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    27 juin 2021 à 22:39 • Review vers le futur •

    Parfois je me fais du soucis pour moi. A plein d’égards mais, dans le cas qui nous occupe, parce que je suis devenue sincèrement inapte lorsqu’il s’agit de jauger une romcom. Ou peut-être que je l’ai toujours été, ce n’est pas clair.
    Pas mal de monde s’est mis à chanter les louanges de Starstruck, cette semaine, et ayant apprécié Rose Matafeo dans Funny Girls je m’imaginais que la série avait peut-être des atouts qui me permettraient d’accrocher à une comédie romantique. Or, le premier épisode a accompli à peu près l’inverse.

    Ce n’est même pas comme si le sujet était terriblement original, en plus. Starstruck suit la rencontre entre Jessie, une jeune femme ordinaire avec une vie un peu pourrie, et Tom, un célèbre acteur, le soir du 31 décembre. Et vous conviendrez avec moi que la perspective (lorgnant sur le wishful thinking généralement) de décrire une rencontre amoureuse entre une inconnue et une célébrité n’a rien de nouveau dans la fiction. Une bonne moitié des fics sur AO3 répond probablement à cette définition.
    Après quelques échanges peu inspirés, pendant lesquels Jessie n’a pas encore réalisé à qui elle avait affaire, les voilà qui se retrouvent dans l’appartement de Tom pour une nuit… moyenne. Sexuellement ce n’est pas absolument la panacée, d’autant qu’elles sont toutes les deux ivres, mais elles remettent ça au petit matin. Et il apparaît que ce qui fonctionne le mieux entre Jessie et Tom, c’est leur entente à un autre niveau.

    Le problème c’est que… eh bien rien.
    Comme tant de séries similaires, où l’on sait pertinemment que malgré les « embûches » les personnages sont écrits pour passer un moment ensemble (voire plus si affinités), Starstruck a décidé que ça n’allait pas être facile. Alors du coup, Jessie panique en réalisant combien Tom est célèbre, puis elle panique une seconde fois parce qu’elle réalise qu’il vient à peine de rompre avec son ex, et ohlala je me demande si ça va être résolu dans les épisodes suivants, c’est un vrai mystère. Parce que certes Jessie et Tom ont toutes les deux envie d’être avec l’autre, de faire du sekse avec l’autre, de plaisanter avec l’autre… mais on va pas leur donner ça dés le premier épisode, pas vrai ? Qu’elles sont chiantes, ces romcoms.

    Après avoir battu le record du monde de roulement d’yeux exaspéré, toutefois, il faut bien admettre qu’en soi, ce n’est pas la pire chose que j’aie pu voir dans une série. Ou, au choix, toutes les séries romantiques sont la pire chose que j’aie pu voir dans une série, ça dépend de la façon dont on le présente. Parce que la vérité, c’est que je n’ai aucune idée de ce qu’une série de ce type pourrait faire pour me convaincre.

    Si sur le moment, je ressens une grande frustration à tester ce genre de séries romantiques… dans le fond, je suspecte que ce ne soit pas leur faute, mais bien la mienne. Tous les genres télévisuels ont leurs propres codes, mais pour une raison qui me dépasse, ce sont toujours les romcoms qui me mettent dans un état d’impatience extrême quand elles utilisent les codes qui sont les leurs. Une part de moi est incapable d’accepter que, bah oui, évidemment qu’on va avoir des obstacles et des retournements de situation, c’est le propre de la majorité des genres télévisuels.
    Qu’est-ce qui cloche chez moi ? Pourquoi je ne suis pas capable juste d’apprécier l’alchimie entre les deux personnages ? C’est quand même pas trop demander que de poser mes fesses devant un épisode de trois quarts d’heure pendant lequel deux personnes, dans la bonne humeur la plus totale, échangent des plaisanteries et des baisers. Je suis vraiment quelqu’un d’endommagé, c’est pas possible.

    Enfin bref. Tout ça pour dire : je suis strictement incapable de distinguer une bonne romcom d’une mauvaise romcom… Si c’est l’enseignement principal que je tire du visionnage du premier épisode de Starstruck, vous vous doutez bien qu’il ne faut surtout pas m’écouter à son propos.


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  • One small step for TV, one giant leap for kids TV

    25 juin 2021 à 23:02 • Telephage-o-thèque •

    En novembre dernier (et j’ai bien failli passer à côté), Nickelodeon a lancé ce qui est probablement l’une de ses plus ambitieuses séries originales depuis des années. Voyez si vous pouvez relever tous ses points forts sur le papier : The Astronauts est en effet une série de science-fiction en single camera, créée par Daniel Knauf (qui n’avait pas créé de série depuis Carnivàle), produite entre autres par Ron Howard et Brian Grazer, et dont l’un des réalisateurs est Jonathan Frakes. C’est beaucoup de monde qu’on ne voit pas trop sur des séries pour la jeunesse d’ordinaire.

    Il est difficile de regarder le premier épisode de The Astronauts, d’une durée double, sans s’apercevoir immédiatement de l’ampleur de ses intentions. Mais comme je ne sais pas si vous y avez jeté un oeil, je vais tenter d’énumérer les qualités de son épisode introductif avec autant de précision que possible.

    Tout démarre en Nouvelle-Zélande, où la fusée spatiale Odyssey II est à quelques jours de son lancement ; plusieurs astronautes émérites doivent, à son bord, aller étudier une étrange comète passant dans notre système solaire. Ca n’a pas l’air super excitant comme ça, en théorie, mais Odyssey II est aussi l’occasion d’envoyer dans l’espace l’intelligence artificielle Mathilda, jusque là essentiellement utilisée comme interface pour des tâches plus simples, et d’en tester les limites.
    Cependant, les choses ne se passent pas comme prévu. Alors que leurs parents sont réunis lors de la soirée d’inauguration pour des raisons professionnelles, cinq enfants qui s’ennuient décident de se glisser dans la navette et aller y prendre quelques photos, par curiosité… et Mathilda choisit ce moment pour commencer la séquence de lancement. Voilà donc que Samy, Elliott, Will, Martin et Doria deviennent en l’espace de 20 minutes des astronautes.

    La série étant en single camera, sa différence la plus évidente avec la majorité des séries Nickelodeon est évidemment son absence de rires enregistrés… mais pas seulement. Ici pas de décors colorés (c’est même l’inverse), des effets spéciaux impressionnants, peu ou pas d’humour, des dialogues qui prennent au sérieux la situation et les personnages qui la traversent, et globalement, on a affaire à une série produite « comme pour les adultes »… un honneur que les jeunes spectatrices étasuniennes ont rarement. The Astronauts n’est pas exactement unique en son genre, mais ces dernières années, ce genre de sursaut téléphagique dans les fictions pour la jeunesse était plutôt l’apanage des plateformes de streaming comme Netflix, Amazon Prime Video ou plus récemment AppleTV+, bien décidées à la fois à conditionner les jeunes générations à ignorer la télévision linéaire, à draguer un public international souvent habitué à mieux, et à se démarquer de l’océan de fictions produites à la chaîne par Disney et Nickelodeon jusqu’alors. Que Nickelodeon ait senti le vent tourner, et investi dans une série de ce gabarit, est une excellente indication de la mutation que les séries pour la jeunesse continuent de connaître aux USA.

    La nuance est autorisée dans The Astronauts. C’est ça qui est le plus impressionnant. La façon dont sont écrites les protagonistes en est la preuve directe.

    Samy, qui est clairement l’héroïne de la série (le pilote démarre par un plan braqué sur son visage), est la fille de deux professionnelles de l’exploration spatiale : Molly Wei, une analyste, et Rebecca Sawyer, elle-même astronaute expérimentée. La fillette s’entraîne, de façon autonome, depuis des années, sur les simulations de sa mère, et se révèle être prompte à prendre des décisions sensées, sans être pour autant immunisée contre la peur.
    Autour d’elle gravitent (pardon) quatre autres compagnes de voyage qu’elle vient à peine de rencontrer, mais qui brillent par l’absence de stéréotypes, quand bien même leur tempérament commence à se dessiner : Elliott est un fils à papa fort en gueule, Will est un chien fou facilement exalté, Martin est un peu couard mais brillant, et Doria est curieuse et sociable. Aucune de ces quatre-là n’a, pour le moment, une qualité qui la destine à remplacer parfaitement l’équipage adulte prévu pour cette expédition dans l’espace.

