Lorsque les enfants paraissent

13 avril 2024 à 18:40

Il n’est pas facile de devenir parent pour la toute première fois, et de nombreuses séries ont su raconter les heures, les jours, les semaines qui suivent la naissance d’un premier enfant (la sud-coréenne Sanhoojoriwon comptant, à mes yeux, parmi les meilleures du genre). Mais imaginez ce que c’est que d’avoir des jumeaux ! Hamdi et Yasmine en font la douloureuse expérience, et dans les 24h qui suivent leur retour à la maison, le couple a tôt fait de réaliser qu’il ne s’en sortira pas seul…

Comme je n’ai pas beaucoup écrit en mars, on a perdu quelques occasions de parler de séries du Ramadan pour cette année, mais ne vous en faites pas : tout n’est pas perdu. Et pour vous prouver ma bonne foi, je vous propose aujourd’hui une review du premier épisode de la comédie égyptienne Ashghal Shaqa, l’une des séries ayant trouvé un fulgurant succès critique pendant le mois écoulé.

La force de Ashghal Shaqa réside dans la légèreté de son approche : ici, pas de gag lourd, de vannes à grosses tatanes, d’humour du plus petit dénominateur commun. Il y a une certaine élégance dans la façon dont la série cherche le rire, même si les situations restent relativement simples. Et, plus important encore, contrairement à beaucoup des comédies provenant de pays arabes que j’ai pu voir, les personnages n’y crient pas ou très peu ; j’ai cru remarquer que les engueulades sont souvent le ressort comique de ces séries, et ici ce n’est pas du tout le cas. En gardant un ton très mesuré, Ashghal Shaqa s’assure que le rire ne vienne pas de la forme, mais du fond.

Yasmine est enceinte jusqu’aux yeux lorsque commence Ashghal Shaqa ; elle vient délivrer au producteur de son émission des extraits de ses anciennes émissions, qui permettront d’avoir quelque chose à diffuser même pendant son congés maternité. La réalité, c’est qu’elle ne veut pas d’un remplaçant pour son rôle : elle ne sait que trop bien qu’ensuite il sera difficile à déloger de sa place à l’antenne. Hélas, son producteur refuse d’utiliser de recycler d’anciens extraits… Elle n’a pas encore quitté le studio de télévision que Yasmine ressent des contractions : pas de chance pour elle, son congé maternité a clairement commencé.
A l’autre bout de la ville, Hamdi est sur une scène de crime. Expert médico-légal, il s’imagine enquêteur de talent alors que son job n’est pas de jouer les détectives, mais seulement de s’occuper des preuves et examens scientifiques ; il a également un deuxième job, qui consiste à gérer les bourdes de son assistant Arabi. Point culminant de sa journée : lors de son travail sur le terrain, dans le cadre d’une affaire de meurtre dont la victime a été retrouvée nue, Hamdi a réussi à convaincre le détective chargé de l’enquête de laisser les plongeurs chercher des vêtements dans l’eau… et ils ont trouvé un T-shirt suspect ! Il a donc collecté une preuve supplémentaire à expertiser. C’est alors qu’Arabi l’informe que Yasmine a appelé plusieurs minutes plus tôt, pour l’avertir qu’elle était sur le point d’accoucher.

Cette introduction semble superflue tant elle a si peu à voir avec les déboires parentaux au centre de la série. Pourtant, c’est bien joué : Ashghal Shaqa démontre ici que ses protagonistes centrales ont des vies occupées, et un entourage encombrant. Ce n’est d’ailleurs pas fini : à l’hôpital, dans la salle d’attente, nous avons tout le temps d’apprendre à connaître leurs mères. Celle de Yasmine, Sawsan, est une femme élégante mais un peu snob, et sévère. Celle de Hamdi, Durrieah, est plus humble mais aussi plus fusionnelle ; en outre, Yasmine ne s’entend pas du tout avec elle. Ce tableau étant composé, on peut donc entrer dans le vif du sujet.
Et le vif du sujet c’est qu’à peine rentrées de la maternité, Yasmine et Hamdi découvrent qu’avoir des jumeaux, ce n’est vraiment pas facile. Entre leur inexpérience, leur fatigue, et le fait qu’elles n’aient personne sur qui compter (Sawsan passe la première nuit chez elles, mais n’a jamais changé une couche de sa vie…), clairement, elles sont dépassées. Toutefois, Hamdi refuse d’employer quelqu’un pour les aider : il prétend que Durrieah l’a élevé elle-même et qu’il ne s’en porte pas plus mal. Yasmine, qui a été élevée par sa nourrice Awatef, pense aussi qu’elle ne s’en porte pas plus mal ! Et que ça ne signifie pas qu’elle ne sera pas présente pour les bébés. Mais rien à faire, Hamdi tient bon…
…pour une douzaine d’heures encore. Quand il finit par s’endormir dans la chambre froide du laboratoire médico-légal, il faut se rendre à l’évidence. Il finit par accepter d’engager quelqu’un.

Se présente alors Om Sabrine, qui semble avoir beaucoup d’expérience professionnelle ainsi que personnelle (elle a une fille), et qui promet de suivre à la lettre les conditions posées par Hamdi (on n’entre pas dans son bureau, et on ne touche pas à ses affaires !). Hélas, les promesses s’avèrent peu suivies d’effet. Blasées, Yasmine et Hamdi peuvent rapidement constater que même la promesse de ne jamais décrocher son téléphone perso quand elle est au travail n’est pas tenue par Sabrine…
A ce stade, je ne saurais dire si Om Sabrine va rester au service du couple parce que celui-ci est trop désespéré pour chercher quelqu’un d’autre, ou si la quête de l’employée providentielle va sous-tenir les épisodes suivants de Ashghal Shaqa. Tout ce que je sais, c’est que les déboires ne sont pas finis pour ces jeunes parents que tout persiste à accabler. Y a-t-il quelqu’un pour les sauver de la fatigue, ou Hamdi et Yasmine sont-elles seules face aux défis de la parentalité ? Bon, pour moi c’est un enjeu un peu facile à regarder de façon détachée, mais je gage que pour des parents, ce visionnage doit être salvateur. En témoigne l’avalanche de compliments adressée à la série pendant le Ramadan.


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