larbins, et de faire face à des clientes désagréables.
    Ces ingrédients sont présents, et King the Land pourrait faire de ça son intrigue que j’en serais enchantée. Mais King the Land n’est pas la série que je voudrais voir, elle est la série que la majorité des amatrices de romcoms sud-coréennes veulent voir. Nous sommes profondément incompatibles.

    Encore une fois, il est possible que je choisisse mal les romcoms auxquelles je donne une chance. Peut-être que me baser sur le fait qu’elle semblait populaire cet été, ou sur deux extraits suffisamment courts pour tenir dans le format de Youtube Shorts, était un mauvais calcul. Peut-être qu’une fois de temps en temps je devrais lire des reviews avant de regarder un épisode (c’est ma faute, j’aime bien me faire ma propre opinion). Il y a plein de raisons pour lesquelles mon processus peut être la cause de ce malentendu prolongé. Mais… je ne peux pas m’empêcher de constater qu’il n’y a vraiment qu’avec les romcoms que cela se produit avec autant de régularité.
    Dans tous les cas, King the Land n’était pas une série pour moi. Si vous l’avez vue, j’espère que c’était un peu plus une série pour vous ! Parfois, je me demande à quoi ça ressemble, de voir dans ces romcoms qui m’agacent autant… quelque chose qui persiste à m’échapper.

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  • Found family

    6 octobre 2023 à 12:47 • Telephage-o-thèque •

    Quand une série se définit comme étant une « Mpreg romantic comedy« , je suis bien obligée d’admettre que l’audace m’éblouit. Le terme « Mpreg » est d’ordinaire réservé à certains recoins d’internet, et est loooin d’être entré dans le langage courant du grand public. Mais la série dont il s’agit ici est une fiction originale de la chaîne canadienne OUTtv, qui comme son nom le suggère s’adresse essentiellement à un public LGBT ; on y estime probablement que le vocabulaire de ce public est un peu différent.
    La série en question s’appelle Womb Envy (ce titre est tout un programme aussi). Après une diffusion chez OUTtv au printemps, elle a apparemment été mise en ligne ensuite sur Apple TV+ et Amazon Prime Video dans certains territoires, ce qui explique qu’elle me soit finalement parvenue. Et c’est donc le sujet du jour.

    Trigger warning : alcoolisme, homophobie, emprise parentale.

    Les déboires de Max commencent un soir qu’il souffre de la gueule de bois (vous avez bien lu) après une énième orgie la veille, et que ses vomissements intenses lui ont fait rater une énième journée de travail. A ce stade il est quasi-certain qu’il va être viré, mais cela s’apprête à devenir le cadet de ses soucis lorsque Maggie fait irruption à sa porte.

    Max et Maggie ont grandi ensemble dans une petite bourgade paumée, elles sont devenues inséparables, Maggie a servi de beard à Max à l’adolescence, et ensemble, elles ont projeté de partir loin de leur ville natale… sauf que seul Max est parti pour Toronto. Leurs vies sont depuis différentes ; voilà environ une décennie qu’elles ne se sont pas vraiment parlé, hors quelques sporadiques interactions de la plus grande banalité sur les réseaux sociaux. Leur lien indestructible s’est donc déchiré avec la distance. Alors que soudain Maggie réapparaisse est, vous l’imaginez, plutôt étrange. La jeune femme a qui plus est une surprise : elle est enceinte de 6 mois. Et elle n’a aucune envie de donner naissance à ce bébé dans le même patelin où elle s’est retrouvée bloquée ! Alors la voilà à Toronto. Avec une idée derrière la tête : faire croire à sa mère Dorothy que l’enfant est de Max, et qu’il est son fiancé, pour échapper à son destin provincial …et à l’intégrisme religieux de Dorothy, ancienne alcoolique devenue born again Christian.
    En l’espace de quelques minutes, voilà donc le quotidien de Max chamboulé. Certes, son existence n’est pas glorieuse : dans le tourbillon du premier épisode, avant que n’arrive Maggie, on a le temps de sentir qu’il ne va pas bien, que même son pote Kyle s’en rend compte,  et que son existence est autant en désordre que son appartement. Mais enfin, jusque là, c’était encore sa vie, au moins ; là, elle semble de moins en moins lui appartenir à mesure que Maggie et Dorothy s’en mêlent. Il a accepté, sans avoir le temps de réfléchir, le pacte que lui proposait Maggie : se faire passer pour le père de son futur enfant et son fiancé… et donc, en un sens, rentrer dans le placard pour elle. Mais ne lui doit-il pas ça, après toutes ces années ? Il a aussi promis de rester célibataire, et la tache s’avère bien ardue lorsqu’il rencontre Patrick, le coach en accouchement de Maggie, dont il tombe immédiatement amoureux ! Dans ce chaos ambiant, Max se retrouve en plus accablé par les apparitions surnaturelles de The Divine, une drag queen qui lui sert de conscience queer ; et elle n’apprécie pas cette histoire de placard, oh non.