    En évitant ce type de poncifs, The Astronauts ouvre pour elle-même une avenue dramatique : ces enfants, par définition, sont démunies devant ce qui se produit, et l’inquiétude est réelle. Le fait que cette inquiétude ne se transforme pas uniquement en suspense (« oh non il y a une crise, va-t-on pouvoir la régler avant la fin de l’épisode ? »), mais aussi en tension émotionnelle liée aux parents, est assez rare. La plupart des séries pour enfants trouvent un moyen d’isoler les protagonistes qui ont l’âge des spectatrices, et de les faire évoluer dans un monde où les parents n’existent plus ou presque plus.
    Ici c’est, paradoxalement, l’inverse. Clouées au sol, les adultes s’inquiètent pour ces enfants qui se sont retrouvées dans l’espace en quelques minutes, et s’agitent, s’énervent, parlent entre elles… Il y a des choses qui se jouent dans ce premier épisode double qui sont très subtiles, sur lesquelles la série n’appuie pas comme une brute, mais qui ne relèvent clairement pas de l’accident. C’est le cas, pendant le lancement précipité d’Odyssey II, de la façon dont les adultes traitent les enfants comme des idiotes, adoptant un ton condescendant voir en les ignorant ; nos 5 astronautes en herbe vont, en prouvant leur capacité d’adaptation, imposer qu’on les prenne au sérieux. The Astronauts interroge indirectement la place de ces gamines dans le monde adulte.

    Et du coup, je le demande à tout le monde : est-ce qu’on est pas bien, là, à regarder une série pour la jeunesse ambitieuse ? Qui est une série de genre, et qui a des choses à dire ? Qui propose une production léchée ? Qui présente des personnages intelligents dans des situation nuancées ?
    Je répète ma question : est-ce qu’on ne se porte pas toutes mieux devant une série qui devrait être la norme ? La bonne nouvelle c’est que la télévision étasunienne pour la jeunesse a amorcé, depuis quelques années, une transition qui semble nous diriger vers cette norme. The Astronauts en est l’un des plus récents exemples, mais pas le seul.
    L’âge d’or de la série pour enfants américaine arrive à grands pas.


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  • Aile de pigeon

    20 juin 2021 à 11:14 • Telephage-o-thèque •

    Il est des séries qu’on rechigne à tenter, et pourtant je me considère comme plutôt aventureuse. Mais voilà : quand on lit le synopsis d’une série, et qu’il ne nous allèche pas, de nos jours il n’est pas très compliqué de céder la priorité à d’autres séries plus passionnantes, en se jurant, bien-sûr, qu’on y reviendra un jour.
    …Depuis quelques jours, les news commencent à tomber sur ce à quoi ressemblera la saison 2 de la série chilienne El Pre$idente (annoncée plus tôt ce printemps), et j’ai bien été obligée d’admettre qu’à force de reporter, j’avais tout simplement enterré le visionnage de la série. Pourquoi ? Parce qu’elle parlait de foot (spot qui m’indiffère puissamment), en particulier d’un scandale que je n’avais pas du tout suivi… et qui entre nous soit dit ne m’intéressait pas le moins du monde.

    Ce qui n’est pas juste. Après tout, si je suis capable de m’éprendre pour le biopic d’un réalisateur de porno japonais des années 80 dont je n’avais jamais entendu parler avant (Zenra Kantoku revient la semaine prochaine, amies téléphages, et je ne suis que joie !), alors pourquoi pas une série sur le Fifagate ? Une série n’est pas son sujet.
    Du coup, devinez de quoi on cause aujourd’hui : eh oui, du premier épisode d’El Pre$idente.

    De toute façon, ce premier épisode n’en parle même pas, du Fifagate. Pas vraiment. Pas encore.
    L’introduction d’El Pre$idente est pour le moment occupée à… eh bien, introduire des trucs. Au premier chef desquels se trouve le personnage central de Sergio Jadue, dirigeant d’un club de foot d’une petite commune obscure et pauvre, mais qui se retrouve, du jour au lendemain, à la tête de toute la fédération chilienne ! Toutefois, ce n’est pas vraiment son talent ou son ambition qui le portent aussi loin, mais plutôt le fait qu’il débarque au siège de l’ANFP (ou Asociación Nacional de Fútbol Profesional) au bon moment, c’est-à-dire lorsque des personnalités autrement plus influentes que lui ont besoin d’un vulgaire pantin à mettre à la Présidence. Âgé d’une trentaine d’années, Jadue devient le plus jeune Président de l’histoire de l’ANFP, mais il n’a pas vraiment de pouvoir décisionnaire…
    …du moins pas tant qu’il ne se réveille pas. Toutefois, motivé par une épouse dont les dents rayent le parquet (et qui contrairement à lui est excellente stratège), il finit par prendre le taureau par les cornes et user de son statut pour s’imposer dans le monde du football chilien.

    Naturellement, ce n’est pas exactement une success story qu’El Pre$idente tente de nous raconter. Déjà, des éléments plus sinistres augurent du scandale à venir, même si Jadue, qui n’a pas inventé le fil à couper le ballon rond, n’en a pas encore conscience. A la fin de ce premier épisode, on comprend cependant qu’en embrassant son titre de Président, il a aussi accepté de prendre part à ce qui se trame du côté sombre du football.
    Et lorsqu’il s’agit de parler de cet aspect, El Pre$idente est encore plus fine que dans son portrait de l’idiot-du-village-devenu-Président Jadue.

    En fait c’est même la force de cette exposition, et a priori du reste de la série. Pour nous expliquer les enjeux, la série emploie un narrateur omniscient, mais il ne s’agit pas de n’importe qui ! Notre guide n’est autre que Julio Grondona, vice-président argentin de la FIFA… et qui est enterré quand démarre la série. Maintenant qu’il n’a littéralement plus rien à perdre, rapport au fait qu’il est mort, il peut parler librement de l’univers du football sud-américain, qu’il connaît si bien pour y avoir régné en maître pendant des années.
    Il peut nous pointer du doigt les tractations entre dirigeants en coulisses. Il peut évoquer les pots-de-vin qu’on distribue aux copains. Il peut nous décrire le business du foot, qui rend ces hommes (…toujours des hommes, naturellement) richissimes depuis des décennies, grâce à la popularité du sport sur le continent. Il explique, en somme, pourquoi des millions de fans permettent à ces types de l’ANFP d’empocher des millions. Il y a plusieurs passages où la voix-off offre du vitriol pur, qui incite le public de la série à se poser des questions sur la corruption qui se cache derrière son sport préféré.
    Pas seulement au sens d’un avertissement sur d’éventuelles dérives, non. Au contraire, rien que dans le premier épisode, les afficionados se font traiter ouvertement de pigeons plusieurs fois ! Si tous ces hommes d’influence se font du pognon, c’est parce que les supporters se laissent entuber sans remettre en question quoi que ce soit. El Pre$idente semble appeler de ses vœux une prise de conscience : le scandale qui sera décrit par la série dans les épisodes à venir devait se produire à un moment où à un autre, mais il ne commence pas avec Jadue. Et ne finit probablement pas avec lui non plus.

    Ce qui est ironique, c’est que bien-sûr… les premiers détails sur la saison 2 ne sont pas la seule information à être tombée récemment. On apprenait ainsi il y a quelques jours qu’Amazon Prime Video avait récupéré les droits de la Ligue 1 française (pour un total de plusieurs centaines de rencontres). Ça m’a un peu fait rire de réaliser cela au beau milieu de mon visionnage, vu qu’El Pre$idente est… une série originale d’Amazon Prime Video.
    L’avantage c’est qu’au pire, ça pourra fournir l’intrigue de saisons ultérieures à la série.


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  • Perspectives

    19 juin 2021 à 23:08 • Review vers le futur •

    Si j’ai hésité avant de me lancer dans une review du premier épisode de Kevin Can F**k Himself, ce n’est pas parce que je n’avais pas envie d’écrire à son sujet, mais parce que l’ambition dévoilée dans cet épisode inaugural donne le vertige. Très honnêtement, je me suis demandé si j’avais pris toute la mesure de ce que je venais de voir. Ne jamais exclure la possibilité qu’écrire une review ne fasse que mettre en évidence ma bêtise…

    Comme vous pouvez le voir, je me suis finalement ravisée. Après tout, ce que j’aime aussi dans les reviews dites de « pilote », outre la question de la découverte (et du partage de celle-ci), c’est le fait qu’il s’agisse d’une photographie à un instant donné de ma compréhension et de mon appréciation d’une série. Toutes deux peuvent évoluer avec les épisodes, et c’est même heureux ; alors coucher sur papier les impressions initiales peut être intéressant. Plus tard, en comparant les notes, en constatant que certaines choses initialement évoquées ont été abandonnées (ou que d’autres au contraire ne se sont révélées qu’en cours de saison/série), en voyant ce qui m’avait fait forte impression et n’était finalement pas capital pour la série, on obtient une mesure plus exacte du chemin parcouru.

