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  • Law & Order: Crown Lake

    17 mai 2020 à 23:46 • Review vers le futur •

    Si vous vous souvenez de l’excellente Zoe Valentine et que vous avez eu la bonne idée de regarder la série, alors vous connaissez Brat, la chaîne Youtube qui investit spécifiquement dans la fiction pour ados et pré-ados américains. Et Dieu sait qu’on a bien besoin de productions originales pour cette cible, les pauvres.
    Eh bien il y a quelques semaines, Brat a eu la bonne idée de sortir une nouvelle série très rafraîchissante, Stage Fright, dont le dernier épisode de la première saison a été publié cette semaine. Cette fois, on a droit à un mélange de teen drama, comédie et enquête policière sur fond de comédie musicale ! Rien que ça.

    Tout commence pendant les répétitions de la troupe de théâtre de la Crown Lake Academy. En apparence, les choses se passent bien, à quelques jours de la représentation du Fantôme de l’Opéra que préparent les étudiants, mais il y a aussi beaucoup de stress en coulisses. Toute la pression repose sur les épaules de Lizzy, qui est la régisseuse de cette production ; elle doit à la fois s’assurer que la mise en scène est respectée par les acteurs sur les planches, et veiller au bon déroulement technique, et à ce titre elle est à la tête d’une petite équipe. Forcément, c’est beaucoup de responsabilités, que Lizzy prend très au sérieux.
    Mais rien ne pouvait la préparer à ce qui se produit lorsque l’immense chandelier s’écrase sur le chanteur-star du spectacle, le très populaire Noah.

    Qu’on se rassure, Noah n’est pas mort (il est « juste » plongé dans le coma), mais tout le monde est quand même effrayé. Bien que la police ait conclu qu’il s’agisse d’un accident, Lizzy est certaine que l’affaire est plus complexe qu’il n’y paraît. Elle commence à poser des questions autour d’elle, et finit par se lancer dans une véritable investigation criminelle qui va l’entraîner aux quatre coins de la Crown Lake Academy.
    Les épisodes de Stage Fright sont courts, rythmés, et suivent à la perfection les codes du genre. Il y a toutes sortes de fausses pistes, plein de suspects, et au moins autant de motifs d’en vouloir à Noah. Heureusement Lizzy va s’entourer (un peu par accident mais l’essentiel c’est que ça fonctionne) d’un petit groupe d’élèves qui vont mener l’enquête avec elle : Roxie, la demi-sœur égocentrique de Noah qui se sent coupable de ne lui avoir jamais vraiment prêté d’attention, Mikey, le sportif qui cache (plus ou moins subtilement) son énorme crush pour Noah derrière une attitude bravache, et Delia, une outsider qui assure la régie du spectacle et qui veut surtout aider Lizzy.

    On ne va pas se mentir : je n’ai pas aimé Stage Fright autant que j’avais aimé Zoe Valentine, qui a bien plus de profondeur émotionnelle c’est certain. Mais on sent quand même des points communs entre les deux séries. La distribution est pléthorique et « diverse », on y met sans difficulté des personnages gays autant que hétéro, mais le rôle principal revient à une jeune fille ; il faut d’ailleurs noter que le cast de ces séries est éminemment age appropriate, pas de trentenaire jouant un ado ici. Les ressemblances se retrouvent aussi sur un plan visuel (il faut dire que Brat ne roule pas sur l’or et a vraisemblablement des décors qui tournent sur plusieurs séries… j’ai aussi reconnu une musique des Sims 3 dans au moins un épisode !). Il est également intéressant de noter que Stage Fright est un spin-off qui ne dit pas son nom d’une autre série de la chaîne, Crown Lake, qui se déroulait dans la même école mais en 1994 (à l’époque, la Crown Lake Academy n’était pas encore mixte).
    Parler de cohérence n’est donc pas superflu ici. Clairement, Brat a trouvé une formule qui est à la fois efficace et capable de produire des séries très différentes. Et surtout, différentes de ce qu’on trouve sur les chaînes traditionnelles ! Aux USA, elles sont rares les séries produites pour les pré-ados et ados qui sortent du cahier des charges rigoureux de Disney et Nickelodeon, mais ici, même en ayant des tropes, des mécanismes et des décors en commun, on en ressort avec des séries uniques, mélangeant plusieurs genres avec brio.

    En l’espace de 8 épisodes seulement, Stage Fright réussit à être amusante, enlevée et intrigante (quand bien même je dois admettre que j’ai commencé à cerner la conclusion de l’enquête vers la moitié de la saison). C’est plus que ce que d’autres productions plus léchées fournissent parfois.


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  • Striking oil

    17 mai 2020 à 23:45 • Telephage-o-thèque •

    A force de persistance, on finit par en voir, des séries historiques scandinaves. Et du coup au fil du temps il est possible d’en tirer des conclusions, d’en comprendre les ressorts, d’en deviner des préférences nationales. Parce qu’encore une fois (affrontant bravement le risque de me répéter), les séries scandinaves, on n’en voit que certaines, c’est-à-dire celles incluant un ou plusieurs meurtres glauques et aussi modernes que possibles. Les séries historiques, en revanche, on s’en tape collectivement le coquillard ; comble de l’ironie c’est souvent l’exact inverse qui se passe pour la fiction allemande, à quelques kilomètres de là.
    Ecoutez, si vous vouliez de la cohérence, fallait pas vous intéresser à l’exportation de séries.

    Du coup, quand je réussis à chopper un Krøniken, un Badehotellet, un Mercur ou un Vår tid är nu, il ne faut pas me le demander deux fois. Ou, tiens : un Lykkeland.

    Il s’avère que les period dramas scandinaves reposent la plupart du temps sur une même poignée de principes : il s’agit d’ensemble dramas représentant grâce à leur distribution pléthorique plusieurs catégories socio-professionnelles, dont les trajectoires individuelles sont écrites de façon à refléter aussi largement que possible les mutations de l’époque choisie. Le cœur de la mission de ces séries, c’est raconter un passage-clé de l’Histoire du pays. L’idée de départ vient de la période dont il est question, pas des personnages qui apparaissent presque comme secondaires (le mot que je voudrais employer est afterthought mais je n’arrive pas à le traduire précisément). Cela ne veut pas dire que les personnages sont traités par-dessus la jambe, au contraire ce sont leurs intrigues personnelles qui permettent d’illustrer le déroulé de l’Histoire. En revanche il est clair que le pitch central de la série, ce n’est pas sur les spécificités de chacun qu’il repose, mais sur le contexte historique en premier lieu.
    On est très, très proche de la formule qui est depuis longtemps celle des dramas historiques britanniques grand public (pensez Upstairs, Downstairs). Cela n’a rien d’étonnant quand on connaît la disponibilité et même l’omniprésence de la télévision britannique sur les écrans scandinaves depuis des décennies, mais c’est l’une des rares influences qui s’exprime encore dans la fiction de la région de nos jours. A noter d’ailleurs que contrairement à beaucoup de productions historiques de la planète, ces period dramas scandinaves ne sont généralement pas adaptés d’oeuvres littéraires appartenant au patrimoine national (ils n’en sont pas moins onéreux).
    Cette règle a évidemment ses exceptions, comme par exemple le cas 1864 qui était adaptée de bouquins, mais lorsqu’il est question de séries on peut difficilement parler de règle sans exception.

    En cela, Lykkeland est très fidèle au cahier des charges, et propose effectivement dans son épisode d’ouverture quelque chose qui s’inscrit pleinement dans cet héritage.
    La période que s’est choisie la série correspond à la fin des années 60, dans la ville de Stavanger, lovée sur les côtes du comté de Rogaland. L’intrigue commence précisément en 1969, alors que les compagnies pétrolières du monde entier se retirent de Norvège, pensant qu’il n’y a plus de pétrole à en tirer (…je me demande si elles ont raison ?). Le problème c’est que Stavanger a besoin de quelque chose, n’importe quoi, pour survivre, et le départ des compagnies notamment nord-américaines (Shell, Esso, Phillips…) serait le dernier clou dans son cercueil économique. Toutes les autres industries sont à la dérive : les eaux n’ont plus de poisson (ce qui met en danger à la fois les professionnels de la pêche, de la conserverie et de la construction navale), le chômage bat des records, le départ des compagnies étrangères vide les commerces et les hôtels… A ce rythme, il ne va rester debout que les nombreuses églises de cette région très conservatrice.

    Je vous accorde que c’est un peu sombre comme point de départ (j’espère que ça va s’arranger !), mais c’est en réalité là que se joue la plus grande originalité de Lykkeland : dans cette volonté de parler du pire. Beaucoup des séries historiques en son genre adoptent résolument un point de vue optimiste ; il s’agit, après tout, de productions se voulant grand public et espérant une certaine longévité, chose qui s’obtient difficilement en poussant ses spectateurs à la dépression. D’où le choix pour plusieurs d’entre elles de se concentrer sur l’après-Guerre, plus favorable à cet état d’esprit. Qui plus est, il s’agit généralement de séries diffusées par la télévision publique, dont la mission de divertissement se mêle à une autre plus complexe, qui… bon, je ne veux pas employer le mot « propagande », ni même nécessairement le mot « nationalisme », qui sont des termes exagérés, mais enfin, les chaînes publiques ne sont pas là pour vous dégoûter de votre propre pays non plus, hein.
    Il n’y a pas beaucoup d’espoir pourtant dans Lykkeland (je suis curieuse de savoir si la roue va tourner !), et c’est plutôt nouveau. C’est également vrai à un niveau individuel, plusieurs des personnages rencontrant au cours de ce premier épisode des obstacles conséquents, certains voyant même leur vie dérailler complètement.

    De toutes les séries historiques scandinaves que j’ai eu l’opportunité de voir, Lykkeland est probablement celle qui est la plus « actuelle ». Certes, elle raconte un tournant de l’Histoire nationale norvégienne, comme tant d’autres comme elle, mais elle renvoie aussi aux crises économiques plus modernes. En fait, la série permet d’aller au-delà d’une forme de… appelons ça « escapisme pédagogique », si vous voulez, et qui est souvent de mise dans ce type de fiction. A la place, elle reflète des préoccupations réelles des spectateurs. On y trouve assez peu de nostalgie, aussi ; à tout prendre, on ressentirait presque du soulagement à ne pas vivre dans le Stavanger de 1969.