    Il n’est pas au bout de ses surprises. Dans la tourmente des jours qui suivent ce curieux accord passé entre les deux amies, Max découvre que son corps change. Ses hormones le tourmentent, il est pris de malaises, et son ventre… son ventre grossit quasiment à vue d’œil ! Womb Envy n’est pas, en réalité, une histoire qui raconte vraiment une grossesse masculine (désolée de vous décevoir), mais plutôt une exploration du phénomène de couvade dont Max fait l’expérience.
    Ce qui surprend, toutefois, surtout après deux ou trois épisodes complètement fous, c’est combien de thèmes Womb Envy veut en fait aborder à travers cette couvade. Pas forcément avec le sérieux d’un drama, parce que son énergie est vraiment chaotique (et qu’en plus ses épisodes d’un quart d’heure environ sont vraiment trop courts pour ça), mais avec sincérité, en tout cas. Max va devoir se confronter à toutes sortes de choses qu’il n’aurait jamais regardées en face autrement. Sur son rapport à l’alcool (même si la série fait finalement un pas de côté un peu dommage à mes yeux), sur son instabilité affective, sur la façon dont il traite autrui en général… Le retour de Maggie dans sa vie est aussi l’occasion forcée de se confronter à leur passé commun, d’admettre qu’il a eu un rôle à jouer dans la disparition de leur amitié autrefois si intense, et qu’aujourd’hui, il a des obligations auprès d’elle, en particulier parce qu’il lui a donné sa parole et qu’il a accepté ses conditions.
    Max n’est pas prêt à tout ça, mais il n’a pas le choix. Dans la situation présente, il n’y a pas d’autre option que l’introspection et l’humilité, malgré ses efforts pour y échapper ou se défausser de sa responsabilité.
    Dans ce contexte, l’exubérante The Divine n’est pas qu’une amie imaginaire taquine. Même si, en drag queen fière de l’être, elle apporte également une énergie chaotique dans la vie de Max (à qui elle n’était jamais apparue jusqu’alors), elle sait aussi être de bon conseil, le rabrouer lorsqu’il se complait dans ses travers, ou le rappeler à la raison lorsqu’il oublie son identité d’homme gay. Jongler entre tout ça n’est pas toujours facile, voire parfois contradictoire, mais The Divine le fait avec bonne humeur, un verre à la main, et toujours un fantastique costume sur le dos (ce n’est probablement pas un hasard que l’interprète de The Divine ait créé la série…).
    En revanche, j’ai quelques bémols à apporter du côté de deux personnages que j’ai peu mentionnés jusqu’à présent. D’une part, Kyle, l’ami fidèle, qui n’apparaît pas dans tous les épisodes mais apporte à chaque fois beaucoup de tendresse protectrice à l’environnement de Max (son interprète ayant vraiment trouvé un équilibre remarquable entre « BFF flamboyant » et « personnage avec une âme à fleur de peau »). Il est largement sous-employé, peut-être par crainte de faire doublon, précisément, avec le rôle de The Divine dans la vie de Max, car il est vrai que sur beaucoup de points, leurs attitudes vis-à-vis des choix du héros se rejoignent. J’espère que Kyle sera mieux traité par la suite (si suite il y a), mais ce n’est rien en comparaison avec ce pauvre Patrick. Car, oui, il faut se confronter à la réalité : Womb Envy se décrit comme une « romcom Mpreg« , mais ce n’est pas réellement possible d’avoir une romcom dans laquelle l’enjeu amoureux est traité de façon anecdotique. Max pense beaucoup à Patrick, parle beaucoup de Patrick, s’inquiète beaucoup du regard de Patrick… la série, moins. Et malgré les quelques protestations de l’intéressé à ce sujet (« je ne suis pas parfait juste parce que je suis malvoyant ! »), Womb Envy a un peu de mal à nous dire ce qui rend Patrick imparfait, et tout simplement humain. La durée de cette saison inaugurale n’y est pas pour rien, mais c’est un peu dommage quand même.

