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    29 juin 2023 à 21:04 • Take Five •

    Il est l’heure (oui, déjà) d’un nouveau Take Five. Pour celles qui sont nouvelles dans les parages, rappelons qu’il s’agit pour moi de vous parler du premier épisode de séries vues au cours des dernières semaines, mais n’ayant pas eu droit à leur propre review, soit par manque de temps, soit par manque d’énergie, soit par… manque d’envie. Il y en a une ou deux dans ce dernier cas aujourd’hui, mais je vous rassure, il ne s’agit pas de simplement sortir les poubelles, et j’espère que vous trouverez votre compte au moins une fois dans cette sélection hétéroclite !

    Dois Tempos (2023)

    Le mal de crâne permanent. Dans le premier épisode de Dois Tempos, la camera ne se pose pas une seule seconde, le montage cumule les plans durant à peine une fraction de seconde, les effets se superposent, les couleurs se précipitent, et ça donne vite le tournis. On n’a pas une seule seconde pour apprécier l’intrigue parce que… bon, en grande partie parce que celle-ci est famélique, mais aussi parce que le style a largement phagocyté tout le reste. Ce désir d’avoir l’air jeune, et en phase avec un public habitué aux réseaux sociaux, se traduit par un épisode aussi vain que ses protagonistes. Dois Tempos se déroule en effet entre 1922 et 2022, dans un même manoir d’une ville appelée Água Marinha, apparemment une ville à haute symbolique féministe puisque c’est là qu’a été élue la première femme maire du pays.
    En 1922, le manoir est occupé par la famille qui a la charge de Cecilia et Otávia, deux riches orphelines ; leur marraine et leur parrain ont décidé que Cecilia devrait épouser leur fils, Pedro. C’est à ce prix que Cecilia peut toucher son héritage, mais à quel prix… d’ailleurs quand commence l’épisode, celle-ci tente de s’enfuir, hélas sans succès. En 2022, le manoir a nouvellement été acheté par Paz, la plus célèbre influenceuse du Brésil, qui le déteste ; mais son entourage, et en particulier sa mère, orchestrent toute son existence, et ont bien l’intention de tourner cette nouvelle demeure en outil promotionnel pour vendre des stages d’influenceuse à prix d’or dans une ville bénéficiant d’une image féministe. On voit tout de suite que les deux situations de Dois Tempos ne sont pas du tout équivalentes, même si toutes les deux sont aveugles aux privilèges que leur confère l’argent : Cecilia est mariée de force, Paz ne veut… euh, on sait pas trop, dans le fond. Elle n’aime rien, même le métier d’influenceuse a l’air de la faire chier, honnêtement. Mais vu la tournure de ce premier épisode, ça ne devrait pas être un problème trop longtemps…
    Avec ses incessants effets, ses choix de reconstitution « historique » très modernes, et bien entendu la profession de l’une de ses héroïnes, Dois Tempos a l’air décidée à en mettre plein la vue. Profitez-en tant que vous avez encore de la rétine. Hélas quand s’achève cet épisode inaugural, il s’avère que son propos sur l’auto-détermination féminine est vide, et que son sujet est un vulgaire… Freaky Friday. Tout ça pour ça. J’enverrai ma facture d’opticien à Netflix, pour la peine.

     Glamorous (2023)

    Cette rescapée a bien failli ne jamais nous parvenir, après avoir été commandée pré-pandémie par The CW, puis abandonnée, puis récupérée par Netflix et finalement diffusée rien que 4 ans après sa commande initiale. Glamorous aurait pourtant plutôt bien trouvé sa place dans le panorama de la CW d’antan, vu son ton de dramédie légère, colorée et chargée de musique, ou son côté « je vous ai comprises » parlant de maquillage, de réseaux sociaux et de crise existentielle de la vingtaine. C’est un mix de The Devil Wears Prada (une référence assumée) et Ugly Betty (une référence moins assumée), rien de très exceptionnel, mais ce n’est pas le type de série qui a besoin d’être originale, pourvu de faire mouche.
    Et honnêtement ? Si j’étais dans la bonne tranche d’âge et/ou que je m’intéressais au business de la beauté, il y a de fortes chances pour que je me laisse tenter. C’est énergique, la protagoniste centrale est bien incarnée, et globalement ça se tient. J’étais presque déçue qu’à la fin de ce premier épisode, une série qui avait réussi à me faire croire qu’elle était consciente de ses tropes décide de créer une situation antagoniste ; je pense que ç’aurait été tout aussi intéressant sans cela. Mais bon, à l’impossible nulle n’est tenue, et surtout pas Glamorous. C’est déjà bien qu’elle soit arrivée jusqu’à une diffusion.

    Hank and Jed Movie Pictures (?)

    Alors on est dans quelque chose d’un peu différent, pour une fois, avec un pilote non-acheté par une chaîne (ou « unsold pilot ») pour lequel je n’ai pas trouvé de trace ferme de date de production. Ce sont des choses qui arrivent ! L’histoire de ce pilote est un peu à part, puisqu’elle démarre alors que des Youtubers habitués à des formats courts se voient offrir une chance par CMT (oui, la chaîne country) il y a quelques années de tourner un pilote vite fait, histoire de voir s’il y a matière à leur commander une comédie. Si je vous raconte tout cela alors que j’ai par ailleurs des flous sur d’autres aspects de sa création, c’est parce que début juin, ces Youtubers en question en ont parlé pendant l’un de leurs podcasts, expliquant une partie du processus… et qu’il s’avère que je suis ces Youtubers pour leurs séries de gameplay ARK: Survival Evolved ! Forcément, poussée par la curiosité, j’ai été jeter un oeil au pilote en question (mis en ligne sur leur chaîne secondaire) et honnêtement… ça va. C’est pas incroyable, mais c’est pas la catastrophe non plus. C’est de la comédie à sketches, et j’y réponds moins qu’au reste en règle générale, mais c’est pas mal. En particulier, j’ai beaucoup aimé toute la séquence avec Satan, qui me semble un peu plus fine que le reste, bien que trainant en longueur (en fait beaucoup de ces sketches sont juste une minute trop longs pour moi).
    Enfin bref, c’est un pilote, quoi, donc imparfait ; avec des dialogues en partie improvisés, les moyens du bord, et apparemment tourné en un weekend qui plus est. Il n’existe aucun monde parallèle dans lequel CMT l’aurait commandée (MTV peut-être, quoique plus aujourd’hui évidemment), mais on passe une vingtaine de minutes sympathiques. Surtout si on apprécie l’humour un peu absurde, un peu redneck, un peu potache de la bande. Vous aurez deviné que c’est mon cas, en tout cas à doses homéopathiques et avec des dinosaures. Donc voilà, ça n’intéressera sûrement que moi, que la bande de Neebs ait ressorti ce pilote des méandres où il était stocké jusque là, je sais bien que la plupart d’entre vous n’en tirera rien. Mais voilà, je l’ai vu ce mois-ci et il entre dans le cadre d’un Take Five ! Et puis, des pilotes unsold, ça devient rare d’en dénicher de nos jours, vous savez ?

    Septième ciel (2023)

    Voilà des années que je râle à propos du jeunisme de la télévision. Toutes nations confondues. On n’en a que pour les jeunes, dans les séries, ou au mieux la crise de la quarantaine/cinquantaine ; par contre, le « troisième âge », rien à péter. Et n’allez pas me sortir « oui mais The Golden Girls » ou « bah quand même, ya eu Grace & Frankie » parce que ce sont les deux seuls exemples que la plupart des gens connaissent, alors pas à moi, hein. Dans le royaume de la téléphagie, on n’emploie les personnes âgées que pour faire rire, parce qu’elles ne sont jamais que des protagonistes secondaires dans la vie des plus jeunes qu’elles ; ou bien pour leur faire raconter, par le truchement de flashbacks des choses vécues plusieurs décennies plus tôt. Quand elles étaient encore jeunes. Quand on pouvait encore s’identifier à elles.
    La télévision est obsédée par la jeunesse, parce qu’on y croit aussi que c’est là que tout se joue. Que les premiers choix seront les derniers, que passé un certain âge, tout est définitif. Qu’il n’y a plus d’émois, plus de questions, plus de problèmes. On n’est pas morte mais c’est tout comme. Alors j’avais très envie de voir Septième ciel, vous comprenez, parce que même s’il s’agit en grande partie d’une romance, au moins c’est une façon de parler de ce à quoi peut ressembler la vie quand, malgré tout et tout le monde, on n’est pas encore finie. Ce premier épisode n’évite pas certains clichés. En fait il n’en évite pas beaucoup : le vieux Jacques placé de force dans une maison de retraite, séparé de ce qu’il aime (notamment son chien Couscous), plongé dans un univers qu’il trouve infantilisant et vieillissant à la fois… fait dés son premier jour la rencontre d’une femme pleine de vie, Rose. Pour Rose, la maison de retraite, ce n’est pas la fin : c’est une aventure de tous les jours. Ce premier épisode de Septième ciel est doux-amer, pas très bouleversant mais pas stérile si jamais, au-delà de l’exposition, la série voulait aborder des choses un peu plus intéressantes. Les ingrédients sont là, à peine camouflés par un peu d’humour même pas trop simpliste comme on aurait pu le craindre (notamment vu le tandem à la direction de l’établissement). Il y a du potentiel. Pas encore réalisé, mais qui me donne envie de jeter un oeil aux épisodes suivants, en tout cas.

    UP65 (2023)

    On trouvera difficilement plus inoffensif que cette petite dramédie sans prétention, qui suit Nishant, un jeune garçon un peu introverti, au moment de son arrivée en IIT. Pas encore un homme, mais convaincu (en grande partie par son père) de devenir un ingénieur, Nishant débarque dans cet établissement de Varanasi sans vraiment savoir ce qui l’attend. Il pense qu’il va bosser dur et ne se préoccuper que des cours ! Qu’il est naïf.
    Il est immédiatement pris en charge par son nouveau colocataire Pandey, ainsi que toute la bande de celui-ci : Prasad, Mohit, Kabadi Baba… autant de jeunes hommes qui ont bien l’intention de se tourner les pouces pendant les 4 années du cursus (voire plus, s’il est nécessaire de redoubler), et de profiter de la vie. On n’est jeune qu’une fois ! Et quelle incroyable période dans la vie de ces jeunes indiens, alors qu’enfin ils obtiennent une liberté que la vie chez leurs parents n’aurait jamais permise. Et puis, le campus est plein de filles ! Bon, là, dans ce premier épisode, pas trop (on n’en voit qu’une parler…), mais le matériel promotionnel promet que des filles rejoindront le groupe, en tout cas.
    La perspective de Nishant n’est pas neuve, et l’approche d’UP65 (apparemment adaptation d’un roman initiatique éponyme) pas beaucoup plus. Mais si vous cherchez une version indienne de GREEK, franchement ça peut le faire.