    …Bon et puis plus prosaïquement, pour des séries comme Kevin Can F**k Himself, on n’a pas trop d’une review dédiée pour expliquer le concept d’un épisode introductif complexe.

    Avant de détailler ce concept, quelques mots sur le sujet de la série elle-même. Kevin Can F**k Himself, dont le titre évoque à dessein un sitcom de 2 saisons appelé Kevin Can Wait (mettant en scène le comédien Kevin James), s’intéresse à un couple d’Américains moyens : Kevin, un installateur de câble, et son épouse Allison, caissière dans un magasin d’alcool. Leur dynamique est celle d’environ tous les couples de séries domestiques étasunienne, Kevin n’ayant jamais vraiment grandi dans sa tête, et Allison étant plutôt celle qui est organisée et sérieuse, limite à l’excès. Le couple n’a pas d’enfants, sauf si l’on compte leurs amies/voisines qui sont aussi immatures que Kevin, et qui passent le plus clair de leur temps libre dans le salon de Kevin et Allison.
    C’est le moment où, si vous me le permettez, je vais me citer moi-même. Dans la review du pilote d’According to Jim, il y a quelques mois, je vous expliquais les dysfonctionnements induits par cette description des dynamiques de couple, qui sont devenues dans les années 90 le standard du sitcom familial de network :

    A plusieurs reprises au cours de son premier épisode, Kevin Can F**k Himself joue sur ce registre, en rappelant à travers les dialogues, notamment, des pitreries passées de Kevin, qui correspondent en tous points aux intrigues typiques de ce type de sitcom, généralement trop intéressées par l’aspect « rigolo » des aventures du mari pour vraiment se poser la question des conséquences. Il y a aussi plusieurs scènes (et on va y revenir) qui mettent en lumière l’insouciance obstinée de Kevin, plus intéressé par le beer pong avec ses potes ou sa console de jeux, face à une Allison qui essaie désespérément d’organiser leur anniversaire de mariage. Kevin Can F**k Himself repose sur ces éternels tropes, supposément représentatifs de la vie familiale de l’Amérique moyenne. D’ailleurs la série fait ouvertement référence à certains de ces sitcoms directement (comme voir le bedonnant Kevin en bleu de travail dans son salon, comme c’était le cas de… Kevin James dans The King of the Queens). Mais c’est facile de le prétendre quand les intrigues sont toujours montrées du point de vue du personnage masculin, comme toutes les autres comédies du genre.

    Sauf que non. Pas du tout. Kevin Can F**k Himself n’est pas un sitcom de network. C’est au contraire une série dramatique d’AMC… une chaîne qui n’a jamais produit le moindre sitcom depuis Remember WENN, sa toute première série originale en 1996 et déjà produite en single camera.
    C’est là que pour la seconde fois aujourd’hui, je vous demande de bien vouloir m’excuser, parce que je vais me citer à nouveau. Cette fois c’est la review combinée que je vais rappeler à votre bon souvenir, un article brassant mes impressions sur 3 sitcoms : Man With a Plan, Son of Zorn… et Kevin Can Wait.

    C’est exactement ce vœu que Kevin Can F**k Himself exauce. Alors évidemment, Kevin et Allison n’ont pas d’enfants, comme je l’ai dit ; à ce titre certaines des dynamiques passent à la trappe (j’ai cependant hâte de voir si cet aspect de leur vie familiale va être abordé à un moment). Ce détail mis à part, Kevin Can F**k Himself fait effectivement le choix de s’intéresser à la perspective d’Allison, soulignant le travail qui lui échoit, les efforts qui sont les siens, la patience qui est attendue d’elle dans une vie où tout tourne autour des désirs de Kevin.
    A quoi ressemble une vie de facto mise au service de son mari ?

    C’est à ce stade qu’on entre dans l’aspect conceptuel de Kevin Can F**k Himself.

    Là où les scènes proposées du point de vue de Kevin reprennent les standards du sitcom multicamera, en revanche, les scènes proposées du point de vue d’Allison sont tournées en single camera. Tout change, du tout au tout : l’angle (les plans sont généralement plus larges en multicam, et focalisés sur le visage d’Allison en single camera), les couleurs, les lentilles, le son, même.
    Lorsque son mari n’est pas au centre des attentions et qu’elle se retrouve hors de son orbite, Allison ne vit pas dans un monde coloré et loufoque ; elle est au contraire sujette à un stress intense, parce que c’est sur ses épaules que repose la vie de couple. C’est à elle de prendre les décisions, grandes comme petites, et le problème n’est pas tellement qu’elle en ait la responsabilité mais plutôt qu’elle doive prendre ces décisions malgré Kevin. Celui-ci est parfaitement content de sa vie, et pour cause ! Il ne voit donc pas l’intérêt de se poser une seule des questions avec lesquelles Allison bataille au quotidien. Grand adepte de l’immobilisme, et encouragé en ce sens par le reste de son entourage, Kevin a déjà tout le confort dont il a besoin. Même si ce confort, il est en réalité assuré par Allison.
    Un aspect fascinant de la configuration de cet épisode est qu’Allison vit dans le monde de Kevin, mais, mécanisme notable, l’inverse ne se produit jamais. A un tel point que je n’osais pas respirer sur la fin du pilote, quand Kevin Can F**k Himself a failli changer cette dynamique. J’avais quelque chose dans la main pendant mon visionnage, et l’objet en question est tombé sur mon bureau avec un bruit sourd, sous l’effet de la surprise. C’est à mon sens le dispositif le plus marquant de cette exposition.

    Kevin Can F**k Himself commence alors qu’Allison n’a pas encore fait le lien entre son stress et le comportement de son époux, qui en cause une large partie (…mais peut-être pas tout).
    Le premier épisode démarre alors qu’elle a même encore des espoirs de projets, et espère améliorer leur vie commune en prévoyant d’emménager dans une nouvelle maison. Tout ce qu’il lui faut, c’est ne pas perdre le cap, et progressivement pousser Kevin dans la bonne direction ! Les rêves d’Allison (ce n’est pas le premier : on apprend qu’à un moment elle voulait reprendre ses études) ne sont pas démesurés, ils témoignent simplement d’une volonté d’améliorer l’ordinaire, d’obtenir plus de confort, d’aspirer à un peu plus de sérénité. Les changements qu’Allison appelle de tout son être sont des chances (et une ligne de dialogue l’explicitera vraiment bien vers la fin de l’épisode) de faire table rase de ce qui ne fonctionne pas, et d’enfin souffler un peu. Bref, c’est un désir d’obtenir pour elle ce qu’elle fournit à Kevin.
    Allison rêve (sans doute déraisonnablement, mais les épouses aussi ont droit à la déraison) d’appuyer sur un bouton qui transforme son existence en conte de fées, ou au moins, en conte de fées domestique. Le problème c’est qu’évidemment, elle ne peut pas porter ces changements à bout de bras. La scène-pivot de ce premier épisode va éteindre les dernières de ses illusions quant à sa propre vie, et lui faire comprendre que l’avenir idéal auquel elle se raccrochait… ne se produira jamais. Il n’y a pas de « mieux ». Quoi qu’elle fasse, elle est impuissante : elle n’a jamais eu le contrôle, elle a juste eu des responsabilités. Un travail colossal dont, en plus, son mari n’a eu de cesse au fil des années de souligner l’inutilité, la frigidité, et/ou la stupidité.