    Cela étant, Womb Envy n’est pas si superficielle que ça dans sa démarche autour d’un personnage handicapé. Elle aborde même quelque chose que la plupart des séries, où qu’elles se trouvent, ne prennent pas au sérieux : le sujet du validisme. L’interprète de Patrick est un acteur présentant réellement un handicap, pour commencer. Dans ses dialogues, et une partie de son intrigue, Womb Envy prête attention à cet aspect et affirme le handicap de son personnages dans les dynamiques ; même si, comme pour plusieurs autres, elle n’a pas le temps de le faire très profondément.
    Ce à quoi elle a prêté beaucoup d’attention, surtout, est son accessibilité. Co-produite avec l’aide de l’AMI, Womb Envy est en effet à la fois une série audiovisuelle et un podcast audio, la production affirmant qu’il est possible de passer de l’un à l’autre à tout moment d’un épisode. Pour faciliter cette bascule, la version video (qui est celle sur laquelle je me base pour cette review) inclut en effet une narration audio supplémentaire assez fine ! Son rôle est tour-à-tour de lire l’écran-titre qui sert de générique (« Womb Envy« , donc), d’apporter un complément aux plans d’ambiance (pour introduire un nouveau décor quand ce n’est pas perceptible dans les dialogues), de marquer auditivement les sauts dans le temps (« and we are back to present day, girl » après un flashback), ou encore de lister une partie des crédits de fin d’épisode (pas tous). Cela se fait souvent de façon gaie, humoristique et subtile, l’idée étant autant d’apporter ces informations à des spectatrices malvoyantes… que d’habituer les spectatrices voyantes à trouver cela normal. La distribution de la série se relaie (selon les épisodes où les actrices apparaissent moins) pour offrir leur voix à la narration, participant à l’impression d’un travail cohésif, et non d’un simple supplément plaqué là, parce qu’il faudrait, en post-prod. Honnêtement plus de séries devraient faire ça, c’est vraiment bien fait ; et qu’une série indé à petit budget s’en donne la peine devrait faire honte à tout le reste du monde.
    Mais ça montre bien que l’intention de Womb Envy est de bien faire ce qu’elle s’est mis en tête d’accomplir. Elle veut joyeusement inclure tout le monde dans son magnifique bordel ambiant, et charmer à tout prix. Vous savez quoi ? Le pari est réussi. Une fois qu’on s’est habituée à ses quelques limites, ça marche vraiment.

    Womb Envy est bien plus que ce que son titre, son résumé ou même son premier épisode, peuvent laisser penser. Il faut parfois un peu s’accrocher : c’est une production à petit budget, avec une direction d’actrices qui n’est pas toujours aussi solide qu’elle pourrait l’être (même si le cast ne démérite pas), et beaucoup d’idées fourrées dans un format trop court pour ses ambitions (des problèmes similaires à ceux d’Alter Boys, mais qui s’expriment différemment). Le dernier épisode de la saison le prouve : Womb Envy en garde pourtant pas mal sous la pédale !
    Comme quoi, elle a raison : il lui faut une seconde saison.

