ladyteruki
  • Twitter
  • Facebook
MENU
  • ladytelephagy
  • ladymnistration
  • ladytelegraphy
  • ladyterukiparadise
  • ladytherapy
  • Accueil
  • A propos
  • Ko-fi, publicité et autres contes
  • Secret Diary of a Cinephile
  • Tags
  • Contact
  • 29 juin 2024

    Regarder les gens

  • 27 juin 2024

    De l’espoir

  • 16 juin 2024

    This is a fine TV show

  • 8 juin 2024

    C’est pas l’homme qui prend la mer

  • 1 juin 2024

    Take Five + Cinq

  • 1 juin 2024

    Call me by your deadname

  • 31 mai 2024

    Internalisation

  • 29 juin 2024

    Regarder les gens

  • 27 juin 2024

    De l’espoir

  • 16 juin 2024

    This is a fine TV show

  • 8 juin 2024

    C’est pas l’homme qui prend la mer

  • 7 juin 2024

    Comedy crumbs

  • 1 juin 2024

    Take Five + Cinq

  • 1 juin 2024

    Call me by your deadname

  • 31 mai 2024

    Internalisation

  • 30 mai 2024

    I’m about to do it XXL

  • 29 mai 2024

    Le bon plaisir du Prince

  • 26 mai 2024

    Passe décisive

  • 25 mai 2024

    Enjoy the suffering

  • Bon voisinage

    12 septembre 2021 à 22:54 • Review vers le futur •

    Pour quelqu’un qui ne se fascine pas franchement ni pour la télévision true crime ni pour les podcasts (…et encore moins pour les podcasts true crime), j’avoue que je ne m’attendais pas à apprécier autant le premier épisode de la nouvelle série de Hulu Only Murders in the Building. C’est le genre de surprises qui me donne envie d’avoir tort encore plus souvent ! Enième preuve que ce n’est pas tant le synopsis d’une série qui fait son intérêt, mais son traitement, Only Murders in the Building est une charmante dramédie policière, et l’une des rares enquêtes dont je vous parlerai cette année. Alors faisons ça : parlons-en.

    Tout commence dans un immeuble d’appartements comme on en trouve dans les grandes villes américaines, mais pas dans les séries américaines (à part Welcome to the Captain, 666 Park Avenue, et The Village, je n’ai pas d’autre exemple en tête, mais vous me corrigerez en commentaires).
    L’Arconia le genre d’endroit où l’on vit à proximité de personnes très différentes, une sorte de melting pot forcé. Charles-Haden Savage, un acteur de télévision sur le retour, Oliver Putnam, un metteur en scène incapable de retrouver du travail à Broadway, et Mabel Mora, une jeune femme qui redécore l’appartement de sa tante, s’y croisent sans se connaître, et dans l’ensemble ce n’est pas plus mal.
    Sauf qu’un jour, le hasard fait qu’elles se retrouvent dans le même ascenseur qu’un autre habitant de l’immeuble… lequel est retrouvé mort quelques heures plus tard. Or, il se trouve que Charles-Haden, Oliver et Mabel consomment toutes les trois avec avidité les épisodes d’un même podcast true crime (« All is Not OK in Oklahoma »). Elles s’en inspirent pour lancer le leur, alors qu’elles se lancent dans une investigation pour comprendre comment ce voisin est décédé. Elles sont en effet convaincues que ce que la police considère être un suicide est en réalité un meurtre. Pour ne pas s’éparpiller trop, nos trois voisines décident de ne s’intéresser qu’à ce qui se déroule à l’intérieur de leur immeuble, et appellent donc leur podcast « Only Murders in the Building ».

    Only Murders in the Building a un côté humoristique certain (ainsi qu’un sens du rythme impeccable qui renforce l’effet obtenu). Toutefois, à ma grande surprise, ce n’est pas une simple parodie, comme je le pensais au début… et à vrai dire, ce n’est même pas une comédie pure. Il y a beaucoup de sensibilité dans sa façon de dépeindre ses personnages, et une réelle envie d’expliquer non seulement ce qui les fascine dans l’univers true crime, mais aussi, plus largement, ce qui leur manque.
    Ainsi Charles-Haden Savage (ou plus simplement Charles) n’a jamais vraiment réussi à établir sa carrière. Hormis un rôle de flic à la télévision dans les années 80, il n’a pas vraiment la crédibilité à laquelle il aspire. C’est un homme profondément solitaire (on commencera à comprendre pourquoi vers la fin de l’épisode introductif), et ça l’a rendu légèrement misanthrope. Malgré cela, on sent aussi qu’il n’est pas blessé que dans son amour-propre, et tout n’est pas qu’une affaire d’ego. Le podcast « All is Not OK in Oklahoma » était l’une des rares joies dans sa vie ; on peut deviner que, malgré sa résistance à fréquenter autrui, « Only Murders in the Building » présente la combinaison parfaite de ce dont Charles a besoin : des rapports humains, et une opportunité de briller professionnellement.
    Oliver Putnam a environ le même âge que Charles, mais lui est diamétralement opposé. Il est sociable à l’excès, tente désespérément de nouer des contacts avec quiconque croise sa route, mais son sourire cache une grande détresse. Outre sa solitude (son fils et ses petits-enfants vivent à Jersey), il a également des difficultés financières, dues en grande partie au fait qu’il est devenu trop vieux pour qu’on lui confie des projets à Broadway. C’est lui qui le premier suggère de lancer « Only Murders in the Building », dont il devient le réalisateur mais aussi le vrai ciment du groupe.
    Mabel est très différente d’eux. Elle est la seule femme, et elle est considérablement plus jeune, pour commencer. Et puis, elle est beaucoup plus mystérieuse, même si le cliffhanger de fin d’épisode va commencer à nous en révéler plus sur elle et ses motivations.

    Il y a quelques années, ABC avait mis en développement une série à laquelle j’ai repensé pendant ce premier épisode : Couch Detective, un procedural dans lequel une téléphage férue de fiction criminelle devenait une enquêtrice de talent, guidée uniquement par son expertise acquise en regardant la télévision. La série n’a finalement jamais été commandée (…il y a peut-être un pilote quelque part, mais je doute qu’il fasse jamais surface). Only Murders in the Building est très proche de cette idée selon laquelle on peut absorber des connaissances pratiques grâce à la popculture… L’idée est très attrayante pour un public, qui aime bien se dire qu’il a acquis des connaissances voire des compétences de cette façon.
    …Et puis, entre nous soit dit, ce n’est pas un concept très éloigné de celui de beaucoup de cozy mysteries. Après tout, Jessica Fletcher de Murder, She Wrote est une excellente enquêtrice uniquement parce qu’elle écrit des romans policiers, elle n’a jamais été formée à la criminologie ! Alors pourquoi son lectorat ne serait-il pas autant capable qu’elle ? D’ailleurs, comme certains épisodes de PushingUpRoses ont eu l’occasion de me le rappeler, les fans de Jessica Fletcher ont parfois essayé de résoudre (…ou de commettre) des crimes grâce aux informations glanées dans ses ouvrages.
    Alors pourquoi pas la même chose pour des fans de podcast true crime ? D’autant qu’Only Murders in the Building est tournée comme une dramédie, ce qui lui donne une aura d’inoffensivité charmante. Il faut voir avec quelle rapidité l’évocation seule de « All is Not OK in Oklahoma » fédère nos trois amies…

    L’inoffensivité charmante d’Only Murders in the Building, ses portraits émouvants de protagonistes isolées qui se trouvent une raison d’être (et une raison d’être ensemble), et son univers visuel comme musical légèrement désuet, m’ont vraiment conquise. Et je ne doute pas un seul instant que son pouvoir soit plus grand encore sur quelqu’un qui consommerait des programmes ou podcasts true crime.


    Lire la suite »
  • No fun in funerals

    11 septembre 2021 à 19:22 • Telephage-o-thèque •

    Même les gens détestables ont une famille. C’est en tout cas vrai pour le héros de Jarðarförin mín (proposée par arte sous le titre Mes Funérailles, une traduction littérale, depuis la semaine dernière), Benedikt, un employé du cadastre qui prend sa retraite lorsque commence la série. Au boulot, tout le monde est ravi de le voir partir, à part un ami avec lequel il joue parfois au golf ; et à la maison, tout le monde appréhende de l’avoir dans les pattes.
    Il n’y a pas beaucoup de monde qui souhaite faire partie de la vie de Benni… à part, comme il s’apprête à le découvrir, son cancer.
    Attention, cette review de saison n’est pas exempte de spoilers !

    Benni (c’est donc le surnom de Benedikt) est un homme très seul, très sévère, très sinistre. Il ne va manquer à personne à son boulot : considéré comme avare (une caractéristique qui ne rend pas vraiment un comptable très populaire avec ses collègues), grincheux et antipathique, il n’y a qu’un seul ami, Hjalti, avec qui il joue parfois au golf ou part à l’occasion en vacances. Cependant les deux hommes ne sont pas particulièrement proches, Benni n’étant pas d’un tempérament particulièrement sociable.
    Benni vit seul, mais à proximité du reste de sa famille : son ex-femme Sigríður, laquelle est désormais en couple avec un homme plus jeune, Luis ; ainsi que leur fils Björn, qui avec sa compagne Ösp est déjà bien occupé à éduquer leur fille Sísí et à payer tant bien que mal les factures courantes. On va cependant découvrir que Benedikt n’est pas plus qu’au travail en odeur de sainteté auprès de sa famille : il méprise Sigríður et Luis pour souscrire à toutes sortes de croissance New Age, il est convaincu que Björn et Ösp sont des gamins qui ne savent pas gérer leur argent et pensent que tout leur est dû… et il n’a rien à reprocher à Sísí vu qu’il ne passe jamais de temps avec elle.

    Après un pot de départ à la retraite célébré avec un certain soulagement par ses collègues, voilà donc notre Benni qui se rend à un dîner de famille… où sa mauvaise humeur légendaire vient évidemment gâcher la soirée. Pendant les jours qui suivent, il n’adresse plus la parole à personne, mais des maux de crâne et des saignements de nez persistants le poussent à consulter un médecin… et il découvre ainsi qu’une tumeur maligne s’est logée dans un recoin vraiment peu accessible de son cerveau. A partir de là, il a deux options : soit tenter une chimio hardcore pour gagner quelques mois, soit risquer une opération qui pourrait considérablement réduire la tumeur… mais à laquelle il a seulement 1 chance sur 5 de survivre.
    Il devient assez clair que Benedikt n’a plus beaucoup de temps devant lui. Même en choisissant l’opération (qui doit se produire deux semaines plus tard), ses espoirs sont minces. Alors que faire du temps qu’il lui reste ?
    C’est là que Benni se met en tête d’organiser ses propres funérailles… de son vivant.
    Le ton de Jarðarförin mín est un peu étrange : on n’est pas tout-à-fait dans la comédie ou dramédie macabre (d’autant qu’il n’y a, en définitive, pas beaucoup de raisons de rire ou sourire, même si certaines choses sont un peu absurdes), mais on ne s’aventure jamais totalement dans le drame non plus, quand bien même il est question de mort… et de vieux dossiers.