    Je rends l’antenne pour ce mois-ci, et vous invite à prendre la parole à votre tour. Qu’avez-vous regardé en juin ?

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  • Fuck you but thanks for all the fish

    26 juin 2023 à 14:21 • Zappeur, Zappeur n'aies pas peur ! •

    Lorsque des phénomènes marins inexpliqués, et de plus en plus souvent mortels, commencent à se produire aux quatre coins du globe, la communauté scientifique s’interroge tout naturellement sur leurs causes. Ou peut-être n’y a-t-il qu’une seule cause commune ? Sur la piste d’une nouvelle vérité scientifique, plusieurs chercheuses s’allient pour comprendre ce qui menace l’humanité.
    C’est le sujet de Der Schwarm, un thriller de science-fiction adapté cette année sous la forme d’une série ambitieuse. Tellement ambitieuse, en fait, qu’il aura fallu pas moins de 6 pays pour co-produire la série qui en résulte, Der Schwarm / The Swarm… Cela dit, vous la connaissez sûrement mieux sous son titre Abysses, puisque France2 achève la diffusion de la saison ce soir, sous ce titre. Elle en est la co-productrice, aux côtés de ZDF en Allemagne, ORF en Autriche, SRF en Suisse, Viaplay (principalement) en Suède, et Hulu Japan au… oui au Japon, donc. Tout ça fait du beau monde, avec la distribution internationale qui va avec. Cette (première ?) saison de 8 épisodes aura coûté la bagatelle de 40 millions d’euros. Est-ce que ça en valait la peine ?

    Sur le principe, le sujet de Der Schwarm / The Swarm n’est pas bien compliqué ; la série est même très pédagogique dans sa mise en place, laquelle occupe environ la première moitié de la saison ! Les catastrophes se succèdent un peu partout, prenant de l’ampleur, et des scientifiques sans lien apparent commencent à se poser des questions.
    Ainsi Charlie Wagner, biologiste marine allemande, observe-t-elle depuis son poste en Ecosse (où elle a été exilée pour insubordination par sa supérieure, la professeure Lehmann) que les fonds marins font remonter des blocs de méthane à la surface. Avec Rahim Amir, son ami et collègue resté dans les laboratoires de Kiel en Allemagne, elle tente d’échanger sur ses doutes, jusqu’à ce qu’un navire de recherche transportant une amie commune soit emporté par les flots. Sur les côtes canadiennes du Pacifique, le cétologue Leon Anawak guette le retour des orques, mais leur migration annuelle ne se passe pas comme prévu, et conduit même à l’attaque d’un bateau de tourisme. En France, Dr. Cécile Roche, une microbiologiste, intervient sur des cas étranges d’empoisonnement dont un crustacé serait à l’origine. Dans l’Atlantique, un autre biologiste marin, Sigur Johanson, est quant à lui engagé pour aider une mission privée à déterminer si des fonds au large de la Norvège peuvent être exploités commercialement par une société d’énergie, et y découvre une nouvelle espèce de vers marins particulièrement aggressive.
    Vous l’aurez compris, on n’est à l’abri nulle part, et à mesure que la saison se déroule, les incidents se multiplient au Pérou, en Afrique du Sud ou encore au Japon. Toujours sur les côtes ou au large, bref, c’est clairement dans l’océan que se trouvent les réponses.

    Der Schwarm / The Swarm insiste, à la limite de la lourdeur parfois, sur la façon dont l’Humanité utilise les océans. Pêche et donc restauration, commerce, énergie, tourisme, et même dans le domaine militaire ; les façons d’exploiter les larges étendues océaniques de la planète ne manquent pas. Et, hasard ou coïncidence, ce sont justement ces domaines qui sont frappés en premier par les phénomènes observés. Le message est clair : on a peut-être besoin des océans, mais les exploiter revient à menacer leur équilibre. Et il semblerait que l’équilibre soit sur le point d’être rétabli… de force s’il le faut.
    Dans ce panorama, il n’est pas très étonnant que les seules héroïnes de la série soient des scientifiques : ce sont les seules protagonistes dont l’activité n’est pas de tirer quelque chose des océans, mais simplement d’en apprendre. Der Schwarm / The Swarm répète d’ailleurs plusieurs fois combien ce cliché selon lequel on connaît mieux l’espace que nos propres océans. Cependant, la série essaie aussi de poser des questions sur les applications de cette curiosité scientifique, et de rappeler que, parfois, même la recherche scientifique se prend les pieds dans les intérêts économiques. Ce n’est toutefois pas sa priorité, et dans l’ensemble la série est avant tout un thriller écologique, attirant l’attention des spectatrices sur les risques encourus par l’océan.

    La saison, en revanche, prend tout son temps pour développer ses conclusions. Toooout son temps.
    En incorporant de nouveaux visages (parfois assez tardivement, même, par exemple l’astrophysicienne Samantha Crowe). En offrant une importance croissante à des personnages très secondaires (comme le riche entrepreneur Aito Mifune). En s’arrêtant sur les déboires personnels des unes et des autres (et les amours contrariées des unes et des autres). En effleurant des sujets sociaux qu’elle n’a pas envie de développer, mais qui apparemment sont quand même plus importants que son intrigue en propre (comme par exemple quand Leon, jeune scientifique First Nation, a toute une conversation sur le racisme avec un personnage très secondaire ; et qu’on n’en reparle plus jamais du reste de la saison). C’est un peu curieux de jouer autant les prolongations, surtout quand cela nuit au rythme du thriller supposé sous-tendre l’intrigue principale.
    Pendant ce temps, on ignore toujours pour quelle raison la vie marine, toutes espèces confondues, se rebelle contre l’Humanité. Est-on dans une configuration à la Zoo, dans laquelle une mutation est à l’origine de l’aggressivité des animaux ? Faut-il y voir la main d’une entité extraterrestre ? Alors, je sais que la recherche, c’est long, mais euh, bon…

    C’est d’autant plus dramatique que, entre vous et moi, les intrigues secondaires sont totalement dispensables, et les traumatismes vécus par plusieurs des personnages sont vite oubliés (qui se souvient que Leon a perdu sa meilleure amie dans l’accident du bateau touristique ? pas lui, en tout cas). Il y aurait eu, en revanche, quelques choses intéressantes à dire sur le cynisme des autorités, effleuré comme avec hésitation par un maximum de trois scènes dans toute la saison, et pourtant un trope majeur des fictions sur une catastrophe. Le refus de la classe politique d’intervenir aurait trouvé tout son sens dans le propos écologique de la série, en plus ! Il y a une ligne de dialogue très prometteuse à ce sujet, quand les scientifiques tentent d’expliquer que les côtes deviennent inhabitables pour l’Humanité et que, horriblement, on leur rétorque que, bah, avec le changement climatique de toute façon on s’y attendait, donc pourquoi s’inquiéter ? Hélas, de ce potentiel, Der Schwarm / The Swarm ne fera rien, en tout cas pas dans cette première saison.
    Cela sert juste de tremplin à ce bon Monsieur Mifune, un gentil milliardaire (j’arrive pas à croire que j’écris ces mots dans une même phrase), qui décide de financer entièrement de sa poche une expédition dans l’Arctique, et aura le culot de dire « I have made my fortune off the planet’s gifts […] and it’s my duty to repay the favor » comme si ce n’était pas en directe contradiction avec le propos écologique de la série. Présenté comme un allié indéfectible de la communauté scientifique déboutée par les autorités (…alors que pourtant, dans les premiers épisodes, son ingérence pouvait sembler suspecte), son rôle n’est pas franchement interrogé, si bien que le privé apparaît implicitement comme une solution tombée du ciel face aux vilains décideurs gouvernementaux (masculin volontaire).
    Sauf que ça non plus, Der Schwarm / The Swarm ne veut pas en parler, parce que ça se passe au moment où, enfin, il commence à y avoir vraiment de l’action !

    Vous le voyez, c’est un peu le bazar. Ce qui, notez bien, ne fait pas de Der Schwarm / The Swarm une mauvaise série. Sa distribution est solide, sa réalisation tient plutôt bien la route, la photographie n’est vraiment pas dégueulasse, certains décors naturels ont de quoi déboîter la mâchoire, les dialogues sont polyglottes (je suis curieuse de savoir comment la VF a géré ça, tiens, racontez-moi), et dans l’ensemble, c’est du bon divertissement grand public. Mais hélas, on ne va jamais au-delà. C’est triste quand même, de créer six heures de télévision sur les fonds marins, et de rester à la surface des choses… Pire encore, cette saison s’achève sur un cliffhanger un peu déroutant, alors qu’une saison 2 n’est absolument pas acquise pour le moment.
    On a vu des choses bien pires être produites ou même co-produites par la télévision française ; mais de là à dire que nos six diffuseurs en ont eu pour leur argent, c’est moins sûr.

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  • From the ashes

    25 juin 2023 à 22:28 • Review vers le futur •

    Le mois de juin n’est pas un moment de joie ; on peut y célébrer nos identités, mais il faut aussi l’employer à confronter ce qui est atroce dans nos histoires, et dans notre histoire commune. C’est visiblement le sens de la mise en ligne sur CBC Gem (la même plateforme à laquelle on doit déjà Sort Of) de la série Alter Boys, une série produite comme un petit film indépendant.

    Trigger warning : homophobie, maltraitance au moins psychologique.

    Son premier épisode est lent, et pourtant bref. Ses silences et ses ralentis étirent le temps, mais on y étouffe. On y suit principalement la perspective de Scotty Anderson, qui passe son deuxième été consécutif à CedarRidge, un camp logé au cœur d’une forêt du Manitoba où l’on pratique une thérapie de conversion .