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  • Take Five Neuf

    1 octobre 2023 à 23:13 • Take Five •

    Bien maligne celle qui pourra deviner à l’avance quelles sont les 5 séries de ce nouveau Take Five, vu qu’il est impossible de procéder par élimination : je n’ai rien publié d’autre ce mois-ci. Quiconque me suit sur Mastodon sait pourquoi.
    Mais l’autre raison, c’est que je suis tombée à la fin de l’été dans un marathon impromptu d’une série US, or, tant que toutes les grèves de l’industrie étasunienne ne seront pas finies, je ne parle pas de télévision américaine. Du coup… bon. Patience. Apparemment on pourrait en voir le bout dans pas trop longtemps, de toute façon.
    Dans tous les cas, nous voici aujourd’hui avec un Take Five automnal qui permet de parler de quelques séries vues ces dernières semaines, et le moins qu’on puisse dire c’est que le bilan est mitigé. Par contre c’est TRÈS féminin ! Et complètement accidentel : je ne m’en rends compte qu’au moment de publier cet article.

    Kumari Srimathi (2023)

    Quand elle était enfant, Srimathi a promis à son grand-père que quoi qu’il arrive, elle préserverait la maison qu’il a construite, et qui a été à l’origine de la fortune de sa famille. A l’époque, plusieurs générations vivaient sous le même toit, mais vingt ans plus tard, les circonstances ont bien changé ; après le décès du grand-père, la famille s’est scindée en deux : d’un côté, son oncle, sa tante, et ses idiots de cousins jumeaux, ont prospéré… de l’autre, le père de Srimathi a disparu (l’épisode ne dit pas spécifiquement dans quelle mesure), et la jeune femme a grandi avec sa soeur, sa mère et sa grand’mère dans le dénuement. Mais elle s’est accrochée à la maison ancestrale, comme promis, et a pendant de longues années multiplié les procédures légales pour empêcher son oncle de s’en saisir et la revendre à profit à quelque entrepreneur désireux de la remplacer par des immeubles plus lucratifs. Dans le petit village où elle vit, Srimathi passe pour un cas désespéré, non seulement à cause des démêlés juridiques, mais aussi parce que, âgée de 30 ans, elle refuse tout mariage. Elle a aussi refusé des études plus conventionnelles pour se consacrer à l’hôtellerie et la restauration. Elle n’en fait jamais qu’à sa tête, avec son tempérament bien trempé et ses idées arrêtées sur ce qui est juste.
    Kumari Srimathi flirte par moments avec le ton et les standards de production des séries quotidiennes indiennes, ce qui est plutôt rare pour une série produite pour une plateforme de streaming (ici Amazon Prime Video). Son propos sur le célibat puis l’entreprenariat féminin, en revanche, n’est pas exactement courant. Srimathi entend en effet dans ce premier épisode un jugement officiel. Après que son oncle ait (miraculeusement ?) enfin mis la main sur le testament du grand-père dont on commençait à considérer qu’il n’existait pas, la demeure semble perdue. Toutefois, devant l’importance d’une maison ancestrale, le juge décrète que si dans les 6 mois Srimathi trouve le montant de la vente promise à l’entrepreneur, elle pourra acheter la maison de son grand-père et la sauver de la destruction. C’est pas avec son salaire dans un bistrot qu’elle va y arriver alors… elle décide de lancer son propre bar-restaurant dans son village ! Projet fou ? Peut-être, mais projet de la dernière chance surtout. Kumari Srimathi enjoint à défier les conventions sociales, l’avis de ses aînées, et même un peu le bon sens, au nom de ce qui est juste.

