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  • ARK: Survival Explained – 1×02

    22 mars 2024 à 22:15 • Review vers le futur •

    Où l’on continue de parler d’ARK: The Animated Series, après un premier épisode plus émouvant qu’attendu. Sans vouloir vous spoiler, ce second opus fait exactement la même chose : démontrer que la série animée a décidé de trouver un équilibre assez fragile entre une accumulation de références au jeu, l’introduction de changements un peu plus surprenants, et un discours qui continue d’explorer le thème de la survie.
    C’est avant tout l’angle, ici, qui mérite qu’on s’arrête dessus.

    Dans le premier épisode, hors quelques minutes aux côtés du défunt Bob (quel Bob, ce Bob), Helena a dû survivre seule à l’hostilité de l’ARK. Enfin, seule, oui et non : le Parasaur qu’elle a sauvé, « Scary », l’accompagne de façon fidèle, et lui a déjà sauvé la mise à son tour. Mais du côté de l’espèce humaine, l’héroïne n’a vraiment eu personne sur qui compter.
    Sauf que, s’enfonçant dans la jungle pour échapper aux hommes de Nerva, et profondément blessée, elle atteint ses limites. C’est là qu’ARK: The Animated Series choisit d’introduire Mei Yin, dont j’aime autant vous prévenir sur le champs qu’elle a toujours été l’une de mes deux autrices d’Explorer Notes préférées, et apparue au dernier moment pour secourir Helena. Celle-ci se montre, légitimement, méfiante… mais force est de constater que Mei Yin (apparemment orthographiée Meiyin par la série, allez savoir pourquoi) est une alliée de valeur.

    Incarnée par la voix auguste de Michelle Yeoh, Mei Yin apparaît ici à la fois sous la forme d’une guerrière badass, mais aussi d’une femme plus mature. J’ignore à quel point le casting de l’actrice a influencé les flashbacks de cet épisode, ou le contraire, mais dans tous les cas, cette fois-ci, Helena est ramenée aux souvenirs qu’elle garde de sa mère au 21e siècle, et l’association de ces deux femmes dans le même épisode sert absolument un même propos.
    Helena est en effet la fille d’une activiste aborigène, Deborah, qui lutte pour la reconnaissance des Droits aux indigènes australiennes ; enfant, déjà, elle accompagnait sa mère à des manifestations, même si à l’époque elle n’en comprenait pas nécessairement la portée et pouvait être effrayée par les réactions racistes. Considérant qu’ARK: The Animated Series est l’adaptation d’un jeu video étasunien, produite par un studio d’animation également étasunien, je dois dire que voir le sujet abordé m’a un peu surprise ; ce n’est pas tous les jours que ce combat intéresse au-delà de ses frontières, et il n’était pas présent dans les Explorer Notes. Quoi qu’il en soit, ARK: The Animated Series met un point d’honneur à apporter une dimension politique à son intrigue et à son propos ici, en insistant sur le besoin de continuer à sa battre pour sa cause, face à la haine et à l’oppression. Cela ne devrait surprendre personne vu les prises de position à la fois de WildCard et des Explorer Notes d’ARK: Survival Evolved au fil des années, mais il s’en trouvera quand même pour râler, soyez-en sûre.
    Deborah apprendra ainsi à Helena les fondements de la survie : « c’est ok d’avoir peur. […] Quand je ne peux pas voler, je cours. Quand je ne peux pas courir, je marche. Quand je ne peux pas marcher, je rampe ». Ne jamais abandonner, avec les moyens du bord. Naturellement, cette leçon ne lui revient pas en tête par hasard, car une fois de plus la jeune femme va être poussée dans ses retranchements.

    Ce nouveau conte sur l’instinct et l’impératif de survie est l’occasion de se lancer dans l’exploration d’une des cavernes de The Island. Et au passage, de côtoyer : des Troodons (fidèles à leur réputation !) ; un Sabertooth ; des Arthroplueras (oui, sic) ; un Otter qui a sûrement fait hurler d’indignation plus d’une joueuse devant son écran (en tout cas, moi) ; un Trilobite (quoiqu’un tatouage de Trilobite avait été vu dans le premier épisode) ; une colonie d’Onycs ; des Araneos et la Broodmother ; et enfin un vol d’Archeopteryx pour finir dans la douceur. Sur le moment j’ai cru que c’était des Microcraptors, mais ils ne faisaient pas assez chier pour ça. Plutôt pas mal.
    Visuellement, ARK: The Animated Series confirme aussi qu’elle est, si vous me pardonnez le jargon technique, putain trop belle sa mère. Je n’en ai pas trop parlé pour le premier épisode, mais il y a vraiment de chouettes plans, sans chercher à faire dans le contemplatif. En outre, la cave de l’obélisque verte, où Mei Yin conduit Helena, est absolument magnifique, forte de couleurs iridescentes et fluorescentes, et, au passage, parfaitement reconnaissable. C’est fou comme dans cette série, sans identifier parfaitement les endroits en cherchant à répliquer les lieux du jeu, on finit par tout de même trouver l’essence de certains endroits-clés de The Island dans ARK: Survival Evolved. Même l’arène de boss de la Broodmother est fidèle à l’esprit de l’original, tout en s’adaptant aux particularités et besoins narratifs d’un medium différent. J’ai l’air de tomber de l’armoire, mais la réalité, c’est que, pour une raison qui à présent m’échappe, je soupçonnais un peu ARK: The Animated Series d’être plus paresseuse qu’elle ne l’est ; depuis le premier épisode, je suis contredite, et j’en suis ravie.

    Ce nouvel épisode ne fait figurer aucun des antagonistes introduits dans le premier (Nerva et Rockwell sont, bien-sûr, mentionnés, mais la série insiste pour ne surtout pas adopter un point de vue omniscient, et nous voilà donc dépourvues d’informations sur leurs actions suivantes, ou leur réaction face à l’évasion d’Helena). On préfère y insister sur l’amitié naissante entre Helena et Mei Yin. J’espère que j’ai mal compris l’un des plans et que cela restera effectivement une amitié ; j’ai d’autres plans pour Mei Yin et normalement les Explorer Notes aussi.
    Cette amitié se fonde au départ sur le fait que Mei Yin pense avoir trouvé quelqu’un avec qui elle a des ennemis communs, mais le respect naît bientôt de leur collaboration. Cette collaboration ne serait pas possible sans qu’Helena prenne conscience de la nécessité de s’endurcir, et d’apprendre à se battre, là où précédemment elle s’indignait et se réfugiait derrière son statut d’intellectuelle.
    Ce que ARK: The Animated Series introduit aussi, c’est l’idée que la persistance à survivre ne saurait se faire sans collaboration, un angle très important du propos fondateur du jeu video, et donc capital à retranscrire ici. Le combat de Deborah fait aussi, indirectement, écho à une préoccupation qui apparaît bien après les Explorer Notes de The Island : « Nous devons nous battre, Helena. Si ce n’est pour nous-mêmes, pour la future génération ». Je n’en dis pas plus parce que, encore une fois, spoilers ; mais je me comprends.

    Fonctionnellement, l’épisode remplit vraiment bien son office. L’émotion est moins au rendez-vous ; mais l’action continue d’être réussie, l’intrigue progresse, les références au jeu et à son intrigue se poursuivent, et le thème de la survie continue d’être exploré. Point positif à mes yeux mais certainement pas pour ceux qui bien-sûr se sont dépêchés de la blâmer d’être « woke » (because of course they did), la série ne cherche absolument pas à ménager les sensibilités de tout le monde, et s’engage pleinement dans une défense sans concession de groupes minorisés. Quiconque a lu les Explorer Notes sait que c’est parfaitement fidèle à ARK: Survival Evolved, et donc on va continuer de copieusement ignorer leur avis.
    A la place, demandons-nous ce que John Dahkeya fait là, à ce moment de l’intrigue…


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  • ARK: Survival Explained – 1×01

    22 mars 2024 à 22:00 • Review vers le futur •

    Le 10 décembre 2020, le studio WildCard publiait une double-annonce surprise, en diffusant pendant les Game Awards un trailer conjoint du jeu video ARK2, et de la série ARK: The Animated Series. Avant ces quelques minutes, aucune de ces deux sorties n’avait été communiquée. Toute la communauté du jeu ARK: Survival Evolved s’en est trouvée électrisée comme jamais. L’impatience en attendant l’arrivée d’ARK2 (sans date précise), et d’ARK: The Animated Series pour 2022, était à son comble. Surtout avec une distribution comme celle-là !
    …Bon, depuis, la patience, on a appris. ARK2 n’est toujours pas sorti, et le studio a lancé l’an dernier une version remasterisée semi-impromptue, ARK: Survival Ascended, en espérant faire patienter tout le monde tout en faisant entrer quelques écus dans sa bourse. Les nouvelles quant à la série animée se faisaient plus que rares, quasi-inexistantes en fait, au point qu’un gag récurrent dans la communauté consistait jusque récemment à suggérer que la série n’existait pas, d’autant qu’aucune plateforme ne semblait vouloir acheter la série (en dépit de sa production intégralement financée par WildCard, et des épisodes vendus clés en main).
    Au fil des ans, on aura en effet entendu tout et son contraire : un article de Rotten Tomatoes affirmant que la série était sur le planning de HBO Max, des rumeurs sur Netflix puis Amazon Prime… Finalement, depuis la semaine dernière, des confirmations d’une arrivée imminente sur Paramount+, enfin ! Voilà donc depuis hier les 6 premiers épisodes disponibles sur la plateforme… aux USA ; les autres territoires n’obtenant ces mêmes épisodes que le mois prochain.

    Trigger warning : suicide.

    Plus de trois années d’attente plus tard (pour une première saison dont on nous garantissait qu’elle était quasiment finie à l’époque), me voilà ainsi enfin en capacité de voir la série animée, et donc d’en discuter. Lourde tâche que d’essayer de reviewer une série qu’on a autant attendue ! Mais surtout, une série accolée à une histoire que l’on connaît si bien, et qui donc prend le risque inhérent à celui des adaptations.
    ARK: The Animated Series a pris son temps pour arriver, alors, mes reviews aussi. Commençons par le premier épisode.

    Je vous épargne les 712 paragraphes dédiés à mon amour pour ARK: Survival Evolved que j’ai effacés avant de publier cette review, mais sachez que vous n’êtes pas passées loin ; par contre, tâchons quand même de résumer de quoi parle le jeu video avant d’aller plus loin.
    A la base, ARK: Survival Evolved attend de ses joueuses qu’elles incarnent une protagoniste customisable ne faisant pas partie de l’histoire, et n’ayant en fait, à bien y regarder, aucune influence sur ce qui se passe. C’est assez inédit, vous en conviendrez. A la place, progresser dans l’exploration du territoire d’une carte donnée (en commençant, idéalement, par la première, The Island) permet de trouver ce que le jeu appelle des Explorer Notes, des sortes de journeaux intimes racontant ce qui s’est passé précédemment. Ecrits du point de vue de plusieurs personnages, les Explorer Notes dévoilent progressivement comment les sorts de Helena Walker, Sir Edmund Rockwell, Mei Ying Lin, Gaius Nerva et plusieurs autres, essaient de donner du sens à leur présence sur The Island.
    Ce que racontent ces fameuses notes ? Ma foi, je ne vais pas tout vous raconter, faute de vous spoiler à la fois le jeu et la série. Mais pour résumer, disons qu’à son réveil sur cette fameuse île, Helena Walker, une biologiste australienne née au 21e siècle, est estomaquée lorsqu’elle découvre que les personnes qu’elle rencontre viennent toutes d’époques différentes. En particulier, le chimiste britannique Sir Edmund Rockwell qui devient plus ou moins son mentor, est né au 19e siècle, et travail en collaboration avec un général de la Rome antique, le denommé Gaius Nerva.

    Ce qui frappe dans le premier épisode de ARK: The Animated Series, c’est le choix à la fois logique et radical de faire de Helena la protagoniste de la série. Tout est vu à travers sa perspective, renforçant l’identification en permettant aux spectatrices de découvrir l’univers de The Island à travers son étonnement ou sa peur. Pour l’essentiel, l’identité des personnages est la même que dans le jeu (Helena est une paleobiologiste maintenant, mais la nuance est assez minime). A noter qu’un personnage inexistant dans les Explorer Notes a été ajouté, du nom de Bob ; c’est un peu une private joke (« Bob », le nom par défaut donné aux personnages masculins du jeu, est aussi et surtout le surnom au sein de la communauté des joueuses inexpérimentées qui meurent rapidement après leur arrivée), doublée de l’opportunité de faire de l’exposition. Le sur-musclé Bob est, fidèle à sa destinée videoludique, tué rapidement pendant ce premier épisode pour céder le champs libre au point de vue encore innocent de Helena.
    C’est alors que Helena fait la rencontre de Sir Edmund Rockwell, qui en pactisant avec le brutal Nerva semble nourrir un objectif cruel, y compris quant à la domestication des différents dinosaures de The Island.

    Aaaah, nous y voilà ! L’un des atouts majeurs du jeu étant son large, très large (193 espèces recensées) bestiaire en grande partie préhistorique, l’apparition de plusieurs animaux est à chaque fois un grand moment, aussi j’espère que vous m’en pardonnerez l’inventaire.
    Là encore, tout est fait pour découvrir les créatures à travers les yeux de Helena : des Coelacanths, le Megalodon qui la poursuit lorsqu’elle se réveille au large de la plage (…et le Leedsichthys qui lui sauve la mise involontairement) ; l’adorable Dodo trouvé sur la plage et immédiatement voué à devenir un compagnon vulnérable mais fidèle ; des Mesopithecus ; des Brontosaurus, Trikes et Pteranodons découverts avec émerveillement au détour d’un bosquet ; le Parasaur sauvé d’une mort certaine qui réapparaîtra avant la fin de l’épisode ; le Rex chevauché par Nerva et les Raptors servant de montures à ses hommes ; un Moschops endormi au camps de Nerva et Rockwell ; un Achatina fort opportun… et quelques insectes brièvement aperçus. Ils sont venus, ils sont tous là. En tout cas, les classiques de début de jeu sont là ; nul doute que d’autres espèces devraient progressivement montrer leur museau.
    Si ARK: The Animated Series met un point d’honneur à multiplier les clins d’oeil, il faut reconnaître que dans leur grande majorité, les créatures comme les protagonistes invoquées ont une raison d’être narrative.