    Quand commence ce premier épisode, les jeunes de CedarRidge ont en réalité vécu deux formes d’Enfer : ils viennent d’être secourus par les autorités locales après que leur camp ait pris feu en pleine nuit. Encore couverts de suie et de cendres, et encore sous le choc, ils attendent chacun leur tour d’être auscultés par la médecin de garde ce soir-là. Scotty est, comme les autres, abruti par les événements des dernières heures, et en même temps son cerveau repasse à mille à l’heure le déroulé des faits. Ce soir-là, il a été le seul à se précipiter dans une cabane en feu, et à en tirer Harris, le conseiller du camp. Son bourreau. Il n’a pas complètement tiré au clair pourquoi. Par contre il sait qui il a laissé dans les flammes : le directeur du camp, Gibson, qui y a donc trouvé la mort.

    Après l’examen médical (qui aurait pu avoir de bien pires conclusions), Scotty doit ensuite, comme ses camarades d’infortune Owen, Ben et Lucas, être interrogé par les autorités. Celles-ci prennent la forme de l’officier Olson, de la Manitoba Safety Alliance : le camp est en effet situé sur un territoire First Nations. Quelque chose que les garçons ne savaient pas ; amenés de force et dans le secret à CedarRidge, ils ignoraient même dans quelle région du pays ils se trouvaient.
    Les questions pleuvent. Les garçons n’ont pas vraiment de réponse. Peut-être ne savent-ils pas comment l’incendie a commencé… peut-être le savent-ils mais ont-ils pire à raconter. Leur discours est émaillé de références voilées à ce qu’ils ont été forcés de vivre dans ce camp, jusqu’à ce que l’incendie n’interrompe les sévices. Ceux-ci ne sont pas nécessairement montrés dans le premier épisode d’Alter Boys, si cela peut vous rassurer, mais un flashback sur un entretien entre Scotty d’une part, avec Gibson et Harris d’autre part, se solde par suffisamment de violence psychologique et physique banalisée pour qu’on se fasse assez peu d’illusions.
    Scotty passe de scène en scène comme un fantôme. Ce premier épisode est, de toute évidence, laconique quant à ce qui s’est réellement passé cette nuit-là, ou même les nuit précédentes. On ne nous dit pas vraiment non plus qui est le cinquième jeune homme, étendu dans un lit d’hôpital, auprès duquel Scotty vient s’étendre en fin d’épisode. Mais comme beaucoup de choses, on devine. Et on devine plus encore qu’Alter Boys finira par nous le dire, avec ses mots, au bon moment.

    Alter Boys est un projet intime ; cela se sent non seulement à son propos mais aussi à sa forme. Quand une série a des dialogues trop écrits et des acteurs pas assez dirigés, pour moi ce n’est pas une question de qualité ou de défaut, c’est presque une preuve intrinsèque de sincérité de la part de Jonathan Lawrence (le scénariste, réalisateur, et accessoirement interprète de Scotty). Ajoutez à cela les plans contemplatifs et la voix-off omniprésente, et vous comprenez peut-être ce que j’entends par « production indépendante » ; d’ailleurs Alter Boys est apparemment basée sur un court-métrage du même nom. La parenté se sent.
    De façon superficielle, Alter Boys peut sembler manquer de subtilité dans sa forme ; sur le fond, c’est toutefois exactement le genre de série qu’il faut regarder, particulièrement en ce mois de juin. Dommage que Netflix (qui pourtant avait soutenu le développement de la série dans le cadre d’un accélérateur conjoint avec CBC) n’ait pas l’air de proposer la série à l’international, mais ce sera peut-être le cas ultérieurement. Ce qui vous laisse le temps de trouver le courage de vous mettre devant.

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  • À consommer avec modération

    23 juin 2023 à 19:46 • Dorama Chick •

    Cela faisait un petit bout de temps qu’on n’avait pas causé « séries d’appétit » dans les parages, alors autant revenir avec du lourd ! Wakako Zake est en effet l’une des séries japonaises les plus longues en son (étrange) genre ; bon, pas aussi longue que Kodoku no Gourmet qui détient de toute évidence le record, mais pas loin derrière. Dans un pays où l’immense majorité des séries ne durent qu’une saison, Wakako Zake en compte six, ce qui est une belle performance. Elle a la chance, comme beaucoup de « séries d’appétit », de pouvoir s’appuyer sur un manga de 13 volumes, et puis plus largement d’avoir un concept déclinable à l’envi. Mais elle a aussi, voire surtout, un petit quelque chose en plus.
    Et ce petit quelque chose en plus… est précisément la raison pour laquelle je n’étais pas très attirée par elle, au départ. C’est que, voyez-vous, l’angle principal de la série pour suivre son héroïne Wakako dans de délicieuses aventures, est de la présenter comme une amatrice d’alcool.

    Eh oui, la série d’appétit du jour serait plutôt une série de soif !

    Wakako, une OL (« office lady« ) de 26 ans à la vie extrêmement banale, a un hobby… et ce hobby, c’est boire après le boulot. Oooh, she’s different…
    Le premier épisode de la série nous la présente au travail, remplissant des fichiers on ne sait pas trop sur quoi ni pourquoi, mais avec entrain : il est bientôt 17h, et l’heure c’est l’heure. Désireuse d’aller lever le coude dans la soirée, Wakako met les bouchées doubles sur son boulot pour avoir plus tard l’impression de mériter son petit remontant. Après avoir mis le paquet, elle est satisfaite d’avoir fini sa tâche en cours avant la fin de la journée… du moins jusqu’à ce qu’un supérieur l’approche, et lui confie une nouvelle tâche imprévue à finir avant le lendemain à 15h. Agacée par ce qui vient de lui tomber dessus sans prévenir, Wakako prend quand même ses jambes à son cou à 17h, et se met en quête d’un établissement où noyer son agacement.

    Cette introduction est pliée en deux minutes, parce que contrairement à l’immense majorité des « séries d’appétit » (dont le format est généralement assez rigide à cet égard), à ma grande surprise, Wakako Zake n’a pas vraiment envie de construire un besoin : elle est toute à l’exploration de la satisfaction. Wakako trouve donc sans plus attendre le restaurant idéal, un petit endroit charmant qui se spécialise dans les grillades de poissons, et décide de sa commande.
    Car oui, deuxième surprise, Wakako Zake n’est pas, comme je le craignais, juste une série de boisson ! Au contraire la série comme sa protagoniste mettent l’accent sur une question importante : si on veut boire un bon verre pour se détendre, quel est l’alcool qui va le mieux avec quel plat ? Pas question de simplement se murger. Après avoir hésité un peu, Wakako finit par commander un saumon grillé, et pour accompagner, un sake Kokken que lui recommande la serveuse. S’en suit, comme c’est la tradition dans les « séries d’appétit », une longue dégustation émerveillée et détaillée, la jeune femme s’absorbant dans la texture de son saumon (la peau craquante, la chair fondante…). Et, surtout, dans la façon dont son repas s’allie avec perfection à sa boisson ! Pendant qu’elle s’extasie, Wakako ne l’a pas remarqué, mais ses moues ravies font envie à son voisin de table qui finit par commander comme elle un saumon grillé. Sauf que, impardonnable impair, il n’a pas réalisé combien le sake était partie intégrante de ce régal, et n’en commande pas, ce qui a le don d’agacer Wakako lorsqu’elle s’en aperçoit. Pour évacuer sa frustration (les gens ne comprennent rien à l’importance d’un bon sake !), au sortir du restaurant, elle décide de ne pas rentrer chez elle… et embraye sur un second établissement.
    Troisième surprise ! Voilà donc Wakako qui bientôt pousse la porte d’un autre bistrot, où elle commande un alcool différent, un sake Onekoete qu’on lui recommande (parce que ses notes plus légères plaisent d’ordinaire aux femmes). Cette fois, elle choisit les plats en fonction de l’alcool : d’abord, des asperges en entrée, puis un namerou, que le patron du restaurant lui prépare de bonne grâce alors que ça n’apparaît pas sur le menu. Ouais, l’air de rien le patron du second restaurant vient de nous faire un Shinya Shokudou ! Une seconde dégustation en découle, Wakako savourant avec joie les nuances de son namerou qui s’associe si bien à son sake… La soirée est plus calme dans ce lieu où elle se sent bien reçue, et où aucun autre client ne semble faire preuve de mauvais goût. Toutefois, alors que lui reviennent en mémoire les événements de la journée passée, elle se sent un peu gênée lorsqu’elle réalise qu’elle vient de faire au restaurateur la même chose que son propre supérieur un peu plus tôt, avec une commande imprévue. Toutefois, Wakako réalise que personne ne lui en tient rigueur, et implicitement, le patron la réinvite même à revenir tester d’autres sake dans le futur. Des sake qui n’apparaissent pas sur le menu, en plus !
    Le fait que la soirée soit délicieuse (et alcoolisée, et associée à la joie d’avoir découvert un chouette resto, et ponctuée par la réalisation qu’une commande imprévue peut avoir des bons côtés), finit de réconcilier Wakako avec sa journée de travail du lendemain. Surtout avec cette fameuse tâche qu’elle doit finir avant 15h. Mais qui, avec le recul d’une soirée détendue, n’a plus l’air si grave, finalement. Tout est bien qui finit bien.

    J’ai de toute évidence pris la liberté de vous raconter tout l’épisode parce que, bon, déjà, franchement, le suspense est la dernière chose qu’on attend d’une série de ce type. On se doutait plus ou moins, parce qu’après tout ce sont les règles du genre de la « série d’appétit », qu’une soirée passée à se régaler allait conduire Wakako à faire la paix avec quelque chose, et ici l’épisode a clairement mis en place un conflit dans sa vie professionnelle. C’est une démarche voisine de celle que j’avais décrite, d’ailleurs, dans ma review de Gohoubi Gohan (dont la diffusion est postérieure à celle de Wakako Zake), n’hésitez pas à aller y jeter un oeil.