     L-Pop (2023)

    Vous vous souvenez de la conversation qu’on a eue voilà quelques mois, à l’occasion de la review portant sur la série brésilienne Além do Guarda-Roupa ? Préparez-vous à l’avoir à nouveau.
    Dans la série mexicaine L-Pop, l’héroïne, Andrea, est une super fan de Kpop (oui, eh bah, moi, je mets pas de tiret, voilà). En fait, elle tellement passionnée par le sujet que sa sœur Pau a décidé de faire d’elle le point focal de son documentaire de fin d’études (avec l’aide de son cameraman Pablo), pour parler à travers Andrea de la hallyu qui a submergé le Mexique. Le portrait qui se dessine d’Andrea, cependant, est plus mitigé qu’il n’y paraît : la jeune femme, qui est au début de la vingtaine, tente de contenter ses parents (toutes les deux dentistes) en suivant leurs traces, et elle mène sans enthousiasme une formation qui devrait la conduire à soigner des caries pour le reste de sa vie. Pas marrant quand on ne rêve que de bubblegum pop, et de danser dans des tenues roses bonbon. Chose que fait aussi Andrea, avec Laty, une « amie » avec laquelle elle a cofondé un groupe faisant des dance covers. Par-dessus le marché, Andrea gagne présentement sa vie derrière le comptoir d’un café tenu par un frère et une sœur d’origine coréenne, l’ambitieuse Hye Jin qui a décidé de mobiliser ses origines pour attirer les fans de Kpop, et le plus réservé Ji Won, sur lequel Andrea a des vues secrètes.
    Tous les écueils évités par Além do Guarda-Roupa, absolument tous, se retrouvent dans L-Pop (et c’est encore plus flagrant quand on voit combien Além do Guarda-Roupa était intentionnelle dans sa description des dérives racistes de la hallyu). Les stéréotypes s’accumulent, le namedropping n’en finit pas de prétexter avoir les mêmes codes que la population visée par la série, et vient s’ajouter à cela une saine dose de moments pseudo-musicaux pendant lesquels on invente des chansons de Kpop (chantées en coréen/anglais… avec un lourd accent mexicain) parce qu’on n’a pas voulu, ou pas pu, obtenir les droits de vrais titres. D’ailleurs en dépit des références émaillant le discours d’Andrea, L-Pop prend bien garde à ne pas employer la moindre photo d’une vraie personnalité coréenne (au point que la chambre de l’héroïne a l’air tapissée de photos de personnes asiatiques prises au hasard, ce qui n’est vraiment pas une impression heureuse vu les autres fautes de goût de L-Pop). Vous comprenez bien que ce qu’on tient là relève du pur prétexte opportuniste !
    …Et ce n’est même pas ce qu’il y a de pire dans L-Pop. Car il faut aussi parler de cette histoire de documentaire, un cadre narratif à la fois éculé et super lourd. Pau, qui n’a vraisemblablement pas compris qu’un documentaire c’est pas une émission de télé-réalité dont elle serait la star, manipule sa sœur Andrea pour le plaisir de cabotiner devant la camera. Elle invective aussi régulièrement Pablo, le gag récurrent étant que ce pauvre type (dont le visage n’apparaît jamais), n’a pas droit exister hors du tournage de ce « documentaire ». Les mouvements de camera sont incessants, le montage donne le tournis, et très franchement, ne manquent que les rires enregistrés pour être dans un sitcom Disney pur jus. C’est proprement insupportable. L-Pop aurait pu être une série sur la nécessité de grandir sans perdre ce qui nous passionne, mais chez Disney+ on est trop occupées à faire des séries de merde qui prennent les ados fascinées par la popculture coréenne pour des truffes. Faire l’effort d’au moins mettre une bonne série derrière le prétexte, c’était en supplément.
    Tout ça pour dire : regardez plutôt Além do Guarda-Roupa.