    L’un des crédos de la mini-série est en effet, comme pas mal d’autres avant elle, d’utiliser cette mort plus ou moins imminente comme une façon d’explorer la vie qui l’a précédée.
    Jarðarförin mín se donne beaucoup de mal pour détailler son portrait de Benni… qui très franchement n’avait pas besoin de tant : il apparaît très rapidement qu’il est intransigeant, égocentrique et obstiné. L’exposition, plutôt efficace, avait bien fait son boulot, et le complément d’information apparaît vite comme superflu. Il a toujours un jugement négatif sur tout, et en particulier sur celles qui lui sont proches, puisqu’il s’est convaincu d’être entouré d’incapables et/ou d’irresponsables. En outre, sa réputation de radin est loin d’être usurpée, en particulier lorsqu’il s’agit de dépenser de l’argent pour quelqu’un d’autre que lui-même.
    Au fil des épisodes, ce portrait est complété d’assez peu de nuances, en dépit du fait que la série suive presqu’uniquement sa perspective et offre un très petit nombre de scènes sans lui. On aura tout juste un peu l’occasion d’apprendre à connaître son entourage, et, à travers ses interactions avec ledit entourage, d’obtenir quelques détails nouveaux sur Benedikt. Jamais rien de révolutionnaire, pour être honnête. Il s’avère que Benni est le genre d’oignon dont le cœur ressemble exactement à la peau : aucune surprise à le peler.

    Il ne vous étonnera nullement qu’avec une personnalité aussi solaire, Benni n’a pas forgé de liens très étroits avec sa famille. On découvrira au fur et à mesure des épisodes à quel point les choses sont tendues.
    Cela fait par exemple 15 ans que Benedikt et Sigríður ont divorcé… et Benedikt en garde toujours une certaine rancune. Le fait qu’elle soit maintenant en couple avec un homme plus jeune (et étranger ; Luis ne parle quasiment qu’en anglais d’ailleurs) l’agace au plus haut point. Le fait qu’elle donne des cours de yoga, qu’elle parle d’aura ou de méditation, aussi. Qu’elle soit heureuse, globalement. Au fil de la série on apprendra vaguement que Benni et Siggy ont eu une fille aînée, mais on ne comprendra les exacts tenants et aboutissants de tout cela que dans le tout dernier épisode. Cela ne semble, pendant un long moment, pas avoir eu d’influence directe sur leur séparation d’alors, ni leurs rapports présents.
    Entre Björn et Benedikt en revanche, les choses ne pourraient être plus claires. Il y a une rancœur vieille de plusieurs décennies entre les deux hommes, due en grande (totale ?) partie au fait que Benedikt n’a jamais été un père très chaleureux, c’est le moins qu’on puisse dire. De façon intéressante, Jarðarförin mín en profite pour aussi glisser un conflit de générations dans cette dynamique, qui n’était pas absolument nécessaire pour expliquer les problèmes entre le père et le fils, mais qui vient les renforcer. Björn est un Millennial désabusé et épuisé, un « simple » infirmier avec une paie modeste ; sa compagne Öst s’est lancée récemment dans une carrière d’influenceuse lifestyle, et la petite famille ne peut que se permettre de louer une petite maison mitoyenne. Or, il apparaît que depuis des décennies, Benni se met un petit pactole de côté… et qu’il commence à le dépenser pour ses fameuses funérailles. Une grande partie de l’intrigue va s’arrêter sur le fait que Björn et Öst voudraient devenir propriétaires (et il apparaît progressivement qu’elles n’ont pas beaucoup le choix, en fait). Or l’accession à la propriété étant ce qu’elle est, le couple demande de l’aide au paternel… qui les traite de tous les noms et dépense son pognon d’encore plus belle dans des conneries. N’avait-on pas prévenu qu’il était charmant ? La mini-série insiste sur les arguments des unes et de l’autre ; mais Benedikt, se sentant seul contre tous et avec le mépris qui le caractérise, ne fait que persister dans son attitude et son projet.

    Même Ólöf, une amie de jeunesse qui par hasard réapparaît dans sa vie, ne parvient pas à lui faire comprendre que son obstination cause plus de dommages qu’autre chose.
    Ólöf, c’est le premier amour de Benedikt, une femme incroyable qui a fait les 400 coups dans les années 60, est partie faire sa vie ailleurs, et que Benni pensait morte depuis des années. Sauf qu’en assistant (par curiosité) à des funérailles, il apprend qu’elle est récemment revenue en ville, et qu’elle est aujourd’hui pasteure. Elle va devenir rapidement sa meilleure confidente (sa seule confidente, honnêtement), sa conseillère, et… bon, sans vouloir vous spoiler, on devine quoi d’autre. Pour être tout-à-fait sincère avec vous, cette relation n’a rien de très intéressant dans la pratique, et surtout à part un peu de nostalgie, Ólöf n’a absolument rien à y gagner. La pauvre a l’air d’avoir eu mille vies, et elle passe une partie de son troisième âge à faire visiter un funérarium ou à écouter un vieux con se plaindre de tout… ya pas de justice.

    A bien y regarder, Jarðarförin mín est en fait assez décevante. On n’y suit pas vraiment l’évolution du personnage central. Benedikt va trouver, en fin de saison, une rédemption un peu brutale, en révélant que c’est le décès de sa fille aînée qui l’aurait poussé à devenir distant. Tout le monde pleure un bon coup et il est comme pardonné !
    Une grande partie des informations données, des échanges montrés, et des défauts révélés dans les épisodes n’aura donc servi à rien : ni à lui faire prendre conscience de la façon dont il blesse ses proches, ni à influencer le comportement de Benni (dont le seul changement d’attitude notable est qu’il passe plus de temps avec sa petite-fille, bien que sans trop se soucier de l’impact de certaines de ses actions sur elle). Dépeint du début à la fin comme nombriliste, aigri et méprisant, Benedikt va finir la série exactement comme il l’avait commencée, mais comme il a été triste à cause de la mort de sa fille, alors ça va, passons l’éponge.

    Si le but de Jarðarförin mín avait été de nous dire des choses sur la remise en question que suscite la maladie et/ou l’âge ; ou sur les leçons que l’on peut apprendre de ses proches, et notamment ce que l’on peut découvrir sur soi dans leur regard… la série n’en montre rien. Il faudra venir à ces conclusions avec un peu d’effort d’imagination.
    Les seuls changements de Benedikt sont envers lui-même : il apprend à se faire plaisir, à ne rien se refuser pour son propre bien-être, à lâcher un peu de sa précieuse fortune. Mais personne, strictement personne d’autre, ne profite de la soi-disant épiphanie. Lorsque finalement, malgré les conseils, craintes et suppliques de son entourage, Benni maintient son projet de funérailles de son vivant, la moitié du dernier épisode en observe le déroulé. C’est comme si la série attendait de nous d’être émues, poussant pour une raison inconnue ses proches à toutes s’y présenter sans exception (en dépit de leurs multiples objections), une larmouchette à l’oeil.
    J’aurais absolument accepté que le sujet de Jarðarförin mín soit que… ma foi, il n’est pas rare que des funérailles poussent l’entourage à se montrer plus complaisant avec le défunt que ce qu’il mérite. J’aurais été prête à entendre ce genre de conclusion : que tout le monde fait la paix avec Benedikt parce que le deuil est une chose complexe, qu’on peut parfois pardonner avec le recul parce que cela aide à passer une étape douloureuse, et/ou qu’on est dans un état émotionnel qui fait oublier, au moins temporairement, les mauvais souvenirs. Un décès peut avoir, paradoxalement, un effet « lunettes roses ». C’est absolument quelque chose qui aurait pu se produire avec les éléments mis en place.
    Le problème c’est que Jarðarförin mín est si peu intéressée par les émotions des personnages autres que Benni, que leur ressenti est très peu détaillé pendant cette conclusion. Pourquoi la famille de Benedikt est-elle venue à l’enterrement ? Pourquoi lui passer ce caprice après avoir réagi si vertement aux précédents (…à raison, si vous voulez mon avis) ? Je ne dis pas que le héros devait nécessairement être puni (je dis juste que je l’aurais souhaité, nuance !). Mais au moins expliquer ce qui lui vaut, au final, d’être couvert d’amour et de bonne volonté quand à aucun moment il n’a rien fait pour en arriver là, ni karmiquement ni narrativement.

    Alors écoutez, on va être claires : de toute évidence, je n’étais pas le bon public pour cette série. Moi, vous me donnez un personnage de parent verbalement maltraitant, eh bien vous aurez beau faire rien ne me fera l’apprécier. On partait du mauvais pied, Jarðarförin mín et moi. C’est sûrement ce qui a conduit à un énorme malentendu. La série avançait et je me massais les tempes devant mon écran : est-il possible que ce connard soit un tel connard ? Spoiler : totalement possible. Mais pas satisfaisant pour un sou, parce que ce connard reste un connard. Même pas un connard drôle, juste un connard.
    Lorsque le dernier épisode s’est conclu (non sans m’évoquer brièvement Scrubs), j’étais sciée. Pourquoi offrir une rédemption à ce gros connard sans qu’il ne la mérite un seul instant ? Parce qu’il a dû faire le deuil de sa fille ? Bah… Siggy aussi et c’est pas une grosse connasse. Qu’est-ce que c’est que cette morale de merde ? A quoi ont servi ces 3 heures de fiction si au final la seule chose qui a changé c’est que tout le monde fait des câlins à Benni ? Pourquoi je n’arrête pas de reviewer des séries frustrantes pour aller élever des chèvres dans le Larzac, au juste ?

    Non, je n’étais pas le meilleur public pour la conclusion de Jarðarförin mín, mais je reconnais que même si celle-ci m’a plus que laissée sur ma faim, je n’ai pas détesté une grande partie de son déroulement. Il y a quelques fascinantes protagonistes, même si elles vivent dans l’ombre du héros : Ólöf mérite un spin-off sur les 50 dernières années incroyables qu’elle a vécue, Björn devrait avoir toute une saison dédiée à son rapport complexe à la famille (par exemple comment a-t-il vécu d’apprendre qu’il avait eu une sœur qu’il n’avait pas connue), et ce pauvre Hjalti mérite qu’une fois de temps en temps, on le laisse parler de lui, parce qu’il a l’air d’être la gentillesse et la patience incarnées.
    Par moments les situations rocambolesques de Jarðarförin mín (ou l’ultime plan de cette première saison) nous rappellent qu’il s’agit d’une dramédie… mais je crois qu’en fait, j’étais bien trop crispée par tout le reste pour en profiter. Hey, ça vous dit pas une saison 2 dans laquelle Benni est mort sur la table d’opération, et tout le monde organise de vraies funérailles post-mortem ? Je suis partante pour ça.