    …Y compris d’autres ajouts, qui, eux, devraient être reçus de façon plus mitigée par la communauté de joueurs (masculin extrêmement volontaire).
    Le premier épisode de la série est d’une durée assez rare pour de l’animation : 47 minutes, soit une durée double par rapport aux épisodes suivants. Et l’une des raisons en est qu’outre l’inévitable besoin de faire un peu d’exposition à la fois de la situation, des personnages et de ce qu’il y a à attendre pour la suite, ARK: The Animated Series inclut de nombreux flashbacks sur la vie de Helena avant d’arriver sur The Island, qui étaient absolument absents des Explorer Notes originales. Ce qui a conduit à l’introduction d’un autre personnage inédit : Victoria était l’épouse de Helena en Australie, lui offrant un soutien inconditionnel alors que notre héroïne peinait à faire avancer sa carrière à cause d’une anxiété de plus en plus handicapante.
    Linguiste et activiste, Victoria est bientôt sollicitée pour servir d’interprète dans un camp de réfugiées, et y trouve la mort, ce qui laisse Helena dans un état psychologique encore plus fragile. Les flashbacks insistant sur la vie commune des deux femmes (Victoria est interprétée par Elliot Page, qui n’avait pas encore fait son coming out trans à l’époque de son embauche pour la série ; mais il est, naturellement, crédité correctement au générique) sont assez nombreux. Il est évident que les puristes y trouveront à redire, et ont en fait déjà commencé. Les puristes peuvent aller se faire cuire le cul, mais enfin, c’est vrai que cet ajout ne fait pas tout de suite sens. Il faut donc attendre la toute fin de l’épisode pour comprendre que cette décision prenne tout son sens.

    Je m’attendais très peu à me retrouver en larmes à la fin de ce premier épisode. J’étais un peu émue devant certains clins d’oeil (la série est très scrupuleuse dans ses visuels), et la backstory d’Helena était touchante, mais rien ne m’avait préparée à ce moment où ARK: The Animated Series décide de donner un sens nouveau à…
    Ma foi, ARK: The Animated Series ambitionne de parler de survie dans tous les sens du terme. C’est un peu ironique étant donné que son titre fait abstraction du terme « Survival » présent dans la version videoludique, mais cela reste extrêmement sensé, et un choix élégant. On aurait bien voulu ne pas bury your gays pour autant, mais enfin, on devrait avoir une chance de rattrapage avec une autre intrigue plus tard, si tout va bien.

    La survie ne tombe pas sous le sens. Je trouve courageux que la série s’interroge sur la motivation qui pousse Helena à exister dans cet univers, de se questionner sur les raisons de son instinct à échapper à un Megalodon, un général romain, ou un chimiste sadique. Il reste beaucoup de choses à découvrir sur The Island, le premier ARK où démarre la série, et ce sera l’affaire des épisodes suivants n’en doutons pas. Mais ARK: The Animated Series ne tient pas pour argent comptant qu’une biologiste, et encore moins une biologiste souffrant d’une anxiété paralysante comme la mienne je voulais bien évidemment dire la sienne, ait l’impulsion nécessaire à survivre au pire.
    Le besoin de survivre, Helena va devoir le piocher au plus profond d’elle-même, et ensuite seulement se confronter à la complexité du nouveau monde dans lequel elle évolue, pour ainsi, peut-être, prévaloir.
    I am still here.


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  • Take Five + Un

    1 février 2024 à 23:39 • Take Five •

    Après mûre réflexion (influencée par plusieurs retours positifs), j’ai décidé que Take Five continuerait cette année… dans une version légèrement améliorée.
    Pour l’essentiel, les règles du jeu restent les mêmes : chaque mois, proposer une compilation de reviews plus rapides pour 5 « pilotes » au sens large de séries pour les reviews desquelles je n’ai pas eu de temps, de place, d’envie (ou quelque autre raison que ce soit) au cours du mois écoulé. Sans que cela ne présuppose nécessairement que je n’en parlerai plus jamais. Toutefois, avec cette année une variante que je vous laisse découvrir !
    En effet, j’ai décidé d’ajouter pour 2024 deux éléments à ces mini-bilans mensuels Take Five, dont l’un… dépend de vous.

    Cinq cartes à jouer avec une bordure violette sont placées en désordre sur un fond violet (une carte du monde, qui est aussi le fond utilisé pour ce site). Chaque carte à jouer représente l'une des séries dont il est question ce mois-ci. Voir leur description individuelle plus bas.

    Le poster pour 19 Ceng montre un ascenseur en bois visiblement usé. Ses portes sont presque totalement ouvertes, laissant entrevoir à l'intérieur les 7 personnages principaux. Avec une attitude méfiante, elles observent l'étage plongé dans la pénombre, sans sembler s'y engager. 19 Ceng (2024)
    Thriller

    Sur le papier, 19 Ceng (ou 19th Floor de son titre international) est l’histoire d’un bâtiment ancien avec une réputation plus ou moins maudite, sur le campus d’une université. Est-il hanté ? Est-il le terrain d’une sorte d’escape game ? Autre chose ? Le premier épisode est brouillon quant au genre de la série (fantastique ? science-fiction ? high concept ?), et le générique n’apporte aucune sorte de clarté, voire même en remet une couche. S’y mélangent des démons chinois anciens, de la VR, des rêves prémonitoires, un accident de bus… on nous assure que personne n’est mort mais on nous parle aussi d’Enfers… Vu que 19 Ceng est l’adaptation d’un roman, j’ai passé mon temps à me dire qu’une explication serait forcément délivrée au bout d’un moment (même si ce n’est clairement pas pour cet épisode introductif), pour m’aider à tenir. Sûrement que le mystère de ce bâtiment, et avec lui de son 19e étage, auquel pour le moment on n’a eu droit qu’à de vagues allusions, sera un peu mieux expliqué à mesure que les protagonistes évoluent dans ses couloirs. Mais pour le moment, rien à faire, on a l’impression que ça part dans tous les sens.
    Une grande partie de l’explication à cette confusion tient dans le fait que 19 Ceng dispose d’un premier épisode qui est tout simplement mal écrit. La scène introductive est tournée du point de vue d’un personnage, la scène suivante procède à l’exposition du point de vue d’un deuxième personnage, et l’héroïne principale, Chun Yu, est introduite par le point de vue d’un troisième personnage. A ce stade on a atteint pas loin de la moitié de l’épisode quand enfin on adopte la perspective de la protagoniste centrale ! Et on n’a même pas encore lancé l’intrigue, qui elle-même, comme je l’ai dit, n’est pas facile à cerner. Quand on ajoute à cela le fait que la série est tournée un peu à la va-vite (tout le budget est vraisemblablement parti dans les effets spéciaux), avec une distribution mal dirigée et des scènes d’action laborieuses, franchement, ça ne donne pas envie.

    Le poster promotionnel de la série montre Benoît Génant, assis dans un polo orange à son bureau (lequel est un bordel couvert d'objets divers et variés n'ayant pas forcément grand'chose à voir avec le travail), regardant la camera d'un air confiant. Ses deux employées sont derrière son fauteuil, regardant également la camera. Le mure du fond est un faux coucher de soleil orangé avec des silhouettes de palmiers. Benoît Génant Officiel (2024)
    Comédie point d’interrogation

    Ma première série française vue cette année est… comment dire… définitivement ma première série française vue cette année. Et c’est un peu tout ce qu’on pouvait lui demander. Je n’avais pas trop fait gaffe mais apparemment TFHein lançait en ce début d’année une nouvelle plateforme, TFHein+, sur laquelle la série a éch-… atterri en parallèle de sa diffusion sur TMC. Bon, du coup ça place bien la barre, je trouve.
    Pour vous situer la bête, Benoît Génant Officiel s’intéresse à un agent immobilier qui s’imagine aussi influenceur. Inculte, odieux, doté d’un ego boursoufflé, et grand fan de Stéphane Plaza dont il connaît la moindre émission par coeur, il mène la grande vie… et on se demande comment. A la tête de son agence BG, il n’a qu’un employé (une deuxième débarque dans cet épisode), il est médiocre avec les clientes potentielles comme avec les acheteuses, et on n’imagine pas vraiment que ses frais soient couverts (surtout lorsqu’ils impliquent le tirage de slips ou de bouteilles de champagne à son effigie). L’épisode dure une petite demi-heure, pendant laquelle le protagoniste passe son temps à accumuler les travers, son seul atout dans la vie étant d’être trop imbu de sa personne pour ressentir la moindre gêne. C’est là, je suppose, toute l’ironie ?
    Benoît Génant Officiel n’est tout simplement pas drôle. C’est l’une de ces séries qui se croit drôle parce qu’outrancière (bien-sûr que le premier épisode inclut une blague transphobe !), mais protégée par le fait que son personnage central est lui-même débectant, comme si tout s’annulait. Ou, pire, comme si cela suffisait à produire de la satire. Mais il n’y a pas de critique ici, pas de recul. Juste une demi-heure de blagues nulles, de gags répétitifs sur le genre de personne qu’est le protagoniste, et de propos dégueulasses parfaitement assumés. Du coup, ce qui est gênant, c’est qu’on ponde encore un truc paresseux comme celui-là. Même TMC vaut mieux. Je crois ?

    Le poster de la série montre la sage-femme Ella, assise dans son uniforme, tenant dans ses mains gantées, avec un léger sourire, un nouveau-né encore couvert de diverses substances. Derrière elle, cinq personnages en blouse blanches (probablement des hommes) se tiennent de façon plus rigide, et plongés dans un effet de brouillard ; on ne voit pas leurs visages. Dag & Nat (2022)
    Médical

    C’était amusant de tomber sur la version sous-titrée de cette série danoise tant de 2022, et s’intéressant à une sage-femme dans un service d’obstétrique, quasiment en même temps que Kiddo s’émerveillait de son visionnage de Kounodori (à raison !). Un simple concours de circonstances dû au fait que SBS en Australie a acquis les droits de diffusion de la série, mais quand même.
    Le ton, bien-sûr, est différent. Dag & Nat (un titre dont je soupçonne sans pouvoir le prouver qu’il inclut un jeu de mots) commence par un échange entre la cheffe des sage-femmes, Ella, réclamant l’embauche de sage-femmes, et son directeur, préoccupé par les coupes budgétaires (sa réaction est encore plus détestable que je ne l’imaginais) ; puis se poursuit avec une réunion de service dans laquelle il est évident que tout le monde est passionnée, mais sur les rotules. Le décor est planté : Dag & Nat s’inquiète de bien traiter ses parturientes, leur bébé et leurs proches, sans en avoir les moyens humains, et donc financiers. La folle journée qui s’en suit oscille entre les moments de grâce, les urgences gérées aussi doucement que possible, et les limites de ce service exsangue malgré ses locaux modernes. L’efficacité est, bien-sûr, ce qui est mesurable ; mais Ella est attentive aussi à tout le reste. Les patientes sont-elles bien reçues ? Leurs souhaits sont-ils respectés ? Leurs soignantes sont-elles suffisamment reposées ? Leurs plaintes sont-elles écoutées ? Leur prise en charge est-elle aussi fluide et agréable que possible ?
    Perce l’idée derrière toutes ces préoccupations que la naissance n’est pas qu’un résultat, ou même un acte médical, mais une expérience de vie… et que Dag & Nat veut interroger les maltraitance médicales qui peuvent si facilement s’insinuer dans un tel environnement. Et… et en même temps, eh bah, pas trop l’interroger de trop près. Parce qu’en fait, pour l’instant, la série fait tout cela sans mordant, j’allais dire sans trop ruer dans les brancards, et donc sans vraiment appeler à une véritable réflexion. Il faudra voir si les épisodes suivants prennent un peu plus le mors aux dents. La conclusion de l’épisode me laisse en outre assez circonspecte, et j’attends de voir ce que la série veut mener les choses parce que si c’est juste pour faire du soapesque, est-ce qu’on avait vraiment besoin de faire mine de s’inquiéter du financement de l’obstétrique publique ? Je pose la question.

    Le poster de la série montre au premier plan la statue autour de laquelle tourne l'intrigue. Les visage de quatre personnages apparaissent autour d'elle, et des couleurs abstraites et floues donnent une aura mystérieuse et magique à l'ensemble.In Your Dreams (2023)
    Dramédie, Fantastique

    Souvent je souligne combien Netflix, en dépit de grandes déclarations d’intention, a encore une politique de commande très molle en Afrique, y compris mais pas seulement en Afrique sub-saharienne. Pour être complètement juste, il me faudrait préciser qu’Amazon Prime Video n’est pas mieux ! La plateforme est installée depuis 2016 en Afrique du Sud, et devinez quoi ? En novembre, elle a sorti sa première série sud-africaine originale, In Your Dreams. C’est vous dire si on se presse vraiment pas du côté des plateformes internationales. En même temps, tant mieux, ça fait plus de parts de marché pour Showmax…. Cela étant, la plateforme semble accélérer un peu le mouvement, ce qui certes n’est pas difficile, puisqu’elle a aussi commandé la co-production internationale The Morning After, en grande partie sud-africaine. J’espère qu’on pourra voir le résultat bientôt. En attendant, le premier épisode d’In Your Dreams est plein d’énergie. La production a des moyens modestes, mais ils sont investis avec intelligence dans une intrigue ancrée dans un folklore (fictif, pour autant que je puisse le contaster) intéressant qui conduit à un peu d’action et de frissons, et ça devrait se poursuivre dans les épisodes suivants. Voire même prendre de l’ampleur.
    Tout part en effet d’une statue qui, dit-on, pourrait réaliser les rêves… sauf qu’il y a, naturellement, une clause en petits caractères. En quête d’explication quant à ces mystères, les protagonistes de l’intrigue, de jeunes adultes remplis de rêves et de projets, mais dont le présent est compliqué, échangent avec beaucoup d’humour des dialogues enlevés et bourrés de références, il y a une petite intrigue amoureuse pour l’instant pas trop pesante, une possible conspiration surnaturelle… Rien dans In Your Dreams ne promet pour l’instant de choses trop complexes, ou une mythologie trop subtile, mais cela lui permet de ne pas décevoir et de remplir parfaitement le contrat. C’est un peu comme regarder une version de Daomu Biji dotée d’un humour un peu plus fin, et de personnages un peu moins vides…
    Je voulais trouver le temps en fin d’année dernière de regarder le reste de la saison, et c’est définitivement ma mission pour ce début de 2024. Honnêtement, je ne vois pas de quoi d’autre je pourrais rêver (pardon).