    Toutefois, le but de ce résumé d’épisode est aussi de vous décrire, au fil de mes surprises successives, ce qui fait la force de Wakako Zake dans sa catégorie. Il s’agit résolument d’une série sur la consommation d’alcool, mais ici, ce qui sert de moteur à l’équation « alcool = détente », ce n’est pas le volume d’alcool consommé… et ce n’est même pas non plus l’ivresse. Or c’était vraiment ce qui m’avait tenue éloignée de la série toutes ces années !
    Au contraire ici, l’idée d’avoir trouvé la combinaison parfaite sous-tend les deux longues séquences de dégustation de ce premier épisode. Comme Wakako le fait remarquer, elle ne boit pas pour oublier : elle boit pour remarquer. C’est-à-dire que l’alcool réhausse le goût de certains plats, et de la même façon, réhausse certaines expériences. En un sens, cela pourrait se produire avec n’importe quelle autre pratique de relaxation, le fait qu’il s’agisse d’alcool est un peu accessoire. Ce qui compte, c’est la ritualisation (sortir à 17h pile et se mettre immédiatement en quête d’un restaurant approprié), l’environnement (un petit restaurant chaleureux où elle peut échanger avec les employées et se détendre), la découverte (elle ne connaît aucun des deux sake qui lui sont servis ce soir-là), et la joie de trouver la parfaite combinaison (l’alcool choisi doit être délicieux seul, mais ne s’envisage vraiment que couplé avec un plat assorti). Ce n’est qu’une fois toutes ces étapes franchies que Wakako Zake délivre à son héroïne la satisfaction promise par le genre tout entier de la « série d’appétit », ici matérialisé par une acceptation des petites frustrations du quotidien professionnel.

    J’ai été frappée par les choix opérés ici, quant à la représentation du rapport à l’alcool. Wakako Zake met un point d’honneur à ce que la consommation dépeinte ne soit pas excessive, et à ce qu’elle trouve un sens gustatif. La série insiste aussi sur la façon dont c’est une expérience certes solitaire (Wakako ne sort pas avec ses collègues après le travail), mais aussi collaborative (dans les deux restaurants de cet épisode, elle suit les recommandations du personnel) ; il ne s’agit pas d’être seule face à son verre, pas vraiment, quand bien même l’expérience relève de l’intime. Et enfin, voire surtout, l’ivresse n’est donc pas du tout le but recherché… non plus que la résistance à l’ivresse ; il ne s’agit pas de tester ses limites. Wakako ne se pose pas la question de « tenir » plus ou moins bien l’alcool, vu les quantités relativement raisonnables ingurgitées (un verre dans le premier resto, et un petit pichet dans le second). Il n’y a rien à prouver.
    Wakako Zake offre un modèle de consommation d’alcool plaisant mais raisonné. On n’y boit pas nécessairement moins, mais on y boit mieux.

    Au fil des mes (nombreuses !) explorations des « séries d’appétit », j’ai souvent eu l’occasion de vous dire combien ces séries, qui dépeignent diverses protagonistes représentant toutes sortes de groupes de la société japonaise, représentent un discours important sur la place de la nourriture dans nos vies. Manger est un acte non seulement banal, mais aussi quelque chose de complexe, un geste intime, culturel, et social. Aussi les « séries d’appétit » détaillent, par des intrigues procédurales et en apparence simplistes, des relations à la nourriture qui traduisent la complexité de notre relation à la bouffe. La bonne bouffe, la malbouffe, les plats qu’on cuisine seule, les plats qu’on déguste ensemble… Que dit de nous ce que nous mangeons ?
    Wakako Zake fait ici exactement le même travail… camouflé derrière la structure procédurale du genre, avec ce qu’elle implique de dialogue interne, et de descriptions méticuleuses de chaque mets savouré. Sauf qu’ici, les mets sont aussi liquides, voilà tout. Mais la complexité est la même.
    Sur ce, bon vendredi soir…

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  • Orfèvrerie

    22 juin 2023 à 22:09 • Telephage-o-thèque •

    C’est une initiative intéressante que l’on pourra observer sur arte ce soir à 23h45 : une série kenyane, Country Queen (diffusée sous le titre français Pour l’or de Tsilanga). Intéressante d’abord parce que les séries africaines sont encore excessivement rares à la télévision française. C’est d’ailleurs rare même pour arte, puisqu’il y a deux ans la série sud-africaine Hopeville n’avait été offerte que sur arte.tv et pas en diffusion linéaire. Sûrement que les diffuseurs ne savent pas qu’il y a une diaspora africaine en France… et c’est là mon hypothèse la plus généreuse à ce désintérêt. Mais aussi parce que Country Queen a une genèse originale… que je ne vais pas aborder tout de suite, parce que sinon vous seriez tentée de ne pas lire la review ! Non mais je vous connais, hein.

    Akisa est une jeune femme ambitieuse, qui est à la tête de sa propre société d’organisation d’événements. La jeune femme a décroché une opportunité unique, et pleine d’avenir. Il s’agit d’une cérémonie de récompense mettant en vedette Max et Vivienne Sibala, un riche couple à la tête d’Eco Rock, une des plus importantes compagnies du pays. Les Sibala sont connues pour leur lutte contre la corruption ; c’est d’ailleurs l’objet de la petite sauterie du jour, qui réunit tout le gratin de Nairobi. Si la soirée se passe bien, Akisa est sûre de décrocher des contrats pour des événements plus prestigieux à l’avenir. C’est un peu stressant, mais c’est également grisant ! Au moins aussi grisant que son aventure avec Max, qui la fréquente en cachette de sa femme. Droiture morale, mon oeil…
    Pas de chance, quelqu’un fait une scène pendant la soirée : un homme qui s’estime spolié par les Sibala lance un projectile sur Vivienne ; ça n’a pour effet que de tâcher sa robe, mais l’esclandre se produit devant la presse. La fête tourne donc au scandale, ce qui évidemment ulcère Vivienne. Elle a tôt fait de se retourner contre Max, dont on découvre qu’elle le traite plus en homme de main qu’en mari. Celui-ci veut se réfugier auprès d’Akisa, mais celle-ci a d’ores et déjà d’autres priorités : dans la même soirée, l’une de ses tantes fait appel à elle. Akisa doit revenir en urgence dans son village natal : son père, à la santé déjà chancelante, a fait un malaise. Ce que la tante ne mentionne pas, c’est que ce malaise a eu lieu après avoir découvert toutes ses poules massacrées par des gens qui en veulent à ses terres… Il est en effet le seul propriétaire terrien de son village à refuser de vendre à une compagnie minière.
    Sans plus attendre, la jeune femme prend la route pour venir au chevet de son père, malgré les traumatismes passés.

    Il se passe de toute évidence BEAUCOUP de choses dans ce premier épisode, et le plus étonnant est que, pour un épisode d’exposition, on est beaucoup dans la suggestion. Les émotions ressenties par Akisa ne sont jamais verbalisées, mais plutôt le fait de flashbacks qui se traduisent plutôt par des sortes de vision du passé, que par le vocabulaire visuel du souvenir. En fait, dans cette série, on ne dit pas vraiment ce que l’on ressent, et le silence de ces émois a quelque chose d’à la fois pénétrant et mystérieux, comme si l’âme des personnages nous échappait toujours un peu. La finesse avec laquelle Country Queen met en place son héroïne, également, est louable : Akisa est présentée d’abord par sa réussite (ou ce qu’elle pense être, en tout cas, une vie réussie), puis, lentement, on en apprend plus sur les raisons qui l’ont conduite à faire les choix d’aujourd’hui ; ainsi l’ambition initialement affichée s’avère-t-elle être plutôt une revanche sur la vie. Au terme du premier épisode, quand bien même on a beaucoup de cartes en main, on a le sentiment de n’avoir qu’à peine gratté la surface de ce qui torture la jeune femme, depuis des années. Depuis qu’elle a fui. Depuis avant cela, même.
    Revenir dans son village natal n’est pas qu’un retour à ses origines humbles, donc, mais bien un travail pénible de confrontation à ses souvenirs, ainsi qu’aux visages qui incarnent ses souvenirs, et ils ne sont guère joyeux. Mais elle revient juste au « bon » moment, ayant le temps d’une dernière conversation avec son père dans laquelle celui-ci lui présente des excuses… quelques heures avant de s’éteindre. Un deuil compliqué attend, sans nul doute, la jeune femme.

    Ne vous méprenez pas : Country Queen n’est pas qu’un human drama (même si ce n’est pas sale). La série a beaucoup de choses dans sa manche, et ça passe notamment par une intrigue secondaire dans laquelle on découvre que les si louables Sibala, à la tête d’un empire minier, sont en réalité pourries jusqu’à la moëlle. Pendant la même soirée que Vivienne comptait utiliser pour briller aux yeux de la haute société kenyane, Max était supposé garder un oeil sur un échange avec des trafiquants d’or. Oui, les Sibala « blanchissent » de l’or sale ! Nous ne sommes d’ailleurs pas les seules au courant : un journaliste semble être sur la piste de leurs malversations.
    Ce trafic pourrait être purement théorique, ou au moins une affaire de crime en col blanc, mais Country Queen ne mange pas de ce pain-là. Elle insiste aussi pour toucher à d’autres aspects du trafic d’or, en montrant les conséquences, bien réelles, de ces affaires pas très propres. Eh non, les crimes en col blanc ne sont pas des crimes sans victimes, ce sont juste des crimes dont les victimes ne connaissent jamais l’auteur ! Et Country Queen le montre à travers la pression qui pèse sur les petits propriétaires pour revendre leurs terres à des compagnies minières (« encouragées » par des techniques d’intimidation si le peer pressure ne suffit pas). Une intrigue autour d’un petit garçon appelé Joshua permet également de souligner l’exploitation illégale d’enfants dans les mines, et qui permet à une filiale d’Eco Rock de trouver un bon filon dans ce premier épisode au péril de sa santé.
    Un premier épisode dense, donc, mais étonnamment digeste. A tort ou à raison, j’ai repensé au premier épisode de la série sud-africaine Ihawu devant ce démarrage de Country Queen, qui a pas mal de points en commun, mais aussi une énorme différence ! Country Queen ne requiert pas vraiment de compréhension préalable (et guère plus de lecture a posteriori) des enjeux socio-économiques ou historiques du Kenya pour comprendre l’intrigue. Tout y se déroule sous nos yeux. L’explication tient peut-être, au moins en partie, à sa genèse.