    Lire la suite »
  • Why is it spicy ?

    10 septembre 2021 à 22:59 • Dorama Chick •

    Quand on rejoint un groupe d’inconnues, que ce soit dans une situation scolaire, amicale, professionnelle ou autre, on ressent toutes cette pression implicite à y trouver sa place… et du coup à s’adapter aux codes de ce groupe. Parfois, tenter des choses nouvelles peut même être l’occasion de dépasser notre zone de confort, et d’évoluer personnellement. La pression de groupe n’a pas que des défauts.
    C’est un peu le sujet de la série japonaise Gekikaradou, lancée cet été sur TV Tokyo… mais avec un twist qui vous sera familier pour d’autres raisons !

    Eh oui, comme le prouve le matériel promotionnel de la série, Gekikaradou est une « série d’appétit » ! Pour celles d’entre vous qui dormaient les 712 dernières reviews à l’occasion desquelles ce sous-genre strictement japonais a été évoqué (c’est pas grave, je vous ai remis des liens plus bas), la « série d’appétit » est une fiction où il est question de bouffe, de bouffe et encore de bouffe. Malgré cela, la « série d’appétit » est riche de mille approches, qui permettent, derrière le défilé de plats délicieux, de proposer des dramas dont le personnage principal, qu’on ne s’y trompe pas, est non pas la bouffe mais bien l’être humain. Ses expériences culinaires ne sont ainsi qu’une façon d’observer ses réactions, son cheminement intérieur, son évolution et finalement sa satisfaction.

    Dans le cas de Gekikaradou, notre héros s’appelle Kenta Sarukawa, et c’est un employé commercial parmi tant d’autres d’une compagnie de thés glacés basée à Osaka. Rien d’exceptionnel, j’avais prévenu.
    Un jour son patron lui apprend qu’il est muté au sein du bureau basé à Tokyo, qui est en train de se créer une clientèle et a bien besoin d’un nouveau commercial sur le terrain. Kenta, qui a toujours grandi, vécu et travaillé à Osaka, est un peu hésitant à déménager, mais ce n’est pas exactement comme s’il avait le choix. Alors il essaie d’aborder cette nouvelle aventure avec une attitude positive. A son arrivée à Tokyo, il fait la rencontre de ses nouvelles collègues : son patron Tanioka, et les autres VRP. Il y a Shinomiya, le plus jeune de la bande, un peu chien fou ; Yamazaki, avare de mots mais pas de coups de fourchette ; Akiyama, le bourreau des cœurs supra-cool ; et Ookochi, la… euh, Schtroumpfette, désolée de le dire. Après un premier jour difficile (sa première tentative de démarchage a tellement échoué que le vendeur de boissons qu’il essayait de démarcher l’a foutu à la porte), Sarukawa se retrouve à un pot d’arrivée, organisé par ses collègues dans leur restaurant coréen préféré.

    C’est là qu’il découvre (à l’insu de son plein gré) que sans exception, absolument toutes ses collègues et même son patron adooorent la nourriture épicée. Or, les épices, Sarukawa n’est pas trop fan. Mais face au peer pressure, le pauvre comprend qu’il va devoir céder à la culture d’entreprise et se mettre à ajouter du piment partout.
    La question, c’est comment augmenter sa résistance ? Eh bien, épisode après épisode, Sarukawa va devoir tenter des plats toujours plus épicés, en solo comme en groupe, et apprendre à tolérer les épices.

    Gekikaradou ne s’arrête pas à ces séances de torture. Son but est d’utiliser la consommation de piments en tous genres comme une métaphore de la façon dont Sarukawa sort de sa coquille. C’est vrai sur un plan personnel, mais aussi professionnel.
    En effet, les collègues de son nouveau bureau ne se contentent pas de manger épicé : elles pensent épicé ! C’est toute une façon de concevoir l’existence que cela représente. Par exemple, les magasins que l’équipe doit démarcher sont notés selon leur degré de difficulté épicée (1 étant un magasin qu’on peut facilement faire signer, 10 étant évidemment le plus ardu). Ou bien les employées considèrent que leur ténacité à manger épicé est comparable à leur ténacité commerciale. Ou encore, comme Tanioka lui expliquera dans ce premier épisode, de l’épice à la douleur, et de la douleur à la félicité, il n’y a qu’un pas. Enfin, qu’une bouchée, en l’occurrence.
    Kenta s’apprête aussi à découvrir qu’il y a une certaine satisfaction à consommer des mets rouge fluo. Pas simplement parce qu’il s’agit de dépasser ses limites, comme bragging rights, mais bien parce qu’en réalité, il ne pouvait pas savoir que c’était agréable avant d’avoir essayé.

    Du coup, ce que promet Gekikaradou, ce n’est pas juste un défilé de plats épicés, mais aussi le parcours initiatique d’une personne totalement quelconque qui se trouve face à un défi quelconque, mais qu’elle va relever, progressivement, avec brio. L’épisode manifeste d’ailleurs toutes les caractéristiques de la « série d’appétit » classique : beaucoup de nourriture (préparée et/ou consommée) à l’écran, structure en crescendo, voix-off pour détailler à la fois le ressenti à table et le cheminement de pensée entre les repas, et finalement satisfaction d’un désir intérieur… Tout y est ! Le cahier des charges est parfaitement rempli.
    Sauf qu’au lieu de donner l’impression d’être vue et revue, Gekikaradou s’est trouvé son concept à elle, sa façon de mêler un human drama sincère et une excuse à peine voilée pour donner faim à tout le monde… et c’est ce qui fait qu’on ne se lasse pas, jamais, des fameuses « séries d’appétit ».


    Lire la suite »
  • Beaucoup de bruit pour la fureur

    5 septembre 2021 à 23:50 • Review vers le futur •

    Officiellement le festival SeriesMania est fini pour cette année… mais la bonne nouvelle c’est qu’il me reste des reviews dans ma manche ! C’est d’une série scandinave dont on va causer aujourd’hui, Furia, présentée en avant-première à Lille, et prête à débuter plus tard ce mois-ci sur la plateforme Viaplay. Au passage, c’est à peu près ma 712e review d’une série Viaplay cette année, après Älska Mig, Dystopia, Mädät omenat, Pørni, ou Try Hard (suivez les tags)… et ce ne sera sûrement pas la dernière !

    Elles ne sont pas nombreuses, les séries à s’intéresser (à oser s’intéresser ?) à l’extrême-droite et sa place à notre époque ; pour comparaison, c’est plus facile pour des séries historiques. Mais étonnamment, rien que sur les écrans scandinaves, au moins trois exemples me viennent à l’esprit : Blå ögon et 22. juli, et maintenant Furia. Cela ne signifie pas que seuls ces pays s’y intéressent (comme le prouve l’existence de Romper Stomper en Australie), mais c’est quand même intéressant à noter. Au moins sur le papier. Et en pratique ?

    En pratique, je confesse être peu enthousiaste à l’issue de ce premier épisode. Furia a pour personnage central un flic répondant au nom d’Asgeir, qui vient d’être muté dans une petite ville de la vallée de Romsdalen. L’endroit est magnifique autant que paisible, et semble parfait pour qu’il commence une nouvelle vie avec sa fille.
    Très vite pourtant, Furia établit que la petite communauté qui vit dans cette bourgade logée entre les montagnes n’a rien d’inoffensif : pour son premier jour en fonction, Asgeir prend la plainte d’une responsable du foyer d’accueil pour demandeuses d’asile, un endroit fréquemment vandalisé et qui, la veille au soir, a même fait l’objet d’une tentative d’incendie. Un geste criminel qui aurait pu avoir de graves conséquences et loin d’être isolé, qui en réalité traduit combien, derrière l’apparente quiétude des environs, l’extrême-droite y est secrètement très active. Quelques uns des dignitaires les plus en vue de la ville s’avèrent même jouer un rôle actif dans le groupe identitaire local, et la police tente de jouer mollement l’apaisement.
    Asgeir ne mange pas de ce pain-là, d’autant qu’il veut protéger sa fille (qui est métisse) de toute la violence raciste qui pourrait se déchaîner contre elle dans leur nouvelle ville. Lorsque le jeune homme qui était suspecté d’être l’auteur de la tentative d’incendie, est retrouvé mort, Asgeir passe à la vitesse supérieure et se met sur la piste des extrémistes qui vivent parmi ses voisins.

    …Et c’est à peu près tout ce qu’il y a à retenir du premier épisode de Furia, honnêtement. Il y a bien un léger rebondissement sur la fin de cet épisode d’exposition, mais on l’avait tellement vu venir qu’on ne peut pas vraiment parler de twist… et surtout, sur le fond, Furia est d’une grande vacuité.
    Pour être honnête, je ne sais pas exactement ce que j’attends d’une série se penchant sur l’extrême-droite, et plus encore sur le terrorisme d’extrême-droite. Je vous le dirai quand je le verrai, et pour le moment je ne l’ai pas vu ; il faut dire qu’il y a quand même beaucoup moins d’exemples de fictions se penchant sur le sujet que pour d’autres formes de terrorisme. Pourtant, de mes quelques visionnages au fil des années, il en ressort souvent une impression de tiédeur : la condamnation n’est jamais aussi franche qu’elle devrait l’être.

    Le premier épisode de Furia nous montre en effet, progressivement, que plusieurs personnages sont des racistes/xénophobes, et que certains sont ouvertement virulents dans leurs propos voire leurs actes. Mais pas tous ! Il y a des… écoutez, ça me fait mal à dire, mais on dirait un peu des gentils identitaires, à certains moments. Ils ne font que s’organiser, et que rédiger des articles de blog, et que noyauter la communauté, et que recruter des jeunes. Le personnage ouvertement dépeint, dés sa première apparition, comme un antagoniste, est celui qui est aussi décrit comme le plus ouvertement enclin à la violence physique, mais eux, eux ça va, un peu. Ils ne font rien de mal. Ils font même des trucs bien en fournissant plusieurs dizaines d’emplois aux habitants de la ville. Le commissaire les aime bien, il leur fait confiance, il leur demande des faveurs à l’occasion… Du coup, la série semble vouloir dire, pas totalement mais un peu quand même, que le problème, c’est la manifestation violente de leurs idées, pas leurs idées elles-mêmes.