    Kevin Can F**k Himself est la deuxième série cette année, après WandaVision, à s’appuyer presque totalement sur la culture télévisuelle américaine pour raconter son intrigue. Pas de la même façon, ni dans le même but ; mais toujours en reprenant les codes de séries antérieures pour raconter des histoires qui, eh oui ma bonne dame, même en 2021, sont encore neuves.
    Des dizaines d’épouses de télévision ont vécu sans sourciller (ou jamais au-delà d’un épisode donné, exactement comme décrit pour le pilote d’According to Jim) la stagnation imposée par des maris qui, de leur point de vue, avaient tout pour être heureux. Le pire, c’est que ces femmes de fiction ont alimenté une culture sexiste bien réelle, elle, et qui a influencé les dynamiques de nombreuses cellules familiales américaines (et au-delà). D’ailleurs Allison elle-même tire une partie de ses fantasmes… de sitcoms similaires.
    Bien que n’étant pas exactement un sitcom elle-même (ou à la rigueur, disons qu’elle l’est pour moitié), la série Kevin Can F**k Himself est l’héritière de plusieurs décennies de fictions s’appuyant sur le language des sitcoms, parlé par des millions de spectatrices, pour faire passer son message. Et de spectatrices il est bien question ici.

    Je ne sais pas où Kevin Can F**k Himself va aller au-delà de cette introduction. La brutalité de son propos comme de son concept peut mener à de grandes choses, surtout une fois que l’héroïne n’est plus dupe de l’hypocrisie de son existence. Pour le moment, le premier épisode reste assez flou sur ce que seront les conséquences du changement de perspective d’Allison, et ce n’est après tout pas son rôle de tout dévoiler d’emblée.
    La bonne nouvelle c’est que maintenant, mes premières impressions ont été mises à l’écrit, et que je pourrai y revenir d’ici quelques épisodes. Et au passage, si vous n’en aviez pas encore l’intention, j’ai peut-être réussi à vous convaincre d’y jeter un oeil. Avec ou sans mari.


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  • Usine à gaz

    18 juin 2021 à 17:34 • Review vers le futur •

    Ça n’a pas fait un pli : dés que j’ai réussi à mettre la main sur une version sous-titrée de la série suédoise Dystopia, je me suis ruée dessus. A l’heure actuelle, il n’y a pas beaucoup de séries dont on peut dire que je les attends avec impatience, mais celle-là en est une.
    Et au passage c’est vraiment épatant que des séries d’une plateforme comme Viaplay, qui n’est pas très disponible hors des pays nordiques, nous arrivent aussi facilement.

    C’est donc une fois de plus d’une fiction originale de Viaplay qu’il va être question aujourd’hui (…c’est le cas de la majorité des séries scandinaves dont j’ai parlé en 2021 pour le moment ; je vous ai remis les suggestions en bas d’article), mais cette fois, avec un twist horrifique. Jugez plutôt : plusieurs personnes se présentant pour un jeu de rôle grandeur nature se retrouvent dans une usine désaffectée, où les choses tournent bientôt au vinaigre…

    Mais en fait la série ne démarre pas sur ce point. Tout commence dans un laboratoire où un couple de scientifiques font des expériences sur des hamsters vivants, les enfermant dans une cage hermétique avant d’y insérer une substance toxique ; s’en suit une mort douloureuse mais rapide, accompagnée de brûlures externes et qu’on devine aussi internes. D’un couple il s’agit bel et bien ici : William et sa compagne Cecilia, qui est enceinte.
    Sauf que vers la fin de l’expérience, il s’avère que leur appareillage subit une pression inattendue, qu’une fuite se produit et que la substance toxique se propage dans tout le laboratoire. Les systèmes de sécurité se déclenchent, et la porte est rapidement bloquée…

    On fait ensuite la connaissance de Tess, une jeune femme qui fait partie de l’équipe préparant un jeu de rôle grandeur nature (« GN » en français, « LARP » en anglais et apparemment également en Suède). Elle n’a clairement pas l’expérience de cet univers, et nous allons bientôt apprendre qu’en réalité elle n’est venue que parce que son compagnon, Leo, est le co-organisateur de l’évènement. L’autre organisatrice, Chrissy, est une femme déterminée à faire de « Dystopia » (c’est le nom si original de cet événement) l’une des plus grandes rencontres de roleplay d’Europe. Ce, grâce à un cadre unique : une gigantesque usine désaffectée, au cœur d’une épaisse forêt et à proximité d’un immense manoir abandonné. Tout est parfait : l’emplacement, les décors, les possibilités d’hébergement… tout, sauf le petit générateur qui maintient à flot leur opération, c’est-à-dire quelques cameras et l’éclairage nécessaire pour que personne ne se mette en danger. Oubliez Chrissy et Leo : la production a trouvé un endroit incroyable où tourner sa série ! Je vous ai mis quelques captures d’écran plus bas.
    Lorsque ledit générateur rend l’âme, les différentes employées de Leo et Chrissy annoncent qu’elles se retirent de « Dystopia » : les garanties de sécurité ne sont pas optimales. Peut-être qu’à l’avenir, les problèmes seront résolus, mais pour le moment pas question de passer l’été dans ces conditions.
    Comme Chrissy est obstinée, elle n’a cependant pas dit son dernier mot : elle convainc Leo d’aller à la source, et de remettre en fonction le générateur d’origine de l’usine elle-même. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?

    Dystopia est de la belle ouvrage. C’est toujours compliqué d’être ravie par une série dont on s’est construit une idée abstraite pendant plusieurs mois, les attentes dénaturant la façon dont on réceptionne le résultat. Pourtant, dans le cas de Dystopia, je suis encore plus contente de ce que j’ai vu que de ce que j’en avais lu.

    L’aspect horrifique ne se limite pas à un simple slasher. L’angoisse qui monte est plus complexe. Le premier épisode met en place ce qui, par la suite, sera sans nul doute terrifiant (…surtout pour une couarde comme moi), mais pour le moment il s’agit de ne pas dévoiler toutes ses cartes tout de suite. Les jump scares sont limités, par exemple, et la plupart des choses inquiétantes sont pour le moment temporisées, voire expliquées.
    On se doute bien qu’il y a un lien entre l’expérience du début de l’épisode, et les problèmes qui vont aller croissant pour « Dystopia », ses organisatrices et ses employées. Mais comme la série est (volontairement) vague sur la timeline des événements, on ne sait pas combien d’années séparent les deux storylines, et par conséquent il y a des indices qui sont particulièrement intrigants à ce sujet, au-delà de qui va souffrir et comment. Personnellement j’ai déjà des théories (l’une d’entre elles impliquant Indigo, un personnage dont j’aime bien à la fois la personnalité ET le nom), mais j’apprécie aussi que le premier épisode prenne son temps pour exposer progressivement ses personnages, ses dynamiques et ses enjeux, avec des complexités parfois insoupçonnées.

    Pour le moment, ma principale source d’étonnement est que la série joue aussi peu du brouillage possible entre le réel et l’imaginaire. Peut-être que cela va s’accentuer par la suite, mais hormis la séquence d’introduction de Tess, finalement Dystopia ne s’intéresse pas tellement à cet aspect. C’est curieux parce que, étant donné la nature du JdR GN, j’aurais vraiment pensé que ç’allait être un axe majeur, sinon de l’intrigue, au moins de frissons. A ma grande surprise, il est finalement assez peu question de cela, l’aspect dramatique effaçant pas mal le concept. Du coup c’est difficile de me dire déçue : certes, c’est un axe qui me rendait curieuse… mais si c’est pour avoir des scènes plus intenses dramatiquement et des personnages plus complexes (Tess a l’air innocente mais elle est loin d’être parfaite !), au final les spectatrices sont bel et bien gagnantes !
    Je suis curieuse de découvrir ce que Viaplay va proposer d’autre cette année.


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  • United States of Teen drama

    18 juin 2021 à 17:28 • Review vers le futur •

    Vu que je suis une vieille conne, il m’arrive régulièrement de dire des teen dramas modernes (en particulier s’ils sont étasuniens) qu’ils manquent d’authenticité par comparaison avec les teen dramas de mon époque, c’est-à-dire les années 1800. C’est une généralité odieuse mais à mon âge on le droit.
    Bon, ce n’est pas tout-à-fait vrai, parfois je vous dis du bien de teen dramas, et il m’arrive même de dresser des comparaisons élogieuses (comme dans le cas de Zoe Valentine par exemple, qui a reçu un des plus beaux compliments auxquels je puisse penser). Et puis pour être honnête, les teen dramas, en vrai de vrai, je ne les aimais déjà pas souvent quand j’étais dans la cible, de toute façon. Mais c’est vrai que globalement j’ai tendance à penser, et encore une fois, particulièrement à la télévision US, que les séries pour ados, parce qu’elles s’adressent aussi (voire principalement) aux jeunes adultes, et qu’elles recherche un certain effet qui attirera l’attention (voir aussi : shock value), sont quand même assez décevantes généralement.