    C’est un équilibre fragile, et il faudrait pour bien faire voir sur le long terme comment le ton de la série va évoluer. Ca tombe plutôt bien, contrairement à la plupart des autres period dramas scandinaves, BBC Four a fait l’acquisition de Lykkeland et il est possible en ce moment de dénicher les épisodes avec de jolis sous-titres anglais (sauf pendant les quelques dialogues eux-mêmes en anglais, même si je pense qu’il faut empêcher légalement les acteurs britanniques d’imiter le Southern drawl).
    Mais étant donné que la série est écrite par Mette M. Bølstad (Kampen om Tungtvannet, Nobel…), que sa première saison a été couverte de récompenses lors des Gullruten et de CANNESERIES, et qu’une deuxième saison est prévue dans les prochains mois, je suis plutôt confiante. Vous devriez l’être aussi.


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  • Magicien malgré lui

    16 mai 2020 à 21:40 • Review vers le futur •

    Pendant les 10 dernières années environ, on a enfin réussi à déverrouiller une partie de l’accès à la télévision internationale. Ce n’est pas encore parfait, mais entre les chaînes un peu plus curieuses que la moyenne, les festivals plus curieux que la moyenne, et les plateformes de streaming plus opportunistes que la moyenne, on n’a jamais autant eu de possibilités d’accéder aux séries de monde entier. And I, for one, am glad.
    Cependant, et j’ai eu l’occasion d’en parler une fois ou deux par le passé, cet accès est encore extrêmement conditionné par les clichés sur la production d’un pays donné, voire carrément par les clichés sur ce pays. Et quand une série marche, bizarrement au lieu d’en conclure « oh, les gens étaient contents de voir quelque chose de nouveau », beaucoup d’exécutifs se disent « il faut absolument qu’on donne 712 autres séries exactement comme ça à notre public », ce qui n’a fait qu’empirer le phénomène. D’où le fait que quasiment aucune comédie scandinave n’a profité de la Scandiwave, par exemple.

    Justement. En dépit des améliorations en la matière, les comédies restent en marge de cette amélioration. Elles voyagent infiniment moins que les dramas ou thrillers, et tout le monde, des chaînes aux plateformes de streaming en passant par les festivals, a du mal à leur faire de la place lorsqu’il s’agit de programmation internationale.
    Alors entendons-nous bien : je suis la première à dire (et je l’ai déjà dit aussi) que l’humour, c’est compliqué à exporter, c’est hautement culturel, et quand en plus des références locales s’en mêlent effectivement c’est la croix et la bannière à promouvoir. Mais enfin, il faut bien commencer quelque part, et si vous croyez que l’humour des sitcoms US va de soi, en réalité c’est en grande partie à cause d’une question d’habitude. Le sitcom multi-camera, c’est pas exactement une tradition française. Donc à un moment il faut y aller, hein. Les habitudes ça se crée.

    La chance qu’on a c’est que dans certains cas (…encore limités, certes), les plateformes de streaming internationales ne peuvent pas se permettre de snober longtemps des genres entiers. Le public colombien (et sud-américain d’ailleurs) aime les comédies et en trouve sur sa télévision ? Eh bien Netflix est bien obligé de renchérir pour capter ce public, et ça donne l’opportunité de voir une comédie comme Chichipatos, ou The Unremarkable Juanquini de son titre international.

    « Chichipato » est apparemment un terme typiquement colombien qu’on peut rapprocher du terme anglophone « cheap » : c’est aussi bien un mot qui désigne quelqu’un de pingre que quelqu’un qui ne vaut pas grand’chose. Dans le cas de Juan Morales, alias Juanquini de son nom de scène, on est tout-à-fait dans la seconde configuration : c’est un piètre magicien à la vie décevante à tous les égards. Il ne sait exécuter que des tours minables, même les enfants devant lesquels il se présentent ne le prennent pas au sérieux, et à vrai dire son fils et sa fille (deux adolescents) n’ont aucun respect pour lui non plus. En fait la seule personne sur laquelle il puisse compter est son épouse, Margot, qui est d’ailleurs aussi sa manager.
    Tout change lorsque El Ñato, le chef d’un cartel, assiste à l’une de ses représentations pourries. Les enfants devant lesquels il se produit ne sont pas impressionnés par ses tours de passe-passe, mais El Ñato tombe sous le charme, pensant apparemment avoir affaire à un véritable magicien capable de réaliser l’impossible.
    Et l’impossible, il en a bien besoin, alors que la police est sur sa piste et qu’il cherche par tous les moyens à échapper à une arrestation. Il organise donc une fête à l’occasion de laquelle il invite l’incroyable Juanquini à se produire pour un numéro que personne ne va oublier.

    Soyons clairs, cet épisode introductif n’est pas mauvais, mais il traîne en longueur, et ce pour deux raisons.
    Déjà, il y a le fait que la plus grande partie de l’épisode mette en parallèle de façon ostensible la vie pourrie de Juanquini et les airs que se donne El Ñato, alors qu’il donne des ordres à son homme de main pour organiser la fameuse fête. Aucun mystère n’est fait de ses intentions, quand bien même on n’en a pas forcément les détails.
    Or, ces détails en réalité sont fournis par un autre biais, qui sont l’autre raison pour laquelle ce premier épisode se plante un peu :

    Bah ouais. Un utilisateur lambda de Netflix connaissait le tour qu’allait prendre les choses avant même de regarder le premier épisode. C’est con, hein ? A l’heure du streaming où, entre les descriptions, les résumés, les trailers automatiques et les tags (et je ne parle même pas de l’accès à Google), on est plus informé sur une série avant de la regarder que pendant… eh bien, il est temps de remettre en question certaines choses dans la façon de bâtir l’exposition d’une série. Bien-sûr il est depuis longtemps possible de se retrouver face à des situations comme celle-là (les programmes télé datent du siècle dernier, et ils incluaient déjà des résumés), mais il était possible de passer à travers et/ou de les ignorer. Là, les résumés précèdent le « contenu » ; visibles avant lui de façon systématique, il faut que les scénaristes du streaming s’adaptent de la même façon que ceux de la télévision linéaire se sont adaptées aux coupures de publicité. Sans quoi, ça fout un peu les effets de manche par terre.
    Ce n’est pas dramatique, je vous rassure. Et pour cause : parce que Chichipatos est une comédie, la trame n’est pas la seule chose qui importe dans ce premier épisode. Et puis, après tout, ce n’est qu’un premier épisode : la mise en jambes est peut-être lente mais il y a des choses derrière.

    Un facteur à la fois aggravant et prometteur est que l’humour que s’est choisi Chichipatos est assez doux-amer. L’humour m’a rappelé celui de la comédie australienne Woodley, par exemple, où ce qui est drôle est toujours un peu déchirant aussi (en témoigne la scène de répétition avec le chat Matías). On n’est pas exactement dans la moquerie, ce qui a le mérite de nous laisser échapper à l’embarras de seconde main, mais plutôt dans une vision très mélancolique de ce qui alimente les situations comiques. Juanquini est un clown triste, voilà tout, et bien que je sois très sensible à ce type d’humour, je suis obligée de reconnaître que ce n’est pas exactement ce qu’il y a de plus facile à mettre en place dans un premier épisode qui traîne déjà la patte par ailleurs. Mais c’est aussi plein de charme.

    Au terme de cette introduction un peu laborieuse, je dois admettre que j’ai déjà pris Juan en affection, et que je suis curieuse de ce qui va arriver par la suite. En partie à cause de cette histoire de clown triste, en partie parce que le résumé de Netflix est très vague sur ce qui se passe après cette fichue disparition (Dieu merci), et en partie parce que, chose que je n’ai pas encore mentionnée, Chichipatos est très esthétique et que son univers visuel m’intrigue.
    Sans aller totalement jusqu’à comparer les deux (parce que, bon, tout le monde n’est pas Luiz Fernando Carvalho), j’ai eu l’impression récurrente de voir une série dans la lignée de Capitu ; venant de moi c’est un immense compliment. En effet, Chichipatos joue à fond le contraste entre les couleurs chaudes et froides, entre l’artifice des sequins et la réalité glauque de la vie quotidienne, entre le milieu criminel et les influences du monde du spectacle vivant… Ca donne un mélange qui ajoute des dimensions complémentaires aux scènes, aux échanges, à l’humour. A tout.

    On pourrait se dire qu’une série comme Chichipatos ne devrait pas voyager ; peut-être qu’elle fonctionne sur son public de destination et rien que lui, c’est possible. Peut-être aussi qu’elle fonctionnerait mieux à la télévision linéaire (son créateur, après tout, a passé l’essentiel de sa carrière chez Caracol avant de bosser avec Netflix sur Siempre Bruja).
    Mais elle fait partie des rares comédies internationales que Netflix commande, elle est là, et elle n’est pas dénuée d’intérêt, même si elle n’est pas non plus une parfaite réussite. Personnellement, je suis contente d’y jeter un œil, et j’attends de voir la tournure du deuxième épisode (sur sept seulement) avant de totalement décider ce que j’en fais. Dans tous les cas, avoir une fenêtre ouverte sur une comédie colombienne est encore une opportunité trop rare pour être boudée.


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  • She’s still in love

    15 mai 2020 à 21:53 • Telephage-o-thèque •

    Ce confinement apporte des visionnages des plus improbables. Cette semaine je me promenais sur Youtube l’âme en peine, plutôt dans l’optique de grignoter des extraits, mais boulottant finalement tout ce qui me passait sous la souris (j’ai même regardé trois épisodes de la saison 5 de Rules of Engagement, une série que chaque fibre de mon être méprise… TROIS ! si c’est pas un appel à l’aide, ça).
    C’est à ce stade que, pour la première fois depuis des mois, l’algorithme a fait un truc sensé et m’a dirigée vers la chaîne Hunny Haha, où se trouvent les séries originales de TVLand. Dont l’intégrale des deux saisons de Happily Divorced.
    Devinez de quoi on parle aujourd’hui.