    Le poster de la série montre Gökhan, de dos mais tournant la tête comme pour regarder par-dessus son épaule, sans peur mais avec résolution. Derrière lui on devine les lumières d'une ville de nuit. Le reste de l'écran est envahi par de nombreux messages en turc, vraisemblablement envoyés par "Kübra". Kübra (2024)
    Drama, Thriller

    Gökhan est revenu de son service dans l’armée avec une toute nouvelle perspective. Sa foi et sa spiritualité ont été décuplées par cette expérience, et il aspire désormais à une vie simple et intègre. Sa petite amie de longue date, Merve, espère qu’il va demander sa main à son père très bientôt ; quant à l’atelier où il travaille, et où essentiellement il sert de manager, il n’a pas encore demandé de promotion officielle. Il semble toujours trouver des excuses pour se faire du soucis (pour sa mère, sa jeune soeur, son ami Serhet qui file un mauvais coton…), mais sans prendre de décision quant à son propre futur, ni faire d’effort pour aller de l’avant car de toute évidence, il est encore affecté par ce qu’il a vu… Un jour, Gökhan sauve un petit garçon d’une voiture en flammes. Perçu comme un héros (ce qu’évidemment il est trop humble pour accepter), notre homme est convaincu d’avoir fait là une expérience de transcendance, comme si Dieu lui-même lui avait donné pour mission de sauver l’enfant. Quelques heures plus tard, Gökhan commence à recevoir des messages privés sur l’app religieuse qu’il utilise, venant d’une personne appelée « Kübra » et qu’il ne connaît pas. Kübra semble tout savoir de sa vie, tout voir, tout entendre. Les messages omniscients commencent à lui délivrer des informations…
    Le premier épisode de Kübra s’intéresse surtout à la vie intérieure de son héros. Certes, les messages de Kübra sont énigmatiques, voire inquiétants. Ils témoignent d’un savoir qui fait peur, surtout parce qu’il est distillé de façon imposée (Gökhan tente de désinstaller l’app, et elle se réinstalle peu après). D’un autre point de vue, on pourrait penser qu’il s’agit d’une situation à la Early Edition, et l’intrigue peut très certainement choisir d’aller dans ce sens. Mais Kübra est profondément fascinée par les troubles qui agitent Gökhan, ses doutes, ses peur ; sa volonté de faire le bien et en même temps de faire du sur-place ; sa moralité intense et pourtant sa tendance à se mettre en danger. L’épisode introductif fait vraiment le job lorsqu’il s’agit de mettre en place, et déjà explorer, tout cela. J’ai beaucoup aimé son approche, et en particulier une scène très bien troussée dans laquelle Gökhan demande conseil à son imam, qui est pleine de joliesse, de bon sens, de bienveillance… et pourtant ne parvient pas à apaiser le héros. Parce que ça ne marche pas comme ça ! Ce serait si simple et justement, les nuances de l’âme, ce n’est pas simple. Kübra semble bien comprendre cela.
    Quant au cliffhanger de fin d’épisode, il est juste saisissant, il n’y a pas d’autre mot (même le générique de fin a de quoi désarçonner). Je suis vraiment curieuse de voir où la série veut aller, et du sens qu’elle donnera à Kübra. Il y a résolument du potentiel.

    Voilà donc pour les reviews. Mais ce n’est pas tout !
    En 2024, je veux aussi utiliser les articles Take Five pour mettre en lumière un poster (ou matériel promotionnel au sens large, selon ce qui se présente) d’une série qui m’a tapé dans l’oeil. C’était quelque chose que j’avais envisagé l’an dernier, mais cette fois c’est la bonne !
    Le plus surprenant, c’est que la série qui inaugure cette nouvelle habitude n’est pas une série chinoise. Alors que franchement, on sait toutes qu’à un moment ou un autre, il sera question de télévision chinoise dans cette rubrique !

    Le poster d'Outlaws se déroule dans une plaine un peu désertique, avec une montagne un peu plus verte en arrière-plan. Le ciel est lourd et nuageux, d'une couleur bleue/grise sombre, mais traversé par des rayons de lumières quasi-divins. Un peu excentré sur la droite, un cheval brun semble prêt à traverser l'image à vive allure. Un homme dans une tenue africaine semi-traditionnelle bleue-grise, arc-bouté, dirige le cheval, tandis qu'assise derrière lui, une femme dans une luxueuse robe d'un jaune éclatant braque une arme sur un danger hors-champs, qui semble les poursuivre.

    Les couleurs, la poussière, les couleurs, le mouvement, les couleurs, la lumière, les couleurs, le côté far west, les couleurs… tout me plaît dans ce poster. Il en existe un autre, plus conventionnel, présentant plusieurs des protagonistes ; mais celui-là je suis tombée sous son charme à la minute où je l’ai vu pour la première fois. Je sais pas comment l’expliquer mais… il y a des posters qui veulent vous faire regarder une série, et qui le pensent vraiment, quoi.
    Sur la base seule de ce poster (et, certes, de la notion qu’il s’agit apparemment d’un western sud-africain, ce qui en soi a de quoi rendre curieuse), j’ai passé une partie des dernières semaines à chercher activement comment regarder la série sud-africaine Outlaws, surtout alors que Showmax n’est plus disponible en Europe (bon, de toute façon, toutes ses séries n’y étaient pas proposées sur nos territoires, mais là du coup, c’est aucune série du tout), et je pense qu’en voyant ce poster… vous comprenez sûrement pourquoi.
    La bonne nouvelle, c’est que je pense que j’ai mis la main dessus ! Il faut encore que je vérifie l’intégrité du fichier, mais j’ai en ma possession le premier épisode (les suivants sont plus compromis, mais vous me connaissez, c’est pas le genre de détail qui m’arrête). J’espère donc vous en toucher deux mots bientôt, donc interprétez-le également comme une promesse !

    Pour finir, le rendez-vous mensuel du Take Five va aussi être dorénavant l’occasion pour moi de mettre en lumière un commentaire du mois écoulé. Vous l’aurez constaté, je ne suis pas très forte lorsqu’il s’agit de répondre aux commentaires. Pour plein de raisons, notamment que je continue d’avoir peur de monopoliser la parole (alors que ça fait des années que certaines d’entre vous me jurent que ce n’est pas interprété comme tel… ça rentre tout simplement pas). Toutefois, ça ne signifie pas que je ne les apprécie pas, et je me suis dit qu’en sélectionner un par mois à mettre en lumière pouvait, un peu, améliorer les choses. Cela me permet en outre d’y répondre en longueur, et d’en faire profiter tout le monde. Même si, techniquement, il est possible de ne louper aucun commentaire en suivant le flux RSS qui leur est spécifique.
    Bon, comme là je n’ai pas trop écrit en janvier, forcément les commentaires ne se bousculent pas. C’est bien ma faute. Enfin bon, on sait pas, peut-être qu’il y aurait pu y avoir des commentaires sur les publications abondantes des mois précédents ! Mais maintenant en tout cas, vous le savez. Et donc je guette ce que vous allez me dire !

    Le commentaire que j’ai sélectionné pour janvier me permet de toucher deux mots sur cette idée de commentaire « tardif », une notion qui je pense est apparue au fil des années et de la pratique des réseaux sociaux, patrie de l’immédiateté. Mais pas seulement.

    Message de Dandelion posté le 12 janvier 2024 à 15:12 : "ok, faut absolument que je trouve ça, je suis beaucoup trop curieux ça a l’air grave intéressant 😮 (oui j’ai mis 150 ans à finir de lire ton article depuis que tu l’as repartagé…)"

    Posté sous la review de l’unique saison de Toranai de Kudasai!!, ce commentaire de Dandelion semble penser qu’il y a une date de péremption aux articles ou, pire, à leur lecture. A mon sens, tout l’intérêt de cataloguer mes reviews sur mon propre Dotcom plutôt que sur les réseaux sociaux, c’est qu’il est possible de les consommer à n’importe quel moment. Y compris 150 ans après ! Je pars au contraire du principe que c’est pour ça que tout reste en ligne, que je n’efface jamais rien, que tout est étiqueté patiemment dans mes abondants tags (toujours listés en bas d’article), et que les commentaires restent ouverts.
    Outre l’influence des réseaux sociaux, qui a détruit une grande partie de l’écosystème des « blogs » (je ne considère pas vraiment le Dotcom comme un blog, vu que je n’y parle plus vraiment de choses personnelles, mais ça c’est moi qui pinaille), je crois qu’autre chose se trame derrière cette notion. La lecture immédiate, c’est important pour les entreprises et entités qui tiennent des statistiques de lecture, car ces statistiques sont souvent utilisées dans le cadre de la publicité… ce qui n’a jamais et ne sera jamais le cas dans ces colonnes. Je suis anti-pub et ça n’est pas près de changer, même quand je suis au fond du fond financièrement. Donc allez-y gaiement, lisez les choses quand vous le sentez. Du moment que vous les lisez !
    Entre vous et moi, je suis la première à pousser un cri ravi quand quelqu’un exhume une vieille review et manifeste de l’intérêt pour la série obscure (ou pas, d’ailleurs) dont j’ai causé il y a 712 reviews de ça. Que ce soit l’envie de la découvrir à l’avenir, ou un petit mot après l’avoir vue (ce qui hélas est encore plus rare, mais je me fais une raison), je suis contente. Je me dis que tout le travail fourni au fil des 17 années écoulées (…janvier marque l’anniversaire de ces colonnes) n’était pas en vain. Par pitié, lisez mes articles 150 ans plus tard ! C’est quand même bien à ça que sert de payer l’hébergement.
    Plus largement, on vit dans un monde où téléphagiquement, quasiment plus personne ne regarde la même chose au même moment. Les plateformes en rêvent, évidemment (pour des raisons similaires aux statistiques de lectures, en fait), mais c’est devenu totalement illusoire, surtout si en tant que téléphage on cherche la qualité et pas juste la nouveauté. En fait, il devient même assez rare de regarder la même chose, tout court. Cette notion suggérant qu’il faudrait lire une review maintenant ou jamais, elle est voisine de l’idée contre laquelle je lutte depuis si longtemps, selon laquelle il faudrait regarder une série maintenant ou jamais. Sauf que moi, contrairement à Netflix, je n’efface rien de mon catalogue, donc c’est encore plus valable ici… Vraiment, ça nous empoisonne collectivement et individuellement la vie. Tout le monde se porterait mieux sans ce type de pression.

    …Cette fois c’est vraiment tout pour janvier en ce qui me concerne. Mais que ça ne vous arrête pas : dites-moi ce que vous avez vu pendant le mois écoulé. Et surtout, n’oubliez pas de laisser un commentaire sous au moins un article ou une review (toutes dates de publication confondues), histoire que le Take Five de février ne se retrouve pas amputé d’une catégorie toute neuve ! Mais sans pression, hein, ça va de soi.


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  • Active love

    12 janvier 2024 à 21:01 • 3615 My (So-Called) Life •

    Comme la plupart d’entre nous, j’ai commencé à regarder des séries très jeune. Si jeune, en fait, que je ne me souviens pas des premières que j’ai regardées ; c’est sur la base de choses qui m’ont été rapportées, et sur cette base seulement, que je sais qu’enfant, je dévorais The Tripods ou Uchuu Keiji Gavan. Ma passion pour la télévision, je suis incapable de vous dire quand elle a commencé, comment, à cause de quelle série, quelle scène, quelle image, quel mot. De toute façon, il y a de fortes chances pour que ça n’ait jamais été l’affaire d’une seule série, d’une seule scène, d’une seule image, d’un seul mot. Nos parcours téléphagiques sont alambiqués, que voulez-vous… Au fil des années, mille raisons ont probablement fait de moi une téléphage amoureuse de cette forme artistique, avant même que je n’en prenne conscience.
    Aujourd’hui pourtant, si on me le demande, je sais précisément ce que j’aime dans les séries.

    J’aime les émotions que je ressens. C’est la raison première pour laquelle je me suis prise de passion pour la fiction sérielle, après tout. C’est cette recherche constante d’une nouvelle émotion, à partir de personnages et/ou de situations qui deviennent lentement familières, mais recèlent des émois qui me prendront par surprise. La plupart de mes meilleurs souvenirs de jeunesse avec la télévision, à l’enfance et surtout à l’adolescence, je les dois à des épisodes qui m’ont dévastée au moment où je m’y attendais le moins. Les séries ont le don de me rendre vulnérable à une foule de choses, et de me faire aimer cet état de vulnérabilité. De le rechercher, même ! Combien de fois ai-je abandonné une série qui semblait solide (et était armée d’une toute aussi solide réputation) parce qu’elle ne me faisait rien ressentir ? C’était les 25 ans de The Sopranos cette semaine, ajoute-t-elle, à propos de rien. J’aime passionnément commencer un épisode dans un état d’esprit et le finir dans un tout autre ; le menton baigné de larmes, peut-être. Ou un immense sourire sur les lèvres. Les yeux écarquillés par la surprise de m’être pris quelque chose que je n’avais quasiment aucun moyen de prédire avant de commencer. Le cœur battant d’avoir une fois de plus été conquise par l’art d’autrui. On recommence quand ?

    J’aime la durée. Quand bien même je ne m’engage plus aussi souvent qu’avant dans des séries destinées à durer (pour des raisons de préférences locales, ou parce que c’est désormais ce qu’il faut attendre par défaut d’une série de plateforme), j’apprécie la perspective d’avoir plusieurs épisodes devant moi, à tout le moins. C’est certainement vrai par opposition à un film, que je vois plus comme un truc dans lequel j’ai moins besoin de m’engager émotionnellement et intellectuellement parce que de toute façon, dans deux à trois heures, ce sera fini. Et en plus on sait que ça finira bien dans l’immense majorité des cas. Il y a résolument quelque chose de psychologique dans cette préférence, surtout dans le cas de certaines séries qui possèdent des saisons parfois bien brèves (voir par exemple : Sort Of), mais cette perspective de procéder par paliers m’enchante. Les épisodes deviennent ces unités au sein desquelles il peut se passer toutes sortes de choses, pour approfondir des personnages, explorer l’univers, ou encore proposer des expérimentations narratives. Mieux encore : tout cela à la fois. Tout peut arriver. Absolument tout. Il suffit de revenir pour l’épisode suivant et de faire tourner la roue à nouveau.