    D’ailleurs dans ces séries-là, on ne parle en fait que très peu d’idées (c’était légèrement différent dans Romper Stomper qui mettait en place un groupe d’antifas parmi ses personnages secondaires). On les dévoile juste assez pour faire les présentations : voilà, eux ce sont les extrémistes de droite. Vous les reconnaîtrez aisément au fait qu’ils n’aiment pas les immigrés. N’en parlons donc plus.
    Au prétexte de vouloir montrer que les suprémacistes blancs sont des suprémacistes blancs, bah on a beaucoup de personnages qui emploient de la rhétorique idéologique de suprématie blanche… mais en face, aucun personnage supposément non-raciste ne tient de propos idéologiques contraires ; parce que l’intrigue les dédie entièrement à lutter contre les suprémacistes blancs. D’ailleurs la principale motivation d’Asgeir est de l’ordre du personnel : il a emménagé ici et il veut que sa fille grandisse dans un endroit où elle soit en sécurité. Comme sa fille a hérité de sa maman noire (décédée avant le début de l’intrigue de Furia) d’une peau foncée et de cheveux nappy, elle semble être une cible de choix pour des suprémacistes blancs… mais si son enfant avait été blanche, il n’est pas certain que notre gentil flic se donnerait autant de mal, si ? En tout cas à aucun moment cet épisode d’introduction ne se donne la peine de lui faire tenir des propos à ce sujet, même pas en passant.
    De même, en ville, on ne va rencontrer personne au cours de cet épisode qui soit particulièrement ulcéré par ce qui s’est passé au foyer. La responsable de celui-ci est furieuse, bien-sûr, mais principalement parce qu’il y a des enfants qui vivent parmi les demandeuses d’asile et que l’incendie aurait pu être tragique (…j’exagère à peine). De toute façon, elle n’a qu’une scène dans ce premier épisode, on ne lui demandera pas plus son avis. En revanche tout le monde, police et presse y compris, prend très au sérieux la mort du jeune vandale raciste. Ce qui serait intéressant si la série prenait le temps de souligner cette différence de traitement, voire même d’y apporter de la nuance (il n’y a effectivement pas encore eu de mort au foyer d’accueil), mais pas vraiment non plus.

    On a un peu l’impression qu’en fait, ce serait un groupe mafieux qui ferait du trafic de drogue dans la vallée de Romsdalen, il n’y aurait pas beaucoup de changements : l’exposition se déroulerait à peu près pareil, et son personnage central conduirait son enquête exactement de la même façon (au moins dans ce premier épisode). Les méchants sont les méchants, on va démanteler leur structure et les mener devant la Justice. Alors que non : le trafic de drogue n’a pas de motivations idéologiques, en tout cas pas à la base. Les fondements du trafic de substances illicites ne sont pas politiques, alors que c’est la raison d’être du trafic d’idées racistes.
    Furia semble intéressée par un aspect bien spécifique : l’extrême-droite ne se balade pas nécessairement en kaki militaire à faire des saluts nazis toutes les cinq minutes. Elle peut revêtir des apparences plus innocentes (l’insistance de la série à s’arrêter sur la beauté de la vallée dans divers plans contemplatifs le démontre, entre autres choses). Des gens qu’on ne soupçonne pas, qui s’imposent comme des piliers de nos communautés, vivent parmi nous sans jamais être inquiétés. Et du coup la montée de l’extrême droite se produit sans qu’on le remarque avant qu’il ne soit trop tard. Comment on fait une fois que les choses en arrivent là ?
    Je crois que tout le monde sera d’accord avec ce constat comme cette problématique. Mais au-delà ? Les séries comme Furia partent du principe que les spectatrices seront d’accord : le racisme et la xénophobie, c’est mal ; vouloir révéler au grand jour l’organisation d’un réseau de suprémacistes blancs, c’est bien. Sauf que précisément, la montée de l’extrême-droite, la popularité de certains groupes politiques, et/ou les débats tenus dans les médias grand public, ont contribué ces dernières années à banaliser une partie de la rhétorique d’extrême-droite. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que faire une série sur la lutte contre l’extrême-droite puisse se passer d’un discours activement anti-raciste, au moins de la part de quelques personnages. Encore plus quand une même série laisse ses personnages les plus racistes ouvertement déblatérer des horreurs à longueur d’épisode. A qui donne-t-on la place de détailler son idéologie ? Qui conforte-t-on dans certaines idées, au final ?

    Je n’ai pas trouvé de sous-titres pour 22. juli, diffusée début 2020 en Norvège. Cependant, je sais au moins que cette série a sciemment décidé de montrer le moins possible l’attentat d’Utøya pour ne pas mettre en vedette ni les actions violentes, ni les idées, ni la personnalité d’un terroriste d’extrême-droite. C’est d’ailleurs pour ça que j’aimerais bien voir la série un jour.
    Parce qu’à un moment il n’y a pas que le sujet d’une série qui importe, il y a aussi le traitement. C’est là qu’est logée la véritable audace.


    Lire la suite »
  • So are yours…

    5 septembre 2021 à 23:48 • Review vers le futur •

    All My Friends Are Racist est le genre de comédies qu’on n’aurait pas vues à la télévision il y a encore quelques années, mais qu’on trouve depuis peu sur l’audiovisuel public australien (en l’occurrence la plateforme  iView, et la chaîne dédiée à l’humour ABC TV Plus). Rien que le titre est tout un poème, mais ce n’est pas tout : regarder le premier de ses courts épisodes est un sport de haute intensité…

    Casey est un influenceur dont la popularité s’est récemment mise à décoller, et il est prêt à partager ce succès nouveau avec sa meilleure amie, Belle. Toutes les deux sont inséparables, et vivent ensemble dans une petite maison de Brisbane, entourées comme il se doit de toutes sortes de potes… dont elles sont plus ou moins proches. Hors de leur tandem, rares sont en effet les personnages de leur entourage à trouver grâce à leurs yeux, en particulier parce que Casey et Belle sont deux personnes d’héritage aborigène dans un océan de personnes blanches. Par exemple il y a Latham, un fétichiste qui ne sait ouvrir la bouche que pour deux choses (avoir l’air engagé pour la cause indigène et l’anulingus), Sammie qui est obsédée par la culture asiatique (oui, singulier), ou bien Celia, qui franchement est la plus raciste de toute la bande… mais ramène toujours les meilleures drogues en soirée.
    Un soir qu’elles sont ivres de leur propre perfection, Casey et Belle se lancent dans la création d’un mur tout entier consacré à épingler le comportement raciste de leur entourage. Malheureusement le mur est découvert quelques heures plus tard et… elles sont cancelled sans autre forme de procès.


    Ce résumé ne vous donne toutefois qu’un aperçu très partiel de ce qui se passe vraiment dans All My Friends Are Racist, parce que… le premier épisode ne dure que 13 minutes et qu’il est écrit, joué et réalisé sous drogues dures. Je ne vois pas d’autre explication au rythme effréné de ses scènes, de ses dialogues, et des idées qui se bousculent ! Les vannes fusent, écorchant tout sur leur passage, y compris ses deux protagonistes centrales qui sont largement imparfaites (c’est un euphémisme).
    Personne ne sera épargné au passage, mais la série a deux cibles essentielles : la culture des Gen Z (dont certains aspects ne sont pas sans rappeler le brio de Content) et l’ère de la réconciliation (soit l’ensemble de politiques modernes consistant supposément à améliorer les relations raciales en Australie).

    All My Friends Are Racist n’est dupe quant à aucun de ces deux angles. Chaque aspect est tourné en ridicule avec une ferveur inédite et rageuse. Certes, l’amour des protagonistes (et donc de la série) pour l’excès donne parfois l’impression d’assister à un festival de mauvais goût, mais on ne pourra certainement pas reprocher à cet épisode d’introduction d’être mou ! Et il y a peu de chances que ça se calme ensuite.
    Colorée, rythmée, furieuse, All My Friends Are Racist ne sera certainement pas pour tout le monde… mais ce n’est pas le but ! La série aura sûrement beaucoup plus d’impact auprès du public de l’âge de ses protagonistes, ne serait-ce qu’à cause de la maîtrise du vocabulaire utilisé dans la série ou des références popculturelles multiples, mais aussi parce que son humour a peu de chances de plaire aux vieilles connes comme moi (j’avoue qu’il y a des moments où j’ai décroché, par exemple pendant la très, trop longue scène au cours de laquelle les deux BFF se réjouissent que la fête qu’elles organisent leur permette de se faire bouffer le cul).
    Cela veut dire aussi que je ne suis pas la meilleure personne pour vous en parler… du coup le mieux, c’est encore que vous la regardiez vous-même.


    Lire la suite »
  • Art de vivre

    3 septembre 2021 à 23:53 • Dorama Chick •

    Ce soir, je vous propose de parler d’une série sur le ballet. Sauf qu’évidemment il ne s’agit pas d’une rediffusion de la review de L’Opéra que je vous proposais il y a quelques jours, mais bien d’une autre série, COMPANY.
    Diffusée au début de l’année par NHK BS Premium (la chaîne du satellite de l’audiovisuel public japonais), COMPANY est, sur la forme comme sur le fond, dans une démarche très différente de la série française qui démarrera la semaine prochaine OCS. Je me suis dit que ce serait une expérience intéressante que d’observer comment, sur la base d’éléments similaires, on obtient deux séries qui n’ont absolument rien à voir !

    COMPANY est, comme son titre le sous-entend, une série qui se déroule au sein de la Shikishima Ballet Company. Fondée par une ancienne danseuse, Mizuho Shikishima, qui en assure la direction artistique, on y monte plusieurs spectacles par an, et le public semble au rendez-vous. « Semble » étant le maître-mot… parce qu’en réalité, la compagnie Shikishima est en train de prendre l’eau. Elle ne parvient plus à vendre des places pour ses représentations, et ne doit ses salles remplies qu’à une situation inédite : la première danseuse de la troupe est la fille du président d’une grande entreprise pharmaceutique, Ariake. Celui-ci achète systématiquement les places invendues et les proposes à ses employées, ce qui permet artificiellement de faire salle comble. Mais ce fragile équilibre est rompu lorsqu’une fusion est organisée entre deux géants pharmaceutiques pour créer le conglomérat Ariake Health ; les affaires étant les affaires, il va devenir nécessaire de faire des coupes budgétaires, et le budget ballet en fait partie ! La compagnie Shikishima s’apprête-t-elle à tirer le rideau ?