     Mask Girl (2023)

    C’est un peu difficile de situer le ton de Mask Girl sur la base seule de son épisode introductif, et en soi c’est déjà un peu mauvais signe. La première moitié de l’épisode penche pour une tragédie moderne, nous présentant l’héroïne Kim Mo Mi comme la victime d’une société obsédée par la beauté. Son visage ne correspondant pas aux critères de beauté extrêmement rigoureux, elle n’a jamais pu réaliser son rêve de devenir une idol, et végète donc dans un emploi de bureau où elle continue quand même d’être déconsidérée pour son physique. Elle a développé un béguin adolescent (en dépit du fait que lorsque l’intrigue commence, en 2009, elle a d’après mes calculs 27 ans…) pour son supérieur hiérarchique direct, le beau Mr. Park, un homme marié qui la calcule à peine. Woe is me. La seule chose qui va à peu près bien dans sa vie, et tout est relatif, est que Mo Mi streame le soir, sur une plateforme équivalente à Twitch, des performances d’idol, tout en chattant avec ses followers… son visage ingrat soigneusement caché par un joli masque nacré, mais c’est pas grave, le public est clairement là pour regarder autre chose (car évidemment elle n’a pas oublié d’être bien roulée, n’exagérons pas quand même). Même cette activité ne lui apporte qu’un soulagement modéré, puisqu’évidemment ses fans ne la connaissent qu’à travers son masque et ses interactions surjouées.
    Mask Girl prend un tournant lorsqu’il s’avère que Kim Mo Mi n’est pas la victime innocente d’une société brutale, mais un maillon de la chaîne comme un autre. Du moins, ce serait intéressant si la série faisait plus que le suggérer, en tout cas ; peut-être que les épisodes suivant feront un meilleur boulot de ce côté-là. En continuant d’adopter (sauf dans le cliffhanger final de l’épisode) le point de vue de son héroïne, la série s’interdit un peu de creuser le propos, d’autant que Mo Mi n’a pas vraiment de capacité d’introspection. La voilà donc qui progressivement devient the villain in her own story, mais sans s’en rendre compte ; elle ruine en une journée la vie de deux personnes : Mr. Park et A Reum. Tout ça en sabotant sa propre chaîne de streaming en s’effeuillant complètement devant ses followers, après avoir bu plus que de raison pour noyer sa peine, ce qui résulte en un bannissement qui évidemment donne à Mo Mi l’opportunité de se complaire encore plus dans son complexe de persécution.
    Du coup, l’intrigue de Mask Girl semble un peu partir dans tous les sens et ne pas interroger grand’chose. Encore une fois, je sais bien que ce n’est qu’une introduction (les règles du Take Five sont les règles !), mais vu la tournure des événements je n’ai pas l’impression d’avoir affaire ici à une série qui vraiment des choses à dire sur les sujets qu’elle s’est choisi. Et en refusant pour le moment de prendre de la distance avec son héroïne, invitant plus à l’identification qu’à la critique, Mask Girl se prive aussi de l’opportunité de faire de la vraie satire.

    Sorcières (2023)