    J’aime les réflexions que la télévision suscite. Aucune autre forme artistique ne m’a jamais poussée à autant d’introspection que la télévision. Je n’ai pas que grandi devant la télé : j’ai surtout grandi avec elle. Un passage-clé de ma téléphagie, lorsque j’ai commencé à vraiment m’impliquer dans ce que je regardais, à multiplier les lectures, à être plus intentionnelle dans ma consommation et ma compréhension des séries… je l’ai vécu à un moment-charnière de ma propre vie. Même si une série donnée, individuellement, ne nous accompagne pas toujours au fil des ans (de moins en moins, à vrai dire), collectivement les séries m’ont portée d’une réalisation à l’autre, ont offert une multitudes d’opportunité de regarder sous un angle différent à quoi ressemblait ma vie, mon histoire, ou encore mes valeurs. Me pousser à m’interroger sur moi-même, mon rapport à d’autres, mon rapport à l’ailleurs, est quelque chose que nulle autre forme artistique a jamais fait pour moi.

    J’aime la découverte. C’est un cliché, mais la télévision a toujours été cette fenêtre sur le monde ; dans les années 90, je me reconnaissais dans ces plans de Profit, ce gamin qui avait grandi dans un carton étriqué avec pour seul aperçu sur l’extérieur l’écran de la télévision familiale. Dans une certaine mesure, c’est toujours un peu vrai aujourd’hui. Les décennies que j’ai passées à côtoyer la télévision ont consisté uniquement à me pousser à élargir mes horizons. Cela s’est traduit par l’appétit de séries en particulier, puis d’une envie de regarder toutes les séries américaines existantes, puis toutes les séries de la planète passées présentes et à venir. Chaque fois que je réalise qu’il y a toujours plus à voir, je me régale. Je n’en aurai jamais fait le tour, et encore heureux. Puisse le flot ne jamais s’interrompre de choses qui m’emmènent là où mon esprit n’est jamais allé.

    Plus le temps passe, plus j’aime aussi le fait de l’aimer. Le fait que la télévision me soit si familière, paradoxalement. Pas tant que des séries me soient familières (ces derniers temps, je revois très peu de séries que j’ai aimées par le passé), que le fait de reconnaître des idées, des ingrédients, des formules. Comparer avec ce que je connais m’éclate autant que découvrir ce que je ne connais pas. J’aime ce que fait mon cerveau quand je regarde le premier épisode d’une nouvelle série. Je ne connais rien d’elle, mais je connais le médium, alors mille pensées se bousculent. Je regarde la façon dont la série expose ses personnages et ses situations, et les engrenages tournent : « Ah, dis-donc, c’est intéressant, ça. La plupart des séries auraient fait commencer l’action il y a 5 ans. Ou auraient raconté ce qu’il s’est passé il y a 5 ans par des flashbacks. Ou auraient montré cette scène, 5 ans plus tard, mais s’en seraient servies comme d’un cadre narratif. Or, là, cette série-là, elle veut vraiment raconter l’après ». J’aime la façon dont mon esprit reconnaît les tropes d’un genre télévisuel donné (« on a vu plus des deux-tiers de l’épisode et le personnage commence enfin à manger : c’est définitivement une série d’appétit ! »), la façon dont je peux recouper des références télévisuelles (« Ha !!! Une allusion à Yizo Yizo, je connais cette série ! Ça m’arrive pas souvent de comprendre une référence sud-africaine, tiens »), la façon dont je formule des reviews au fil de mes journées quand je suis inspirée (« La mort est vécue par tout le monde pareil, mais le deuil dépend… hm alors non, ça, faut que ça trempe un peu avant d’arriver à quelque chose… et cette casserole aussi »). J’aime la riche histoire de ce medium. Savoir que les séries existent dans une continuité, que la forme qu’elles prennent a un sens, et même plus : une trajectoire. J’aime avoir à l’esprit comment un genre a émergé dans un pays, alors que certains autres pas du tout ; j’aime assister à la façon dont ça se manifeste dans une série de ce genre-là produite dans ce pays-là. Plus tard, j’aime en parler. Parler de ce que j’ai appris, encourager d’autres à en apprendre plus, à peut-être tenter ce qu’elles n’auraient pas vu sans un coup de coude insistant de ma part.
    J’aime observer comment différents pays promeuvent leurs séries (hélas on n’aura pas le temps de revenir sur la longue et fascinante histoire du product placement aujourd’hui) ; j’aime même trouver une image qui me satisfait, que j’ai envie de tourner en « représentante » sur le tag d’une série produite dans un pays qui ne produit quasiment jamais de beau matériel promotionnel, sauf que ce coup-là, j’ai eu du bol. J’aime les heures que je passe à écumer les moteurs de recherche en quête d’une information précise sur une série produite dans une langue que je ne parle pas, mais qui me parle ; j’aime au moins autant sinon plus les heures que je passe à écumer les moteurs de recherche en quête de l’information qui me fera comprendre une référence historique, culturelle ou linguistique. Faites pétez les onglets : c’est la marque familière d’une série qui a su me ravir. J’aime chercher la prochaine série à regarder, me demander si j’ai déjà vu une série de ce pays-là, ou si j’ai déjà vu une série de ce genre spécifique dans ce pays en particulier, et essayer régulièrement de sortir des chemins déjà empruntés. Je sais où je n’ai pas encore posé le pied justement parce que j’ai tant cartographié déjà…

    J’aime que la télévision ne soit pas quelque chose de passif pour moi. C’est ça qui me rend passionnée : à quel point la télévision est tout sauf un acte de réception passive. Cc’est un engagement temporel, émotionnel, intellectuel, culturel, social. La télévision est un art tellement vivant. Et moi avec elle.


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  • 2023, le calme pendant la tempête

    31 décembre 2023 à 23:37 • 3615 My (So-Called) Life •

    ChristmasTree-300Celles d’entre vous qui me lisent depuis quelques temps savent que je déteste établir des classements de fin d’année. En fait, je déteste les classements, tout court. Pourquoi hiérarchiser et exclure, quand le propre de ce que je fais ici à longueur de temps est précisément de fournir le contraire ? Je ne considère pas que mon rôle, quand vous venez me lire ici, soit de présélectionner pour vous, mais plutôt de vous donner un maximum de chances de faire des découvertes que vous n’auriez peut-être pas faites autrement.
    Alors, pour le dernier article de l’année, comme c’est la coutume, plutôt que de vous proposer un best of, je vous délivre un all of. En télévision, on prend le bon avec le mauvais ; et toutes les nuances intermédiaires.

    Mais d’abord, quelques mots de remerciements aux personnes qui, malgré tout, m’ont soutenue cette année, d’abord sur uTip puis, après la fermeture de la plateforme, sur Ko-fi. Plusieurs contributions n’ont pas fait le transfert, et ça a largement été un problème alors que j’avais décidé qu’en 2023 j’écrirais dorénavant à mon rythme plutôt que sur la base d’objectifs chiffrés, ce qui avait déjà contribué à diminuer les contributions. On va pas se mentir, sans les personnes qui ont tenu bon cette année, et qui m’ont suivie malgré ces changements, je ne serais pas arrivée en un seul morceau jusqu’au mois de décembre. Merci, donc, du fond du cœur, pour votre soutien.
    Cette année, donc, il n’était pas question de me forcer à écrire si je n’en avais pas l’énergie ou même l’envie. Ce qui a été bien pratique pour éviter de me sentir coupable quand, après un deuil, je me suis trouvée effectivement incapable d’aligner trois mots au printemps.
    Comme je tiens des statistiques (grâce à Notion), je suis en mesure de vous confirmer que je n’ai posté « que » 140 articles cette année, ce qui est toujours mieux que 2020 mais enfin, cette année-là n’est pas exactement une référence. Toutefois, ce chiffre est incomplet : avec l’implémentation d’un nouveau type d’article (Take Five) et donc des articles dits « Multi » plus réguliers, ce n’est pas toujours le nombre d’article qui a compté, mais plutôt leur teneur. Et dans le fond, ça devrait toujours un peu être comme ça.
    Le tableau ne serait toutefois pas complet sans mentionner que je n’ai pas fait qu’écrire moins : j’ai aussi regardé moins. Cette année, je n’ai vu « que » 793 épisodes de séries, ce qui est bien en-deçà de mes habitudes. Toutefois, le fait de ne pas me forcer à écrire a également impliqué de moins me forcer à regarder juste pour avoir du « matériel », et après tout, ce n’est pas la pire des choses. J’ajoute que les grèves étasuniennes ont aussi eu leur rôle à jouer dans ce phénomène. Sur ces 793 épisodes :
    – 271 étaient des « pilotes » (ou premiers épisodes au sens large) ;
    – 53 étaient des season/series finale, un chiffre stable comparé à l’an dernier ;
    – 102 étaient des revisionnages, ce qui est intéressant parce que c’est moins de la moitié du chiffre de l’an dernier !
    J’ai vraiment l’impression d’avoir eu un régime téléphagique un peu plus sain cette année, même si cela a eu des répercussions sur le rythme de publication.

    Bon, mais vous n’êtes évidemment pas venues là pour me regarder lister des chiffres… mais bien des séries ! Alors passons au récapitulatif de l’intégralité des articles postés cette année.

    Upcoming

    Take Five

    Inaugurée cette année, cette nouvelle catégorie consiste à sélectionner 5 séries dont le premier épisode a été vu dans le mois, et leur offrir une review plus courte que la moyenne. Certes, ma moyenne a tendance à être haute ! Mais il n’empêche que cela permet un panachage de découvertes favorables pour des séries qui autrement auraient pu n’être jamais mentionnées. Pour vous aider à vous y retrouver, je n’ai pas listé ici les 12 Take Five de l’année (ç’aurait juste donné 12 icônes rigoureusement similaires !), mais préféré répartir les séries traitées dans leur catégorie géographique ; faites-vous plaisir !
    …Qu’en pensez-vous, on renouvelle l’expérience en 2024 ?

     

    Upcoming

    Telephagia, Tivistory & Divers

    Dans le mouvement induit par l’espèce d’optimisation qui a résulté d’un rythme de publication plus libre et aléatoire, les articles plus généraux ont un peu pâti. Outre un article qui a (déjà) mal vieilli, puisqu’il était question de parler du financement de ma prose sur uTip (la plateforme mettait la clé sous la porte 4 mois après cette publication…), les deux autres articles un peu généraux de l’année ont porté l’un sur un épais bilan de festival, et l’autre sur une réflexion plus abstraite. C’est peu, mais je ne suis pas trop mécontente de ce qui a été accompli sur le fond, alors bon.

     

    Pilotes - US

     

    Pilotes – US

    Personne ne m’a jamais demandé de faire grève des séries US cette année, mais c’était ma façon à moi, insignifiante téléphage sans pouvoir sur quoi que ce soit, d’avoir le sentiment de faire quelque chose. Cela explique en partie le vide de cette rubrique pour 2023, mais en partie seulement, car ne nous mentons pas, j’ai un peu de mal avec les reviews de pilotes étasuniens depuis quelques années. C’est vraiment quelque chose sur quoi je voulais travailler un peu cette année sans avoir vraiment l’opportunité de le faire, et je remets donc cette quête à l’an prochain. Parler un peu moins des séries US bof ou mauvaises, juste parce que j’avais deux-trois pensées en tête, ça ne pourra faire que du bien à tout le monde.

     

    Pilotes - Asie

    Pilotes – Asie

    Bon, je crois que ce ne sera une surprise pour personne, les séries asiatiques ont depuis longtemps leurs quartiers dans ces colonnes. Il faut cependant noter qu’à ce stade, les séries indiennes sont devenues une valeur sûre de cette catégorie, ce qui n’était pas le cas il y a quelques années encore (et encore, je n’ai toujours pas publié la série de reviews dont je parle depuis des lustres). A un moment, il faudra peut-être leur donner leur propre rubrique !

     

    Pilotes - Canada

    Pilotes – Canada

    Il me devient de plus en plus difficile de nier qu’avec les années, ma préférence en matière de fiction canadienne s’oriente vers les séries francophones plutôt qu’anglophones. Il m’est devenu plus facile de me mettre devant une série québécoise au hasard que devant une série anglophone, et si je n’ai pas nécessairement identifié à quoi cette évolution était due, je pense que je vais arrêter de faire des efforts pour les séries anglophones quand elles ne le méritent pas plus. Surtout après des expériences comme Robyn Hood, faut arrêter le délire.

     

    Pilotes - Océanie

    Pilotes – Océanie

    Comme souvent, l’année a été humble pour les séries d’Australie et de Nouvelle-Zélande, avec assez peu de séries évoquées en 2023. Dans le cas présent, ce n’est même pas par manque d’intérêt (plusieurs des séries évoquées ici sont même très solides), mais plus pour des questions de proportionnalité. Qu’on se rassure, donc.

     

    Pilotes - Europe de l'Ouest

    Pilotes – Europe de l’Ouest

    A ma grande surprise, j’ai regardé assez peu de séries espagnoles cette année, et ça se sent dans les reviews. C’est étonnant parce que ce ne sont pas les bonnes séries espagnoles qui manquent, mais on dirait que beaucoup d’entre elles sont passées sous mon radar cette année. En échange on trouve plus de séries britanniques que d’habitude, et une série suisse, ce qui ne se produit vraiment pas souvent !

     

    Pilotes - Scandinavie

    Pilotes – Scandinavie

    Gloire en soit rendue, une fois de plus, à Viaplay, la plateforme nordique qui fournit quelques unes des meilleures séries de la région depuis plusieurs années (on verra combien de temps ça dure avec les changements financiers qui se profilent). Il me faut toutefois souligner que plusieurs autres plateformes n’ont pas démérité cette année, et que, la mode du polar scandinave s’étant un petit peu tassée, on commence à avoir accès à une jolie variété de genres et de ton dans la région. Je ne peux qu’approuver. Pas une grosse année scandinave, mais une bonne année scandinave.

     

     

    Pilotes - France

    Pilotes – Turquie & monde arabe

    Une catégorie de série qui a hautement bénéficié d’un Take Five spécial à l’occasion du Ramadan, je vous le concède bien volontiers. Il y a encore quelques années, une telle palettes de séries aurait été inimaginable, et c’est avec les séries arabes, en particulier (les séries turques étant, toutes proportions gardées, plus faciles à trouver traduites) que je mesure le plus la chance que nous avons de vivre à une époque où tant de choses nous deviennent accessibles.

     

    Pilotes - France

    Pilotes – Israël

    Voilà.