    Eh bien, ce sera bien-sûr l’enjeu de COMPANY, mais avec un twist intéressant : le personnage principal n’a rien à voir avec la danse classique.
    Quand démarre la série, Seiichi Aoyagi est même en train d’assister, à l’âge de quarante ans et des poussières, à son tout premier ballet. Et pour tout vous dire ça l’endort mieux qu’un épisode de Derrick. Il a récupéré ces places par son travail, chez Ariake, mais sans grande conviction ; en outre, ni sa femme ni sa fille n’ont voulu l’accompagner à la représentation.
    Toutefois, il apprend le lendemain par son patron que… eh bien, avec la fusion qui arrive, Ariake Health ne va plus avoir besoin de lui. Il y a plein de postes en double, et puis, de toute façon, il n’est pas un très bon employé, il fait juste ce qu’on lui dit sans prendre aucune initiative, ça n’a pas beaucoup de valeur pour le future géant pharmaceutique Ariake Health.
    Il se voit néanmoins octroyé une dernière opportunité. Enfin, du point de vue de son patron, c’est plutôt une mise au placard, mais il y a une infime chance qu’il puisse tourner ça en sa faveur. Aoyagi est en effet affecté à la co-gestion de la compagnie Shikishima, et s’il parvient à vendre toutes les places de la prochaine production de la troupe (…qui sera, évidemment, Le Lac des Cygnes), son emploi sera sauvé.
    Hélas pour lui, ce n’est pas la seule chose en jeu : alors même qu’il apprend être sur un siège éjectable au travail, il rentre dans une maison déserte… sa femme l’a quitté, sans aucun signe avant-coureur.

    Vous l’avez compris, COMPANY approche un même sujet (un corps de ballet) avec un angle totalement différent de L’Opéra. Ici, c’est ouvertement le regard des non-initiées sur la danse classique qui prime, les personnages impliquées dans la danse ayant, in fine, assez peu l’occasion de montrer leurs émotions dans ce premier épisode. La directrice Shikishima, le danseur Haruka Takano, ou même la collègue de fortune de Seiichi, une entraineuse sportive du nom de Yui Segawa, ne sont pas vraiment là pour nous faire ressentir ce que c’est que de se consacrer corps et âme à l’excellence. A contrario, Seiichi va abondamment nous communiquer son ressenti vis-à-vis de cet art ; et ce ressenti se prépare à évoluer considérablement, quand bien même au début il y est très indifférent. Cela n’est d’ailleurs pas totalement étonnant de la part d’une série proposée par un diffuseur comme NHK, dont la mission de service public inclut d’essayer de faire transmettre à ses spectatrices l’intérêt pour une certaine idée du mieux-disant culturel.

    Cependant, cela va plus loin que ça. Le premier épisode de COMPANY établit une feuille de route assez claire du character development qu’on peut attendre de Seiichi (dans L’Opéra, au contraire, il n’était pas toujours très clair dés l’exposition de ce vers quoi la série veut aller). Ce n’est pas par manque de chance qu’il a été décidé que notre homme devrait travailler avec la compagnie Shikishima, mais bien parce que son poste est en péril. Et si sa situation professionnelle est fragile, ce n’est pas purement circonstanciel, mais bien parce qu’il est incapable de faire preuve d’initiative… voire même incapable d’être quelqu’un, tout court. Rien ne l’intéresse vraiment, en fait. Il est convaincu que la solution à tous ses problèmes dans la vie, c’est de docilement faire ce qu’on attend de lui, si possible en lui explicitant précisément ce qui est attendu. Sauf que dans le monde du travail, ça ne marche plus comme ça… et en fait, nulle part ailleurs. Plus tard dans l’épisode, lors d’une confrontation avec son épouse (qui est venue lui présenter des papiers de divorces), Seiichi entendra de sa part les mêmes reproches que venant de son supérieur hiérarchique : son manque d’initiative témoigne d’une forme de vide intérieur. Il ne se demande pas ce qui ferait plaisir à sa femme, ou même… ce qu’elle fait de ses journées quand il est au travail.
    Or, il va découvrir par hasard qu’en fait, voilà deux ans, elle s’est passionnée pour… le ballet.

    On voit bien comment la plupart des ingrédients posés dans le premier épisode de COMPANY ambitionnent de se combiner, d’autant que son ton de dramédie n’entretient aucune ambiguïté.
    L’idée est au contraire d’inviter les spectatrices dans un monde familier, très familier, trop familier : celui d’un quotidien maussade, où la routine a tout phagocyté, et où rien ne suscite la passion. On n’est certainement pas là devant une série sur ce que coûte le ballet, comme L’Opéra qui en montre les coulisses peu attrayantes ; au contraire, c’est une série sur ce que le ballet procure.

    Est-il parfois difficile de comprendre certaines formes artistiques ? Oui, bien-sûr, au premier abord. Mais si l’on se laisse toucher, elles peuvent nous bouleverser, et nous inspirer à tout changer. COMPANY veut éveiller son personnage quelconque (donc nous) à quelque chose de sublime, lui insuffler le choc suffisant pour faire battre son cœur, pour qu’il se mette à vivre, enfin.
    Je ne vais certainement pas la contredire.


    Lire la suite »
  • Le fantasme de l’Opéra

    29 août 2021 à 21:56 • Review vers le futur •

    N’étant pas en mesure de me déplacer à Lille pour assister à Series Mania, j’étais bien contente d’apprendre que plusieurs séries de la sélection cette année allaient atterrir sur une plateforme dédiée. Comme il faut hélas faire des choix (d’autant que la fonction de visionnage n’est activée que pour un temps restreint), on n’aura certainement pas l’occasion de parler de tout, et d’ailleurs quand bien même je le voudrais que je ne le pourrais pas : j’ai déjà raté des séances en essayant d’apprendre à utiliser le site correctement (mais bon, ne nous éternisons pas sur le sujet, je me flagellerai plutôt sur mon temps libre).
    On va quand même faire un effort pour parler d’une série de la compétition française pas mal du tout, sobrement intitulée L’Opéra, qui arrivera début septembre sur OCS.

    Parfaitement : ce weekend, je lapide une série québécoise et je loue les qualités d’une série française. Comme quoi tout peut arriver !

    Avant que vous n’imaginiez le pire (« elle a complètement pété une durite, cette pov’ lady »… oui, mais pas dans ce cas précis), laissez-moi tempérer mon introduction : L’Opéra est une série intéressante. Pas un coup de cœur. Et le déroulé du premier épisode souligne bien pourquoi.

    On commence par suivre une jeune femme lors d’une soirée au cours de laquelle elle cumule les clichés : club super bruyant, alcool, drogue, coup d’un soir… évidemment pour le lendemain se réveiller en panique parce qu’elle est en retard au boulot. Saurez-vous deviner où elle travaille ? A l’Opéra de Paris bien-sûr, c’est dans le titre. Ce soir-là (oui parce qu’elle a évidemment émergé vers six heures du soir) Zoë ne doit pas danser un ballet complet, et c’est fort heureux, mais simplement participer au Défilé. C’est un rituel qui présente les différentes danseuses de la troupe aux mécènes grâce auxquelles l’Opéra peut continuer de tourner. Inutile de dire que le grand jeu est sorti et que, même s’il ne s’agit pas d’une vraie représentation, elle a son importance. C’est d’autant plus vrai pour Sébastien, ancien danseur (et ami de longue date de Zoë), qui vient d’être engagé sur le poste de Directeur de la Danse. Sa fonction couvre non seulement des aspects artistiques, mais surtout administratifs pour ne pas dire politiques. L’Opéra nous présentera par la suite une troisième protagoniste, Flora. C’est la toute première danseuse noire de l’Opéra de Paris, elle vient de la banlieue et ne connaît personne, ce qui forcément rend son arrivée d’autant plus difficile.

    Il n’y a rien de follement original dans cette mise en place. Zoë, qui est vieillissante et a en plus souffert de nombreux problèmes de santé ces dernières années, est une héroïne dysfonctionnelle comme beaucoup d’autres. Elle a des sautes d’humeur et des réactions qu’on ne comprend pas toujours (son coup d’un soir l’insulte, elle s’énerve, il s’excuse, dans la réplique suivante elle lui propose de baiser… ooooo-kay ?), mais en même temps on nous fait bien sentir qu’elle tient un rôle d’underdog dans l’intrigue, parce qu’elle est tellement attachée à l’Opéra qu’elle refuse de laisser sa place, redoublant en dépit d’elle-même d’efforts pour mériter sa place.
    Elles ne se sont pas encore croisées, mais implicitement Flora est présentée comme la relève de Zoë. Elle va collectionner les expériences racistes, en plus de l’ambiance déjà si chaleureuse de ce milieu compétitif. C’est un absolu festival, à partir du moment où elle est prise pour la nouvelle femme de ménage à l’accueil, et jusqu’à la fin de l’épisode. L’Opéra voudrait essayer de nous mettre à sa place dans ses chaussons, pour nous faire comprendre la série de microaggressions qu’elle rencontre en l’espace de quelques heures. Mais c’est fait assez maladroitement, la première scène où elle apparaît la montrant déjà en train de s’énerver, ce qui finalement valide des clichés (le fait qu’elle soit noire ET issue de la banlieue en est un autre dont on aurait aussi pu se passer, mais bon). Evidemment plus les saloperies vont se succéder, plus Flora va être dépeinte comme étant fondée à être ulcérée, mais la réalisation ne prend pas le temps de montrer cette montée en frustration et au final, certaines de ses réactions peuvent être interprétées comme disproportionnées sur le moment. Du coup, on ne sait pas trop ce que la série a décidé de faire de ce personnage pour le moment ; ce qui est sûr c’est que le trauma porn est pour le moment la seule chose qui ressorte de ses scènes. Il faut espérer qu’à un moment, à défaut que ce soit le cas des autres personnages, la série essaie de voir Flora comme autre chose qu’une danseuse noire.
    Les galères de Sébastien sont enfin assez tièdes, d’autant qu’on en sait assez peu de lui sur un plan personnel (il est possible qu’il soit un peu codé gay ? j’ai peut-être surinterprété). Du coup c’est un peu difficile de s’intéresser au fait que sa supérieure hiérarchique ne voulait pas de lui à ce poste, et… et c’est à peu près tout pour le moment. Pour le reste, il est essentiellement l’outil par lequel nous apprenons comment fonctionne l’institution. C’est d’ailleurs intéressant que ce soit un personnage masculin qui apparaisse comme le plus objectif et raisonnable dans l’intrigue.

    Vous l’aurez compris, on n’est pas ici dans l’époustoufflant. Mais c’est pas grave, ce n’est pas la vocation de toutes les séries de rebattre les cartes.