    Aujourd’hui est l’un de ces jours providentiels pendant lesquels je fais mon mea culpa, et admets que lorsque je fais ce genre de commentaires, j’ai tort. Et je vous explique pourquoi à l’occasion du pilote de The Republic of Sarah.

    The Republic of Sarah est exactement la démonstration inverse de ce que je décrie si souvent. C’est effectivement une série orientée en partie vers la tranche d’âge YA, mais elle a suffisamment de personnages et d’intrigues adolescentes pour tout de même courtiser ce public (en outre, elle est diffusée sur The CW, qu’on peut difficilement accuser de snober les ados).
    Mais la différence majeure, c’est son sujet.

    La série démarre alors que Sarah, une jeune femme avec un tempérament un peu rebelle (mais qui est quand même prof d’Histoire en parallèle), vit une vie banale à Greylock, une petite ville ressemblant à s’y méprendre à Stars Hollow de Gilmore Girls. J’ai pas trouvé de références mais je suis quasiment sûre que c’est le même backlot. Elle y a toujours vécu, bien entendu, y a son groupe d’amies qui ont chacune des problèmes individuels, elle habite à proximité de sa mère, elle flirte aussi avec le séduisant Grover, bref, elle y mène une existence des plus ennuyeuses.
    Comme dans toutes les Small Town, USA où l’automne semble permanent (sans déconner, ça vous intrigue pas que toutes les séries de ce type, de Gilmore Girls à Everwood en passant par October Road ou maintenant The Republic of Sarah, les arbres soient TOUJOURS oranges ?), on y tient des réunions municipales, à l’occasion desquelles Sarah et ses amies apprennent un beau jour une nouvelle pour le moins surprenante.
    La compagnie Lydon, une multinationale dont plusieurs employées allaient et venaient au cours des derniers mois, a découvert une veine de coltan sous la ville. En soi ce n’est pas un matériau miraculeux, mais il peut être exploité dans le secteur de l’électronique et Lydon veut donc procéder à son extraction. Le maire de Greylock est heureux d’apprendre aux résidentes qu’il leur sera proposé de vendre leur terrain et d’être relogées un peu plus loin, que Lydon va investir dans la ville et que des emplois vont être créés, c’est merveilleux.
    Sauf qu’évidemment ce n’est pas merveilleux pour Sarah et les gens qui, comme elle, pensent qu’il faut préserver Greylock. Sarah se met donc en tête de trouver un moyen de sauver la bourgade de l’exploitation de Lydon, et découvre en cours de pilote une façon pour le moins originale de le faire ! En fouillant dans des vieilles cartes (et ses souvenirs d’un vieux cours), Sarah a en effet réalisé que techniquement Greylock n’est pas située aux USA, ni au Canada… elle pourrait proclamer son indépendance !

    Voilà pourquoi aujourd’hui je mange mon chapeau : parce que The Republic of Sarah prouve aussi que les séries pour les ados (et les jeunes adultes) ont vécu une mutation majeure depuis l’époque de ma propre adolescence. Dans les années 90, les séries pour adolescentes n’étaient pas politiques ; il pouvait leur arriver de l’être passagèrement, mais ce n’était pas leur mission première. Dawson Leery ne passait pas des nuits entières à parler à Joey de la school-to-prison pipeline, Buffy Summers se plaignait plus de l’ennui d’un boulot dans un fast food que de la stagnation du salaire minimum, Angela Chase ne s’est jamais demandée si la teinture de ses cheveux était cruelty-free, et ne me lancez même pas sur les résidentes de Beverly Hills. Personne ne semblait présumer que la politique allait intéresser ce public (presque paradoxalement, tout ce petit monde se retrouve dans des campagnes « Rock the vote » au moment des grandes échéances électorales) et du coup personne ne faisait de série incluant des propos politiques, à plus forte raison parce que les années 90 étaient déjà, même du côté des séries pour adultes, très souvent apolitiques, à quelques salvatrices exceptions près évidemment.
    De mon temps, et j’ai le droit d’utiliser cette expression rapport au fait que je suis une vieille conne, de mon temps on pensait les ados complètement obnubilées par leurs affaires de cœur, de cours, de popularité, de teenage angst, bref, de nombril.

    Certes il y a toujours de ça aujourd’hui, et il y a des séries qui ont même poussé la superficialité aussi loin que possible, mais justement ça dépend des séries. Il y a plus de choix, plus de tons. Et des séries comme The Republic of Sarah peuvent émerger, avec un propos clairement anti-capitaliste et assez révolutionnaire, que ma génération n’aurait même jamais imaginé voir à la télévision.
    Je ne dis pas que The Republic of Sarah est le The West Wing de la télévision adolescente ou quoi que ce soit. Ohlà, non ! En fait je trouve son premier épisode parfois tiède par moments, en partie parce qu’il s’attarde beaucoup sur l’aspect dramatique de façon peu subtile. Je suis aussi déçue (tout en n’attendant pas grand’chose) par le traitement de la question des violences intrafamiliales, soulevée et écartée en moins de trois quarts d’heure. Il y a des choses qui franchement sont bateau pendant ce premier épisode, comme si la série avait essayé de compenser, d’une certaine façon.

    Toutefois, il y a quelque chose qu’on ne peut pas enlever à The Republic of Sarah : son intrigue principale repose sur une dénonciation de la main-mise des grandes entreprises et de la complicité des élus, et l’un de ses axes majeurs va clairement être de poser des questions sur l’engagement politique. Vu la tournure que prennent les évènements, The Republic of Sarah va probablement aussi parler de lois (celles qui sont et celles dont on décide, et pourquoi) et donc de ce qui est juste.
    Et avec tout le respect que j’ai pour les teen dramas de ma génération, on ne nous a jamais posé ces questions, quelles que soient les réponses que la série leur apporte ensuite.


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  • L’épreuve

    11 juin 2021 à 20:39 • Telephage-o-thèque •

    Est-il possible de faire une série de survie sans forcément s’aventurer dans le post-apocalyptique ? Si oui, dans quel genre de contexte, et pour raconter quel genre d’histoire ? C’est le défi relevé par la série koweïtienne Dumue Farah (ou Tears of Joy de son titre international), et on va parler aujourd’hui de son premier épisode.

    A l’origine proposée en 2020 par une application portant le nom de « Watch » (c’est bien, c’est pas du tout chiant à googler…), Dumue Farah est également proposée par la plateforme Shahid, dont je vous dressais un aperçu le mois dernier (et qui, pour rappel, peut être testée gratuitement pendant une semaine). La série ne comporte que 8 épisodes, et de ce que je comprends de sa conclusion vu que je m’autorise quelques spoilers dans ce genre de circonstances, elle n’est pas amenée à avoir de suite. On est donc plus sur une mini-série.
    De par le format, l’idée de départ est donc que la problématique de la survie va être intense, mais brève.

    Pourtant la première scène de Dumue Farah commence comme beaucoup de dramas domestiques du monde arabophone, avec une confrontation entre un mari et sa femme. Aziz est un chirurgien, il est marié à Farah depuis 10 ans, et ils ont une petite fille, Sarah ; mais tout cela n’a rien d’idyllique, et Farah, délaissée depuis des années, a passé le point de non-retour. Elle est en train d’organiser un voyage en Géorgie avec sa famille et, une fois de plus, Aziz se montre indisponible pour passer du temps avec elles, privilégiant son travail. Farah et sa fille partent donc en voyage sans lui, et la situation est loin d’être réglée : le conflit les attend au retour. Pourquoi la Géorgie ? Ce n’est pas clair, mais en tout cas la destination a l’air populaire, parce que les parents de Farah sont également de la partie. Il ne manque vraiment qu’Aziz…

    Alors que leur bus s’arrête sur une aire d’autoroute (et encore, le terme est généreux) située à une heure de leur destination, Farah et sa famille en profitent pour manger un morceau. Malheureusement, l’endroit est au beau milieu de la forêt géorgienne, et la petite Sarah se perd rapidement. Dans la panique qui s’en suit, Farah se lance à son tour dans les bois à sa recherche, et se trouve perdue aussi ; elle ignore que quasiment au même moment, sa propre mère a fait un arrêt cardiaque sur l’aire d’autoroute, et que ses parents sont conduits en urgence à l’hôpital géorgien le plus proche. Où, évidemment, le père de Farah ne parle pas le géorgien…
    Toutes les membres de la famille sont donc séparées, et la situation semble avoir atteint un point critique.