     

    Pilotes - France

    Pilotes – France

    Je ne me suis jamais réclamée d’une quelconque spécialité en matière de fiction française, mais je dois dire qu’à mon échelle, je ne suis pas mécontente. Il y a eu quelques bonnes découvertes dans la promotion de 2023 (et d’autres plus dispensables, certes), et encore, vous n’avez pas encore vu les reviews de saison. Preuve que parfois, il ne sert à rien de faire du chiffre.

     

    Pilotes - Divers

    Pilotes – Afrique

    Au risque de me répéter, nous vivons une époque formidable. Il est désormais possible d’avoir du choix en matière de séries produites en Afrique ! Les plateformes de streaming mais aussi certaines chaînes (comme arte) se mettent enfin à l’heure africaine, et même si ce n’est pas (et ne sera peut-être jamais) dans des proportions qui satisfassent complètement mes appétits, pour des personnes un peu moins gloutonnes que moi, ce sera déjà une révolution. Il ne faut pas se relâcher !

     

    Pilotes - Divers

    Pilotes – Amérique du Sud

    J’ai passé l’année à me dire que je n’avais pas vraiment vu de séries sud-américaines en 2023, et résultat, les chiffres me contredisent. Ce n’est pas trop mal d’un point de vue quantitatif ! Cependant, en matière de qualité, je reste sur ma faim. Peu de ces séries ont trouvé grâce à mes yeux, dans le fond. Ce sera sûrement l’un des paris de l’année à venir.

     

    Pilotes - Divers

    Pilotes – Balkans & Europe centrale (sans Russie)

    A l’inverse, j’ai eu l’impression de regarder beaucoup de séries polonaises, et au final je me vois contredite par les faits ! Pourquoi diable ai-je eu le sentiment de voir beaucoup de séries polonaises ?! En fait, l’élimination totale des séries russes de mon régime téléphagique a même démontré que je consomme peu de séries d’Europe centrale ou des Balkans, et c’est absolument quelque chose que je veux améliorer à l’avenir.

     

    Saisons / Séries complètes

    Saisons & Séries complètes

    La baisse du nombre total de publications cette année n’aura quasiment pas impacté les reviews de saisons et/ou séries complètes, et je trouve que c’est une plutôt bonne nouvelle. Ces reviews n’ont jamais été point mon point fort, et je trouve en outre qu’il est toujours plus difficile d’inciter à la découverte avec des reviews qui, par nature, sont propices soit au spoiler, soit aux allusions à des choses que les lectrices n’ont pas vues. J’essaie cependant de ne pas laisser les séries qui me fascinent et/ou que j’aime tomber dans l’oubli, et essaie de leur donner des reviews plus longues en espérant trouver un équilibre. Vous me direz si ç’aura été le cas cette année. Il y a, bien-sûr, des reviews que je regrette de n’avoir pas finies (l’intégrale de The Good Place en début d’année, par exemple, et qui allait me travailler toute l’année pour de multiples raisons), mais à l’impossible nulle n’est tenue. Je suis en tout cas sincèrement heureuse d’avoir pu vous écrire de longs, looongs paragraphes sur mes coups de cœur Replacing Chef Chico, Rencana Besar ou Sweet Kaaram Coffee (on notera que mes favorites cette année ne venaient pas des pays où j’ai le plus mes habitudes). En outre, enfin réussir à vous proposer une review de The Republic aura été pour moi une petite victoire.

     

     

    Il y aurait encore plein de petites choses à dire, mais, hey, l’année finit… pas mes services dans ces colonnes. Grâce à votre soutien sur Ko-fi, je suis allée au bout de 2023 et rempile donc pour une nouvelle année de reviews interminables et de découvertes que personne ne va faire, mais c’est ce pour quoi j’ai signé !

    2023 aura été une année très, très difficile sur le plan personnel (mais à ce stade, je pense qu’elles le seront toutes, vu le handicap, la pauvreté, l’isolement…). Réapprendre à être un peu plus satisfaite de ce que je fais sans trop me mettre la pression aura été l’une des rares victoires de ces douze mois éprouvants à tous les égards. Bon, je me suis quand même mis la pression, surtout vers la fin de l’année quand, prise par la culpabilité, j’ai essayé d’écrire plus souvent ; il y a encore un équilibre à trouver, mais au moins j’ai le sentiment d’aller dans le bon sens, et d’avoir assaini ma relation à la fois aux séries et à l’écriture sur les séries.
    J’espère que de votre côté, vous avez également tiré quelque chose de positif de vos lectures ici.

    Aussi, pour 2024, c’est tout ce que je vous souhaite : un rapport plus sain à ce que vous regardez. Et plus largement, un rapport plus sain à ce que vous consommez sur internet, aussi (d’ailleurs on me trouve désormais plus sur Mastodon que tout autre réseau social, et je suis convaincue que ça m’a beaucoup aidée dans mes tentatives de rendre ma vie moins stressante…). C’est à peu près le mieux qu’on puisse espérer par les temps qui courent, mais juste au cas où ça marche, je vous souhaite en plus de bonnes séries et de bonne compagnie pour en parler, de trouver aussi dans le « vrai » monde des choses qui vous fassent vous sentir apaisée.

    Meilleurs vœux, amies téléphages. Puissions-nous toutes trouver dans la fiction les ressources dont nous avons besoin pour la suite.

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  • Take Five Douze

    31 décembre 2023 à 23:33 • Take Five •

    Ainsi donc nous voilà arrivées au tout dernier Take Five de l’année, et je ne vous cache pas que ça fait un petit quelque chose. L’air de rien, je me suis habituée à ce nouveau rituel mensuel. Il m’a permis tout au long de 2023 de vous parler de séries pour lesquelles je n’aurais pas forcément trouvé une place sans cela, et j’ai cru comprendre que ces reviews plus rapides avaient même aidé certaines d’entre vous à faire des découvertes ! C’est tout ce que je demande.
    Pour cette dernière mouture, j’ai décidé d’offrir une review de la dernière chance non seulement pour des séries vues en décembre, mais aussi plus largement en 2023. Beaucoup d’autres auraient pu être à leur place. On n’a jamais le temps de discuter de tout… mais enfin, les Take Five auront amélioré un peu les choses, à leur échelle…

    1670 (2023)

    Ce n’est pas vraiment un secret : je ne suis pas particulièrement fan du mockumentary, un sous-genre télévisuel qui me donne envie de me trépaner avec mon clavier (je ne recommande pas : peu maniable et très douloureux). On a peut-être trouvé l’une des rares exceptions avec 1670, une comédie polonaise lancée par Netflix sur la dernière ligne droite de l’année… précisément parce que la série se déroule au 17e siècle.
    Alors certes, cette histoire de propriétaire terrien imbu de lui-même… mais en réalité parfaitement idiot, ce n’est pas ce que j’appellerais de l’inédit. D’après une étude scientifique réalisée sur une personne (moi), la moitié des comédies optant pour le mockumentary affectionnent ce genre de protagoniste. C’est normal ! Le genre repose sur la mise en lumière soit de l’hypocrisie soit du déni de ses protagonistes, et rien de mieux dans les deux cas qu’un bonhomme à l’ego boursoufflé. Le héros, qui s’appelle Jan Paweł et s’est promis d’entrer dans l’Histoire (bon, bref), se vante donc devant la camera alors qu’il n’a rien dont il puisse être fier : ses deux fils insupportables (un rustre bon à rien, mais qui est l’aîné, et un vicieux calculateur entré dans les ordres comme cadet), sa femme ultra-pratiquante qui fait très peur, la propriété du village qu’il est obligée de partager… ya rien qui va.
    Comme 1670 adore se vautrer dans l’anachronisme comme les cochons dans la fange, et que c’est honnêtement sa meilleure idée, cela donne des séquences plutôt amusantes, dans lesquelles Jan Paweł essaie d’impressionner les camera comme il peut. Je ne dirais pas que j’ai eu le fou-rire du siècle (ni d’aucun précédent) devant 1670, mais en tout cas c’est suffisamment tiré par les cheveux pour que ça fonctionne le temps d’un épisode. Comme toujours, cependant, j’ai un peu de mal à m’imaginer regarder ce genre de série sur le long terme, tant j’ai été échaudée par le passé. Le mockumentary, ça peut éventuellement me divertir le temps d’un épisode, mais rarement plus longtemps. Toutefois, je ne parle qu’en mon nom : si vous appréciez le style en règle générale, cette nouvelle variation sur les tropes du genre devrait vous plaire.

    Escort Boys (2023)

    Ben, un acteur raté, revient à la mort de son père dans son patelin natal en Camargue pour s’occuper de sa soeur adolescente Charly, et préserver le domaine familial, quand bien même celui-ci tombe en ruine. Hélas il est également couvert de dettes, et même si la débrouillardise permet de rétablir l’eau, cela n’empêche pas les services sociaux de se pencher sur le cas de Charly… C’est alors Ben découvre par hasard que l’un de ses anciens potes d’enfance, Mathias, désormais employé de l’exploitation, s’est lancé dans le travail du sexe et que… ma foi, ça paie pas trop mal (sauf qu’il le découvre après s’être prostitué sans le savoir).
    Si le sujet vous évoque quelque chose, alors vous faites sûrement partie des quelques centaines de personnes qui avaient lu ma review de la série israélienne Johnny Ve Abirey Hagalil, troquant la Galilée contre la Camargue (les drones y gagnent au change). Comme dans mes souvenirs de l’originale, la version française insiste bien trop eu sur le fait que les protagonistes masculins ont le sex appeal d’un phoque en plein désert, ou que la prostitution implique un peu plus qu’être bâti comme un Dieu grec et se pointer à une fête devant de jolies femmes. Cependant, la réalisation tient cependant plutôt bien la route, et la distribution principale n’est pas mauvaise même si ça crie juste un peu trop dans une scène ou deux. Honnêtement, si je n’avais pas déjà regardé Callboys cette année, et eu mon quota de gigolos, j’aurais peut-être envisagé de… de… the f*ck ?!
    « Les hommes n’osent plus vous draguer parce qu’ils ont peur de se faire traiter de harceleurs. Là, au moins… », assène le personnage de Carole Bouquet à des jeunes femmes dans cet épisode inaugural avant de s’égosiller contre le féminisme.
    Ouais, non ; poubelle. Si j’avais su avant, j’aurais même pas commencé, d’ailleurs.

    Lilmout (2021)

    Reem et Hadi se sont mariées vite, très vite, trop vite… quelques mois plus tard, malgré tout l’argent du monde, leur amour s’effrite sans raison apparente. Ou plutôt c’est ce que j’aurais dit si j’étais un homme comme Hadi, absolument incapable de la moindre observation, quand il est parfaitement évident que Reem traverse une crise qui la ronge de l’intérieur. Lilmout (ou Till Death à l’international…) nous suggère en effet que la dépression, le traumatisme et/ou la culpabilité bouffent la jeune femme, laquelle passe des nuits sans sommeil dans la neige pour anesthésier son âme, tandis que son époux se demande pourquoi elle ne lui montre plus d’affection bien au chaud depuis la fenêtre. Mais, connard, tu vois pas qu’elle va mal ?! Insupportable. Aussi il n’est que très modérément étonnant que, à la faveur d’un voyage, Hadi tombe sous le charme d’une inconnue, Sahar, dont le sort fait qu’il croise le chemin plusieurs fois. Cèdera-t-il à la tentation ?
    Le charme principal de cette série libanaise, c’est… son générique, pour commencer. Pas loin de 4 minutes d’un tango sombre en ouverture de série, ça m’a ravi le coeur sans prévenir, j’étais pas prête ! Lilmout mise beaucoup sur l’ambiance en règle générale, que ce soit pendant le générique ou après, mais ces premières minutes qui tentent de raconter une histoire cryptique, dont on suppose qu’elle dit quelque chose de la série, étaient juste incroyables. Mais pas juste parce que c’est un joli générique… Celui-ci met en effet en opposition deux femmes (Reem et Sahar), l’une mariée et l’autre non, à un homme (Hadi) qui ne semble pas capable de se décider. Le trio se toise, se jalouse, s’étreint, se repousse… et finalement les deux femmes se choisissent. SE CHOISISSENT ! Ce qui aurait pu passer pour une simple métaphore tombe un peu à l’eau quand, comme moi, on a vu le matériel promotionnel, et surtout, on a lu des synopsis de la saison 3 pendant le Ramadan (parfaitement accidentellement, faut-il le noter)… Je savais donc qu’à un moment, les deux femmes ont effectivement pris la fuite ensemble ! Mais à quel titre ? Est-il possible que l’une des séries libanaises les plus populaires de ces dernières années mette en scène une relation romantique entre ces deux femmes ? Je n’ose y croire. Mais j’ai très envie d’y croire.
    Bien évidemment, le premier épisode ne nous le dira pas. Certainement pas avec cette mise en place ténébreuse, insistant à la place sur les tourments intérieurs de Reem (sans nous en donner la clé), l’ego blessé de Hadi, et, plus tard, lors d’une conversation enfumée dans un bar, la certitude confiante de Sahar. Puisque Lilmout ne voulait rien me confirmer encore, alors j’ai passé le reste de l’année à essayer de faire main basse sur les épisodes suivants. Il ne m’en manque plus que deux, deux ! et je pourrai commencer mon marathon. J’ai hâte. Je vais potentiellement être déçue, très possiblement, mais j’ai hâte.

    Trigger warning : violences domestiques, harcèlement sexuel.