    Même si cette exposition ne coupe pas le souffle par son innovation, elle a d’abord le mérite d’être dotée de dialogues solides. Des dialogues comme franchement j’aimerais en entendre plus souvent à la télévision française ! Eh bah oui, c’est une review de série française, vous savez que je suis légalement obligée de faire une remarque généraliste sur toute la production nationale. La plupart des échanges sonnent « vrai », sont presque totalement dénués des tics de language si courants chez les scénaristes écrivant dans la langue de Molière (pour leur défense, ce n’était pas trop un auteur de télévision), et je n’ai pas noté de scène pendant laquelle les personnages parleraient de façon trop écrite. Si j’avais 1€ chaque fois que je fais cette simple constatation devant une série française, je n’aurais même pas de quoi acheter une baguette de pain. Cela a sans nul doute demandé un effort considérable, mais je vais vous dire : ça en valait la peine. Rien dans L’Opéra ne sonne à côté de la plaque.

    Toutefois je vous rassure, j’ai aussi gardé une bonne impression de ce premier épisode sur le fond.
    L’Opéra ambitionne de décrire, au-delà de ses personnages, l’univers très fermé de la danse classique à un tel niveau. Il y a un fantasme derrière cet Opéra, ses petits rats et ses grandes étoiles (comme le souligne le fameux dialogue entre Zoë et son coup d’un soir). Un fantasme de beauté classique et d’excellence plusieurs fois centenaire.
    L’Opéra veut disséquer ce fantasme pour mieux en exposer les tripes. Pas pour faire dans le sensationnel, et c’est heureux. Plutôt pour en extraire quelque chose qu’on sent poindre discrètement à plusieurs reprises dans cet épisode d’introduction : la plupart d’entre nous n’ira jamais voir un ballet entre ces murs. Certaines privilégiée iront assister à une représentation, peut-être plusieurs à la rigueur… En revanche, pour ces danseuses, cette institution représente toute leur vie. Or, ce fantasme a prix, et ce prix, il ne se paie pas qu’en sueur. Celles qui rêvent de danser sur cette scène y laissent beaucoup au nom d’un idéal difficile à atteindre, et jamais atteint pour longtemps. C’est une existence cruelle et éphémère.
    Faire partie d’une institution, c’est prendre le risque de disparaître en elle. Peut-on espérer la changer ou dévore-t-elle tout ?

    Les protagonistes de L’Opéra s’infligent tout cela, et il est permis de se demander pourquoi. Parce qu’elles sont habitées par le fantasme de l’Opéra ? Peut-être. Mais sans lui, où seraient-elles ? Qui seraient-elles ?
    Il est des questions auxquelles on préfèrerait n’avoir jamais à répondre.


    Lire la suite »
  • Got til it’s gone

    28 août 2021 à 23:27 • Telephage-o-thèque •

    Pratique en voie de disparition : il m’arrivait, dans les années 90, de m’installer devant la télé, de zapper les chaînes au hasard, et de regarder tout ce qui me passait sous la télécommande. Il m’arrivait également, et là encore je ne suis pas convaincue que cela se produise toujours, que je me mette par réflexe devant la télévision à une case horaire donnée, simplement parce qu’une chaîne y diffuse des séries, mais sans rien connaître des fictions diffusées ! Juste remarquer un changement dans la case horaire et se dire : « eh bah voyons de quoi ça parle et ce que ça vaut », parce que, vraiment, il n’y avait pas d’autre moyen de se faire une idée, dans une vie sans internet. Les reviews et les news nous parvenaient avec des mois de retard… quand elles nous parvenaient. Alors on laissait le hasard faire. Télé Z nous brossait bien un rapide résumé d’une phrase dans un coin de programme, mais il était souvent succinct pour ne pas dire énigmatique (s’il n’était pas bourré d’erreurs). En tout cas c’était bien tout.

    Le hasard, je ne suis pas certaine qu’il existe encore beaucoup pour les téléphages d’aujourd’hui. Même moi je n’y ai plus beaucoup recours, et je suppose que les spectatrices n’ayant jamais connu la roulette russe des années 90 (et antérieures) en font encore moins l’expérience. Aujourd’hui il suffit de Google, de Wikipedia, d’IMDb… même les plateformes de SVOD fournissent de l’information AVANT visionnage, si bien qu’on sait toujours un peu ce qu’on va regarder avant d’en avoir vu une image.
    J’y repensais récemment, et notamment, je revivais avec un peu de nostalgie l’excitation que cela générait chez moi d’avoir découvert qu’une nouvelle série allait débarquer, d’essayer d’en voir le premier épisode à UN moment précis de la semaine et aucun autre (soit parce qu’on pouvait se mettre devant la télé à ce moment-là, soit parce qu’on recourrait à un magnétoscope), et de lui donner sa chance… en ne sachant d’elle qu’une phrase sibylline, au mieux.
    Quelle merveilleuse surprise que de tomber sous son charme dans ces conditions ! Rien ne destinait cette téléphage et cette série à se rencontrer… et pourtant elles étaient faites l’une pour l’autre. Le coup de foudre immédiat, la romance bouleversante des semaines à venir, et ce petit sourire niais chaque veille de diffusion d’un nouvel épisode… On ne va pas se mentir, c’est mon origin story de pilotovore.

    Now and Again, diffusée en France sous le titre d’Un agent très secret, a fait partie des séries que j’ai découvertes ainsi. Je ne peux plus regarder la VHS, mais je me rappelle avec une précision déconcertante que l’enregistrement démarrait avec un peu de retard, et qu’il me manquait quelques secondes de l’épisode. Si je ferme les yeux, je peux revivre ma confusion intriguée en voyant l’intérieur de cette rame de métro couverte de sang. Et je peux même, si je me concentre très fort, ressentir ma surprise en découvrant, dans la scène suivante, un drama familial assez typique de la décennie.
    Vous savez quoi ? Plutôt que de compter sur ma mémoire, j’ai décidé de regarder à nouveau le premier épisode de Now and Again, et du coup, je vous emmène avec moi.

    Cela ne se voit pas sur le matériel promotionnel, mais le personnage principal de Now and Again est incarné par John Goodman, qui dans les années 90 (pre-Treme par exemple) était essentiellement connu pour ses rôles comiques. Pourtant, il incarne ici un personnage de Monsieur Tout-le-Monde peu humoristique, un assureur du nom de Michael Wiseman.
    Wiseman a une vie très quelconque : une épouse, Lisa ; une fille adolescente, Heather ; un pavillon en banlieue, à crédit. Dans le premier épisode, il apprend que la promotion qu’il espérait décrocher est allée à un employé moins expérimenté et plus jeune que lui, en grande partie parce que Wiseman est un homme très éthique et qu’il travaille dans les assurances bon sang de bois. Avec son collègue et ami Roger, il va donc boire un coup pour oublier que sa vie très banale, et en rentrant, une bousculade sur le quai du métro le fait tomber sur les rails et mourir, écrasé par le train (ce n’est pas ce qui cause tout ce sang, mais on en reparle dans un instant).
    …A quelques mois de cela, Michael Wiseman se réveille dans une chambre d’hôpital high tech.

    S’il y a une chose que réussit Now and Again, c’est l’exposition : ce premier épisode y dédie la quasi-totalité de ses trois quarts d’heure. On va avoir droit à toutes les explications possibles et imaginables de la situation, et elle est à la fois simple et inattendue : Michael Wiseman a été « récupéré » in extremis par le gouvernement étasunien, et sa conscience a été téléchargée dans un corps à la pointe du progrès, un homme-soldat parfait qui sert de prototype à un projet secret. Tout le monde pense que Wiseman est mort, et techniquement il l’est, d’autant qu’à présent il a l’apparence d’un homme plus jeune, plus beau, plus hung. Alors bien-sûr il y a une clause en petits caractères, qui est que personne, jamais, ne doit apprendre que Wiseman est toujours « en vie », pas même sa femme et sa fille, sous peine d’être désactivé par le gouvernement (et quiconque au courant de son existence serait éliminé…), sans parler du fait que personne n’a évidemment demandé à notre homme son avis avant de le mettre dans cette situation.
    En échange, Wiseman a accès au meilleur en matière d’équipement, de logement, de nutrition, de soins médico-psychologiques… à la condition de tolérer le fait qu’il est désormais un rat de laboratoire sous surveillance permanente, en particulier par le Dr. Morris, qui dirige le projet.
    Now and Again est clairement une interprétation moderne (…pour les années 90) du thème de The Six Million Dollar Man, mais avec un twist puisque, en parallèle, la série continue de suivre la trajectoire de la famille Wiseman, et en particulier de Lisa. Plusieurs mois après la mort de son mari, elle gérer à la fois son deuil, le quotidien de son foyer, et ce qui s’annonce comme une épuisante et longue bataille juridique. Michael Wiseman avait en effet souscrit à une assurance-vie, mais la compagnie d’assurances (qui était également son employeur) refuse de la verser, prétendant que notre homme se serait suicidé. Le contrat serait donc caduque, à moins de pouvoir prouver qu’il s’agissait réellement d’un accident. C’est la tension dramatique qui soutient une grande partie de la série.

    Si Now and Again peut se permettre toute cette exposition, c’est (un peu contre-intuitivement) grâce à… un énorme sens de l’humour. Oui, la série parle de deuil et d’espionnage (enfin, elle commence à le faire en tout cas), mais ses dialogues sont truculents, et ses personnages ont tous du répondant. Lorsque le Dr. Morris se lance par exemple dans une explication initiale de la situation à Wiseman, il le fait avec des petites vannes, du sarcasme, et même quelques pas de danse… et tout est à l’avenant. Bien que se voulant résolument tragique par moments, Now and Again ménage de nombreuses respirations dans son déroulement, histoire de n’être jamais totalement sombre malgré ses sujets sur le fond.