    J’ai passé près de trois quarts d’heure avec ces « sorcières » et je ne suis toujours pas capable de vous dire si on a affaire ici à une série fantastique. Cet épisode introductif a plutôt tout d’un drama, et suit le sort de trois femmes adultes dans leurs vies, ce qui les fait tourner et ce qui les bouleverse, sans vraiment nous donner grand’chose de tangible qui nous permette de comprendre ce qui les lie. Vu la conclusion de l’épisode, cette information va vraisemblablement former le cœur de l’intrigue par la suite, mais pour le moment c’est donc flou à dessein. Joe est une journaliste, que le premier épisode présente alors qu’elle est partie en Chine enquêter sur le sort de femmes traumatisées par la politique de l’enfant unique ; Beth est la femme au foyer frustrée d’un chirurgien esthétique, elle semble lentement de désengager de sa propre vie familiale ; Agnès (…quoique, « Amy » aurait été drôle) est une coach de vie donnant dans les pseudo-sciences et qui tente avec sa compagne Sophie de fonder une famille. Dans une moindre mesure, un homme nous est présenté de façon similaire, quoiqu’on l’aperçoive plus succinctement.
    En parallèle de tout cela, on suit une enquête qui n’a l’air d’avoir aucun lien avec tout ce petit monde : dans la toute petite commune de Sainte-Piété, un bébé est découvert dans la forêt, nu, près des chutes d’eaux en marge de la bourgade. Aucun parent ne semble avoir perdu cet enfant, et plus étrange encore, l’appel aux autorités qui a conduit à découvrir le petit est extrêmement mystérieux. Comment tout cela est-il lié ? Quelques bruissements de flashbacks nous informent que les trois femmes, qui sont sœurs, ont connu cette même forêt, et ont visiblement tout fait pour la laisser derrière elles.
    Sorcières est-elle vraiment une histoire de sorcellerie ? Parfois la série semble jouer sur cette ambiguïté, mais en même temps, ce n’est pas clair. Elle semble plutôt être une histoire de traumatisme, et des rites et remèdes auxquels on se raccroche pour en guérir. Notez bien que dans le fond, les deux notions ne sont pas mutuellement exclusives…

     While The Men Are Away (2023)

    Ne vous laissez pas abuser par l’introduction hilarante de ce premier épisode : While The Men Are Away, bien que ne manquant pas d’une saine dose de légèreté, est avant tout un drama prenant plutôt au sérieux son contexte historique de la Seconde Guerre mondiale. La série se déroule dans une large ferme de pommiers dont le propriétaire, Harry Whitmore, a récemment rejoint l’armée australienne pour partir se battre en Europe. Du moins, si on vous le demande, c’est la version officielle. Reste à la tête de l’exploitation agricole sa veu-… femme, Francesca dite Frankie, une Italienne considérée comme « assimilée » (elle n’est pas dupe), son employée aborigène Kathleen (qui a pris un peu de galon lorsque Harry les a quittées), et Robert, un jeune objecteur de conscience séduisant (et il le sait). Viennent s’ajouter également deux jeunes recrues de la Women’s Land Army, envoyées pour compenser l’absence de main d’oeuvre dans une industrie aussi essentielle que l’agriculture : Gwen, jeune fille riche et pleine d’illusions mais au tempérament volontaire ; et Esther, une jeune femme juive promise à un mariage avec un docteur juif, mais dont l’esprit aspire à plus. Ces protagonistes et quelques autres plus secondaires incluent un nombre de personnages queer (parfois pas encore au courant de l’être), et cela fait de While The Men Are Away une chronique sur le sort d’un certain nombre de minorités à une époque où leurs histoires n’étaient pas contées.
    Les séries s’intéressant au sujet ne sont en fait pas rares, dans une certaine mesure. On peut mentionner Land Girls, Les Combattantes ou encore Bomb Girls, qui chacune à leur façon ont tenté de décrire la vie de ces femmes dont l’Histoire a retenu si peu. Soudainement libérées de la présence de la plupart des hommes, elles ont trouvé une liberté nouvelle, quoiqu’évidemment relative et surtout temporaire. While The Men Are Away retranscrit bien cette intention, mais veut aller plus loin en abordant plus que le sort de femmes blanches cis et hétérosexuelles dans son objet. Tout cela en cultivant quelques petits secrets un peu piquants (et je ne parle pas que du sort pas très mystérieux de Harry, quoique j’aimerais bien savoir ce qu’il a fait pour le mériter). Les portraits manquent légèrement de relief dans cet épisode introductif, mais rien que les épisodes suivants ne peuvent corriger ; ça fait de While The Men Are Away un des pilotes les plus sympathiques vus ce mois-ci.

    Un autre truc qui me retient d’écrire, en ce moment, est l’impression de le faire dans le vide. Si jamais vous avez lu tout ou partie de ce Take Five, n’hésitez pas à me dire ce que vous avez regardé pendant le mois écoulé, ça me fera plaisir… et me motivera à continuer de vous parler séries.

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