    Safe Home (2023)

    Phoebe n’a aucune idée de ce qui l’attend, lorsqu’elle rejoint la petite équipe d’un centre spécialisé dans l’accueil, le conseil juridique et l’accompagnement de victimes de violences domestiques en tant que chargée de communication (un poste qu’elle est la première à occuper). Pour elle, c’est surtout l’opportunité de s’éloigner du monde politique, et en particulier du mari de sa patronne ; mais évidemment elle est convaincue de bien faire. Sauf que rien ne l’a préparée à cet univers et ses problématiques…
    A la base j’avais prévu de parler de Safe Home bien plus tôt dans l’année, dans une review de saison qui aurait dû être plutôt simple à rédiger (il s’agit d’une mini-série en 4 épisodes), mais il m’a fallu tempérer mon enthousiasme pour trois raisons. La première, c’est que, eh bien, le sujet est rude, de toute évidence ! Phoebe n’ayant qu’une connaissance très superficielle des enjeux, elle va multiplier les faux-pas, mais cela implique pour la série de la confronter autant que possible à des choses violentes. Et donc, nous aussi. La deuxième est qu’au printemps quand la série est sortie sur les écrans australiens, je passais un sale moment à titre personnel, et qu’il m’était impossible de me concentrer sur pas mal de choses ; le sujet de Safe Home n’aidant pas à se mettre du baume au coeur. La troisième est plus retorse : Safe Home m’a évoqué une autre série, plus longue, que je voulais reviewer en détail depuis longtemps, et ma quête pour mettre la main sur cette série a finalement pris le pas sur mon visionnage de Safe Home. Je me suis promise d’y revenir, toutefois ; d’autant que je me régale toujours autant non seulement de la présence d’Aisha Dee (déjà au générique de Sweet/Vicious, s’il vous souvient), mais aussi de Mabel Li (fabuleuse dans New Gold Mountain). Dés son premier épisode et, je le confesse, dans le second que j’ai également regardé, Safe Home trouve un équilibre insoupçonné entre son envie de parler d’un sujet difficile, sa capacité à créer des retournements de situation saisissants, et son désir brûlant de se montrer aussi pédagogique que possible (des phénomènes comme la respectabilité ou l’emprise sont par exemple démontrés dans l’épisode introductif). Pour le reste, j’espère bien qu’on en reparlera plus tard. A un moment.

    War: Wrath and Revenge (2023)

    C’est un peu triste que Netflix propose cette série, produite par Mo Abudu et sa compagnie EbonyLife (sous contrat avec la plateforme), sans donner vraiment à ses abonnées non-nigérianes le contexte qui s’impose. Il s’agit en effet d’un spin-off de la série à succès Sons of the Caliphate ! Enfin bon, je suppose que c’est déjà bien d’avoir accès à des séries produites au Nigeria, on va pas encore en plus exiger de la cohérence ; probablement que Netflix n’envisage pas que quiconque tente la série par hasard ou curiosité.
    Je n’ai hélas pas eu la chance de voir Sons of the Caliphate (Netflix a pourtant proposé la saison 2 à l’international à l’époque, mais pas au point qu’elle me parvienne…), mais pour résumer, disons que c’était un soap se penchant sur la politique dans la région de Kowa, au Nord du pays. Nuhu Bula était l’un d’entre eux ; quand War: Wrath and Revenge démarre, il se présente désormais aux élections gouvernorales dans le Nord du pays. Il le fait presque à contre-coeur, encouragé par sa femme Binta qui est bien plus fine stratège que lui et également bien plus ambitieuse. Nuhu est moyennement motivé, surtout qu’il se présente face au Gouverneur Sanusi, un homme véreux en place depuis des années et qui a le soutien de Khalifa, un ancien ami de Nuhu et actuellement l’emir de la région. L’exposition des enjeux se fait ici sur fond de violence : des chercheurs de diamants attaqués par des bandits, une tentative d’assassinat… on n’est pas là pour déconner.
    Mais le plus frappant, c’est combien War: Wrath and Revenge assume sa continuité avec la série originale ; l’exposition y est réduite au minimum, partant du principe que tout le monde sait de quoi il s’agit. A un tel point qu’il est légitime de se demander si on n’assiste pas à une saison 3 de Sons of the Caliphate, tout simplement ; le changement principal étant que le spin-off dispose d’épisodes beaucoup plus courts que la série originale. Sous cet angle, il me paraît difficile de recommander War: Wrath and Revenge pour quelque autre raison que la curiosité pure.

    Et, ma foi, c’est ainsi que se finit le dernier Take Five de l’année, et avec lui la dernière review de l’année. Pendant que je poste mon récapitulatif traditionnel, n’hésitez pas à me parler de ce que VOUS avez vu en décembre, ou pendant l’année 2023, qui mériterait d’être mentionné une dernière fois avant qu’on passe à l’année suivante !
    D’ailleurs, qu’est-ce qu’on en fait, des Take Five ?

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  • Les dés sont jetés

    31 décembre 2023 à 23:27 • Telephage-o-thèque •

    L’année 2023 touche à sa fin, et elle aura été parfaitement épouvantable. Pourtant, une chose s’est produite qui en a relevé un peu le niveau depuis les abysses du désespoir où elle trempait… j’ai enfin réalisé un projet de longue date de retenter le jeu de rôle. Cet appétit, dont je parle cycliquement depuis des années (principalement sur les réseaux sociaux), a mis 20 ans avant de finalement être… ma foi, pas rassasié, ou du moins pas complètement. Bien l’intention de remettre le couvert en 2024, pour commencer ! Mais en tout cas, m’a permis de gratter quelque chose qui me démangeait depuis bien longtemps.
    Dans la foulée, les vannes se sont ouvertes. Et c’est comme ça que pour la première fois, je me suis également penchée sérieusement sur Critical Role, l’émission de jeu de rôles d’une bande d’actrices de doublage un peu nerds sur les bords.

    …Par conséquent, je me suis mise également à la série animée, The Legend of Vox Machina, lancée en 2022 après une campagne Kickstarter entrée dans les annales, et dont une 3e saison est actuellement en préparation. Et j’avoue qu’outre mon intérêt croissant pour le JdR, j’ai regardé The Legend of Vox Machina en grande partie parce que je n’ai jamais regardé une série tirée d’un actual play, et que le défi d’adaptation me fascinait.

    C’est que, le jeu de rôle, à la base, c’est quoi ? C’est en grande partie de l’improvisation… soit précisément ce que l’on ne trouve pas dans la fiction. Et certainement pas animée ! Vous savez, le truc qui exige des mois de planification, de production, et de doublage…? Difficile d’improviser dans ces circonstances. Outre le genre télévisuel lui-même et ses impératifs de production, The Legend of Vox Machina se trouvait en outre face à un défi supplémentaire : présenter non seulement un univers familier, mais aussi des protagonistes aimées, et un arc narratif déjà connu (en-dehors des deux premiers épisodes, dont l’intrigue était inédite pour les spectatrices des actual plays hebdomadaires ; les raisons importent peu ici), celui des Briarwood de Whitestone. Il fallait donc qu’en plus de changer complètement de genre et de mode de production, The Legend of Vox Machina satisfasse les (nombreuses) donatrices de la campagne Kickstarter, délivre ce qu’il faut de références et de clins d’œil pour rester fidèle aux puristes… tout en essayant d’attirer, si possible, quelques abonnées d’Amazon Prime Video, bien entendu.
    Le cahier des charges était donc bien chargé, d’où ma curiosité. Globalement, la première saison de The Legend of Vox Machina trouve un plutôt bon équilibre entre tous ces tiraillements.

    Alors, bien-sûr, comme dans toute adaptation, des choix ont été faits ; c’est le contraire qui aurait été étonnant.
    En particulier, cette première saison ne dure « que » cinq heures, condensant environ la cinquantaine d’heures de jeu précédemment en douze épisodes de fiction. Il était donc inévitable de tailler dans le gras, et en grande partie souhaitable de toute façon : ça a du sens quand on sait combien une partie de jeu de rôle inclut de discussions autour de la mécanique du jeu, de calculs autour des combats, ou plus simplement, de longs débats sur les choix du groupe. Une grande partie de tout ça n’a aucune raison d’être transposée dans une fiction linéaire. Ce serait un concept, cela dit, que de mettre l’intrigue en pause et regarder les scénaristes se demander où envoyer les personnages ensuite, je suis à peu près certaine que Moonlighting a dû proposer une version de cette blague dans les années 80 d’ailleurs, mais ici on n’est pas là pour faire dans le meta à ce point.
    Cela pose, cependant, parfois des problèmes de rythme : on a par moments l’impression que les choses vont trop vite, et que les personnages prennent des décisions brutales (le changement d’opinion du groupe d’aventurières dans le premier épisode, par exemple, n’est pas du meilleur effet). Certaines évolutions donnent parfois le sentiment de n’avoir pas été « méritées » grâce à un processus interne aux protagonistes, qui nous serait détaillé dans beaucoup d’autres séries. Certaines choses doivent se résoudre vite si on veut clore l’arc narratif avant la fin de la saison. Encore une fois, The Legend of Vox Machina s’appuie sur une histoire qu’une grande partie de ses spectatrices connaissent déjà, elle peut se permettre des raccourcis… mais certaines transitions sont quand même un peu abruptes.

    Sur un sujet voisin, The Legend of Vox Machina pâtit aussi par moments de son besoin (encore une fois, très compréhensible) de faire un peu tout en même temps, et surtout, de faire parler un peu tout le monde.
    Des personnages comme Grog ou Scanlan, qui se caractérisent dans la série animée essentiellement pour leur côté comic relief, n’ont souvent pas grand’chose à se mettre sous la dent dans l’intrigue principale. Or, on n’a pas trop le temps pour des intrigues secondaires, mais on ne peut pas non plus écarter deux des sept personnages qu’adorent les fans de Critical Role. Alors que faire ? Comment s’assurer que deux des huit acteurs ne vont pas être délaissés ? Eh bien, on leur fait cumuler les one liners, à tout moment de l’épisode, et ça donne des scènes pendant lesquelles parfois la tension dramatique voire la dimension tragique peuvent être amoindries voire perdues. Que voulez-vous, il fallait absolument rappeler que Grog, un barbare violent pas très malin, est un barbare violent pas très malin… parce que sinon il n’a rien à dire du tout pendant la saison.

    Honnêtement, ces passages un peu moins enthousiasmants, je ne vois même pas comment The Legend of Vox Machina aurait pu les éviter. Ce n’est pas une question de flemme, ou de viser le plus petit dénominateur commun, ou de se dire que le public des séries animées n’est pas capable de capter certaines nuances… non, rien de tout ça. C’est, et je sais que je l’ai déjà dit mais je veux vraiment insister là-dessus, inhérent aux problématiques de l’adaptation. Pour les éviter, il aurait fallu une saison de 24 épisodes… mais c’était déjà un crowdfunding d’exception, faut ptet pas non plus pousser.
    En un sens, se heurter à ses écueils est la marque de scénaristes qui ont compris les enjeux du passage à la série animée. Si ces problèmes avaient été résolus, d’autres bien plus graves se seraient profilés à leur place.

    Malgré ces quelques inconvénients, la série s’en tire quand même très bien.
    Le cast est un peu bridé, là encore, par la force des choses : qui dit pas d’improvisation et peu de temps pour explorer la nuance de certaines émotions ou étapes de l’intrigue, dit que nécessairement, il y a une part de la personnalité qui disparaît dans la manœuvre. Mais les actrices connaissent si bien leurs personnages que les aventurières de Vox Machina ne sont pas des coquilles vides pour autant. L’alchimie n’est en tout cas plus à démontrer, et elle fonctionne malgré les obstacles.
    Les scènes de baston sont divertissantes (malgré l’absence complète de hasard, elle aussi inévitable bien-sûr, mais qui forcément change la façon dont on perçoit les scènes d’action et leurs enjeux), et d’ailleurs, me faut-il préciser, extrêmement gore. Si je m’attendais à ce que The Legend of Vox Machina soit parfois graveleuse, et que son vocabulaire soit émaillé de jurons, en revanche je n’avais pas anticipé que je verrais autant de corps déchiquetés, écrasés, empalés, brûlés vifs, ou, euh, qu’est-ce que j’oublie ? Ah oui, éviscérés, aussi. Le monde de Tal’Dorei est cruel et brutal, et même si The Legend of Vox Machina se réclame d’une certaine légèreté, elle ne laisse personne oublier que se lancer dans l’aventure, c’est miser sa vie. Certains passages filent vraiment les jetons, aussi, et il y a notamment une scène de nuit à Emon, notamment, qui crée une véritable stupeur digne des meilleurs films d’horreur. Et puis bien entendu, il y a le Sun Tree… si vous ne savez pas de quoi il s’agit, alors j’ai envie de dire que la fin de l’épisode 5 vaut à elle seule de tenter la série.
    D’une manière générale, j’ai vraiment beaucoup apprécié la réalisation. Il y a certains plans ou certaines « manœuvres de camera » qui ont vraiment du mérite. Je suis moyennement fan du recours à la « fausse 3D » (c’est-à-dire les outils de la 3D mais l’apparence de la 2D) pour les scènes d’action, mais ça ne signifie pas qu’elle est mal intégrée, juste que ça n’a jamais eu ma préférence. Toutefois, pour certaines scènes particulièrement agitées avec beaucoup de personnages, on comprend aisément qu’elles présentent des avantages par opposition au dessin à la main.

    Il y a donc pas mal de concessions inévitables dans la première saison de The Legend of Vox Machina… mais au final, on ne perd pas au change. La série délivre plus ou moins ce qu’on attendait d’elle : une extension de l’émission sur Twitch/Youtube, ou une porte d’entrée. En tout cas, certainement pas une solution de remplacement.
    Pour un projet de cette ampleur, The Legend of Vox Machina parvient à préserver un peu d’âme, et remplit en outre ses objectifs en matière de clins d’œil de toutes sortes. Il est tout-à-fait possible de regarder et apprécier sans avoir les références, attention ! Mais c’est difficile de nier qu’une partie de la tendresse se crée aussi au travers de ces coups de coude à la version actual play.

    En 2023, j’ai également commencé à parler de séries d’animation dans ces colonnes, et je me tâte toujours quant à déterminer dans quelle mesure je souhaite poursuivre sur cette lancée. The Legend of Vox Machina a bien gagné sa place parmi les exceptions, en tout cas.

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  • Tout roule

    30 décembre 2023 à 23:55 • Telephage-o-thèque •

    Il y a quelque chose dans les fictions portant sur les 30 Glorieuses qu’aucune série sur une autre période de l’Histoire n’arrive à effleurer. Un optimisme, peut-être. Une nostalgie, sûrement aussi. Ces séries sont rarement cyniques, et c’est particulièrement vrai de celles qui s’intéressent à un symbole ou un autre du boom économique, comme c’est le cas de Carmen Curlers.
    La série danoise doit son titre à des bigoudis chauffants, une innovation inédite imaginée dans les années 60 et qui a réellement existé, et dont la popularité a eu tôt fait de remplacer l’usage des papillotes, encombrantes et peu pratiques. Bien qu’ayant changé certains détails (et noms !) pour s’autoriser quelques libertés, la série n’en finit pas de se fasciner pour l’esprit d’innovation qui se cache derrière l’invention. Sans cynisme.
    Et c’est un peu le problème, en fait.