    Country Queen a été produite entièrement au Kenya, sa distribution comme son équipe technique sont majoritairement kenyanes… mais la série a été conçue en Allemagne, où résident ses productrices exécutives et d’où provient la plus grande partie de son financement. Good Karma Fiction, la société de production allemande qui est à son origine, est en effet spécialisée dans la création de séries et de films tournés en Afrique (je n’ai pas réussi à déterminer si c’était juste le Kenya, par contre). Son objectif est de financer les étapes de la fabrication de ces fictions, du développement au tournage (je ne sais pas pour la post-production) en Afrique sub-saharienne, mais aussi de former les professionnelles de l’équipe technique. Toutefois, ce financement se fait sur la base crédits et aides octroyées par des diffuseurs (arte et ZDF dans le cas de Country Queen) ainsi que par des organismes d’aide à la création (ici DW Akademie, le BMZ, la Ford Foundation) de l’hémisphère nord.
    Le site de Good Karma Fiction ne rentre pas dans les détails (ça ne leur ferait pas de mal de rajouter un espace presse, mais bon), et d’une façon générale il n’a pas l’air d’être très à jour puisqu’il considère que seul un pilote a été produit pour Country Queen à ce jour. Ahem. Reste qu’il donne une bonne idée du type de projets que ses productrices soutiennent, c’est-à-dire… une palette assez large de genres ! Un teen drama d’aventures, un revenge drama se déroulant dans les années 50, une dramédie sur une psy aveugle, un drama familial fantastique… les ambitions de Good Karma Fiction semblent être intéressantes, si tous ces projets voient le jour en tout cas. Il faut également noter que pour autant que je puisse en juger (encore une fois, ce site mériterait d’être plus complet), les séries en développement seraient écrites par des scénaristes africaines, et dans une interview le producteur kenyan Kamau Wandung’u indique que 98% de l’équipe de Country Queen était africaine. L’intervention des productrices exécutives allemandes semble donc, en grande partie au moins, se limiter à mettre les choses en place, notamment du point de vue de l’obtention de financement et de la distribution. Et en effet, avant même d’atterrir sur arte ce soir, Country Queen a été proposée dés l’an dernier par Netflix, dont elle est de facto devenue la première série kenyane « originale ». On aimerait bien des nouvelles de ses commandes originales kenyanes, mais pas de chance, Netflix passe sous un tunnel.

    Pas étonnant, dés lors, qu’une fiction pour laquelle les chèques ont été signés à l’étranger ait tendance à être plus facile d’accès pour un public non-kenyan : c’est généralement ce qui se passe quand l’élaboration de la série elle-même est le fait d’une équipe internationale. Et surtout cela permet à Country Queen de connaître un sort que peu voire pas de séries kenyanes ont pu connaître jusque là… c’est-à-dire nous parvenir.
    L’occasion de se montrer curieuse de la fiction d’ailleurs… et, surtout, curieuse des problématiques dont on entend si peu parler sur nos propres écrans, comme le trafic d’or.

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  • Make that two

    18 juin 2023 à 22:39 • Review vers le futur •

    On est dimanche soir, je n’ai pas fini la review sur laquelle je travaillais, alors je décide de m’envoyer un pilote de comédie derrière la cravate, histoire de finir le weekend sur une note moins frustrante. Et quelle n’est pas ma surprise : il s’avère que je tombe alors totalement sous le charme de la série !!! Alors forcément je me devais de courir ventre à terre pour vous faire part de ma découverte, d’autant qu’il s’agit d’une série qui… lorgne sur la romcom.
    Je sais, c’est à peine croyable, et pourtant, bienvenue dans le monde de Double Parked.

    La série s’ouvre sur une joyeuse soirée pendant laquelle Nat et Steph ont invité leurs amies Lily et Johnny à dîner… et la conversation bat son plein sur la reproduction humaine et la grossesse. C’est que, voyez-vous, Nat et Steph espèrent convaincre Johnny de devenir leur donneur de sperme, et les choses sont d’ailleurs plutôt bien engagées, si ce n’est qu’il faut quand même mettre au clair les détails avant de s’engager dans cette voie. Mais après des questions, des rires et quelques vannes graveleuses, finalement Johnny accepte. Nat et Steph, soulagées, ont fait un pas dans la direction qui fera d’elles des mères…
    …sauf que deux ans plus tard, toujours rien. Steph est passé par plusieurs traitements de fertilité, et dans le bureau du Dr. Foster qui les suit (…plus ou moins, vu le bordel de ses dossiers), elle apprend une fois de plus que, coup dur, elle n’est pas enceinte. Avec un énorme sentiment de ratage, elle rentre avec Nat pour fêter l’anniversaire de Lily, en compagnie de Johnny bien-sûr. La petite bande a tôt fait de se mettre minable pour oublier les événements de la journée.

    Dans un éclair de génie dû à l’alcool, soudain, Lily a une idée : pourquoi est-ce Steph qui doit être enceinte ? Les deux femmes n’ont pas les idées très claires, mais elles conviennent néanmoins que l’idée n’a jamais vraiment été abordée que Nat soit celle qui porte leur enfant. En fait l’idée semble tellement lumineuse, que dans le feu de l’action, voilà bientôt Johnny qui s’isole avec un réceptacle dans la salle de bains, et Steph et Nat armées d’une poire à sauce !
    Le lendemain, tout le monde (entre deux gueules de bois) rigole bien de cette aventure, qui ne donnera, évidemment, rien… Évidemment. Évidemment, pas vrai ?! Non mais imaginez que Nat soit enceinte de Johnny, surtout qu’elles sont sorties ensemble quand elles étaient ado, non franchement ce serait le bazar.

    Le charme de Double Parked, et c’est une sacrée performance, compense totalement la prévisibilité de sa mise en place. Ce premier épisode suit une structure simple et sans grande originalité, annoncée dés le titre (sans parler du matériel promotionnel), mais c’est pas grave parce que sur le reste, tout fonctionne ! Le quatuor amical a une énergie incroyable, employée dans deux montages de soirées qui, à deux ans d’écart, changent chacune le destin d’un couple. Et puis la relation entre Steph et Nat est immédiatement attachante, pleine d’un petit quelque chose de complice qui ajoute à la tendresse. En fait, c’est même ça qui m’a immédiatement ravie, et m’a rappelé combien je préfère cent fois une romance dans un couple déjà établi plutôt que les atermoiements sur un couple dont tout le monde sait qu’il va se former, sauf lui. Entre Steph l’hypersensible (surtout après deux années de parcours de fertilité) et Nat la décontractée (on va voir combien de temps ça dure), il y a quelque chose qui se joue d’autant mieux que cette relation ne repose pas trop sur des stéréotypes usés.
    Avant la fin de cet épisode introductif, voilà donc Nat enceinte, mais aussi, à la surprise générale, Steph (je vous laisse découvrir pourquoi). Et quoi qu’il arrive, je suis déjà conquise. Qui l’aurait cru ?

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  • Canal jaune et bleu

    17 juin 2023 à 19:50 • Telephage-o-thèque •

    Beaucoup de choses ont été dites de l’importance de l’image dans le cadre des guerres modernes, et en particulier l’invasion russe de l’Ukraine. La plupart de ces choses ont toutefois été dites des images réelles, capturées pendant les combats, chroniquant le parcours des exilées, ou suivant le peuple resté en Ukraine dans son quotidien. Et, surtout, de Zelensky. Peu de choses, en revanches, ont été dites sur la fiction.
    Pourtant c’est bel et bien de fiction que tout est parti pour Zelensky lui-même ! Comme on a eu l’occasion de le dire précédemment, dans la review consacrée au premier épisode de la comédie politique Sluga Narodu, l’actuel Président ukrainien s’est fait connaître… et, selon votre point de vue, potentiellement élire… grâce aux séries. Egalement producteur de Sluga Narodu (ainsi que de Svaty, nommée à deux reprises à l’occasion du Festival de télévision de Monte-Carlo), Zelensky a un savoir-faire évident dans la façon de (se) mettre en scène. Il l’a employé dans le cadre de son mandat pour attirer l’attention de la communauté internationale sur la guerre dans son pays…

    …Mais il n’est pas le seul. La fiction ukrainienne ne dépend pas que de lui pour raconter, comme beaucoup de télévisions à travers le monde, un roman national. C’est de cela dont je vous propose de parler un peu aujourd’hui, à travers une review croisée du premier épisode de deux séries : Mama, diffusée avant que ne commence l’invasion russe et proposée par arte.tv jusque récemment, et Ia – Nadiya, lancée exactement un an après début de l’offensive.
    D’ailleurs, vous savez quoi, on va même commencer par cet anniversaire.

    L’intrigue de la mini-série Ia – Nadiya (littéralement « moi, Nadiya », mais son titre international a opté pour le jeu de mots I Am Hope) démarre le 14 février 2022. Ce jour-là, tout est encore paisible en Ukraine, au moins en apparence.
    L’héroïne, Nadiya donc, est secouriste, encore un peu novice et avec plein de choses à apprendre sur le métier. Elle fait cependant au début de l’épisode une expérience qui l’interpelle à un autre niveau. En effet, un homme en uniforme prétend s’évanouir pour être évacué vers l’hôpital… et se sert de cette opportunité pour déserter, prenant la direction de l’aéroport. En partant, il lui glisse un billet ; pour qu’elle s’achète une robe, lui dit-il… ou un billet de train pour Lviv. Nadiya ne comprend pas, et c’est à son collègue Petrovych de lui expliquer que, avec les rumeurs d’invasion russe qui enflent, de plus en plus de soldats se sauvent loin de la frontière. Pour Nadiya, naïve mais surtout habituée à sauver la vie d’inconnues plutôt que la sienne, ça n’a pas de sens.
    L’incident est toutefois vite noyé dans le quotidien. Petrovych est plus préoccupé par le partage des pots-de-vin, et le boulot reprend, à son rythme habituel. Nadiya fête la Saint-Valentin avec son petit ami Roma (non sans noter qu’il est terriblement jaloux de l’ami d’enfance de Nadiya, Pasha, quand bien même celui-ci vit en Slovaquie…), avec lequel elle planifie des vacances d’été au Portugal plutôt que de l’accompagner dans ses vacances aux Carpates qui commencent le lendemain. Sa mère, infirmière, qui leur a laissé l’appartement vide ce soir-là… La guerre n’arrivera sans doute jamais (« on est au 21e siècle », lui assure Roma, « on règle les problèmes autrement ») et la vie continue.
    Sauf que quelques jours plus tard, elle arrive. A quelques kilomètres de Kharkyv. A quelques kilomètres du lit de Nadiya.