    A la base, je n’ai certainement pas commencé un rewatch de Happily Divorced en vue de faire une review.
    S’il y a bien une chose sur laquelle on peut tous tomber d’accord, c’est que reviewer un sitcom multi-camera est la chose la moins gratifiante au monde. Déjà, reviewer une comédie, c’est toujours un peu compliqué. Mais alors, reviewer une comédie dont le format repose principalement sur des gags (et moins sur une histoire : le genre du sitcom est profondément procédural, à la base), c’est pire. A cela s’ajoute le fait que la formule du sitcom multicam reste inchangée depuis des décennies, et qu’en plus Happily Divorced, je vous le disais précédemment, est volontairement basée sur une certaine nostalgie d’un humour grand public. A la base, les raisons qui font exister cette série sous sa forme finale se prêtent donc peu à une critique inédite. Ce n’est pas impossible, mais ça ne va pas de soi.
    Personne ne commence un marathon de Happily Divorced dans le but d’en faire une review. Et la meilleure preuve c’est que les reviews globales de Happily Divorced, on en trouve moins que (pour caricaturer) de Mad Men.

    Cela étant posé, Happily Divorced a des propriétés intéressantes, et uniques. Même la plus « simple » des comédies a des choses à dire, et du coup moi aussi. Rassurez-vous, je tiens ce crachoir fermement.

    Pour commencer on pourrait justement parler de l’héritage de Happily Divorced.
    Un héritage dont la série se réclame ouvertement, et qui lui a permis de trouver sa place dans la grille de TVLand à la perfection (une chaîne qui pour l’essentiel fait son beurre non pas de ses fictions originales, mais au contraire de son recours à l’épais catalogue de la syndication), de toute évidence. Dans le cas de Happily Divorced au moins, cet héritage n’est pas une simple solution de facilité : toutes les séries de Fran Drescher portent haut et fort leur parenté avec les classiques que sont I Love Lucy, The Brady Bunch, ou Gilligan’s Island. Leur point commun ? Il s’agit de sitcoms en multicam diffusés pendant les années 50 et 60, et Fran est née à la fin des années 50, faites le calcul. Ces séries reviennent régulièrement dans des références ou des parodies dans The Nanny et Happily Divorced (un peu moins dans Living with Fran), en plus d’inspirer, tout simplement, le style d’humour lui-même. Ca fait d’ailleurs près d’un an que j’ai un article en préparation sur le sujet, un jour peut-être même que je le finirai.
    Il s’agit donc assez peu de faire appel exactement à la nostalgie des spectateurs, mais plutôt de puiser dans les influences télévisuelles de la créatrice elle-même. Ce qui fait de Fran Drescher… eh bien, Fran Drescher, c’est sa familiarité avec une forme de savoir-faire classique qu’elle veut faire perdurer. Elle a grandi devant des séries qui restent chères à son cœur (vous mentez si vous prétendez ne pas ressentir la même affection pour vos premières amours télévisuelles en dépit des années et des tendances), qui ont construit son rapport à la fiction et à l’humour ; chacune des séries dont elle est à la tête, depuis, s’inscrit dans cette tradition. Fran Drescher, reine des téléphages.
    Elle n’est pas la seule à le faire ; Rachel Bloom, dans Crazy Ex-Girlfriend, procède exactement de la même façon avec le théâtre musical par exemple ; ces deux-là étaient vraiment faites pour s’entendre.

    A cette nostalgie d’une certaine vision du sitcom vient s’ajouter, cependant, une envie d’en moderniser les héros, les situations et les gags, paradoxalement.
    Parce que Happily Divorced, c’est une série dont les personnages principaux approchent au minimum la cinquantaine, ne forment pas exactement une famille, n’ont pas d’enfants… et passent le plus clair de leur temps à parler de sexe.

    D’ordinaire (y compris dans la filmographie de Fran Drescher), le sexe dans les sitcoms se résume à des insinuations à double-sens et des suggestions de ce qui se passe. Pourquoi ? Parce que pardi, le sitcom multicam est historiquement un genre familial (d’où le grand nombre de situations domestiques), et son humour est construit pour être compréhensible par toutes les tranches d’âges présentes devant la télévision en primetime. Ca ne veut pas dire que les personnages de ces séries n’ont pas de vie sexuelle, mais ils se contentent d’y faire allusion de façon détournée, ou d’apparaître côte à côte dans le même lit, en s’embrassant sagement sous les draps (ces fameux draps qui recouvrent le torse des femmes mais pas celui des hommes). Il ne s’agirait pas de fâcher des spectateurs et encore moins de annonceurs.
    Dans Happily Divorced, on ne montre peut-être pas le sexe, mais on en parle sans détour. Et pour cause : la situation du départ, c’est que Fran Lovett apprend au bout de 18 ans de mariage que son époux Peter (pardon : « Petah ») est gay. Une grande partie de l’humour tient donc au fait que les personnages n’ont plus de relations sexuelles ensemble, et tentent donc (avec l’énergie du désespoir) d’avoir des relations sexuelles avec d’autres. Happily Divorced s’intéresse donc principalement à ces deux quasi-quincas, ainsi qu’à leur meilleure amie Judi qui est elle aussi célibataire, qui cherchent un partenaire plus ou moins romantique pour combler un manque. Et ce manque est nécessairement sexuel, parce que l’affection et même la vie commune restent inchangées après le divorce de Fran et Petah. La pomme de la discorde, c’est précisément la sexualité.
    L’un des gags récurrents de Happily Divorced est ce reproche que fait Fran à Petah d’avoir « décidé » de la priver de sexe ; bien entendu ce ressort en masque un autre, plus dramatique, qui est que la vie que Fran pensait avoir a déraillé à cause de la révélation tardive de l’homosexualité de son mari, mais vers la fin de la saison 2 on apprendra qu’en réalité, elle et Petah ont toujours su cette homosexualité, et qu’ils ont fait leurs choix en ignorant ce fait.
    Happily Divorced ne traite pas le sexe comme quelque chose d’abstrait, pourtant. Cela lui serait facile, mais au contraire au fil des répliques et gags visuels, la série est très spécifique quant aux actes désirés ; ce ne sont pas forcément des mots crus qui sont employés, mais ils sont très souvent directs. Masturbation (parent pauvre de la sexualité vu les circonstances) et pénétration de divers orifices sont régulièrement abordées, aussi bien par les personnages ayant la cinquantaine (Fran, Petah et Judi) que la génération au-dessus (Glenn et Dori, les parents encore très actifs de Fran). Rien n’est jamais honteux à dire dans la série, ni à propos du sekse qu’on fait, ni à propos de celui qu’on veut faire. Et pour un couple qui s’est séparé uniquement sur le plan sexuel, Fran et Petah sont étonnamment capables de comprendre l’un les besoins de l’autre et d’y répondre positivement, quand bien même (…à l’exception d’un épisode) ces besoins ne sont pas comblés ensemble. Dans Happily Divorced, tout le monde est horny, et après tout on est entre adultes alors pourquoi s’en cacher ?
    C’est terriblement rafraîchissant parce que cette façon très, hm, frontale, d’aborder la sexualité, elle est rare dans les sitcoms multicam ET elle est rare dans les séries avec des héros de cette tranche d’âge (en 2011 Grace & Frankie n’était encore qu’une étincelle dans l’œil de Marta Kauffman). Et elle n’était certainement pas présente dans les séries qui ont inspiré à Fran Drescher son humour ! Déjà que Lucy et Ricky faisaient lit à part…
    Fran était déjà entrée dans la vie active quand The Golden Girls a débuté, et l’influence de cette série est donc infiniment moins présente dans l’oeuvre de Drescher, mais on est un peu plus dans ce voisinage-là.

    Happily Divorced est donc une série pleine d’envie de renouveler le genre, mais désireuse de ne jamais le renier. Sa formule illustre en fait à la perfection la situation de ses personnages, qui arrivent avec une histoire longue et pleine de rebondissements, des personnalités forgées au fil des décennies et des relations tissées, et un besoin de changement à la fois organique et contradictoire. C’est exactement là qu’en sont Fran et Petah, et selon les épisodes, leur entourage.
    A plusieurs reprises, chacun des personnages (Fran et Petah plus souvent que les autres évidemment) va devoir se confronter au besoin d’aller de l’avant, de s’adapter à des circonstances qui changent, mais sans jamais repartir de zéro. La conclusion de nombre des intrigues, et de la série elle-même, c’est qu’ils ont traversé des décennies côte à côte, et que les évolutions ne changent pas qui ils sont individuellement, ni qui ils sont ensemble. C’est parfois difficile à accepter après autant de temps passé dans une certaine configuration, mais c’est aussi un réconfort incroyable que d’avoir des gens sur qui ont peut compter pendant toute une vie adulte.
    Dans Happily Divorced, il faut réévaluer certaines choses même après des décennies, mais il y en a d’autres sur lesquelles on peut toujours compter : qui on est, d’où on vient, et l’affection que l’on se porte. Le reste finalement est accessoire, parce qui si on sait qui on est, d’où on vient, et qu’on s’aime, alors dans le fond on peut faire face à tout. C’est une série où l’on apprécie ce que l’on a construit, quand bien même rien n’est garantit dans la vie.

    HappilyDivorced-PurpleFranPetah-300On pourrait parler encore longtemps… oui bon, JE pourrais parler encore longtemps d’autres caractéristiques de Happily Divorced. De sa place assumée dans le Franiverse (et son rappel d’acteurs, importants mais aussi mineurs, étant déjà apparus dans les 2 autres séries de la trilogie) et de sa place dans la transmission de la culture télévisuelle au sens large (voir aussi : Joan Collins) (je dois VRAIMENT finir cette article un jour), du discours de la série sur la difficultés financières (je recommande d’ailleurs à mes lecteurs les plus intéressés par la question un rewatch de The Nanny, l’une des séries les plus blue collar des années 90, qui n’en ont pourtant pas manqué), des thématiques qui reviennent de série en série dans les anecdotes présentées ou dans les intrigues, du rôle quasi-invisible de Peter Marc Jacobson dans ces décennies de télévision consacrées à mettre en valeur son ex-femme, de la garde-robe presque exclusivement violette de Fran Lovett, même…
    Ne me mettez pas au défi. Comme quoi, on en trouve, des choses à dire, sur un sitcom multicam !