    On est en 1963, et deux personnages commencent à se croiser sans pour le moment se connaître.
    Le premier est Axel Byvang, propriétaire d’un magasin d’électroménager qui, bien-sûr, est en pleine croissance alors que les ventes de téléviseurs explosent, et qui commence à assurer à son épouse Tove et leur jeune fils Finn une vie confortable. Axel a grandi dans une ferme crasseuse, et si son statut se porte mieux que celui de ses parents aujourd’hui, c’est par un concours de circonstances tel qu’il relève du miracle. Mais c’est aussi parce qu’il est animé par un appétit de revanche qui prend ses racines dans une enfance douloureuses en pensionnat ; ce traumatisme le motive à essayer de s’enrichir, même si parfois il ne se rend pas compte que son obsession pour investir dans l’invention du siècle peut effrayer sa femme.
    La seconde est Birthe Windfeld, femme d’un fermier et mère d’une famille nombreuse. Elle vit à la rude et s’en est parfaitement accommodée (le premier épisode ne s’étend pas dessus, mais on peut imaginer qu’elle n’a jamais rien connu d’autre), en revanche elle réalise que, si ses deux filles lui ressemblent pas mal, son fils benjamin, Svend, est en revanche plus gêné par leur condition très humble. Cela crée souvent des conflits avec son père, et Birthe essaie à la fois de donner tout ce qu’elle peut à son fils pour le rendre heureux, et temporiser avec son mari qui est prompt à la colère (mais a priori pas violent).

    Très premier degré, Carmen Curlers raconte progressivement comme Axel, là encore par hasard, tombe sur une annonce de la part d’un inventeur qui tente d’imaginer des bigoudis électriques et a besoin pour cela d’un investisseur. Obnubilé par cette trouvaille, même si pour le moment elle ne fonctionne pas vraiment, Axel se jette entièrement dans le projet, au risque d’effrayer Tove… et de faire s’évaporer leurs économies. Pendant ce temps, Birthe tente comme elle peut de concilier les attentes de son fils adolescents avec les réalités de son quotidien. En faisant en sorte qu’Axel et Birthe se croisent à plusieurs reprises, et en s’appuyant sur une voix-off qui promet que leurs vies vont bientôt être transformées à jamais (par les bigoudis, comprend-on), Carmen Curlers veut raconter une jolie histoire de succès…
    …Et le premier épisode passe complètement à côté de plein de choses pour accomplir cela.
    Je lis que Carmen Curlers (sortie en 2022, et déjà diffusée sur plusieurs continents, donc il y a pas mal de presse à lire à son sujet) est l’histoire d’une quête d’indépendance, non seulement pour Axel l’ambitieux mais aussi pour Birthe et plusieurs autres femmes qui, grâce aux fameux bigoudis, vont découvrir un statut socio-économique inespéré. Fort bien, ravie pour elle. Mais en nous vendant cet idéal, Carmen Curlers se prive de choses plus ambivalentes, comme par exemple explorer les standards de beauté des années 60, par exemple. La féminité au sens large ferait aussi un excellent sujet pour la série, ne serait-ce que parce que Birthe est une des protagonistes principales, et qu’il s’agit d’une femme pragmatique et peu coquette, et qu’elle est sur le point de s’investir dans le sort d’un produit de beauté ; mais il n’y a que très peu de mise en place sur cet aspect, le premier épisode préférant se concentrer sur son fils et son envie de plaire à la gente féminine, là où ses filles (l’une étudiante, l’autre encore enfant) auraient également proposé des miroirs intéressants.

    Et la question que je me pose, à cause de Carmen Curlers mais aussi en raison de la diffusion en ce moment de la série suédoise Vår tid är nu par arte, c’est : est-ce qu’on n’a pas collectivement passé l’âge des séries sur les Trente Glorieuses ? Bon, vu les succès d’audiences de l’une ou de l’autre (et pas que d’elles, d’ailleurs), oui, clairement. Il y a un public pour ces séries en 2023 (sur le fil !). Mais au-delà de la réception du public, sur le fond, je me questionne parce que ce sont quand même, très largement, des séries  de Boomer (et pour cause). On n’y remet rien en question, on n’y dit rien d’inconfortable, et on continue d’y vendre de la fiction historique « à la papa » qui parle d’innovation mais n’innove en rien. Dans Carmen Curlers, on vend un projet commercial qui en réalité n’a amélioré le quotidien des femmes que parce qu’il avait été passablement compliqué par des critères de beauté stricts mais absurdes ; on y vent des bouts de plastique avec de la cire dont le plus grand fait d’armes est, comme s’amusent à le répéter tous les sites évoquant la série et donc les bigoudis, d’avoir été l’une des entreprises à la plus grande croissance il y a 70 ans de cela. On raconte une fois de plus le Destin d’un homme ombrageux, parfois à la limite de la violence (il s’arrête juste à temps dans ce premier épisode) mais qui est de facto exonéré par la série parce qu’il a souffert et qu’il est un « visionnaire ». Et peut-être que justement, il est temps de porter un regard plus cynique, ou au moins doté d’un peu plus de recul, à présent. Peut-être qu’il y a quelques années j’aurais pu, avec un petit effort, apprécier ce que fait Carmen Curlers.
    Mais aujourd’hui ? Je sais pas, je me dis qu’il n’y a pas que les bigoudis de mémé qui appartiennent au passé.

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  • Ne nous sous-estimez pas

    28 décembre 2023 à 21:14 • Dorama Chick •

    D’ici la fin de cette review, je fais le pari que je vais vous faire changer d’avis sur la série du jour. Et attention, on part de loin.

    Zeicho accompagne en effet un agent du service municipal chargé de procéder au paiement de dettes d’impôt ou, le cas échéant, à des saisies (« zeicho » désigne cela : un agent du recouvrement). Parce que Soichirou Aiba est payé par la ville de Miyukino, ce sont des impayés de taxe d’habitation et d’impôt foncier qui forment l’essentiel de son travail. Alors vous allez me dire qu’on a vu plus passionnant qu’une série sur un fonctionnaire gratte-papier, que ça évoque des choses un peu angoissantes (voire de mauvais souvenirs), et que tout le monde déteste ce genre de profession.
    Et encore, vous me le diriez avant d’avoir lu les trigger warnings du jour :

    Trigger warning : tentativeS de suicide, suicide.

    Certes.

    Voici mon contre-argument.

    Première des choses : si vous craignez l’ennui, rassurez-vous. Zeicho trouve le moyen de rendre les choses dynamiques parce qu’une partie seulement de l’intrigue se déroule dans les bureaux des services de recouvrement.

    Comme le suggère le matériel promotionnel, les agentes du service sont souvent amenées à rendre des visites aux administrées qui ont accumulé des dettes auprès de leurs services. Souvent, c’est uniquement pour leur demander poliment de payer, parfois c’est pour procéder à une saisie, mais c’est plus rare.
    Le premier épisode a une explication plutôt pédagogique à la raison pour laquelle la saisie n’est pas une tâche par défaut, d’ailleurs : ce serait dépenser de l’argent public (en main d’œuvre, véhicules, etc.) inutilement que de procéder à une expertise complète d’un foyer pour chaque impayé, quand on sait que l’argent n’est pas toujours recouvré immédiatement. Si la personne ne peut pas payer, et ne possède rien de valeur (d’autant que certains objets du quotidien ne peuvent être confisqués), c’est même l’équivalent d’un abus de bien public que d’investir trop de moyens dans une intervention. Donc les agents se déplacent pour aller sonner, si possible discuter avec la citoyenne concernée, attester de la situation financière, et essayer de régler les choses à l’amiable en priorité.
    Bon, et le fait que le Japon privilégie encore le paiement de grosses sommes en liquide au 21e siècle favorise aussi ce genre de démarche : tout service public impliquant de l’argent conduit à des échanges humains. C’est un peu plus respirable que notre système français, qui consiste à appeler le centre des impôts local entre 14h30 et 16h deux jours par semaine, tomber sur un robot téléphonique, être mise en attente, et abandonner au bout de 30 minutes pour finalement envoyer un email qui ne trouvera réponse que dans 6 mois.

    Qui plus est, Soichirou Aiba est un personnage qui est plus attentif que la moyenne de ses collègues à prendre soin des citoyennes. Il a une relation non seulement polie, mais quasiment amicale avec elles ; il ne vient pas les voir que pour la paperasse, mais s’intéresse sincèrement à elles ; il s’inquiète non seulement du recouvrement des dettes, mais aussi des conditions de vie auxquelles il assiste. C’est en outre quelqu’un qui a lâché son travail au ministère des Finances à Tokyo pour prendre ce job dans une petite ville, donc qui a troqué un statut enviable pour ce travail, ce qui suggère une forme de vocation. Quand la série commence, il est en train de former Hanako Doumeki, une nouvelle recrue de son service qui est très rigoureuse, mais peut paraître froide de prime abord. Aiba va veiller à lui enseigner non seulement de suivre la procédure, de rester attentive à l’argent public dépenser dans le recouvrement de dettes, mais aussi, parfois, d’aller un peu plus loin pour le bien des administrées. La bonne nouvelle, c’est que Doumeki est plus humaine qu’elle ne paraît.
    De fait, le premier épisode suit un double cas qui permet très didactiquement de montrer que Zeicho présente des services de recouvrement qui ostensiblement sont durs avec les mauvais payeurs, mais compréhensifs avec les gens réellement en difficulté. C’est illustré ici par deux citoyens qui expliquent ne pas pouvoir régler tout ou partie de leur dette : un confiseur et le patron d’un restaurant traditionnel… mais est-ce vraiment le cas ? Dans quelle mesure s’agit-il d’un problème d’argent plutôt que d’un manque de volonté ? La fraude est-elle totalement à écarter ? Et dans tous les cas, quelles solutions pour obtenir les sommes dues à la ville ? Aiba et son équipe (tout le service se déplace dans certaines circonstances, mais évidemment pas pour rien) vont devoir faire preuve de perspicacité pour prendre la mesure de la situation de chacun des deux hommes. Et attention, ça va donner une intrigue très douloureuse, d’où les trigger warnings.
    Bref, Zeicho insiste sur une forme de Justice sociale. Il ne s’agit pas de pousser les citoyennes au désespoir, mais de s’assurer que tout le monde paie sa part, et que les services publics continuent d’être financés. L’insistance régulière de Zeicho sur ce point, et plus largement sur le fait qu’en tant que fonctionnaires, les employées des services du recouvrement sont une dépense publique et doivent donc mesurer leurs interventions à l’aune de ce qu’elles rapportent, est vraiment quelque chose qui est souligné à plusieurs reprises pendant l’épisode inaugural.

    Alors forcément, si, forcément, vous allez me dire que les chances pour que ça se passe toujours si calmement que ça en réalité sont assez minces ; que les services gouvernementaux comme municipaux sont rarement aussi compréhensifs lorsqu’il s’agit d’argent, et en particulier de l’argent des pauvres ; et que même si c’était le cas, ça ne rend l’expérience que très modérément plus vivable. J’entends même certaines voix souligner que ça ressemble un peu à de la propagande d’État (même si Zeicho n’est pas diffusée par la télévision publique). Et je ne le conteste même pas.
    Vous pourriez même arguer que le ton moitié drame, moitié dramédie de la série (sûrement hérité du manga original), est un défaut supplémentaire. En effet, Zeicho se vante de suivre les employées du service de recouvrement, et plus spécifiquement le Pôle 3 auquel Aiba et Doumeki appartiennent, jusque dans des détails aussi triviaux que leurs conversations à la cantine, leurs potins à l’équivalent de la machine à café (notamment sur le nouvel adjoint du maire qui doit bientôt arriver), ou leurs blagues de la vie quotidienne au bureau. Ce qui n’a pas pour conséquence que de les humaniser, mais aussi plus prosaïquement d’apporter des respirations dans la narration, qui sinon serait bien trop sérieuse, comme vous vous en doutez. Cela ne plaira pas à tout le monde, d’autant que des millions de séries japonaises avant Zeicho ont déjà proposé strictement le même humour et les mêmes dynamiques de groupe. Un jour, je vais commencer un site internet « does the fat guy love food » sur le modèle de « does the dog die« , je pense.

    Eh bien, je persiste à dire qu’une série comme Zeicho est ultra-nécessaire.
    Voilà donc pourquoi : ce que présente Zeicho sous couvert de ses histoires de taxes, de vie de bureau, et de machins, c’est ce qu’on réclame à la télévision depuis des années. Si-si.

    Et en particulier, c’est ce qu’on réclame à chaque fois qu’on parle de l’importance massive de la fiction policière dans les constructions collectives autour de la police. Chaque fois que l’on s’interroge sur l’omniprésence du travail d’enquête dans les histoires que nos télévisions nous racontent sur notre propre société. Chaque fois qu’on parle de copaganda. Chaque fois qu’on se demande ce que la télévision pourrait faire autrement.

    Zeicho est une série de travail social. Ce n’est pas la première, mais dans un paysage audiovisuel (national autant qu’international) complètement phagocyté par la fiction policière, ça reste plutôt minoritaire.
    Il y a quelque chose de très intentionnel dans la façon dont ces fonctionnaires (qui d’ailleurs rappellent assez ouvertement qu’elles ne sont pas des policières) racontent aux spectatrices un autre rapport aux autorités. Un rapport basé sur l’idée que ce qui fait tourner une nation, c’est-à-dire les impôts, constitue un cycle où chacune doit jouer son rôle. Un rapport basé sur l’honnêteté à tous les égards, et la transparence. Un rapport explicitement basé sur le principe « kouhei kousei« , soit : « équitable et juste ». Nulle citoyenne n’est au-dessus de la loi ni exemptée de participer à la société ; mais chacune mérite l’aide de l’État lorsque les circonstances s’y prêtent.
    Ainsi, au risque de vous spoiler, l’intrigue introductive de Zeicho se conclut par une saisie avec mise en demeure de payer, et une offre de facilité de paiement (l’exonération n’a pas l’air de faire partie du code des finances publiques au Japon). Parce que l’un de ces hommes personnifie kouhei, et l’autre kousei.
    En 2020, j’avais écrit un thread sur Xwitter (je n’étais pas active comme maintenant sur Mastodon) dans lequel je parlais justement de promouvoir la fiction sur le travail social comme alternative à la fiction policière. Encore une fois, ce n’est pas que ces séries n’existent pas, mais elles sont rares et beaucoup moins mises en lumière. On est ici en plein dedans, et assez près de ce qui me semble à la fois mainstream et courageux (un difficile équilibre !). D’autant que Zeicho emploie, en partie, les outils des séries policières populaires ! Des affaires procédurales, des investigations pour comprendre le motif et les moyens des citoyennes, des interventions… tout ça, c’est tiré tout droit de la formule de la fiction policière. Mais sans flic, et sans une grande partie de ce que le travail policier implique moralement et socialement.