    Les heures qui suivent sont empreintes d’une normalité anormale. La ville est vraisemblablement la même ; ses habitantes, beaucoup moins. Pour chacune, c’est l’heure du choix : partir ou rester ? Beaucoup partent. Dans la précipitation. Laissant des affaires, des animaux, des proches même, derrière soi… tout ne peut ou ne veut pas nécessairement voyager. Mais certaines choisissent de rester, comme la mère de Nadiya, infirmière, pour qui cela tombe quasiment sous le sens de continuer de travailler.
    Roma a réservé un billet que Nadiya le rejoigne dans les Carpates ; plus tard dans l’après-midi, elle prendra le train, se réfugiera à l’étranger. La mère de Nadiya encourage sa fille à partir, sans la moindre hésitation. Sauf qu’il y a plusieurs heures à attendre avant le départ du train, et que Nadiya, ne sachant tout simplement pas comment exister dans l’intervalle, décide d’aller tuer le temps au boulot malgré son jour de congés qui fait que personne ne l’y attend. Elle découvre une fois sur place, avec Petrovych qui lui aussi ne savait pas quoi faire de lui-même pendant sa journée de repos, que la vie à Kharkyv continue : les mêmes maladies, les mêmes urgences… Par contre, pas le même personnel ; forcément, puisque certaines fuient la ville… Se produit ce qui devait se produire, et voilà bientôt Nadiya, Petrovych, et l’infirmière Olena (dont c’est le premier jour), embarquées dans la même ambulance en cette journée banale de fin du monde.

    Ia – Nadiya n’a pas le temps d’être complexe. Non seulement parce qu’elle ne dure que 4 épisodes (hélas j’ai eu des soucis de corruption sur le 2e épisode, donc on devra se contenter de ne parler que du premier), mais aussi parce qu’elle a été tournée en l’espace de 17 jours. Et bien-sûr… pendant une guerre. La chaîne 2+2 qui la diffuse s’enorgueillit d’avoir produit la première série ukrainienne de cette guerre, c’est-à-dire non seulement sur celle-ci mais aussi pendant celle-ci (toutefois la majorité des scènes ont été tournées à Kyiv). Les actrices parlent de contrats stipulant que la production n’est pas responsable en cas de mort sur le tournage, de couvre-feu et de coupures de courant, de scènes filmées dans la cendre des maisons réellement démolies par les bombes…
    Cela explique sûrement le ton de la série. Tout y est grave. On ne cherche pas à ménager des scènes plus légères, on ne donne pas dans l’euphémisme. Il y a un personnage d’enfant (le fils d’Olena) mais son apparition est pour le moment brève. A l’inverse, on ne tape pas dans l’héroïsme dégoulinant ; une certaine dignité est de mise (bon, on parle d’héroïsme quand même, ça va de soi).
    Ce premier épisode se voit comme une photographie d’un moment-charnière. D’ailleurs, ce moment a semble-t-il existé : Ia – Nadiya est inspirée par une étudiante en médecine de 21 ans nommée Anna Andryushchenko, devenue ambulancière de fortune. Elle est devenue l’une des célébrités de circonstance de cette guerre.

    Quatre soldats chantent gaiement à l’arrière de leur fourgon, quelque part sur une route ukrainienne. L’un d’entre eux, son téléphone entre les doigts, enregistre une video dans laquelle il souhaite un joyeux anniversaire à sa mère, à l’autre bout du pays. Elle ne la recevra jamais : une explosion touche bientôt le véhicule, et les soldats, blessés, sont bientôt capturés par l’ennemi. Des combats dans le Donbass, le premier épisode de Mama ne nous dira rien de plus : son objet n’est pas d’être une série militaire. C’est, avant tout, un mélodrame sur fond de guerre.
    Les faits décrits dans Mama ne portent pas sur l’invasion de 2022 ; il s’agit au contraire d’une série suivant le parcours d’une femme, Nina, pendant le conflit de 2014. Vivant à Jytomyr avec son mari et sa fille adolescente, travaillant dans un grand hôpital, et ayant un train de vie décent, la guerre n’aurait pas touché Nina si son fils Vitaly ne s’était pas retrouvé dans l’armée, envoyé à l’autre bout du pays pour le défendre. Seulement voilà : la prise en otage de ces quatre soldats inclut Vitaly… Découvrant par hasard ce fait via une video sur internet dans lequel il apparaît blessé, Nina prend immédiatement les choses en main ; devant l’impuissance de l’armée ukrainienne, elle fait appel à un amour de jeunesse qui travaille dans les renseignements. Avec son aide, elle trouve un contact à la frontière qui lui indique qu’il peut lui restituer son fils… en échange d’une somme conséquente, ça va de soi. Nina se met donc à son tour sur le chemin du Donbass, sur les traces de son fils.

    On ne fait pas exactement dans la finesse avec Mama. A grand renfort de musiques lancinantes, d’attaques cardiaques (du mari de Nina), et de larmes aux yeux, la série insiste, presque contre-intuitivement, sur le désespoir de la situation plutôt que sur le courage de sa protagoniste. Un courage d’autant plus louable qu’évidemment elle a peur, mais qu’il est hors de question d’y céder… cet épisode introductif a beaucoup de mal à trouver le bon équilibre, si bien que Nina, pourtant une femme imposante moralement comme physiquement, éduquée et intelligente, apparaît ici uniquement comme une victime de quiconque a envie de tirer profit d’elle ce jour-là. L’histoire qui se raconte dans Mama, c’est effectivement une histoire de victime, et c’est cela qui est louable ; contrairement aux séries de guerre (et il y en a de très nombreuses sur ce mode… à la télévision russe !) où il est question de victoires et de faits d’armes valeureux, Mama est plutôt dans le registre Calimero, à dessein. Nina incarne une Ukraine prisonnière des circonstances, baladée par ceux qui prétendent l’aider, mais obstinée. A grand renfort de violons. Après tout, la série n’est-elle pas dédiée aux mères des héros ? Pas à des héroïnes.
    Même quand il veut parler de la situation plus générale du pays, ce premier épisode de Mama a du mal. Son propos sur la corruption est, au moins pour le moment, superficiel ; sa représentation de la fracture est/ouest de l’Ukraine (entre les populations exposées à la Russie et celles qui sont « à l’abri ») est simpliste, évoquée comme à mots couverts, résolue par une pirouette ; son évocation de la question politique reste vague. Même quand elle semble accuser l’armée de ne pas vraiment faire d’efforts pour sauver ses propres soldats, Mama donne dans la mollesse. On peut évoquer les sujets qui fâchent, mais il ne s’agit pas de caresser la fibre patriotique à rebrousse-poil. Ressort de Mama une impression un peu gênante…

    Alors certes, Mama est une série initialement diffusée en février 2021, soit un an avant le conflit qui fait rage à l’heure où vous lisez ces lignes. Vous pourriez me dire : « mais lady, du coup, quel est le rapport avec la guerre de l’image actuelle ? »… et vous auriez raison, sauf qu’il vous manquerait les deux informations qui suivent.
    D’abord, le 16 février 2022 (c’est-à-dire alors que l’invasion paraissait, à juste titre, imminente), la chaîne STB a décidé de rediffuser la mini-série sur son antenne. Difficilement un hasard. Et d’autre part, c’est en 2022 que Mama a commencé à être largement diffusée dans le monde : outre arte en Europe de l’Ouest, il faut en effet également compter la diffusion en Pologne, République tchèque, Estonie et Lituanie. Et cette dimension internationale n’est vraiment pas un accident.

    Nul ne sait où en sera le conflit armé d’ici quelques mois. Ce qui est certain, c’est que le conflit télévisuel, lui, n’est pas prêt de s’apaiser.
    Au mois de mars 2023, on apprenait que FILM.UA (l’une des plus grosses boîtes de production du pays) avait mis en chantier une anthologie au titre international de Those Who Stayed. S’intéressant, comme Ia – Nadiya, aux premières semaines de l’invasion de 2022, Those Who Stayed promet 6 épisodes co-produits avec les diffuseurs publics suédois, norvégien et finlandais, ainsi que la société allemande Red Arrow.
    Quelques semaines plus tard en avril, le MIPTV incluait une rencontre à Cannes sur le thème « Stand with Ukrainian Content Industry« . L’occasion pour plusieurs grandes figures de la télévision locale de rappeler leur engagement à raconter, à leur propre public mais aussi en grande partie au-delà, l’histoire de leur nation. Un projet d’autant plus important une fois la guerre finie. La télévision ukrainienne est très consciente du pouvoir de la fiction pour lui assurer la protection culturelle (et donc diplomatique) de l’Europe notamment. Or, si les enjeux sont politiques, ils sont aussi économiques. Autrefois submergée de séries russes (dont souvent ses équipes étaient co-productrices), l’Ukraine a amorcé au fil des dernières années une transition pour s’affranchir de la fiction ennemie… Sauf que quand on est un petit pays, il faut bien amortir les coûts de production d’une façon ou d’une autre. Dans ce contexte, poser des jalons internationaux, c’est bien plus que porter la voix d’un pays en guerre : c’est financer la reconstruction d’une industrie actuellement en jachère.
    Cela dit, il n’est pas nécessaire d’attendre la fin de la guerre pour mettre certaines choses en chantier. Au mois de mai, c’était au tour d’une autre anthologie dramatique, intitulée Yellow Blue (à la fois une référence au drapeau ukrainien, bien-sûr, mais aussi un jeu de mots sur « ia lyubliu« , c’est-à-dire « je t’aime »), d’être annoncée. Chaque épisode de la future série devrait raconter des « histoires vraies » des premiers jours de l’invasion en février 2022. Les exemples de sujets donnés sont notamment un épisode dans lequel un Français se rend dans la zone occupée par les Russes à la recherche de sa petite amie ukrainienne, ou une veuve tentant d’évacuer l’Ukraine comme des milliers de réfugiées. Des histoires qui incluent une dimension internationale, donc. Vous serez surprise d’apprendre que la série, dont le diffuseur national est pour le moment inconnu, est financée en partie par le ministère de la Culture ukrainien, en plus de la Ukrainian Film Fund. Qui d’ailleurs n’a quasiment plus de budget, pour des raisons compréhensibles… mais en a trouvé dans le cas qui nous occupe. Il est déjà prévu que les recettes occasionnées par la distribution (notez bien que le terme employé n’est pas ici la diffusion) de la série soient reversées à des organismes d’aide aux victimes de la guerre.