    Pour parler correctement de Dumue Farah, il faut mentionner un « personnage » important de la distribution : la forêt géorgienne. Et à travers celle-ci, la réalisation sans faille de la série.
    Dans ce premier épisode, il y a beaucoup de monde qui panique, et ce n’est certainement pas fini, mais la réalisation met moins l’accent sur une potentielle atmosphère « hystérique » (ce qui aurait été la tentation de tant de séries…), et plus sur l’impression de vertige provoquée par cette immensité d’arbres rigoureusement identiques, au beau milieu desquels il est si aisé de perdre son chemin. En plus, pour des raisons qui n’appartiennent qu’à elle (pouvait pas choisir d’aller à Dubai, non ?!), Farah a décidé de faire ce voyage au début de l’hiver, donc ces arbres nus ont cet air froid et menaçant, le tapis de feuilles mortes couvrant le sol de la forêt semblant ajouter à l’impression de désert angoissant. Toute forme de vie semble étouffée par la forêt. La camera tourne dans toutes les directions, comme étourdie, finissant de nous dérouter ; en l’espace de quelques plans, nous aussi avons perdu tout sens de l’orientation.
    On comprend progressivement que Dumue Farah a toutes les intentions de faire de cette forêt une corne d’abondance de problèmes. Tout y est effrayant, et évidemment, la nuit, dans le noir et le froid, cette impression est démultipliée. En plus, même s’ils ont l’air déserts, les arbres géorgiens abritent parfois… des humaines géorgiennes. Et du peu qu’on en voit dans ce premier épisode, elles ne sont pas commodes (il faut dire que vivre dans une forêt pareille ne vous met pas spécialement en liesse).

    Farah s’est lancée à la poursuite de sa fille sans équipement, sans préparation, parce qu’au départ elle pensait que la petite jouait non loin de l’aire de bus ; et la petite Sarah n’a sur elle qu’une maigre barre de chocolat que sa grand’mère lui a donné un peu plus tôt dans l’épisode. C’est donc rapidement de survie qu’il va être question. Bien-sûr, dans l’esprit de la mère, le problème est que Sarah est seule dans les bois, mais en fait toutes les deux vont devoir survivre, avec les moyens du bord c’est-à-dire rien. Le matériel promotionnel laisse entendre qu’elles vont se retrouver à un moment, mais qu’il faudra alors survivre ensemble et essayer de retourner à la civilisation.
    C’est une épreuve, indéniablement, qui attend Farah. Une triple épreuve, en fait. L’épreuve qui consiste à craindre d’avoir perdu sa fille, celle que représente la survie dans une nature hostile, et celle de traverser tout cela dans un pays étranger. La terreur cumulée de tous ces défis est l’aspect « survie » que veut explorer Dumue Farah.

    Dans tout cela je ne sais pas encore quoi penser du rôle d’Aziz, posé en ouverture de la série. A la fin de ce premier épisode, il apprend qu’une femme koweïtienne et sa fille ont disparu en Géorgie (il était en salle d’opération pendant les faits), et son mauvais pressentiment est vite confirmé. Mais il est, par définition, à distance. La question de la survie n’est pas la sienne, et j’ose espérer que même s’il se rend en Géorgie par la suite, il n’aura pas l’idée saugrenue d’aller se perdre dans les bois à son tour !
    Du coup, Dumue Farah n’a pas exactement posé les jalons d’une quelconque utilité pour lui. Limite au contraire. Farah lui reproche au début de l’épisode de n’être pas là pour elle, et, eh bien, perdue dans la forêt géorgienne, il n’est pas plus là. Elle ne peut compter que sur elle-même, une fois de plus.
    Je n’arrive pas à voir où la série veut en venir avec ce conflit ; était-ce uniquement une façon de justifier l’absence de l’homme, et expliquer pourquoi Farah est seule à gérer la crise en Géorgie ? J’aurais tellement aimé avoir le temps de voir les 7 autres épisodes de la série pour comprendre ce qu’elle comptait faire d’Aziz.

    Ce détail mis à part, je suis impressionnée par cet épisode introductif. Dumue Farah est une série où le monde est hostile, mais où il n’est pas besoin d’aller sur le terrain de la science-fiction ou du fantastique pour expliquer cela. La solitude et l’inconnu suffisent. Isolée et perdue, Farah n’a personne sur qui compter pour survivre à l’hiver géorgien… et ça pourrait arriver à n’importe qui. Dans cette série, la peur de tout perdre n’a rien d’imaginaire.


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  • Oh how the mighty have fallen

    6 juin 2021 à 19:16 • Review vers le futur •

    Il se passe quelque chose de très intéressant au Québec en ce moment : une nouvelle génération de séries pour adolescentes. Après Je voudrais qu’on m’efface, et son ton cruellement réaliste sur des réalités sociales peu montrées dans des séries (y compris canadiennes), une nouvelle série au moins aussi audacieuse, mais à l’approche radicalement différente, a démarré la semaine dernière. Hasard ou coïncidence, les deux séries sont des fictions originales d’ICI TOU.TV, la plateforme de streaming rattachée à l’audiovisuel public francophone.
    Bienvenue dans Les petits rois, la série qui reprend les codes du teen drama moderne pour mieux les tordre.

    Regardez-moi ce matériel promotionnel plein de couleurs, ces éclairages dramatiques, et ces actrices plus stylées qu’un tapis rouge du Met Gala. Osez me dire que vous n’avez pas l’impression de voir une affiche de Riverdale.
    C’est fait exprès.

    Les petits rois se déroule dans un prestigieux lycée proposant un sport-études aux gloires montantes de diverses disciplines. Les deux stars de l’établissement sont « Adaboy » et « Julep », deux amis inséparables. Le premier, qui se distingue pour son amour des fringues et de la mode, est également un patineur artistique de talent ; le second est le meilleur joueur de hockey de l’école et obsédé par son physique. Leur entourage est constitué d’autres protagonistes hautes en couleur : « Pom », le petit-ami de Julep, qui dans le premier épisode se présente à la présidence de la vie scolaire ; « Basta », l’influenceuse qui ne pense qu’à sa vie amoureuse ; « Bee », la lesbienne volage ; « Prank », le rigolo fort en gueule ; « Mac », la première de la classe ambitieuse ; « Wizz », le geek qui négocie ses talents au prix fort ; ou encore « Liz », la militante souvent renvoyée à sa foi musulmane.
    Tout ce petit monde, vous l’aurez compris, emploie des surnoms… et toute une palette de stéréotypes qu’on a déjà plus ou moins vus ailleurs.

    Sauf que. Les petits rois les suit, mais sans nous donner envie de les aimer. Le début du premier épisode est même très clair sur l’attitude que nous sommes supposées adopter : dans l’ombre, quelqu’un observe tout ce petit monde, les filme même, et promet de se venger. Qui est cette personne et qu’est-ce qui l’a poussée à vouloir prendre sa revanche ? C’est ce que l’on ne sait pas encore, mais à mesure que l’épisode inaugural va avancer, on va comprendre que son plan est déjà à l’oeuvre.
    Et pour être honnête il est difficile de ne pas abonder dans son sens. Adaboy et Julep sont imbuvables, et n’hésitent pas à se montrer cruels pourvu de servir leurs propres intérêts. Plus nous passons de temps avec eux, plus nous découvrons qu’ils ont tout dans la vie, sauf une once de moralité. Pour beaucoup de séries adolescentes, leur succès ferait d’eux des personnages aspirationnels, ou à tout le moins, divertissants de par leurs excès ; mais dans Les petits rois, le dégoût est omniprésent. A-t-on besoin, au final, de savoir ce qu’ils ont fait pour s’attirer les foudres de la personne qui nous promet vengeance ? A mesure que l’épisode avance, on comprend que tout le monde pourrait avoir une bonne raison de les détester, et leur souhaiter tout le mal du monde.
    Le pire, c’est qu’ils s’apprêtent probablement à causer leur propre chute. Tout ce qu’il y avait besoin de faire, c’était les prendre sur le fait.