    Il s’agit d’autant de raisons pour lesquelles le timing était absolument parfait pour moi. Après avoir dévoré plusieurs saisons de Bob’s Burgers (où les personnages n’ont jamais honte de leurs kinks respectifs, et parfaitement respectés lorsqu’ils les expriment parce que l’affection qu’on se porte va au-delà) et lamenté devant des épisodes d’Ana Andi Nos qu’on n’ait pas assez de séries comme remède au jeunisme (où les personnages arriveraient avec un long passé fait de choix et de relations établies, au lieu de jouer leur avenir dans chaque épisode comme tant d’autres séries), j’étais fin prête pour ce marathon Happily Divorced. J’en ressors… écoutez, presque réconfortée à l’idée que l’une des créatrices et comédiennes de télévision que j’aime le plus au monde (si ce n’est LA) soit toujours capable de me toucher, m’amuser, m’évoquer la télévision de jadis et en même temps me montrer une fiction moderne.

    Je pense parfois que je ne pourrais pas aimer Fran Drescher plus que je ne l’aime déjà (et honnêtement Indebted n’aide pas), et puis voilà qu’arrive ce rewatch de Happily Divorced.
    Toute la gratitude du monde n’y suffirait pas.


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  • Chat-virement

    10 mai 2020 à 22:16 • Dorama Chick •

    D’ordinaire je renâcle à parler des séries japonaises les plus bizarres : le cliché m’agace, et je n’ai pas envie de lui donner du crédit. Oui, il y a des séries japonaises au concept (et/ou à l’exécution) complètement out there, tout comme il y a parfois des séries américaines, ou britanniques, ou peu importe, qui vous font écarquiller les yeux en vous demandant quel genre de drogue ses créateurs ont consommé. Mais parce que, de base, la culture japonaise nous est généralement moins familière que d’autres, ce qui est « bizarre » au Japon semble toujours valider l’idée que « hihi les Japonais ils sont trop bizarres« . Pendant ce temps ça fait quasiment deux décennies que je regarde des séries japonaises et pour moi, dans la majorité des cas, c’est le summum de l’émotion, le royaume de la chronique douce, le berceau de la fiction slow TV. Quel autre pays nous fournirait des séries nous broyant autant le cœur que Dakara Kouya, nous chatouillant autant les sens que Mousou Shimai, nous interrogeant autant sur les rôles sociaux que Saka no Tochu no Ie, nous invitant à partager l’intimité la plus banale que Shinya Shokudou (d’ailleurs le Japon a inventé à lui seul tout un genre entièrement dédié à parler de notre rapport aux repas ! comment ça ne parle pas à un public français, ça ?). Je refuse d’entrer dans ce jeu qui consiste à faire persister l’idée que les Japonais sont « bizarres » alors que leur fiction a tant d’âme. Ces clichés me donnent la nausée, ils prennent leur racine dans quelque chose qui dépasse largement le seul domaine télévisuel, et je ne veux pas les nourrir, jamais.

    …Bon, cela étant, il n’est pas bon non plus d’ignorer volontairement que, parfois, il y a effectivement des séries japonaises « bizarres » (y compris aux yeux des Japonais, au passage). Des séries de niche, même si de niche il ne va pas exactement être question aujourd’hui, des séries créées pour un public minuscule avec lequel on peut s’autoriser un truc tout-à-fait dingue parce que, quelque part, on est entre amis, on peut se faire des private jokes. Bien souvent ces séries sont des fictions au budget inférieur à votre facture d’électricité, expérimentales ou adaptées d’un manga avec un public pré-existant mais numériquement limité, et diffusées en troisième, quatrième ou cinquième partie de soirée quand il n’y a vraiment que les fidèles parmi les fidèles pour apprécier. Bah oui, les séries « bizarres », c’est mainstream nulle part, les amis. Et ces séries, quand je les trouve intéressantes d’un point de vue ou d’un autre, bah je vais pas faire comme si elles n’existaient pas. Parce qu’il arrive une fois de temps en temps que cette bizarrerie me touche quand même. Vous savez quoi ? Moi aussi parfois je suis bizarre, on l’est tous.
    Alors vautrons-nous dans la bizarrerie aujourd’hui avec Kyou no Nekomura-san, une série dont le héros est un chat qui commence un nouveau travail comme employé de maison. Et qui est interprété par un humain.
    En même temps j’avais prévenu.

    Le premier épisode de Kyou no Nekomura-san donne le ton d’emblée : la série s’ouvre sur une scène contemplative pendant laquelle Neko Nekomura (oui c’est le nom complet du chat, sachant que « neko » signifie précisément « chat », et que Nakamura est un nom de famille plutôt courant) marche avec un petit panier dans sa main, traversant la ville dans un but clairement précis, mais pour le moment inconnu. En fait il est tellement déterminé qu’il passe devant la poissonnerie sans même jeter un regard à l’étalage ! Il arrive finalement devant une petite maison, devant laquelle un panneau indique que la famille Murata cherche un employé de maison. Il se présente et obtient à peu près la même réaction que Tony Micelli : « mais, vous êtes un chat, je ne vais quand même pas embaucher un chat comme employé de maison ».
    Vu que Neko Nekomura est un chat, il entre quand même, et décide de prouver qu’il sait passer l’aspirateur, aérer une couverture, et préparer le thé. Bon, tiède le thé, parce qu’il peut pas boire chaud (rapport au fait que c’est un chat), mais il s’avère que le thé est bon quand même. La famille Murata est ébahie, et en plus il connaît un magasin où faire les courses est très économique, donc il est embauché. Satisfait, il se roule par terre dans le salon et s’endort. Idéalement il aurait bien grignoté un rat là tout de suite, mais bon globalement il est content.

    Et. C’est. L’épisode.
    Parce que ce que je ne vous ai pas dit, c’est que Kyou no Nekomura-san est un « mini-drama », soit une série dont les épisodes durent 6 minutes publicité incluse, le mercredi soir à 00h52 (et pas une minute plus tard, comme vous le savez) et sur plusieurs plateformes de catch-up et streaming. Donc voilà, c’est tout, revenez la semaine prochaine à la même heure pour connaître la suite des aventures domestiques du chat ! Très franchement à la fin de ce premier épisode, mon premier réflexe a été d’en vouloir encore. J’étais totalement sous le charme.

    Pourquoi ? Parce que justement il y a une raison pour laquelle j’emploie ici le terme de mini-drama (qui est celui que TV Tokyo a choisi) plutôt que celui, plus compréhensible pour vous spectateurs francophones, de shortcom. C’est dans cette nuance que se joue toute la série.
    Certes, il y a un aspect de toute évidence absurde et une poignée de gags légers, comme par exemple la figure surprise du poissonnier, mettons. En outre on ne va pas nier que voir Yutaka Matsushita, l’un des visages les plus connus de l’audiovisuel japonais (Kyou no Nekomura-san, lancée début avril, est déjà sa 3e série cette année…), un type de presque 60 ans avec une carrière longue comme le bras, se trimbaler dans un costume de chat géant avec un petit panier en osier (un petit panier en osier !) est un peu hallucinant. Toutefois, le fait est que la série traite son sujet avec un ton pince-sans-rire, tenant pour naturel que tous voient là un chat, donne une force insoupçonnée à l’ensemble. La première réaction de la jeune femme qui ouvre la porte, c’est « bah, vous êtes un chat, qu’est-ce que vous voulez ? ».
    KyounoNekomurasan-Manga-300Il faut d’ailleurs préciser que dans le manga, c’est un vrai chat qui interagit avec les humains de la maison et accomplit les corvées du quotidien (dans un style plutôt épuré, comme vous pouvez le constater). C’est donc plutôt normal que la série ignore totalement qu’elle a employé un acteur humain plutôt qu’un acteur chat, parce que ce n’était pas le propos de base, en fait. Ca n’a jamais été le but. Dans le fond, tout ce que fait Kyou no Nekomura-san, c’est repousser les limites de la suspension d’incrédulité ; mais une fois qu’on tient pour acquis que c’est à un chat qu’on a affaire, alors ce n’est plus étrange du tout. Ou disons, pas plus que prétendre que l’un des héros d’une série de science-fiction est vraiment né jaune avec des oreilles pointues. Bah, non, pas vraiment, mais c’est pas grave, c’est de la fiction. On emploie les acteurs qu’on a pour raconter une histoire, et c’est là que tout se joue (…même si effectivement, des chats comédiens, ça existe aussi, et il y en avait un très bien dans une autre série japonaise, la délicate Gu-Gu Datte Neko de Aru, un autre exemple d’excellente fiction japonaise d’ailleurs).
    Et par-dessus le marché, Kyou no Nekomura-san est aussi tout simplement pleine de douceur. C’est une tranche de vie ! Une simple chronique domestique où, oui bon bah d’accord, effectivement, un chat est employé de maison, certes… mais au-delà, c’est très simple. C’est la banale intimité qui se crée avec un animal qu’on pourrait qualifier de doublement domestique.

    Le fait est qu’en 6 minutes publicité incluse, Kyou no Nekomura-san utilise toute une palette de nuances subtiles que son seul pitch et/ou son matériel promotionnel ne retranscriraient jamais. Comme toutes les séries, vous me direz. Eh bien voilà. Justement c’est bien ça l’idée : s’autoriser à constater à quel point ce qui est « bizarre » vu de loin… est en réalité, une fois apprivoisé, complexe, drôle et touchant.
    Cette bizarrerie, ma foi, elle fait du bien ! Kyou no Nekomura-san est simple, et douce, et apaisante. Elle met du baume au cœur et nous rappelle que très franchement, qui n’a pas besoin d’un peu de bizarrerie de temps en temps ?