    …Au point qu’on en a oublié la scène si gore qui a servi d’introduction, dont j’avais raté une bonne partie lors de ma première découverte.
    En réalité, cette première scène sanglante se déroule dans un train tokyoïte (filmée par des gens qui ne sont probablement jamais allés à Tokyo, mais passons), à bord duquel un vieil homme se déplaçant avec un sac de courses laisse derrière lui quatre œufs. Oubli ? Non. Très vite il apparaît qu’avec les soubresauts du wagon, ceux-ci se brisent, et que tout le monde à bord meurt dans les minutes qui suivent après avoir s’être vidé de son sang par tous les orifices possibles. Voilà, c’était ça, le sang partout. Aussi lorsqu’on aperçoit notre vieux bonhomme dans une scène ultérieure, on commence à se figer à l’idée de ce qu’il s’apprête à faire, cette fois dans un nouveau pays…
    Le premier épisode de Now and Again ne va pas beaucoup s’attarder, pour le moment, sur cette intrigue. Elle est là pour le moment à titre purement introductif, et parce que Now and Again est très feuilletonnante, le pilote ne voit aucun problème à ne pas tout nous en dire.
    Cette intrigue est d’ailleurs l’une des premières, à la télévision américaine (il y en eu a une autre dans The West Wing quelques semaines plus tard), à expliciter les inquiétudes croissantes au sujet du terrorisme biologique. La scène du métro tokyoïte par laquelle commence Now and Again est évidemment une référence directe à l’attaque au gaz sarin qui avait eu lieu quelques années plus tôt. Le vieil homme qui commet ces actes atroces, et c’est évidemment tourné ainsi à dessein, a toutes les apparences de l’inoffensivité : il est non seulement vieux, mais aussi frêle, poli, a l’air éduqué (plus tard dans l’épisode on le verra parler français à plusieurs interlocuteurs), gentil avec les enfants… mais ce qu’il laisse dans son sillon est horrifique. Now and Again ne nous dit pas encore quelle est la relation entre lui et Michael Wiseman, mais puisque désormais Wiseman appartient au gouvernement, ce n’est pas non plus très mystérieux…

    Malgré les années… ou devrais-je dire les décennies, ce premier épisode tient encore très bien la route. Il y a bien-sûr des choses qui ont vieilli (les standards ont évolué et c’est bien naturel), comme par exemple la façon dont se finissent certaines scènes, ou la façon dont certains silences tombent à des moments qui aujourd’hui seraient souvent meublés avec une musique à suspense. Reste que, globalement, on rit des mêmes choses, on a le cœur qui se serre à propos des mêmes choses, et on tremble devant les mêmes choses. C’est la marque d’une série qui réussit ce qu’elle a entrepris.
    Voilà qui me rend bien triste.

    Parce que, si vous ne connaissiez pas déjà la série, je vous ai peut-être donné envie de la regarder avec cette review nostalgique et… eh bien, je vous ai gâché une bonne partie de la surprise. Dans les années 90, tout ce processus de hasard, il en découlait presque toujours de la surprise ; bonne ou mauvaise, on ne savait pas (c’est un peu le principe du hasard), mais il fallait grosso-modo sauter dans le vide, et voir ce qui allait se produire. Regarder des séries c’était très souvent un leap of faith.
    Aujourd’hui, on peut faire découvrir de vieilles séries à de jeunes générations… mais on ne peut pas leur donner cette surprise. C’est contraire à la pratique de recommander des séries, pour ainsi dire : on ne peut plus créer de hasards. C’est avec une idée assez nette de la série que vous allez décider ou non de lui donner une chance. Cela ne veut pas dire qu’il est joué d’avance que vous l’aimiez, mais cela veut dire que vous ne faites aucun saut dans le vide, et que quoi que je fasse, je ne pourrais jamais vous pousser du haut d’une falaise télévisuelle et vous donner ce frisson si particulier. De tout ce que j’essaie de partager et/ou de transmettre, cette particularité-là de mon expérience téléphagique est impossible à relayer. Elle s’éteindra bientôt, et en fait, même pour moi qui l’ai connue, elle s’éteint déjà.

    Pratique en voie de disparition, comme je vous le disais.


    Lire la suite »
  • Sleepless in Montréal

    27 août 2021 à 22:07 • Review vers le futur •

    D’ordinaire, je suis la première à vous vanter les multiples qualités de la fiction québécoise. Je ne taris pas d’éloges sur le dynamisme de leur industrie, sur ses drames mais aussi ses comédies, sur le ton souvent très authentique de ses dialogues, sur sa capacité à présenter plus souvent qu’à son tour des personnages intéressants et des portraits fins. Le Dieu de la Téléphagie sait combien d’exemples je pourrais vous présenter pour le prouver, mais je me suis contentée d’en mettre seulement 3 en bas d’article. Il m’est même arrivé de prendre les productions de ce pays comme exemple de à quoi la fiction française pourrait aspirer plus souvent. Vraiment, les séries québécoises, changez rien, je vous adore, big fan, tout ça tout ça. D’ailleurs je suis pas la seule, TFHein aussi est fan, au vu du nombre d’adaptations de séries québécoises commandées ces dernières années, en particulier lorsqu’elles ont un personnage central féminin…

    Mais aujourd’hui, je suis un peu acculée par Un lien familial, un drame de mœurs qui a démarré plus tôt ce mois-ci chez nos amis francophones d’outre-Atlantique… et dont le premier épisode est un puissant somnifère, ce qui m’arrange bien en période d’insomnie. Pour sa défense, Un lien familial ne s’est pas choisi un sujet qui d’ordinaire m’extasie, mais ça n’est pas une excuse.

    Adaptation d’un roman éponyme, le premier épisode d’Un lien familial nous fait entrer dans le quotidien de Magalie, une femme dont la vie est, comme souvent, parfaite en apparence : elle a un compagnon de longue date, Mathieu ; elles ont ensemble une petite fille adorable, une belle maison, un train de vie confortable… de quoi pourrait-elle se plaindre ?
    Evidemment il y a quelque chose qui ne va pas quand même, et en l’occurrence c’est la découverte, apparemment récente, que Mathieu la trompe avec l’une de ses collègues, Sophie.
    Nous ne vivons pas avec Magalie ladite découverte, qui prédate le démarrage de l’intrigue ; en revanche nous saisissons progressivement la portée de cet événement dans sa vie. En particulier, cette révélation a poussé Magalie à se lancer à son tour dans une aventure extra-conjugale, quoiqu’en pointillés, avec Olivier, lui-même mari de sa collaboratrice principale, Isabelle. Elle n’est pas fière de la situation, mais se sent bloquée : elle ne veut pas causer de traumatisme à sa jeune fille, et craint qu’une séparation ne change sa vie pour le pire. Alors elle reste dans cette situation, pas vraiment heureuse ni malheureuse, dans un étrange entre deux inconfortable.

    Le premier épisode d’Un lien familial va donc, eh bien, établir ce lien familial. Bien que Magalie et Mathieu ne soient pas mariés, ça n’empêche nullement qu’il soit réel, à la fois parce que leur fille serait tout pareil bouleversée, et aussi parce que, au fil des années, le couple s’est construit une routine, une famille étendue, des amies, bref… une vie. Et que remettre tout ça en question semble énorme.

    Le premier épisode concède à Mathieu quelques scènes pour s’exprimer (il utilisera l’une d’entre elles pour indiquer aux spectatrices que lui aussi considère sa fille comme le frein principal à une séparation avec Magalie), mais beaucoup moins. Si bien que son intériorité nous reste encore très mystérieuse, par exemple sur les raisons qui l’ont poussé à sauter le pas et commencer à tromper Magalie. Mais pour être honnête, personnellement moi-même à titre subjectif, ça me va très bien parce que franchement… bah, on n’en a rien à péter.
    Car ce premier épisode introduit également un autre personnage masculin, Guillaume. D’abord peu présent, plus la mise en place va avancer, plus il va prendre de l’importance, et obtenir ce fameux droit à l’intériorité en nous dévoilant ses sentiments. Homme divorcé, flic (…profitez-en, je ne parle plus très souvent de flicaille dans ces colonnes) avec un salaire plus modeste, père d’une fille adolescente dont il a la garde alternée, Guillaume est dans une situation très différente de Magalie. Il va la rencontrer à l’occasion d’un dîner et immédiatement tomber sous son charme. Je vous laisse deviner la suite.

    Sans aller jusqu’à prétendre que tout ce que Un lien familial pourrait avoir à dire se trouverait dans ce premier épisode (je suis de mauvais poil, pas de mauvaise foi), en tout cas on a quand même un aperçu assez net de ce vers quoi on se dirige. Il y a des éléments encore un peu flous, par exemple pourquoi la série mentionne avec autant d’insistance un cas (a priori) sans connexion avec l’intrigue, à propos de la disparition d’une mère de famille sans histoires (sus, comme disent les jeunes). Il n’empêche que pour l’essentiel, on sent bien que Magalie ne va pas rester indéfiniment insensible au charme humble de Guillaume, et que c’est certainement ce qui va la pousser, de loin en loin, à penser sérieusement à une séparation avec Mathieu, et probablement la mettre en place aussi.

    Il y a toutes sortes de questions morales, mais aussi juste humaines, qui se posent dans cette situation, et en soi je ne suis pas strictement opposée à une fiction qui les aborde. Comme son titre le laisse entendre, Un lien familial s’apprête à observer comment cette famille, ce qui l’a créée et ce qui la détruit, va devoir vivre les changements qui s’annoncent, forcément avec un peu de déchirements. En soi le sujet n’est, évidemment, pas sans intérêt.
    Mon problème est que, en attendant, ce premier épisode ressemble à une longue liste de qui couche avec qui, qui ne couche plus avec qui, qui sait que qui couche avec qui, qui voudrait bien coucher avec qui… Pardon mais, hein, non quoi. Le premier épisode d’Un lien familial a l’air de se captiver pour le réseau de relations ainsi créées, qui effectivement sont des préoccupations accaparantes pour les protagonistes, mais qui dramatiquement sont pour le moment assez stériles. D’autant qu’en-dehors de Magalie (qui a quelques jolies scènes, comme par exemple chez sa gynéco), personne dans ce tableau ne semble avoir d’émotions très complexes, les personnages autres qu’elle étant systématiquement là où on les attend, donnant l’impression d’être là pour la fonction tenue dans la vie de l’héroïne. Mathieu est-il par exemple un égoïste patenté, ou est-ce simplement que la série n’est pas intéressée par ce qu’il traverse ? Olivier se sent-il troublé par l’aventure qu’il entretient avec Magalie, ou estime-t-il que c’est mérité vu la façon dont Isabelle le traite ? Et d’ailleurs, Isabelle est-elle obsédée par sa propre réussite, ou se sent-elle piégée par son image alors que décolle sa carrière culinaire ? On ne sait pas, et on a un peu l’impression que la série s’en fout. Ce qui ne peut pas être vrai, je n’ose le croire. Pas venant d’une série qui a aussi méticuleusement décrit Magalie, ou qui s’est appliquée à insérer des différences de statut socio-économiques dans son intrigue. Et certainement pas venant d’une série écrite par la même autrice que le livre d’origine, basée sur sa propre expérience lors d’une séparation. Je refuse de croire que la série s’en fout, par contre je veux bien croire que ce premier épisode est maladroit.

    Plus tard sûrement, peut-être, en tout cas je l’espère, Un lien familial va entrer dans le vif de son sujet, va disséquer les dilemmes, va créer des joies et des peines pour ses protagonistes, va nous en faire aimer certains (idéalement la plupart), va nous faire espérer que les personnages obtiennent ce qu’elles veulent et/ou ce qu’elles méritent… Plus tard. Certainement pas dans ce premier épisode.