    Soyons claires : il ne s’agit pas de dire que c’est mal, et encore moins que ces séries et projets, bien qu’ayant vraisemblablement une coloration (ha ha) idéologique précise, ne devraient pas exister. Il est assez naturel qu’une petite nation en guerre, a fortiori si elle est envahie, s’empare de tous les outils à sa disposition pour attirer l’attention à l’étranger sur sa cause ! Sans parler du fait que, de toute évidence, c’est un sujet important pour ses propres spectatrices.
    Cela nous rappelle toutefois que la prudence doit être de mise, dés lors que nous consommons de la fiction produite dans un autre pays (bon, et aussi le nôtre, mais c’est une autre problématique encore !). Tout n’est pas forcément propagande outrancière ! Mais toute série mérite un regard critique et distancié, afin de bien garder en tête les enjeux politiques, voire diplomatiques, qui pèsent derrière la simple diffusion de quelques épisodes. Même sirupeux. Peut-être même surtout.

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  • Bredouille

    9 juin 2023 à 22:54 • Review vers le futur •

    Avant le Bling Ring, il y avait la Lidingöligan, un groupe de jeunes suédoises qui ont cambriolé plusieurs maisons cossues pendant la seconde moitié des années 90. C’est à cette « ligue de Lidingö » (Lidingö étant la bourgade friquée où plusieurs d’entre elles vivaient) que s’intéresse Barracuda Queens, une nouveauté suédoise de Netflix lancée en ce début juin.
    Je vous rassure, ça va être une review très courte, entre autres parce que cet épisode, à ma grande surprise, ne dure qu’une demi-heure. Un choix étonnant car l’exposition aurait facilement pu faire usage de quelques minutes supplémentaires pour approfondir certaines protagonistes, mais… ça fait partie des raisons pour lesquelles ceci va être une review un peu expéditive.

    C’est que Barracuda Queens ne semble, en fait, pas vraiment être intéressée par ses personnages, voyez-vous. Ce sont surtout les circonstances qui l’intéressent, comme si la créatrice (et réalisatrice) Amanda Adolfsson n’avait été intéressée que par la surface des choses. La mise en place est donc plus focalisée sur la Lidingöligan en tant que groupe, que sur les individualités des unes et des autres : les quatre amies sont parties en virée, ont dépensé des sommes folles ainsi que causé des dommages dans l’hôtel de luxe où elles ont séjourné, mais hors de question de l’admettre devant leurs parents qui les croyaient en stage de tennis. Du coup, avec des dettes à rembourser en quelques semaines, la question se pose de trouver l’argent.
    Ce ne devrait en théorie pas être un gros problème, puisque trois de ces quatre amies sont super riches, mais voilà, elles sont à peine entrées dans l’âge adulte (et encore, l’une d’entre elles a 17 ans), l’âge auquel on fait des conneries pour ne pas avoir à avouer qu’on fait des conneries. Lorsque l’une d’entre elles chaparde une montre hors de prix et la met au clou, l’idée leur apparait alors que de l’argent, ce n’est pas ça qui manque dans leur entourage, il suffit d’aller mettre la main sur la richesse d’autrui !

    A voir ce premier épisode, Barracuda Queens n’a donc pas dépassé le stade du pitch. Hors Klara, qui va nous montrer un peu d’émotion (elle est très stressée par son examen de Droit, boit comme un trou, et c’est également elle qui, mise au pied du mur, prend la décision de voler la montre), cette introduction ne nous dit vraiment pas grand’chose sur les protagonistes de la série. Peut-être par peur de les ériger en modèle ? C’est dur à dire. D’un autre côté, c’est toujours mieux que les regarder avec mépris pour avoir dépensé en un weekend une somme dont la plupart d’entre nous ne verra pas la couleur sur toute une vie…
    Pourtant ç’aurait eu de l’importance : qui elles sont détermine les conflits qui vont tirailler le groupe par la suite… Après, il est vrai que, à voir comment cet épisode inaugural rend la décision de cambrioler évidente en trois échanges de regard et deux répliques, il n’y a pas non plus vraiment de conflit. Vous comprenez bien que, forcément, c’est pas bien compliqué de caser tout ça en trente minutes quand on ne dit rien des personnages, et que ces personnages évoluent comme un banc de poissons uniforme !

    Bref, si vous n’avez rien d’autre à regarder, Barracuda Queens va probablement meubler votre weekend et vous laisser tout le loisir de tout oublier lundi à la première heure. Mais franchement, en 2023, qui n’a rien d’autre à regarder ?

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  • Breakaway

    3 juin 2023 à 21:21 • Review vers le futur •

    C’est la fin des vacances et Chloé est sur le point de reprendre le rythme de l’année scolaire. Pour elle, ça veut surtout dire reprendre l’entraînement de hockey, sa passion.
    Allez, ça faisait quelques temps que je n’avais pas parlé d’une série pour la jeunesse, et voilà justement que démarre, en ce début de mois de juin, une nouvelle série québécoise. Premier Trio est semble-t-il l’adaptation d’une série de romans pour la jeunesse, qu’ICI TOUT.TV propose en deux fois, avec une première moitié de saison lancée hier avant que les suivants ne débarquent en juillet.

    Et il m’a vraiment plu, ce premier épisode, tant il démontre la richesse des séries pour la jeunesse dés lors qu’on sort du cahier des charges de Disney ou Nickelodeon. Ainsi, dans ce premier épisode, le sport est (presque paradoxalement) au second plan : hors un bref aperçu de Chloé qui s’entraîne dans la toute première scène, seule sur une patinoire le dernier jour des vacances, on ne verra aucune protagoniste sur la glace. Ce qui est clairement important pour Premier Trio, ce sont ses personnages, leur passion, leur vie intérieure.
    Ainsi, juste avant la rentrée, Chloé se voit offrir une opportunité rare : au lieu de rejoindre son équipe féminine, Philippe, le coach de l’équipe bantam AAA masculine, lui propose d’intégrer le camp d’entrainement de l’équipe qu’il est en train de former. S’il n’est pas inédit qu’une fille rejoigne ce type d’équipe, cela reste exceptionnel, et démontre que les talents de Chloé, meilleure joueuse de sa ligue, sont reconnus. Toutefois, cette opportunité n’est pas sans risque, notamment s’il s’avère qu’elle n’a pas le niveau pour cette équipe et qu’elle perd, ensuite, l’opportunité de trouver une nouvelle place au sein de la ligue féminine.

    Tout le génie de ce premier épisode tient dans cette question : quel choix Chloé doit-elle faire ?
    Il est bon de noter qu’ici, au moins pour le moment, son recrutement tombe sous le sens et qu’on évite donc le syndrome Bella and the Bulldogs par lequel Chloé aurait dû prouver qu’elle a sa place au sein de l’équipe. Cela fera peut-être l’objet d’intrigues ultérieures, mais en tout cas, ce n’est pas la problématique centrale ici, ce qui permet de recentrer la question sur ce choix. Celui-ci détermine non seulement l’année à venir, mais aussi le futur plus lointain. Chloé est passionnée de hockey, et a de toute évidence des espoirs professionnels, mais comment savoir quelle est la décision qui lui permettra d’atteindre son but ? Sans boule de cristal, peser chaque prise de risque semble tellement confus ; il n’y a aucun moyen de savoir quel sera le bon choix.
    A cela encore faut-il ajouter qu’outre la réflexion de Chloé quant à son propre avenir, son entourage, évidemment, a aussi une opinion. Ses parents sont assez divisées sur la question : sa mère, qui la pousse beaucoup et la voit déjà championne olympique dans quelques années, est à 712% derrière l’idée de rejoindre l’équipe masculine, alors que son père, un peu effrayé pour sa fille, la préfèrerait en sécurité dans l’équipe féminine. Et puis il y a Emy, sa meilleure amie ; elles vont à l’école ensemble, mais elles n’ont pas du tout les mêmes occupations en-dehors. Si Chloé décide d’accepter la proposition du coach Philippe, elle risque au nom de l’entrainement intensif qui l’attend de passer à côté de beaucoup d’expériences avec son amie, et plus largement d’une partie de sa jeunesse.

    Alors que faire ? Bon, il n’y a pas vraiment de série si Chloé ne fait pas un certain choix avant la fin du premier épisode, c’est sûr. L’essentiel n’est pas dans le suspense, de toute façon, mais dans le processus de décision, qui sert merveilleusement la fonction d’exposition de cet épisode, et en même temps établit une règle fondamentale. Dans Premier Trio, l’important, c’est ce que Chloé pense et ressent. En faisant de son raisonnement le focus de cet épisode introductif, la série invite ses jeunes spectatrices (selon le site d’ICI TOUT.TV, la série indique s’adresser aux 9-12 ans, mais peut clairement être regardée au-delà) à chercher plus qu’une « simple » série sportive. Ça fonctionne incroyablement bien.

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  • Take Five Cinq

    31 mai 2023 à 22:32 • Take Five •

    Nouveau mois, nouveau Take Five. J’ai essayé d’écrire un peu plus ce mois-ci (vous me direz si ça s’est vu), et du coup je n’étais pas certaine, au juste, d’avoir de quoi fournir un article complet aujourd’hui, mais vous savez quoi ? En fait, des « pilotes », ce n’est vraiment pas ça qui manque ! Et du coup nous voilà reparties pour 5 séries dont, malgré tout, je n’ai pas parlé en mai. Parfois par manque d’envie de consacrer un article complet. Parfois par manque de place. Parfois par manque de temps… l’une de ces séries étant sortie aujourd’hui !