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  • Cour martiale

    9 mai 2020 à 19:50 • Review vers le futur •

    Avez-vous remarqué que la pratique de la co-production, courante en ce qui concerne la télévision traditionnelle, est rarissime du côté de la SVOD ? Pour beaucoup d’acteurs du marché, produire une série est bien souvent une affaire qui se mène en solo : la fiction originale a un coût lourd, mais c’est un argument de vente trop puissant pour le partager. Au pire il arrive (dans certains pays plus que dans d’autres) qu’une plateforme s’associe à un diffuseur historique, mais une chose est sûre : entre plateformes, c’est chacun pour soi.
    Aussi des séries comme Code M sont-elles assez atypiques dans le paysage mondial : celle-ci est co-produite par deux plateformes indiennes. Zee5 et ALTBalaji. Deux géants de leur secteur s’il en est, n’ont rien à prouver, et s’appuient sur de grands groupes audiovisuels qui, au pire du pire, peuvent toujours se tourner vers d’autres activités si cette histoire de streaming ne marche pas. En outre, ALTBalaji est une plateforme associée à la société de production Balaji (créée par Ekta Kapoor), qui a fourni de nombreuses séries par le passé aux chaînes du groupe Zee TV. On est donc entre amis de longue date.

    Cela rend d’autant plus intéressants le sujet et le ton de Code M, une série qui n’aurait absolument pas vu le jour en Inde sur d’autres supports que la SVOD de par la gravité de son sujet.

    Trigger warning : suicide par immolation.

    Tout y commence par une opération militaire à la frontière indo-pakistanaise, dans un petit village où une poignée de soldats indiens fait irruption en pleine nuit, se glisse dans un bâtiment, et ouvrent le feu. Deux des hommes à l’intérieur prennent la fuite, et dans la course-poursuite qui s’en suit pendant laquelle au moins un fugitif est tué, l’un des soldats tombe à terre. Générique.

    Code M vient de nous présenter « les faits ». Des faits présentés rapidement et sans contexte, mais des faits. Après son générique, les choses deviennent plus subjectives : un journal dont le titre annonce que les habitants du village s’étaient rebellés face à l’armée, un autre qui explique qu’il s’agissait de terroristes dûment éliminés, un troisième proposant comme légende d’une photo d’enterrement le terme de « martyr » pour le soldat tombé pendant l’opération, et un dernier s’interrogeant sur la véritable nature de cette intervention. Tout le monde a une interprétation différente des faits.
    Tout le monde, et en particulier les familles des hommes tués ce jour-là. Une semaine après, la plaie est encore à vif, et les manifestations se poursuivent en soutien aux villageois morts cette nuit-là. Dans le même temps, Ajay Paswan (le soldat mort dans l’exercice de ses fonctions) est décoré à titre posthume avec tous les honneurs par le colonel Chauhan.
    Ce jour-là, la mère de l’un des hommes tués pendant l’opération s’immole par le feu devant la base militaire de Jodhpur, où se tient la cérémonie.

    Clairement les choses sont allées trop loin, et il devient politiquement difficile d’ignorer la montée de la contestation. Le ministre de la Défense demande à Chauhan de faire ce qu’il faut pour… j’allais dire éteindre l’incendie, mais c’est peut-être de mauvais goût. En tout cas il faut que les troubles autour de cette opération cessent, et pour cela, la mise en place d’une enquête interne est tout indiquée. Chauhan a exactement en tête la personne qu’il faut pour la conduire : la major Monica Mehra.

    Pourquoi elle ? Monica nous est présentée littéralement à mille lieues de toute cette affaire : elle dans un nightclub de Pune en train d’enterrer sa vie de jeune fille. Une altercation au bar nous permet cependant de comprendre qu’elle est extrêmement compétente, dotée d’un sang-froid sans pareil et d’une capacité de jugement aiguisée (accessoirement deux courtes scènes vont nous apprendre que son fiancé est extrêmement à l’aise avec son travail dans l’armée, et qu’il la soutient même alors qu’elle doit s’absenter juste avant leur mariage). Monica est l’incarnation de la modernité, et on se demande un peu quelle sera sa réaction devant tout cela, dans une bourgade frontalière où la présence militaire a un poids bien particulier.
    A mesure que progresse l’épisode, on va également découvrir que Monica est une amie personnelle de la fille de Chauhan… et que la fille en question était fiancée au défunt Ajay Paswan. Décidément ce dossier est un sac de nœuds sans nom, et le mystère va s’épaissir encore à la fin de ce premier épisode avec une révélation supplémentaire.

    Il ne fait aucun doute que Code M marche sur une corde raide avec un tel sujet. En fait ça se sent d’autant plus que le ton de la série est, par ailleurs, assez léger ; le montage est vif, la musique omniprésente, la camera ne tient pas en place… on est à plusieurs moments très proches stylistiquement du soap opera indien plus que des thrillers de la SVOD (en témoigne d’ailleurs le format d’une demi-heure). Dans la façon dont ces scènes se déroulent, on a l’impression que Code M essaie d’atténuer la tension, paradoxalement.
    Cela n’enlève rien à la complexité du sujet, qu’on se rassure. J’ai plus l’impression que cette « bâtardisation » est due à l’héritage de la télévision traditionnelle et ses standards de production, qu’à une intention de freiner des quatre fers. Quoi qu’il en soit, cela témoigne d’une intention assez nette de vouloir aborder des questions complexes sur le rôle de l’armée, son image et ses actions à l’intérieur des frontières… tout en essayant de ne pas trop braquer les spectateurs, ni dans leurs convictions ni dans leurs habitudes téléphagiques. J’ai parlé de nombreuses fois de séries ayant vu le jour grâce à l’émergence des webséries et de la SVOD en Inde au fil du temps. A mon sens, Code M se situe très peu dans cet héritage, et ne s’inscrit pas vraiment dans les tendances à succès du milieu non plus. On est là devant quelque chose de très mainstream, mais qui essaie, quand même, de fournir une série qui ose (et je ne parle pas que de la petite scène qui sous-entend que Monica a eu du sekse prémarital avec son fiancé), cherchant un équilibre précaire entre des habitudes de productions à la papa et des opportunités narratives nouvelles. Ce n’est pas vraiment un hasard, dans le fond, si une telle série est co-produite par des entités comme Zee5 et ALTBalaji.

    De mon point de vue, ça marche quand même. Je soupçonne d’ailleurs qu’on n’a pas fini de découvrir qu’il y a eu un loupé, en dépit de ce que clament tous ceux que Monica a rencontrés au début de son enquête… et ça, pour le coup, ce serait plutôt novateur.


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  • Women’s rights are human rights

    8 mai 2020 à 23:05 • Review vers le futur •

    Les dernières semaines ne se sont pas vraiment prêtées aux coups de cœur téléphagiques ; parfois, quand le moral est bas, on n’arrive tout simplement pas à se lier à une série, les ressorts affectifs fonctionnant un peu moins lorsque l’esprit est ailleurs. Pour dire vrai, mon seul véritable marathon s’est limité à un rewatch des 6 premières saisons de Bob’s Burgers, et une boulimie des saisons 7 à 9 que j’avais jusque là mises de côté. Et. C’est. Tout.
    En-dehors de ça ? Ma consommation s’est limitée à des pilotes ce qui, mon Dieu ne vous méprenez surtout pas, est toujours un plaisir, mais relève d’un engagement moindre.

    La roue est en train de tourner, cependant. Je me suis assise pour un visionnage de pilote grâce à Heder, un legal drama suédois proposé par la plateforme Viaplay l’été dernier. Pourtant, rien dans Heder n’est très joyeux.

    Trigger warning : viol sur mineure et potentiellement prostitution forcée.

    Au juste je ne sais pas trop qui j’essaie d’allécher avec des reviews comme celle-là, mais bon, tentons.

    Heder est un legal drama qui se déroule dans un cabinet spécialisé dans les crimes sexuels ; on apprend très tôt que son but n’est pas d’être rentable, et qu’en fait le financement du cabinet est dû à des investissements et des dons, plutôt que grâce aux cas eux-mêmes. Si j’ai bien compris, beaucoup de ceux-ci sont traités pro bono, donc on est moins dans un univers corporate que la plupart des séries du genre.
    La question n’est pas de faire des gros sous, mais juste de maintenir l’activité pour pouvoir venir en aide à des victimes. L’existence de ce cabinet est donc hautement politique, et les 4 avocates principales ont des idées qui reflètent cet engagement.

    Parlons-en, de ces avocates, parce que c’est l’un des gros points forts de ce premier épisode ! Il y a quelque chose de radical dans leur mise en place ; dans leur existence-même.
    Toutes les quatre sont en effet des femmes ayant la quarantaine environ, et leurs histoires personnelles, qui tiennent une large place dans l’intrigue, renforce ce fait. Je ne sais pas comment le décrire autrement que : il est clair que ce ne sont pas des femmes de vingt ans. Leurs intrigues ne sont pas spécifiques nécessairement, en revanche leur attitude l’est ; ces héroïnes ont accompli beaucoup de choses dans leur vie, elles arrivent devant nous avec un passé, des choix, des erreurs, et ça se sent. Elles ne pourraient pas être des femmes de vingt ans. C’est vraiment évident à voir la série, un peu de la même façon je suppose que The Good Wife ne serait pas la série qu’elle est avec une héroïne plus jeune.
    Chacune arrive donc avec une backstory conséquente, et détaillée : Elin est une mère de famille et une alcoolique en rémission ; Janni est dans une relation relativement neuve après des années compliquées avec un ex, et entreprend d’essayer de faire un enfant ; Nour est une activiste féministe plutôt connue et très probablement une victime elle-même (et une musulmane pratiquante, ce qui est encore plutôt rare dans une série occidentale) ; Eva est la fille de l’investisseuse principale du cabinet et vient de commencer une nouvelle relation… Toutes sont complexes, imparfaites, et vraiment bien écrites. Bien interprétées, aussi (même si j’ai failli ne pas reconnaître Eva Röse sans sa perruque noire d’Äkta Människor !), d’autant qu’aux intrigues individuelles s’ajoutent des interactions fluides, aussi bien professionnelles qu’amicales, qui terminent de donner une fantastique dynamique à la série.