    Les petits rois en a sa claque, des séries qui portent aux nues ces comportements. Elle part également du principe que ses spectatrices sont en mesure d’apprécier les questions morales soulevées par son intrigue, et les invite à prendre du recul sur les aspects soapesques qui, dans un autre contexte, relèveraient uniquement du guilty pleasure. Il y a, d’une certaine façon, un peu de 13 Reasons Why dans son intrigue (sans le côté high concept), mais pour le moment avec une conscience plus aiguisée de la responsabilité de la série quant à ce qu’elle décrit à  ses spectatrices. Je hais 13 Reasons Why, je sais pas si je l’ai mentionné récemment ? En tout cas ça mérite d’être répété.
    Non, en fait, vous savez quoi ? Tant qu’on en est à dresser des comparaisons, l’ambition de l’intrigue rageuse de Les petits rois, ainsi que son esthétique léchée, évoque en fait surtout Sweet/Vicious : au lieu de s’adresser au plus petit dénominateur commun, la série mise sur l’appétit de son audience pour la justice. Ce n’est (…en tout cas, a priori) pas le même motif exactement qui pousse les vengeuses masquées des deux séries à agir, mais l’idée est proche. Toute la question sera de déterminer comment cette justice peut s’obtenir, et quelles en sont les limites. Pour le moment, Les petits rois donne l’impression (surtout dans le dernier tournant de ce premier épisode) de n’en avoir aucune, de limite. Je soupçonne que ça ne puisse pas durer…

    Dans tous les cas c’est de la belle ouvrage, aussi bien sur le fond que sur la forme. Les petits rois est clairement une réussite, et j’ai hâte de découvrir où sa première (courte) saison va mener. Et si vous en avez marre des teen shows qui prennent les adolescentes qui les regardent pour des écervelées, vous devriez probablement aussi.


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  • Get rekt

    6 juin 2021 à 19:13 • Review vers le futur •

    D’ordinaire, j’aime bien parler des séries scandinaves qui ne sont pas des polars, parce que d’une part yen a plein et qu’elles ne trouvent jamais autant de publicité, et d’autre part, eh bien, euh, parce que j’aime ça. Et je ne manque jamais une occasion de vous parler des dramas familiaux, des comédies barrées, ou de toute autre petite gemme que je trouve sur mon chemin.
    Aujourd’hui ne sera pas l’une de ces occasions. Aujourd’hui, on va plutôt parler de Try Hard, et j’écris ces quelques lignes plutôt comme un avertissement.

    Try Hard, c’est une comédie… pardon, une « comédie » de la plateforme nordique de streaming Viaplay. Elle a décidé de se dérouler dans l’univers des e-sports, cette fois. Entendons-nous bien : il y a des séries originales de Viaplay qui valent le coup d’oeil (on parlait de Pørni à peine le mois dernier, après tout !), et il y en a d’autres qui me tentent dans un avenir proche (Dystopia, une série d’horreur qui débarque la semaine prochaine, est ultra-intrigante de par sa promesse d’utiliser un jeu de rôle grandeur nature pour base de départ, et j’ai hâte de la comparer à Siberia).
    Mais tout dans la démarche de Try Hard prouve qu’on ne s’est pas donné beaucoup de mal ici. Ironiquement.

    Sebastian est un adulte de 23 ans, mais il continue de se comporter comme un adolescent ; il passe sa vie à jouer aux jeux video, et vit aux crochets de ses parents. Ceux-ci ont passé le point de non-retour, et décident finalement de lui couper d’abord l’électricité, puis finalement les vivres. Seb est donc mis face à un ultimatum : soit il trouve quelque chose à faire de sa vie (et ça tombe bien, il y a un salon d’orientation en ce moment, il pourrait y trouver une formation ou un boulot), soit il déménage. Et non, bosser gratuitement au cybercafé du coin ne compte pas !
    Evidemment le jeune homme vit cela comme un affront personnel, surtout qu’il a été interrompu en pleine partie avec son meilleur pote Henrik lorsque ses parents ont organisé leur petite intervention. Il est convaincu que s’il continue sur sa lancée, il finira par être recruté par une ligue qui va le payer une petite fortune pour jouer sur Faceit, son jeu video préféré (et clairement un équivalent de Counter-Strike). Le pire, c’est qu’une fois au salon d’orientation, il fait la rencontre de « Salt », un ancien joueur de compétition qui aujourd’hui donne des cours en vue de former les joueurs qui se présenteront à « Crazy LAN Randers », où les célébrités e-sport de demain sont repérées. Bon, les cours ne l’intéressent pas vraiment, mais Seb se convainc que participer à Crazy LAN Randers va lui ouvrir les portes des plus grandes équipes. Sauf que pour y participer, il doit avoir sa propre équipe, et qu’il va donc devoir s’organiser avec ses meilleurs potes gamers.

    Si seulement il n’y avait que Sebastian qui avait un poil dans la main, dans ce premier épisode. Mais c’est toute la série qui est d’une flemme désolante. Les personnages sont unidimensionnels et stupides (tous autant qu’ils sont, et au passage vous remarquerez l’emploi du masculin, il a tout son sens ici, les rares personnages féminins cumulant un total de trois répliques et demies…), pour commencer. On est ici dans l’énumération studieuse de clichés sur les gamers, pire encore que The Big Bang Theory sur les geeks (et faut le faire !). Mais à la rigueur ça passerait si la comédie était…
    …c’est que le mot que je cherche, déjà ? Oui, voilà : drôle. Si la comédie était drôle, ça passerait mieux. Un peu mieux, mais ce serait déjà ça de pris.

    Try Hard n’a aucune affection pour son sujet. Que l’on considère que son sujet est Sebastian, ou que l’on considère que de façon plus large c’est le jeu video. Je ne suis même pas totalement convaincue que les créateurs connaissent grand’chose au sujet. Ce serait pourtant une bonne idée d’avoir une série qui parle du miroir aux alouettes qu’est le milieu du jeu video à l’heure actuelle, qu’on parle des illusions que peut donner le streaming ou qu’on traite, comme c’est le cas ici, de la compétition de haut niveau. Mais Try Hard n’a pas l’air d’avoir envie de s’intéresser au fond de son sujet, juste de montrer une bande d’imbéciles qui se lancent dans un projet idiot, présenté comme voué à l’échec (et même s’il ne l’était pas, ça ne serait pas beaucoup plus satisfaisant).
    Jamais la planète n’avait autant joué aux jeux videos qu’en 2020, et voilà Try Hard qui débarque avec ses poncifs d’un autre temps, ses personnages vides et ses dialogues sans intérêt. Je suis un tout petit peu moins sévère avec le personnage d’Henrik (qui est quelqu’un de positif et un peu plus surprenant que la moyenne des autres protagonistes), mais c’est uniquement par effet de comparaison, la barre étant placée particulièrement bas.

    Try Hard ne fait aucune promesse valable, et celles délivrées du bout des lèvres par son premier épisode ne font pas envie. La série se refuse à, pardon, jouer le jeu. Au pire, si vous devez vraiment passer quelques heures à imaginer devenir riche en jouant à des jeux video, inscrivez-vous sur Twitch, ça vous passera très vite.


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  • Why have you never cared ?

    5 juin 2021 à 18:22 • 3615 My (So-Called) Life •

    Dimanche dernier, j’ai décidé sur un coup de tête de regarder à nouveau le premier épisode de Gilmore Girls. A ce moment-là, il était quelque chose comme 3h du matin, je n’avais même pas encore réalisé que c’était la fête des mères ! C’était juste l’effet de plusieurs semaines de lobbying pur et simple par mes suggestions Youtube (auxquelles j’obtempère systématiquement lorsqu’il s’agit de séries, comme vous le savez), cumulé à une envie de regarder quelque chose qui ne ferait pas l’objet d’une review, parce que parfois, je veux juste m’assurer que je vais regarder quelque chose pour moi plutôt que pour vous. Et aussi, c’était l’anniversaire de ma tentative de suicide, et je croyais regarder quelque chose de réconfortant…

    Trigger warning : violence psychologique.

    D’ailleurs, le présent texte ne sera pas une review. C’est mon ressenti conflictuel face à Gilmore Girls qui m’a interrogée.
    Et ce qu’il traduit.

    J’ai déjà à plusieurs reprises écrit sur (ou fait allusion à) Gilmore Girls, en particulier une review globale de la série lorsque j’ai procédé à mon premier marathon intégral, en 2012. Il y a presque 10 ans, donc, pour une série que pourtant j’avais découverte sur France2 au début des années 2000. Ce sont donc quasiment deux décennies d’histoire que j’ai avec cette série, comme toute téléphage est vouée à entretenir avec toutes sortes de fictions lorsqu’elle atteint l’âge canonique de 40 ans. Au fil des années se construisent des impressions, des sentiments, des réflexions, mais aussi des rendez-vous ratés, des visionnages gloutons, des visites ultérieures plus ou moins fréquentes, et, à l’occasion, une scène et/ou une réplique qui revient à l’esprit, comme au milieu de nulle part, parce que la série fait inconsciemment partie de nous au bout du compte, comme tout art que nous avons consommé au fil des années.