    Lire la suite »
  • Newsroom

    22 août 2021 à 22:06 • Review vers le futur •

    Dimanche dernier, la télévision publique australienne a diffusé ce qui restera sûrement dans les annales comme l’heure de télévision la plus parfaite de l’année : le premier épisode de sa série The Newsreader.

    La série démarre le 24 janvier 1986, au sein de la rédaction de News at Six, qui couvre l’actualité tout au long de la journée, au fil des divers bulletins de la matinée ou mi-journée, et journaux télévisés de la soirée. C’est une photographie palpitante d’une époque… et de la façon dont cette époque était racontée aux spectatrices d’alors.

    Ce soir-là, les informations sont présentées par les deux vedettes de la rédaction : Geoff Walters, un journaliste bourru mais capable ayant plusieurs décennies d’expérience, et Helen Norville (Anna Torv, vraiment gâtée par les rôles depuis son retour au pays), l’une des rares femmes à percer dans les rédactions encore très masculines des années 80. Entre elles, rien ne va, surtout lorsque Helen essaie d’acquérir de l’autonomie et/ou de couvrir des sujets de son choix. Or, Geoff a le soutien du directeur de la rédaction (et ami de longue date), Lindsay Cunningham ; lorsque le ton monte pour la énième fois avec Lindsay, celle-ci part en claquant la porte. Lindsay la prévient que cette fois, elle est virée.
    Ces bouleversements internes permettent à un jeune journaliste idéaliste, Dale Jennings (jusque là plutôt occupé à fournir des B-rolls pour des sujets sans importance, mais plein d’espoir d’être un jour assis en plateau) de décrocher sa toute première opportunité de présenter les news matinales.

    Au vu de ses premières minutes, certains thèmes semblent évidents dans The Newsreader, comme par exemple les mutations du journalisme télévisé, le sexisme au sein d’une profession majoritairement masculine, ou encore l’ambition, tout simplement. On a l’impression de savoir un peu ce qui nous attend pour les épisodes suivants : Helen va devoir batailler pour se faire une place, Dale va essayer de gravir les échelons qui vont faire de lui un présentateur respecté… et tout le monde ne peut pas être à l’antenne au même moment. Et ce n’est pas totalement une impression erronée, il y a un peu de ça.
    Mais ce premier épisode propose aussi un retournement de situation, et grâce à lui, un retournement de dynamique, plus que salvateur. Car au soir du 24 janvier, Dale passe chez Helen pour lui restituer des affaires que, dans le tourbillon de la journée, elle avait laissées au bureau… et la découvre sur le tapis de sa cuisine, en pleine overdose de médicaments. Il appelle les secours qui, ne pouvant la convaincre (elle craint pour son image publique) d’aller aux urgences, demandent à Dale de s’occuper d’elle dans les heures à venir pour qu’elle ne reste pas seule. Sans vraiment hésiter, notre bon petit gars l’emmène chez lui, et sans le faire exprès, devient l’un des rares alliés de Helen à News at Six.

    Au lieu de monter ces deux protagonistes l’une contre l’autre, The Newsreader décide donc de le faire évoluer ensemble. Lorsqu’on dépeint un univers aussi compétitif que le journalisme, il y a quelque chose d’audacieux dans cette démarche.
    Helen n’est pas prête à renier ses ambitions, et elle ne serait pas l’une des rares femmes australiennes à atteindre un tel statut si elle cédait un pouce aux intimidations. Malgré tout, elle est aussi capable de voir que Dale, avec les qualités qui lui sont propres, n’est pas une menace pour elle. Quant à Dale, il a ce tempérament de petit chiot qui effectivement fait de lui quelqu’un d’inoffensif, mais il est aussi un journaliste plein de qualités (même si pour l’instant, lire les news n’en fait pas partie), et probablement plein d’avenir. Il respecte Helen, et elle (qui se définit elle-même comme quelqu’un de très loyal) respecte Dale en retour, et la fin de l’épisode montrera tout le potentiel qu’elles ont, ensemble, une fois sur le terrain.
    Cette fin d’épisode est aussi une impressionnante démonstration de la force des images, et la façon dont la façon de présenter l’actualité est en train de changer.

    De façon très intéressante, The Newsreader n’a pas vraiment de problème avec l’idée que l’information soit rapportée d’une façon de plus en plus chargée d’émotions, au lieu d’être présentée aux spectatrices avec une objectivité rigoureuse. La série assume parfaitement de considérer qu’on ne fait plus de journalisme « à l’ancienne » (celui de The Hour, pour caricaturer). Le business de l’information se dirige vers le sentimental et le spectaculaire, le paraître est un art à part entière, les audiences sont reines, et… il n’y a pas nécessairement de commentaire à faire. The Newsreader a décidé (ironiquement) que cela était factuel, pour ne pas dire historique, et que le débat n’a plus lieu d’être en 2021. D’une façon générale, ce premier épisode n’a pas réellement envie de débattre, de poser un regard critique, de s’aventurer sur le terrain de l’abstrait ou du politique. Son but est plutôt de nous plonger dans le quotidien de celles qui ont fait non pas l’actualité, mais les programmes qui nous ont parlé d’actualité.

    Riche de ses nuances dramatiques, d’un style exemplaire (la musique est un pur délice), et désireuse de renverser les dynamiques qu’on attend d’un monde pareil, The Newsreader n’est pas nécessairement très analytique, mais elle est fascinante. Ce premier épisode compte parmi les meilleurs épisodes de télévision de l’année en Australie (et nous sommes au moins d’août), et comble de chance, il y en a d’autres qui arrivent derrière.


    Lire la suite »
« 1 … 41 42 43 44 45 … 684 »

Fun facts

  • Fun fact final du dimanche 23 septembre 2018 - 2018-09-23

  • Fun fact du samedi 22 septembre 2018 - 2018-09-22

  • Fun fact du vendredi 21 septembre 2018 - 2018-09-21

  • Fun fact du jeudi 20 septembre 2018 - 2018-09-20

  • Fun fact du mercredi 19 septembre 2018 - 2018-09-19

  • Fun fact du mardi 18 septembre 2018 - 2018-09-18

  • Emmy fun fact du lundi 17 septembre 2018 - 2018-09-17

  • Emmy fun fact du dimanche 16 septembre 2018 - 2018-09-16

  • Emmy fun fact du samedi 15 septembre 2018 - 2018-09-15

  • Emmy fun fact du vendredi 14 septembre 2018 - 2018-09-14

  • Emmy fun fact du jeudi 13 septembre 2018 - 2018-09-13

  • Emmy fun fact du mercredi 12 septembre 2018 - 2018-09-12

  • Emmy fun fact du mardi 11 septembre 2018 - 2018-09-11

  • Emmy fun fact du lundi 10 septembre 2018 - 2018-09-10

  • Fun fact du dimanche 9 septembre 2018 - 2018-09-09

  • Fun fact du samedi 8 septembre 2018 - 2018-09-08

  • Fun fact du vendredi 7 septembre 2018 - 2018-09-07

  • Fun fact du jeudi 6 septembre 2018 - 2018-09-06

Voir plus d'articles +

ladytherapy

  • 4 juillet 2018 à 2:04 • par ladyteruki •

    Silence

    Peut-être avez-vous remarqué que mon compte Twitter a été désactivé pendant la nuit. Cela vous a peut-être alarmé,...

  • 24 octobre 2016 à 23:02 • par ladyteruki •

    Say you’ll be there

    Maltraitée lorsqu’elle était jeune, frappée plusieurs fois par la maladie, anxieuse au point de se faire du mal…...

  • 16 mai 2016 à 14:17 • par ladyteruki •

    The flesh-eating monster

    En janvier dernier, ma généraliste n’était pas disponible ; je suis donc allée voir sa collègue, dans le bureau...

Voir plus d'articles +

Dirty Sexy Money

Kofi-Banner-650 Plus de 6800 articles publiés, plus de 9500 séries abordées, plus de 120 pays différents explorés, et 17 ans de bons et loyaux services... si vous aimez ce que vous lisez, pourquoi ne pas envisager un petit don ? Surtout que ladyteruki.com est une expérience libre de toute publicité.

Note : ladyteruki.com emploie depuis 2021 le féminin générique.

Episodes précédents

  • Fun fact du mardi 8 novembre 2016
  • La démission du révérend Camden
  • Pas fun fact du samedi 17 juin 2017
  • La chair est faible… mais abondante
  • [DL] Crime Story

Suivez-moi

Retrouvez-moi sur Mastodon.

Écrans d’Asie

PaypalButton-300 Le répertoire Écrans d'Asie recense toutes les reviews de séries et films asiatiques francophones, courez-y !

Articles par jour

novembre 2025
L M M J V S D
 12
3456789
10111213141516
17181920212223
24252627282930
« Juin    

Articles par mois

Tags les plus populaires

Oz Pushing Daisies [Année] 2012 [Année] 2015 [Année] 2016 [Année] 2021 [Pays] Afrique du Sud [Pays] Allemagne [Pays] Australie [Pays] Brésil [Pays] Canada [Pays] Canada (Québec) [Pays] Corée du Sud [Pays] Danemark [Pays] Espagne [Pays] France [Pays] Japon [Pays] Norvège [Pays] Royaume-Uni [Pays] Suède [Pays] USA [Various] Review - Pilote [Various] Review - Saison [Various] Review - Série complète [Various] Tivistory
Accéder à tous les tags

Tell me a Tivistory…

Tivistory-300 Les séries du monde entier piquent votre curiosité ? Tant mieux, à moi aussi ! Alors rendez-vous dans le tag Tivistory. Où je vous donne plein de dates, et de repères, et de titres de vieilles séries... pour vous expliquer, en substance, que la télévision a toujours été passionnante, partout.

Dirty Sexy Money

Kofi-Banner-650 Plus de 6800 articles publiés, plus de 9500 séries abordées, plus de 120 pays différents explorés, et 17 ans de bons et loyaux services... si vous aimez ce que vous lisez, pourquoi ne pas envisager un petit don ? Surtout que ladyteruki.com est une expérience libre de toute publicité.

Retrouvez-moi aussi sur Mastodon.


Pour en savoir plus sur ce site et les univers à découvrir, rendez-vous sur la page
A propos !

Bienvenue sur ladyteruki.com ! …Mais qu’est-ce que c’est ?

Depuis 2004, j’écris sur la télévision, la musique notamment asiatique, les coulisses des cabinets ministériels, l'actualité, et mille autres choses encore. Désormais tous mes articles sont disponibles sur un seul site.

A vous de voir dans quel univers vous voulez entrer, il vous suffit de choisir le thème qui vous intéresse ! Le plus alimenté et fréquenté est ladytelephagy, dédié à la télévision du monde entier, son histoire et ses découvertes...

ladyteruki © 2025

Design Alex Arzuman | Site développé par Florian Perrier