    Mais on n’a pas ici affaire à une version suédoise de Sex & the City, et l’affaire qui occupe ce premier épisode (promettant de s’étendre aux épisodes suivants : Heder est feuilletonnante) est là pour nous rappeler qu’avant toute chose, ces femmes très différentes sont rassemblées par une même cause. L’affaire sur laquelle elles planchent dans cet épisode inaugural concerne une adolescente de 15 ans qui accuse un homme trois fois plus âgé qu’elle de l’avoir violée plusieurs fois. Malheureusement, une fois entendue, l’affaire est close en faveur de la défense, les preuves ne suffisant pas à prouver que les rapports sexuels (pourtant extrêmement violents) n’étaient pas consentis.
    En voulant faire appel, nos avocates vont se tourner vers un journaliste (l’ex de Janni…), qui s’avère lui-même mener une enquête pouvant étayer le dossier de la jeune fille. Il semblerait toutefois que ledit dossier soit bien plus sensible qu’il ne pouvait le sembler de prime abord, et que plus encore qu’une question de viol individuel, il s’agisse d’un réseau de prostitution de mineures…

    Ces éléments (ainsi que la terrifiante conclusion de l’épisode) nous rappellent donc que même si les héroïnes de Heder nous paraissent pleines d’assurance, compétentes, engagées et tout ce qu’on veut, elles s’apprêtent à être confrontées à quelque chose de plus intense que jamais. Même alors que leur cabinet célèbre 10 ans d’existence, rien ne les a préparées aux développements de cette affaire.
    Pourtant, ce n’est pas vraiment l’aspect juridique ou criminel de ce dossier qui me préoccupe. D’une façon étrange, à l’issue du premier épisode de Heder, je suis vraiment inquiète pour les héroïnes elles-mêmes. En moins d’une heure, je les aime déjà intensément, et s’il y a bien une chose que je ne m’attendais pas à ressentir pour des personnages de série en ce moment, c’est bien ce soucis quant à leur bien-être, leur sécurité, leur moral. S’il arrive quelque chose à l’une d’entre elles, je ne réponds plus de rien.


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  • Good for the soul

    26 avril 2020 à 13:55 • Telephage-o-thèque •

    Avec le soucis croissant des diffuseurs étasuniens pour la « diversité », on a pu voir ces derniers temps toutes sortes de séries faite pour et souvent par des Afro-américains devenir mainstream. Cela n’a pas toujours été le cas en effet : après avoir connu un boom pendant les années 90, les « Black sitcoms » ont lentement été réduits à des commandes faites par les chaînes du câble et satellite américain dédiées au public noir, avec une visibilité moindre… et donc des budgets à l’avenant.
    TV One est l’une de ces chaînes ; ses grilles consistent essentiellement, pour ce qui concerne les séries, à rediffuser des classiques du Black sitcom (ce n’est pas très cher, après tout, et il y a des décennies de patrimoine dans lesquelles piocher). Malgré tout, il lui arrive de commander quelques séries originales, et c’est de l’une de celles-ci qu’il est question aujourd’hui, avec Belle’s, une série pour laquelle j’ai une tendresse particulière. Je l’avais évoquée en passant dans des reviews antérieures, mais aujourd’hui, c’est elle la star.

    Belle’s est le nom de la série, mais aussi du restaurant qui lui sert de décor, fondé par Belle Crawford. Hélas, Belle n’est plus car elle est décédée deux ans avant que ne commence la série, mais l’établissement lui a survécu, et il est tenu aujourd’hui par les membres de sa famille. Le patron est Big Bill Cooper, un veuf qui dirige d’une main de maître les opérations ; mais en cuisine, la vraie cheffe dans tous les sens du termes, c’est Gladys, la sœur de Belle. En salle, c’est Jill (la fille de Big Bill et Belle) qui tient le rôle de manager, sa sœur la mannequin Loreta donne à l’occasion un coup de main pour le service, et le cousin Maurice est le barman, quand il n’est pas trop occupé à courir les jupons du moins. Ces personnages et le restaurant où ils évoluent nous sont présentés par Pam, la fille de Jill (et donc la petite-fille de Belle), une enfant de 10 ans qui n’intervient pas trop dans les intrigues mais apparaît à l’écran en brisant régulièrement le quatrième mur afin de nous familiariser avec les protagonistes, l’action ou le contexte de celle-ci.
    Ce qui est le plus étonnant dans la formule de Belle’s, cependant, ne tient pas dans ses lignes, mais dans ses modalités de production : c’est un hybride de single- et multi-camera, et même de drama. Il n’y a pas de public (ni de rires enregistrés, d’ailleurs, bien qu’on puisse sans peine deviner quand on les entendrait), et la camera est un peu plus mobile dans les volumes qui forment les décors, mais l’écriture comme la réalisation relèvent des standards du sitcom. Et le budget aussi. Par contre, l’intention…
    Au total je dois avoir vu ce premier épisode une bonne demi-douzaine de fois au fil des années (Belle’s a été diffusée initialement en 2013). Il fait sans aucun doute partie des épisodes que je serais vraiment fâchée de perdre un jour, à plus forte raison parce que sans mes archives, je ne suis pas convaincue qu’il soit possible de le trouver à l’heure actuelle (…quoique). Pis avec un titre comme ça, bonne chance pour les recherches sur Youtube et consorts ; d’ailleurs j’ai un mal de chien à mettre la main sur certains autres épisodes de son unique saison. Problème qui ne s’arrangera probablement pas avec les années, croyez-moi.
    Depuis tout ce temps, je reste fascinée par le mélange de formats qui s’y manifeste, d’abord. Cela étant, pour être honnête, je trouve également grandiose ce qu’il s’y dit, avec le peu de moyens qui sont de toute évidence les siens.

    Ce qu’il s’y dit ? Ma foi, ce premier épisode fournit ce qu’il faut d’exposition, en grande partie grâce à l’intervention de Pam qui nous présente chaque personnage ainsi qu’une brève histoire du restaurant. Le cadre narratif est simple : la petite fille tient un journal intime où elle confine tous ses secrets, apprend-on, mais à 10 ans elle n’a pas des tonnes de secrets, alors elle y parle de la vie de ce restaurant. Un restaurant où il se passe des tonnes de choses, nous promet-elle.
    Quel genre de choses ? Eh bien, dans cet épisode inaugural, un homme se présente pour voir s’il peut réserver la salle de réception pour une réunion de famille. Assez banal, non ?

    Parfois le terme de Black sitcom peut sembler couvrir une réalité simple : c’est un sitcom, et il y a des noirs à l’écran. Mais ce que Belle’s fait avec cette intrigue en apparence totalement inoffensive, c’est au contraire prouver que le Black sitcom est un composant essentiel de la culture afro-américaine, et y contribue pleinement.
    Alors reprenons ce que je vous ai déjà dit, mais cette fois en vous parlant de ce que je n’ai pas encore évoqué : Belle’s est un restaurant situé à Atlanta, qui sert de la soul food, comme le démontre clairement l’introduction de Gladys en cuisine, qui énumère les plats qu’elle prépare lorsqu’elle se plaint que son fourneau défectueux ne lui permette pas de travaille correctement : feuilles de moutarde verte (mustard greens), pois cornille (black-eyed peas), patates douces (sweet potatoes), poisson-chat frit (skillet-fried catfish), mini-carottes au miel (honey baby carrots), gâteau de maïs (corn cake), jarret de porc (ham hock) et filet de porc glacé (glazed pork loin). Plus soul food, ça va être compliqué à trouver ! Le générique de Belle’s représente d’ailleurs plusieurs de ces plats, ainsi que du mac & cheese, que se passent les protagonistes avant de prier ensemble pour le dîner. Il faudrait aussi mentionner que l’un des murs de Belle’s représente l’arbre généalogique de la famille Cooper/Crawford sur environ une dizaine de générations.
    Ce n’est pas que le contexte de la série, c’est aussi le déroulement du premier épisode qui prend ses racines dans la culture afro-américaines.

    L’homme blanc qui vient réserver la salle de réception, et qui finit par proposer de réserver tout le restaurant parce qu’il cherche à faire servir 100 couverts, est en effet en train d’organiser la réunion annuelle de sa famille : la branche des Crawford d’Atlanta. Il se réunissent parce qu’ils sont tous des héritiers de ceux qui ont vécu dans la plantation de Walnut Cove il y a un siècle et demi…
    En entendant cela, Big Bill s’agace : le nom de jeune fille de sa femme, après tout, est Crawford. Il y a de fortes chances pour que les ancêtres de l’homme qui vient de lui signer un chèque soient ceux qui ont jadis possédé les ancêtres de Belle. En fait, Big Bill n’a plus du tout envie de servir à dîner à cette famille, et décide que la prochaine fois qu’il le verra, au lieu de signer un contrat avec lui pour la réservation du restaurant, il déchirera son chèque et lui enverra à la gueule. Gladys et Jill ont beau essayer d’argumenter (« c’était il y a longtemps ! ils n’étaient pas en vie quand ça s’est passé, et nous non plus ! »), Big Bill ne cède pas, encouragé par le cousin Maurice qui calcule qu’il faudrait que les Crawford règlent non pas l’addition du dîner, mais le montant des réparations.
    Située au milieu de l’épisode, cette discussion est le point d’orgue de l’intrigue, le moment où les personnalités s’expriment. En fait, le contexte dans lequel existent le restaurant et ses occupants prend tout son sens parce qu’ils ne sont pas juste dans un restaurant, et ils ne sont pas juste une famille. Ils sont une famille qui tient un restaurant de soul food à Atlanta, et ce genre de choses a toute une histoire. L’Histoire.

    Regarder Belle’s donne un peu l’impression, à la spectatrice blanche et européenne que je suis, d’assister à une conversation qui ne me regarde pas et à laquelle je n’ai jamais été invitée. La discussion qui a lieu ce jour-là au restaurant entre Big Bill et les siens est de toute évidence une discussion qui a eu lieu dans le salon de nombreuses familles afro-américaines (et d’autres familles noires, mais je deviens hors-sujet). Des débats auxquels je n’assiste pas, dont certaines nuances m’échappent, qui ont lieu entre gens qui savent ce que cela représente d’avoir ce genre d’Histoire.