    Quand je regarde le premier épisode de Gilmore Girls (et ce n’était pas le premier revisionnage), j’arrive presque à me rappeler de la première fois où je l’ai vu, et à partir de là, les vannes sont ouvertes. Toutes sortes de souvenirs reviennent à la surface. Au début des années 2000, j’entrais à peine dans l’âge adulte. Je commençais aussi à prendre douloureusement conscience de choses sur mon milieu familial, et si je n’en étais alors, mais alors pas du tout, au point de parler de maltraitance, de violences intrafamiliales, ou même de violence tout court, en tout cas l’euphémisme de « famille dysfonctionnelle » commençait à émerger dans ma façon de voir les choses. C’était nouveau et les contours étaient encore flous, parce que c’était effrayant. Je passais encore beaucoup de temps à essayer de diminuer l’impact qu’avaient eu, au fil des ans, beaucoup de mes expériences avec mes parents.
    Ce n’était pas la première fois, mais ce n’était sûrement pas la dernière, que la télévision allait me servir à élargir mes horizons et essayer d’adopter des points de vue variés sur mes questionnements personnels. Certaines des séries que je consommais à l’époque, parfois depuis quelques années, servaient (bien qu’involontairement) à me représenter ce que ma famille n’était pas mais aurait pu être. C’était la raison pour laquelle j’étais autant captivée par 7th Heaven, le Dieu de la Téléphagie me pardonne. Pour moi, cette famille large mais surtout joviale, où dans chaque épisode les parents s’interrogeaient sans fin sur la meilleure façon de parler à leurs enfants pour leur donner la bonne éducation, c’était de la science-fiction. Ces parents-là n’élevaient pas la voix, ou si rarement ; mais ils étaient conservateurs, comme mes parents, et du coup ça ouvrait plein de possibilités. Ainsi ce n’étaient pas les « valeurs » de mes parents que 7th Heaven m’aidait à remettre en cause, mais juste leurs pratiques. Pour moi, 7th Heaven c’était la série qui me disait que les choses pouvaient se passer bien, sur tous les plans y compris familial, et c’était révolutionnaire ! Lorsqu’avec les saisons, le Révérend Camden a commencé à se montrer sous un jour moins positif (ha ! little did I know…), j’ai d’ailleurs été désarçonnée.

    On pourrait penser que dans ce contexte, Gilmore Girls et son approche plutôt conservatrice (elle était, après tout, financée par une organisation de financement de programmes family-friendly, ce qui est une paraphrase pour du contenu regardable par toutes tranches d’âges, certes, mais aussi conservateur ; j’ai aussi évoqué dans ma review son rapport réticent au progrès et à la modernité) allaient servir la même fonction, mais pas du tout. Instinctivement, à l’époque, mon regard s’est porté non pas sur la relation entre Lorelai et Rory, qui était attendrissante mais n’avait jamais trouvé résonnance chez moi, mais plutôt sur celle qui concernait Lorelai et Emily (celle de Lane et Madame Kim était également importante à mes yeux, et suivie avec attention). Je n’étais pas capable de le formuler à l’époque, mais c’était un soulagement que de voir les différents accrochages entre les deux femmes, à une époque où moi-même je commençais à avoir des conversations déplaisantes avec mes propres parents sur notre relation. Mes premiers questionnements à voix haute étaient mal reçus, en particulier par ma mère qui (je commençais à peine à m’en rendre compte) avait passé les années précédentes à m’empêcher de poser trop de questions ; ils étaient étouffés avec une violence verbale non-contenue, dans ce style de dispute typique des parents toxiques qui en fait consiste à balancer autant d’horreurs que possible à leur fille jusqu’à ce qu’un commentaire réussisse à la faire vaciller et douter d’elle-même au lieu des parents. Bref, de la violence psychologique. Les attaques personnelles finissaient par fuser de toute part, manifestation d’un ressentiment mutuel, parce que je commençais à être capable d’encaisser les horreurs juste un peu plus longtemps qu’avant avant de m’effondrer. Le résultat, c’est que ce qui était auparavant des monologues violents devenait des « conversations » violentes, qui pouvaient ressembler un peu plus à un script d’une scène similaire ; genre certaines de celles-ci.
    Avec une nuance essentielle : quand ces dialogues sont écrits par des scénaristes, ils incluent des aveux qui me manquaient cruellement. Qui est-ce que j’essaie de berner ? Ils me manquent toujours. La stratégie de mes parents et en particulier de ma mère, c’était de ne surtout pas avouer que les choses pouvaient être dysfonctionnelles ; que mes émotions étaient injustifiées, et donc irrationnelles ; et que personne n’avait donc rien à se reprocher, à part moi. Dans Gilmore Girls, pour des raisons propres à la narration, on disait à voix haute (quand bien même tous les personnages n’étaient pas forcément d’accord avec cette possibilité) qu’Emily avait foiré quelque chose dans sa relation à Lorelai, quand bien même cela ne faisait pas d’elle un monstre (et Gilmore Girls a persisté, d’ailleurs, dans son humanisation d’Emily, qui encore une fois rendait la série regardable par moi au stade où j’en étais de mes réflexions).

    Au fil des visionnages, pourtant, ce rapport à Gilmore Girls a fluctué. Parce que mon rapport à mes propres parents a fluctué, j’imagine.

    Au moment de mon marathon en 2012, j’avais coupé les ponts avec mes parents, et ces choses étaient moins douloureuses. Ma review fait d’ailleurs un commentaire très différent de la relation entre Lorelai et Emily, et en la relisant aujourd’hui, surtout après mon revisionnage frais du pilote… je m’aperçois que je ne ressens plus les choses de la même façon. Et qu’à nouveau, je ressens les affrontements entre la mère et la fille comme une plaie mal cicatrisée (ou rouverte, aux choix). Dimanche dernier, j’ai regardé Emily manipuler Lorelai pour obtenir les fameux dîners du vendredi soir, puis lui rappeler « you have your precious pride, I have my weekly dinners » avec un ton qu’on ne peut qualifier autrement que méchant. Et qui justifie (quoi que les épisodes ultérieurs tentent d’en dire) tout ce que Lorelai ressent de négatif envers sa mère.

    J’ai cru que j’avais fait la paix avec Gilmore Girls, et que les émotions suscitées par elle étaient désormais atténuées. J’ai cru que j’avais fait la paix avec Emily Gilmore. J’ai cru que j’avais fait la paix avec ma mère. Je m’étais trompée.
    Clairement ce n’est pas le cas (clairement !). Sans quoi les choses ne seraient pas aussi douloureuses. Sans quoi un simple revisionnage ne serait pas aussi douloureux. Sans quoi je ne découvrirais pas, à l’occasion d’un fondu au noir, que mon reflet sur l’écran affiche un rictus de dégoût. Je connais cette Emily, j’ai grandi avec elle (une version moins riche et élégante d’elle, mais elle quand même), et je méprise tout ce qu’elle représente. Même 20 ans plus tard.

    On voudrait pouvoir dire, ne serait-ce qu’à celles qui sont aujourd’hui en train de se débattre avec ce qu’on traversait il y a 20 ans, qu’à un moment ces blessures cicatrisent, comme si c’était voué à se produire. Mais la fiction comme ici Gilmore Girls aide à révéler que non, qu’on passe par toutes sortes de phases, plutôt des oscillations, au fil des années. Avec un peu de chance, dans 10 ans je ressentirai encore quelque chose de différent devant le premier épisode de Gilmore Girls ; ou peut-être que je ne le regarderai plus jamais parce qu’à un moment j’aurai cessé ma relation avec cette série. C’est difficile à prédire.
    Peut-être qu’aujourd’hui je ressens un peu moins de flou, ou moins de colère, devant les mêmes scènes ; ou peut-être que ces sentiments s’expriment juste différemment parce que je n’ai plus l’expérience du contact prolongé. Je reconnais en Emily Gilmore des choses que je ne peux pas pardonner, toujours pas après tout ce temps, peut-être jamais. La bonne nouvelle c’est que je n’y suis pas obligée. Et l’encore meilleure nouvelle c’est que je n’ai plus à dîner toutes les semaines avec elle.

    Bonne fête des mères avec du retard, Emily. J’espère que de temps en temps tu as mal aussi.


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