    Aktris (2023)

    L’une des surprises du mois (il faut dire qu’elle débarque sur Disney+ le dernier jour), Aktris possède un sujet et surtout un ton assez spéciaux. La série s’intéresse à Yasemin, une jeune actrice en pleine gloire qui le jour écume les tournages et plateaux télé, et la nuit, devient une vigilante. Si bien que toute la ville a surnommée la mystérieuse tueuse « Avcı », soit : la chasseuse. Est-elle pour autant une justicière ? Non, nous dit cette introduction : si elle tue des hommes violents, c’est uniquement sur conseil de son chauffeur et ami d’enfance, qui essaie tout simplement de canaliser son tempérament meurtrier pour faire le bien. Sans ce compas moral extérieur, elle tuerait absolument n’importe qui, car Yasemin est une espèce de sociopathe capricieuse et pas du tout quelqu’un qui cherche à avoir un motif valable de tuer. Là, ça tombe sur des types louches, mais honnêtement pour elle, aucune différence. L’installation du personnage et de son absence totale de moralité donnent au premier épisode d’Aktris un côté très superficiel, à grand renfort de séquences pendant lesquelles elle chantonne dans son bain, essaie des perruques, gigote sur de la musique, et se débarbouille de sang.
    Toutefois, dans le même temps, cette mise en jambes inclut aussi des aspects qui intriguent. Peut-être que dans le fond, Yasemin n’est pas aussi insouciante qu’elle veut le prétendre. N’est-elle pas touchée par le sort d’autrui ? Sa rencontre avec une jeune actrice débutante qu’elle prend sous son aile sur un coup de tête tend à démontrer le contraire, en particulier au vu de son histoire personnelle. Et surtout, peut-être que cette innocence que le pouvoir et l’argent ont pu lui conférer a quand même une date d’expiration ? La question se pose en particulier quand Aktris augmente progressivement la température et introduit… une seconde personne méritant le titre d’Avcı. Je n’ai aucune idée d’où le joyeux bordel d’Aktris compte mener, mais sur la dernière ligne droite, le mois de mai aura délivré son pilote le plus what the fuck avec cette nouveauté.

    Bon matin Chuck (2023)

    Quand quelqu’un vous chie dessus pendant une partie à trois, et que ce n’est même pas le pire moment de votre journée, c’est vraiment que les choses vont mal. Chuck, l’animateur d’une matinal extrêmement populaire du nom de Bon matin un café ?, en fait l’expérience lorsqu’une soirée touche le fond. Mais en fait, si on veut vraiment être honnête (ce qu’il a du mal à faire avec lui-même), c’est toute la vie de Charlie qui touche le fond, après avoir pendant longtemps bénéficié de la patience de son entourage. Cet épisode de sa vie, qui se solde en plus par une arrestation pour exhibitionnisme, est ce moment que les personnes souffrant d’addiction connaissent bien : le moment sombre avant la… euh, mais est-ce garanti que Chuck guérisse, en fait ?
    Le premier épisode de Bon matin Chuck (ou l’art de réduire les méfaits), eh oui c’est son titre complet, est à la fois terrible et hilarant, dans un exercice d’équilibrisme que, très franchement, seules les séries sur l’addiction peuvent vraiment maîtriser. Je dis ça alors que ma main est déjà prête à cliquer sur ma réserve d’épisodes de Rude Awakening. Mais là où beaucoup de ces séries peuvent être colorées, Bon matin Chuck a fait le choix intéressant d’opter pour une réalisation entièrement en noir et blanc, qui réhausse l’aspect tragique mais aussi le côté absurde de ses divers retournements de situation. Ce premier épisode pose les bases d’une série qui n’a pas forcément choisi l’histoire la plus originale pour le moment, mais s’est néanmoins trouvé un ton parfaitement unique pour la traiter. De toute façon, quand on parle d’addiction, ce n’est pas l’originalité que l’on cherche, mais un angle qui nous interroge, intimement, sur l’aide qu’on est prête à accepter, sur la difficulté à changer, et sur la façon dont une vie meilleure, même si imparfaite, est peut-être envisageable. Hâte de voir la suite.

    Impuros (2018)

    Je me revois encore, ajoutant Impuros à la base de données du Dotcom, toute heureuse d’avoir trouvé le premier épisode d’une série brésilienne que je voulais tester… avant de lancer le pilote et de découvrir que ce n’était pas une version sous-titrée. C’était début 2019, et je n’ai pas oublié. Ce mois-ci, par le plus grand des hasards (ainsi, probablement, qu’une mise à disposition sur quelque plateforme de streaming), Impuros a fait son retour sous ma souris, cette fois avec des sous-titres. J’ai vérifié. L’occasion de me plonger pleinement, enfin, dans l’ambiance moite et sordide de la fin des années 90. Patience et longueur de temps…
    Evandro et Zeca ont grandi dans une favela, dans la petite baraque de leur mère qui les a élevés seule. Les deux frères ne pourraient être plus différents, comme le prouve la sortie de maison de redressement de Zeca, le jour de leurs 18 ans, alors qu’Evandro est consciencieusement en train de mettre de l’argent de côté avec son petit job de vendeur de bonbons. Ils ne le savent pas, mais bien que vivant à nouveau sous le même toit, leurs destins ont déjà bifurqué pour de bon. Zeco espérait rejoindre l’armée, et offrir à sa petite amie (secrètement enceinte) l’avenir stable de leurs rêves ; Evandro espérait être exonéré de service militaire, et continuer à travailler à son compte, librement. Ni l’un ni l’autre ne sont exaucés : Zeco est refoulé (à cause de ses antécédents criminels), n’ayant plus d’autre choix que de se tourner vers les malfrats du quartier pour gagner sa vie, et Evandro incorporé à l’armée pour l’année à venir.
    Dans ce chassé-croisé de rêves contrariés, Impuros raconte les tensions agitant les favelas, hélas bien connues maintenant y compris par la télévision brésilienne (qui ne peut plus les ignorer depuis Cidade dos Homens). Entre la pauvreté galopante, les gangs, la police corrompue… pas évident d’avoir un avenir à 18 ans. Mais Impuros nous réserve un twist dans ce premier épisode, et non des moindres : le fils qui a « mal tourné » est abattu en pleine rue. Se pose alors la question de ce que deviendra le second fils…

    Perfil Falso (2023)

    Tout commence comme un conte de fée pour Camila, danseuse dans une revue de Las Vegas, quand un charmant colombien du nom de Fernando matche avec elle sur une app de rencontres. Bon, conte de fée moderne, mais conte de fée quand même. Le seul hic ? Camila a menti sur son profil, et prétendu être infirmière. Le courant passe si bien entre elle et Fernando qu’elle ne divulgue pas immédiatement sa véritable profession… avant de finalement jouer franc-jeu, au risque de le perdre. Mais non. Fernando ne la quitte pas. Leur relation à distance se poursuit de façon idyllique. Se pourrait-il qu’elle ait trouvé l’homme de sa vie, lui permettant d’oublier son violent ex Vicente ?
    Vous savez quoi, mon résumé est un peu injuste. Perfil Falso (proposée par Netflix sous le titre international Fake Profile) essaie de faire un peu plus que cela. Son ambiance emprunte au thriller, met en place une inquiétude palpable, pas nécessairement palpitante mais elle n’en est pas moins là. Les rappels réguliers de l’emprise de Vicente en font partie. Mais surtout, l’idée plane que sur internet, personne ne sait que je suis un chien. De la même façon que Camila a menti sur son métier, est-il possible qu’on lui mente ? Et dans ce cas, quel est le mensonge… et du coup quelle est la vérité ? Au-delà de la romance torride (enfin disons, un peu mieux que tiède), Perfil Falso est donc l’une de ces innombrables séries s’inquiétant de ce qu’une jeune femme seule quelque part (ici une app de rencontres) peut risquer. Ce n’est pas franchement révolutionnaire, mais l’actrice qui joue Camila est jolie comme un cœur, il y a deux-trois scènes softcore, et un budget très à l’aise situant l’action entre Las Vegas et Cartagena. Honnêtement, si vous vous mettez ça de côté, à regarder pendant un pic de chaleur dans les prochains mois, ça peut le faire.

    Strandhotellet (2023)

    Je dis souvent du bien de Viaplay, alors pour me faire mentir la plateforme a commandé cette série de Camilla Läckberg, une des figures de proue du polar scandinave. On lui doit évidemment les ouvrages sur lesquels était basée Fjällbackamorden, mais c’est avec Lyckoviken qu’elle est passée à la création de séries. Son truc, c’est certes le crime, mais surtout les petites villes côtières, et ce décor se retrouve une fois de plus dans Strandhotellet qui se déroule dans une station balnéaire. La bonne nouvelle, c’est que c’est ensoleillé et coloré… la mauvaise c’est que c’est filmé comme un épisode de Demain Nous Appartient (c’est légèrement mieux joué). La série démarre sur la fête d’anniversaire de Werner Gyllenmark, à la tête d’un des deux grands hôtels locaux, qui célèbre ses 60 ans avec la moitié de la ville. Une bonne occasion pour toutes sortes de protagonistes, y compris celles qui le reste du temps ne se parlent pas ou plus, de se côtoyer pendant que le champagne circule… et une opportunité d’exposition parfaite pour nous dire qui est qui, qui a divorcé de qui, et qui est encore amoureuse de qui. C’est d’une subtilité très relative. Naturellement que serait une oeuvre de Läckberg sans mort, et donc la fête d’anniversaire tourne au vinaigre de façon tragique.
    Moins qu’une enquête, Strandhotellet ambitionne d’utiliser ce point de départ comme révélateur des tensions et des secrets bla bla bla. Vous connaissez la chanson, on peut pas cracher quelque part sans qu’un glaviot tombe sur une série comme celle-là, c’est juste que la Scandinavie nous en envoie moins que d’autres régions du monde. Bref, si c’est votre genre de fiction, allez-y, ça vous dépaysera un peu sur un plan superficiel tout en vous donnant précisément ce que vous trouvez d’ordinaire dans ces séries. Sinon, si vous êtes comme moi, passez outre… D’ailleurs, en fait, vous n’êtes pas comme moi, puisque vous n’avez pas perdu 42 minutes de votre vie devant cet épisode, et qu’il est donc encore temps pour vous d’éviter le pire.

    Voilà, c’est tout pour moi ! En tout cas pour ce mois-ci. Merci encore pour votre soutien pendant cette période difficile ; j’espère qu’en mai, vous avez trouvé un peu de lecture qui vous a intéressées. Et à part ça, qu’avez-vous vu ?

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