    Toutefois, quand je pousse au-delà de mon embarras initial, j’apprécie au contraire d’avoir la chance d’y assister par le biais de la fiction afro-américaine.
    Après tout combien de séries diffusées sur les chaînes mainstream osent parler des réparations pour l’esclavage ? Black-ish l’a fait, et sûrement une ou deux autres, mais au-delà, les exemples ne se bousculent pas. C’est le genre de thématiques que les diffuseurs n’aiment pas avoir dans des séries que des spectateurs blancs vont regarder, pour ne pas les froisser. Vous avez vu les réactions quand Amazon a annoncé être seulement en train de développer (même pas commander, juste développer) une série comme Black America ? Les séries étasuniennes qui parlent des réparations, dans les faits, ce sont encore dans leur grande majorité des séries que le public blanc a peu de chances de voir. Ce sont des séries comme Belle’s, proposée par TV One, une chaîne qui a été regardée par un spectateur blanc, une fois, en septembre 2016 à Westport (Connecticut), parce qu’il s’était assis sa télécommande en revenant des toilettes.
    Toute la culture qui s’exprime pendant tout cet épisode est une forme de signal envoyé aux spectateurs de ce Black sitcom pour leur réaffirmer qu’ils sont entre eux. Belle’s est une série créée pour un public dont je ne fais pas partie, et nombre de mes lecteurs non plus (idéalement je ne devrais pas plus être celle qui en parle). Pourtant, l’énergie que cet épisode à lui seul déploie à essayer d’utiliser ses maigres moyens, pour les tourner en quelque chose d’important et complexe, force l’admiration, et donne du grain à moudre. Certes, l’intrigue finit par être résolue de façon pacifique (en fait l’association de la famille Crawford compte plus de noirs que de blancs, qui considèrent qu’aujourd’hui leur histoire commune fait d’eux une famille… et Belle était une cousine éloignée de plusieurs d’entre eux), mais le discours tenu, avec ses implications douloureuses, reste bel et bien.

    Ce serait en théorie l’utilité de toute cette belle « diversité » dont les diffuseurs aiment à se vanter : permettre à toutes les expériences, et donc toutes les sous-cultures d’un territoire donné, de s’exprimer puis d’être vues. Le problème c’est que dans la pratique, parce qu’on veut faire des audiences et donc avoir de l’audace sans contrarier trop de monde (surtout quand on investit gros dans une fiction léchée), on ne peut pas vraiment faire ça. Il faut donc encore compter sur la curiosité de chacun.


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  • Papa déconne

    26 avril 2020 à 13:51 • Telephage-o-thèque •

    Au risque de vous faire mourir d’ennui, je vais vous raconter un rêve que j’ai fait cette semaine. Ca n’arrive pas souvent mais juste cette fois-ci, tenez bon parce que c’est la raison pour laquelle je poste cette review.

    J’ai rêvé que je voyais un couple se parler dans une maison colorée, et en les voyant interagir, je me suit dit : « ah oui, c’est le couple de ce sitcom, c’est quoi le nom déjà ? Une comédie familiale autour d’un couple de la classe moyenne… » ; le problème c’est que, j’ai réalisé immédiatement que ça décrivait BEAUCOUP de sitcoms, alors, toujours dans mon rêve, je suis allée regarder sur IMDb les noms des acteurs pour retrouver le nom de la série. Bon dans mon rêve yavait pas le logo d’IMDb, mais on se comprend, hein ; en tout cas c’était leur mise en page. Tout en explorant la base de données, j’avais l’impression de passer à côté de quelque chose, comme si en m’attardant sur ce sitcom je ne cherchais pas le bon, paradoxalement. Finalement, j’ai enfin pu retrouver les noms des acteurs que j’avais vus dans leur maison colorée : il s’agissait de Grant Show et Daphne Zuniga ; je me souviens m’être écriée « ah mais oui, c’est un sitcom qui n’a duré qu’une saison dans les années 90 avant d’être annulé ! Lui, il était charpentier et elle, elle était décoratrice d’intérieur ». La réponse a paru me satisfaire parce que je me suis réveillée à peu près à ce moment-là, pour autant que je puisse en juger.
    Au réveil, ma première pensée a été : « hm, je crois que je viens de rêver d’un sitcom qui n’a jamais existé ». Et ensuite, par association d’idées je me suis rendue compte que le sitcom qu’en réalité je cherchais dans mon rêve, ça devait être According to Jim, avec Courtney Thorne-Smith… qui jouait avec Show et Zuniga dans Melrose Place ! Vous voyez le truc ? Et du coup j’ai ressorti mon vieux dossier d’According to Jim, et c’est de ça dont on cause aujourd’hui.
    Ecoutez, je ne sais pas de quoi ça a l’air de l’extérieur, mais la vie à l’intérieur de mon cerveau de téléphage n’en finit pas de me surprendre.



    Comme je vous le disais (ou plutôt, mon subconscient vous le disait), According to Jim est l’un des 712 millions de sitcoms américains à mettre en scène un couple totalement banal de la classe moyenne. Un genre très peuplé, parce qu’aux États-Unis c’est sous cette forme que le sitcom est né (c’est différent au Royaume-Uni, mais c’est un autre sujet pour un autre jour) puis a fleuri, et on n’arrête pas une équipe qui gagne.

    Il y a bien longtemps, je me rappelle avoir lu un article (j’aimerais juste me rappeler où) qui avançait une théorie intéressante sur les rôles genrés à la télévision américaine, en particulier dans les sitcoms sur la classe moyenne. Pour résumer ce qui m’en est resté, il s’y disait que ces sitcoms sont apparus dans les années 50, à un moment où dans l’après-Guerre, les femmes n’étaient pas exactement au foyer… elles y retournaient. Elles avaient participé à l’effort de guerre, merci, au revoir. Ces sitcoms avaient la particularité non seulement de présenter l’image de la parfaite femme au foyer, mais aussi de la mettre souvent en présence d’un mari un peu idiot, flemmard et/ou maladroit ; dans sa grande intelligence émotionnelle, l’épouse utilisait ses talents domestiques pour arranger les situations dans lesquelles le mari se mettait et tout finissait bien. Regardez, mesdames, vous rendez vraiment la vie de votre famille meilleure en concentrant toute votre attention sur votre foyer.
    Bon, faudrait vraiment que je remette la main sur l’article, parce que chaque fois que j’y repense, j’ai plein d’exemples et de contre-exemples qui me viennent en tête que j’aimerais bien voir expliqués dans le cadre de cette théorie (ça se trouve ils sont abordés et je ne me souviens pas des détails !). Par exemple, je ne suis pas totalement convaincue que les rôles genrés dans la fiction soient aussi récents que les années 50, ne serait-ce qu’à cause des séries radiophoniques, ou le cinema évidemment. Par contre, je peux croire qu’effectivement un renforcement de ces normes sociales et domestiques ait été opéré pendant cette décennie, a fortiori à la télévision parce que les premiers spectateurs assidus, rappelons-le, étaient majoritairement des spectatrices.

    Et donc je repensais à cette théorie en revoyant According to Jim. On n’est clairement plus dans les années 50, mais les rôles genrés dans les sitcoms sur la classe moyenne ont largement survécu… bien qu’avec quelques variations.
    En fait, According to Jim est l’exemple parfait de la forme moderne de cette dynamique familiale (cette famille moderne, si vous voulez) : un mari qui accumule les gaffes, et une épouse qui le supporte sans trop de raisons apparentes mais qui se montre raisonnable. Derrière ce qualificatif a priori plutôt flatteur, se cache le rôle qui échoit systématiquement à l’épouse de tenter de juguler les enfantillages de l’homme, de composer avec les décisions irrationnelles de celui-ci, bref de maintenir un peu d’ordre dans la maisonnée, où il devient dans les faits comme un enfant supplémentaire à la charge de la figure féminine du couple. Pas si charmant que ça, donc. Pourtant c’est le crédo de nombreuses séries similaires de ces 30 dernières années ; ah oui, parce que si According to Jim a été lancée voilà bientôt 20 ans et peut donc être accusée d’être « vieille », ce n’est pas le cas de, disons, Last Man Standing, Man with a Plan ou Kevin Can Wait, pour ne citer qu’elles. Des maris immatures vivant aux côtés d’une épouse qui conduit la maison d’une main de maître, ça ne manque pas, même si aujourd’hui, « modernité » oblige, ces personnages féminins sont autorisés à travailler (c’est fort urbain).
    Ce que l’on remarque, c’est que ces sitcoms ont en fait opéré un changement très intéressant par rapport aux dynamiques observées dans de nombreuses comédies datant des premières décennies de la télévision. Avant, celle qui était l’héroïne du foyer était la femme. Elle est au contraire devenue l’éteignoir de service depuis les années 90 (et la liste des séries à appliquer ce principe est longue : The King of Queens, Home Improvement, My Wife and Kids, The War at Home, Still Standing, Everybody loves Raymond, 8 Simple Rules, Listen Up!, The Bill Engvall Show, Rodney… pour ne parler que de multicamera).

    Le vrai héros, quand bien même (voire surtout) il collectionne les bourdes, c’est le mari ; ce n’est d’ailleurs pas un hasard que la plupart de ces séries soient construites autour d’un comédien ayant un minimum de reconnaissance préalable, l’actrice jouant sa femme était castée après coup. Sans aucun doute possible, c’est le mari la star, et son manque de maturité est tournée comme un trait non pas humoristique, mais affectif : il est un peu idiot, mais c’est pour ça qu’on l’aime ! So relatable ! On est tous un peu comme lui dans le fond, non ?
    …Bah, non, pas si vous êtes l’épouse. Mais justement. Cette génération de sitcoms part du principe que le public s’identifie au mari. La série est donc construite en privilégiant sa perspective au sein du foyer ; d’ailleurs regarder le matériel promotionnel de ces séries est hautement instructif. Mais cette perspective est au mieux celle d’un type qui estime que sa famille va le rendre fou (« hahaha, il ne supporte pas ses enfants, c’est hilarant« ), au pire celle d’un énergumène qui veut l’attention de ses proches sans aucune responsabilité… et souvent un mélange de deux. Alors certes, ces hommes sont présents dans leur foyer, et prennent part dans une certaine mesure à la vie de leur famille (pas à la tenue de la maison, faut pas déconner), et en un sens c’est « progressiste », mais la seule façon que ces sitcoms ont trouvé d’impliquer un homme dans la vie de sa propre famille, c’est de lui faire faire n’importe quoi et que sa femme lui pardonne ses conneries derrière tout en continuant de faire tourner la boutique au jour le jour, une charge de travail qui s’assort en plus de l’étiquette de chieuse pas drôle. Car il s’avère que lorsqu’on privilégie le point de vue du mari et qu’on veut faire rire, faire passer l’épouse pour la psychorigide de service est un moyen infaillible pour pondre des dizaines voire des centaines d’intrigues domestiques reposant sur des conflits tous trouvés.
    Pour comparaison, les sitcoms basés sur un couple, mais s’orientant sur la question amoureuse plutôt que domestique (Dharma & Greg ou Committed, par exemple, ou même Dingue de Toi), permettent un peu plus souvent aux deux personnages d’être à peu près égaux devant l’excentricité. La différence réside peut-être dans le fait que dans une comédie ostensiblement familiale, il ne fait aucun doute que le couple va durer, et ça participe même à l’humour de la série : quelle que soit la pitrerie du mari cette semaine, au final on lui passera tout. Alors que dans une série s’orientant plus sur l’exploration de la romance entre les deux héros, les défauts de chacun sont de potentiels obstacles à la réussite du couple : un trop grand déséquilibre causerait une rupture, et même si cette rupture ne se produit jamais vraiment, sans quoi il n’y a plus de série, elle est la menace qui plane au-dessus des interactions. Dans ces sitcoms, le couple qui apprend à vivre ensemble peut cesser de le faire si les choses vont trop loin ; le mari qui fait le zouave est en revanche assez certain que son comportement n’aura jamais de conséquences.

    Pour en revenir à According to Jim précisément, c’est ce que l’on observe dans son épisode inaugural. L’intrigue principale tourne autour du premier jour d’école de leur fille aînée, Ruby, qui pose quelques soucis à Jim et Cheryl parce que la petite refuse d’être laissée en classe. Incapable de résister aux cris terrifiés de sa fille chaque matin, Cheryl (dont on suppose qu’elle est mère au foyer, mais ça n’est jamais explicitement indiqué) a passé les premiers jours de l’année scolaire sur un banc à quelques mètres de Ruby, mais il faudra bien qu’un jour la petite accepte de rester à l’école sans ses parents. Un dilemme ordinaire et sans réel enjeu… c’est donc une mission pour Jim ! Celui-ci décrète bientôt que Cheryl est trop émotive (« but that’s ok, you’re a woman… that’s what we love about you guys« ), et que c’est lui qui emmènera sa fille à l’école désormais.
    …Naturellement il n’en est pas plus capable qu’elle, et va même empirer les choses en se faisant escorter hors de l’école manu militari (et, apprendra-t-on ensuite, en cassant une fontaine à eau). Mais parce qu’il refuse d’avouer son incapacité à résoudre le problème, il prétend que pour décharger Cheryl, c’est désormais lui qui accompagnera leur fille à l’école et ira même la chercher à 15h… sans lui dire qu’après tout ce qu’il a causé, il a dû changer la petite d’école, ce stratagème visant en fait à camoufler ce fait, et lui permettre (la nouvelle école étant plus souple) de quand même rester toute la journée à proximité de sa fille.
    Le premier épisode d’According to Jim semble s’intéresser à une problématique familiale courante, mais en réalité elle n’a aucune intention de répondre à ses propres questions : à la fin de l’épisode, rien n’est résolu pour Ruby qui continue de hurler à la mort si on la laisse seule à l’école. La résolution repose non pas sur la conclusion de l’intrigue elle-même, mais juste sur le fait qu’au bout du compte, le mensonge de Jim est découvert et qu’il doit donc s’en faire pardonner par Cheryl. Un pardon obtenu en jouant du tambour sur son propre ventre et en faisant le singe dans la chambre à coucher, chose à laquelle son épouse ne peut pas résister (because of reasons) et ils finissent donc par éteindre les lumières… avant qu’une autre dispute n’éclate, bien-sûr.

    Ce à quoi on assiste à travers According to Jim, c’est une réintroduction molle de l’homme à la vie familiale : les intrigues sont là pour prouver qu’il n’est pas capable de gérer ses propres émotions, qu’il n’est pas capable de dépasser ses travers, qu’il n’est pas capable de prendre des décisions sensées. En bref, il ne contribue à rien (dans ce premier épisode on le verra brièvement tenter de réparer un tiroir de la cuisine, non sans laisser le plus jeune de leurs enfants jouer avec un marteau ; par contre celle qui fait la cuisine, les courses, la lessive, met ou débarrasse la table, devinez qui c’est), mais ce n’est pas grave parce que son soucis, c’est d’être vu sous un jour positif par sa famille. Derrière le soi-disant effet d’identification, il y a juste un soucis d’être validé. Pas validé pour ses actions ou même pour ses intentions, parce que dans les deux cas celles-ci reflètent les défauts du protagoniste, mais validé pour faire acte de présence. Se présenter comme le pitre accomplit cela et ça ne demande pas d’efforts, donc eh bah bingo.
    Le mari d’According to Jim (et de toutes les comédies en son genre) a littéralement le mérite d’être là, point barre.

    Heureusement que tous les pères (de télévision et d’ailleurs) ne sont pas comme ça. Mais on ne peut pas vraiment compter sur ce type de sitcoms domestiques pour les y encourager depuis près de 30 ans, en tout cas.


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  • Bring back what once was mine

    25 avril 2020 à 13:55 • Telephage-o-thèque •

    Il faut reconnaître à la plateforme australienne Stan un talent certain pour trouver des séries originales qui le soient vraiment. C’est probablement un atout dans un secteur hautement concurrentiel comme la SVOD, mais reste que l’effort doit être souligné. Wolf Creek, The Commons, No Activity, ou encore Romper Stomper, sont des concepts qu’on n’aurait probablement pas trouvé sur des chaînes traditionnelles australiennes, et à peine plus chez la concurrence en streaming.

    Trigger warning : dépression, tentative de suicide.

    Bloom, une série de science-fiction lancée l’an dernier, ne fait pas exception. On y imagine ce qui se passerait si, après une catastrophe naturelle (une brutale inondation, en l’occurrence) touchant durement une petite ville, on découvrait dans les ruines une plante capable de rajeunir de plusieurs décennies quiconque la consommerait.

    A l’origine, la première saison de Bloom a été lancée le 1er janvier 2019, et a depuis gagné une deuxième saison. En revoyant l’épisode inaugural pour les besoins de cette review (c’est l’article sur Ana Andi Nos qui m’y a fait penser), j’ai essayé de me souvenir de la raison pour laquelle je n’avais pas accroché, en dépit de l’idée intéressante qui fonde la série. Est-ce l’interprétation ? Non, elle est impeccable. L’exposition maladroite, alors ? Non plus, au contraire le récit prend le temps de mettre en place ses personnages et leurs affres bien avant de vraiment nous parler de la fleur magique. Bon alors la réalisation ? Même pas, c’est même extrêmement réussi. La musique peut-être ? Franchement non, étant donné qu’une bonne partie du soundtrack évoque celui de Twin Peaks, ce qui est toujours un compliment en ce qui me concerne.
    Alors quoi, au nom du ciel, quel peut bien être mon problème ?!

    Eh bien, le soucis c’est peut-être juste une question d’angle. Je crois que j’aurais voulu voir Bloom poser d’emblée des sujets autour de l’âge, la vieillesse et le temps qui passe, mais ce n’est pas trop le cas dans ce premier épisode. Certes, cela pourrait changer avec les épisodes suivants, mais précisément parce que cette introduction s’intéresse plus aux douleurs qui tordent les personnages qu’aux propriétés de la plante, il semble assez clair que ce ne sera pas le cas ou, au moins, pas en priorité. Ce que préfère aborder la série, et pour être claire ce n’est pas un défaut mais simplement une approche qui me parlait moins, c’est l’idée de retrouver ce qui a été perdu (et probablement le prix de ces retrouvailles, à terme). Le désespoir qui tenaille la bourgade de Mullan est largement établi dans cette introduction, non seulement à cause de l’inondation terrible qui a fait 5 victimes, mais aussi parce que plus largement, les problèmes de ses habitants n’ont pas commencé là et que pour beaucoup la vie est difficile de toute façon. Tous les personnages sont forcés de faire le deuil de quelque chose qu’ils ne retrouveront probablement jamais, qu’il s’agisse de leur mère, de leur ferme, de l’amour de leur vie ou même de leur mémoire.

    Je ne peux assez insister là-dessus : ça ne fait pas du tout un mauvais drama, loin s’en faut. En outre Bloom prend son temps pour installer ce sentiment de perte et le désespoir qui en découle, aussi je ne lui reproche absolument pas son traitement pas plus que son thème. Simplement, cela n’a pas vraiment résonné avec moi, ce n’était pas ce que j’attendais. Peut-être que (une fois n’est pas coutume) la série est plus pessimiste que je ne l’espérais, peut-être que j’en ai marre que la fiction nous parle de la jeunesse plutôt que de la vieillesse (pas sûre d’être claire sur la nuance dans ce contexte précis, j’espère que vous voyez l’idée), peut-être que, comble de l’ironie, il faut parfois accepter qu’une série ne soit pas ce que l’on espère mais juste ce qu’elle est, avec les choix de son équipe de production même s’ils ne sont pas les nôtres. Ah, et il y a aussi une réelle possibilité que je sois personnellement terrifiée par l’idée de perdre ce qui m’est cher, à un degré si extrême que Bloom me refuse le déni que je pratique souvent. Il y a plein de raisons possibles, donc, et elles ne s’excluent même pas mutuellement.

    Le fait est que je n’ai pas accroché, ni pour le premier, ni pour mon second visionnage. Peut-être que quand j’aurai accepté de perdre ce qui était autrefois mien, je serai un peu plus disposée à apprécier Bloom, qui sait ?


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