    Je n’ai pas encore regardé les épisodes suivants (j’avais l’intention de le faire ce mois-ci, mais avoir été malade comme un chien la semaine dernière a largement donné un coup de canif dans mes plans téléphagiques de décembre…), mais je gage que d’autres cas vont ultérieurement permettre à Zeicho de poursuivre sur cette lancée. Et d’explorer le nombre infini de nuances entre le refus mal intentionné de paiement et l’impossibilité désespérée de paiement, pour nous montrer que ces histoires d’impôts, c’est plus que des factures à régler : c’est un projet de société.
    Alors, même pas un peu convaincues ?

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  • Avec intérêt

    27 décembre 2023 à 20:33 • Dorama Chick •

    17 milliards de rupiahs ont disparu des comptes de UBI, ou Universal Bank of Indonesia. Cette institution bancaire a résisté à toutes les crises des deux dernières décennies (et ça commence à faire beaucoup de crises), et sa stabilité est capitale. Alors certes, ça n’est pas 17 milliards de dollars, mais ça mérite quand même d’être étudié. Le détective Makarim, spécialiste des affaires financières, est dépêché avec son équipe pour enquêter au sein de la banque en toute discrétion. Où est passé l’argent ? Il est d’autant plus difficile de le tracer qu’il a été converti en cryptomonnaies…
    Après deux fausses pistes, il faut se rendre à l’évidence : les détournements de fonds viennent de l’intérieur. Makarim et ses subordonnés commencent donc à interroger plusieurs employées de UBI, dans l’espoir de mettre la main sur la personne responsable de ces malversations.

    Trigger warning : tentative de suicide, auto-mutilation, aggression sexuelle, addiction.

    …Sauf que Rencana Besar n’est pas une série policière, ou disons, pas principalement. Bien que suivant en grande partie le point de vue de l’enquêteur Makarim, la série a un parti pris qui, contre toute attente, n’est pas nécessairement celui du maintien de l’ordre. En fait, Rencana Besar a tout de l’appel à la révolte !

    Parfois, la première scène d’une série nous en dit plus sur ses intentions que beaucoup des suivantes, et c’est le cas dans Rencana Besar, qui démarre par une manifestation devant les portes de UBI. Des dizaines, peut-être même quelques centaines de citoyennes, sont amassées devant les grilles de l’établissement bancaire, et scandent leur fureur. Nous n’avons encore aucun élément de contexte sur l’intrigue, et pourtant difficile de ne pas comprendre leur sentiment général à travers leurs revendications : moins de corruption, plus de justice sociale, moins de pouvoir pour les actionnaires, refus du mélange entre le monde bancaire et le monde politique… Ces slogans (basés sur la structure et les termes du Pancasila) sont approuvés et répétés par la foule en colère, à l’initiative d’un homme équipé d’un mégaphone. A quelques mètres de là, pourtant, un tireur se met en position…
    Rencana Besar opère alors ce qui est désormais une obligation légale pour une série, c’est-à-dire un retour dans le passé de plusieurs mois. C’est à ce moment-là que Makarim est donc informé de la disparition des 17 milliards (qui équivalent à un peu plus d’1 million d’euros), et commence son enquête.

    Et au début, vraiment, tout semble simple : les analystes de son équipe trouvent rapidement la trace de deux comptes en banque de UBI ayant procédé à des mouvements de fonds équivalents à 17 milliards, qui laisseraient présager que les coupables ont été trouvées. Mais vu les arrestations qui s’en suivent dans des habitations relevant plus de bidonvilles que de manoirs, il semble assez évident que les deux pauvres personnes âgées dans la salle d’interrogatoire de Makarim ne sont que des paravents. Ce genre de choses n’est pas le produit d’une intervenante extérieure ; il faut avoir des accès internes aux serveurs de la banque pour réussir un coup comme celui-là.
    Alors l’enquêteur se déplace dans les bureaux de UBI, et, aidé par le manager Agung, entreprend d’interroger le personnel : service informatique, service de sécurité, guichet même… toute personne ayant eu accès aux ordinateurs de l’établissement, ne serait-ce qu’une fois, est suspecte.

    Cette suite d’interrogatoires est, au passage, une très élégante façon pour Rencana Besar de procéder à une exposition détaillée de plusieurs de ses personnages. Structurellement, c’est très fin : tandis que la série nous présente les protagonistes une par une, déclinant leur identité, leur rôle au sein de la banque, et leur alibi, tout ça pour le bénéfice de l’enquête… eh bien Makarim prend des notes complémentaires qui nous sont montrées plus discrètement, et donnent des indications subjectives sur leur personnalité et leurs enjeux individuels tels que perçus sur le moment. Tout ça sans que les spectatrices aient l’impression de longues présentations bavardes, puisque chaque entretien fait aussi progresser l’enquête ! C’en est quasiment orgasmique, cette fluidité dans l’introduction à la fois de l’intrigue et de ses personnages. Le genre de truc qui devrait figurer dans un cours d’écriture ou un guide pour scénaristes ; j’en suis émoustillée rien qu’à y repenser. Je regarde des centaines de pilotes par an, j’aimerais que tous aient cette agilité. Allez, rien que la moitié et je serais déjà satisfaite. On dit un quart, et j’arrête de me plaindre des retours dans le temps ?
    Bref, Makarim essaye de cerner le profil des employées qui défilent devant lui, et… il n’est guère plus avancé. Par exemple Rifad, le syndicaliste des RH méfiant envers sa hiérarchie : il a l’air rebelle, mais c’est parce qu’il défend les intérêts des employées de la banque. Ou la responsable du marketing Amanda, bon, elle aime bien avoir l’air élégante, mais elle n’a pas un train de vie dispendieux et son sac de luxe est en fait une vulgaire copie. Ou Reza, le jeune agent des services informatiques ; il a l’air nerveux et hésitant, mais il ne ferait pas de mal à une mouche. Quant à l’auditrice interne Ayumi qui, la première, a tiré la sonnette d’alarme, elle a l’air trop psychorigide pour ne serait-ce qu’imaginer une chose pareille, et n’a sûrement été placée sur la liste des suspects que pour de mauvaises raisons.
    Concluslion : il n’y a aucune chance qu’une de ces personnes ait monté à elle seule un détournement de fonds d’une telle ampleur. Mais alors, qui ?

    …Avant la fin du premier épisode, la série a décidé de nous délivrer la réponse.
    Rencana Besar
    nous fait sentir qu’elle n’a aucune intention de se comporter comme n’importe quel polar. Au contraire : elle est du côté des employées, du côté des manifestantes, du côté du peuple. Cela se sent dans la révélation de son cliffhanger de fin d’épisode, et plus largement, dans son souhait de ne pas être une simple enquête policière.
    En basculant son angle, elle change son traitement. Rencana Besar commence à être une série non pas sur une enquête un détournement de fonds, mais une enquête sur la banque UBI. Tout naturellement, UBI devient alors la métaphore de tout ce qui cloche dans le système bancaire, à commencer par le fait que son patron, le puissant Surya Nawasena, soit candidat à l’élection présidentielle (…il se présente, bien-sûr, sur la base de promesses de prospérité et de lutte contre la corruption). Et par extension, de ce qui cloche dans la société.

    ATTENTION : il va m’être difficile de parler plus en avant de Rencana Besar sans vous spoiler. Alors, si vous ne devez lire que quelques lignes de plus au sujet de la série, ce seront celles-ci : regardez cette série indonésienne. Avec ses 6 épisodes d’environ ‘une demi-heure chacun, honnêtement, c’est plutôt facile à suivre, comme recommandation. Prenez un abonnement Amazon Prime Video, dégotez les épisodes par d’autres canaux, venez braquer mon disque dur à main armée s’il le faut. Peu importe. Rencana Besar est le genre de série anti-capitaliste dont on a besoin ; son existence est d’ailleurs un peu une aberration (et plus encore sur Amazon, dont on sait qui elle enrichit). Je vous garantis que ces quelques heures de fiction indonésienne vous feront plus de bien que la moitié des séries que vous avez consommées cette année.
    Bon, et si malgré tout, vous n’avez pas peur des spoilers, ou que vous avez écouté ce conseil et que vous venez pour une analyse moins vague de l’intrigue, ça se passe après l’image.

    Parce que, quand je parle de série anti-capitaliste, je parle de série OUVERTEMENT anti-capitaliste, n’ayant pas peur d’articuler les idées et le vocabulaire de son sujet. Ce qui, l’air de rien, n’est pas si courant. A une époque où les personnes les plus riches de la planète s’emparent ostensiblement de médias sociaux, de titres de presse, de groupes audiovisuels, de plateformes de streaming, pour faire avancer leurs idées et leurs intérêts… ce discours relève tout simplement du miracle.
    Rencana Besar traite en fait cette histoire de détournements de fonds, qui dans une autre série serait l’alpha et l’omega de l’intrigue, comme un point de départ, quasiment un prétexte, pour parler du capitalisme et de ses ravages.

    Ainsi, bien avant avant la disparition des 17 milliards, UBI est déjà dans la tourmente. En cause ? L’annonce du gouvernement consistant à relever le salaire minimum à Jakarta, une mesure qui déplaît à Surya Nawasena, naturellement. Le patron de la banque décide, par l’entremise de son bras droit Agung, d’organiser ses services internes pour limiter la portée de cette mesure. En jouant sur les mots et par une pirouette corporate, la banque s’autorise donc à ne pas augmenter les salaires, mais juste l’enveloppe salariale globale que prévoit la loi… et cela signifie, dans les faits, que la plupart des employées de UBI ne vont pas réellement voir de changement sur leur fiche de paie. Tout cela, bien-sûr, alors que l’équipe d’audit mandatée par les actionnaires de UBI reçoivent l’assurance que les profits de la banque ne se sont jamais aussi bien portés. Vous connaissez la chanson.
    Le syndicat de UBI n’en perd pas une miette ; après avoir pris rendez-vous avec leur patron pour essayer de discuter, puis réalisé que c’était sans appel, l’organisation passe à la vitesse supérieure. C’est ainsi que Rifad se retrouve auprès des organisatrices d’une grève réclamant de meilleures conditions de travail, et qui est planifiée pour le 1er Mai (c’est aussi la date de la Journée internationale des Travailleuses, en Indonésie). Ayant ameuté les médias et mobilisé le personnel de la banque pendant un mois, le syndicat pense avoir une chance de se faire entendre…
    Or, il ne suffit que de quelques coups de fil entre Surya Nawasena (encore une fois via Agung) et les autorités pour que la police débarque, arrête les meneuses de la manifestation, et gaze les autres manifestantes devant des cameras qui ne perdent pas une miette de ces démonstrations de violences extrémistes. Je ne vous fais pas un dessin, vous avez grosso-modo vu à quoi ça ressemblait au printemps (vous vous souvenez du printemps 2023 ?).

    Cet événement, qui a de tragiques conséquences, est le réel déclencheur de l’intrigue, et nous permet de voir comment, dégoûtées, les employées décident que les méthodes de mobilisation habituelles ne marchent plus. Et n’ont sûrement jamais vraiment marché… Progressivement, il apparaît que Rifad, Amanda, Reza et Ayumi ont chacune une bonne raison de se lancer dans le casse du siècle : créer un scandale de détournement de fonds qui oblige les regards à se braquer sur les agissements de la banque, et les attitudes à changer à son égard. C’est pour cela qu’en concentrant leurs efforts, elles ont détourné les 17 milliards, qui forcent la police à enquêter sur les comptes de la banque.
    Rencana Besar est décidée à montrer non seulement, par des intrigues corporate, que la banque UBI est néfaste, mais aussi que ses pratiques favorisent d’autres choses illégales et dangereuses, plus indirectement. Et notamment le blanchiment d’argent, donc le trafic de drogue, qui finance la campagne présidentielle de Surya Nawasena. C’est un sujet qui touche personnellement Amanda, par exemple… mais aussi Makarim. Et combien j’ai attendu avec curiosité de savoir ce que la série allait faire de cet ingrédient ! Car le bon Makarim, il en crève (presque littéralement), de l’addiction de sa fille, et des ricochets sur son mariage, son travail, sa vie. Mais cela sera-t-il suffisant pour le convaincre ?
    Or, c’est ça, la question fondamentale de Rencana Besar : à partir de quel moment les gens arrêtent-ils de s’habituer au capitalisme, et en repoussent les valeurs nocives ?

    Au fil des épisodes, Rencana Besar revient sur les raisons pour lesquelles les quatre employées de la banque, qui semblaient n’avoir rien en commun si ce n’est leur employeur, ont décidé d’unir leurs compétences pour mettre à terre UBI.
    En parallèle, la série démontre quels sont les moyens d’action qui leur sont opposés, puisque Surya Nawasena fait tout son possible pour préserver l’image de marque (et donc les investissements) de UBI. Instaurer des exercices de team building incitant les employées à se conformer ? Demander aux leaders religieux (légalement un employeur de la taille de UBI a pour obligation de permettre à toutes les religions de se rassembler dans ses locaux, et de procéder aux rites qui les concernent) de convaincre plus ou moins subtilement les employées de ne pas écouter le syndicat ? Accentuer la pression sur les employées syndiquées en accroissant leur charge de travail et donc les risques d’erreur ? Pousser à la démission voire au suicide pour éviter d’avoir à payer des indeminités ? Allez, ne vous en faites pas, si rien de tout cela ne marche, il est toujours possible de demander à la police de disparaître quelqu’un d’encombrant…
    Et encore, ce n’est même pas le pire.

    La série est dédiée « aux victimes des violations des Droits de l’Homme, et plus spécifiquement les victimes des émeutes de 1998« , une période de l’Histoire indonésienne que Rencana Besar incorpore à l’intrigue (le frère d’Ayumi est l’un des étudiants qui a été fusillés pendant les manifestations, pour commencer). D’ailleurs, des images d’archives de ces événements sont incluses dans le générique, ainsi que dans l’épisode final de la série. Plus passagèrement, on y trouve aussi des références à l’assassinat de Salim Kancil. Il y a aussi dans cette chanson utilisée deux fois dans la série une mention de « 1986 », qui a l’air de peut-être se référer au transmigrasi vu le contexte, mais c’était vraiment pas clair pour moi, et j’ai pas trouvé assez de lectures permettant de comprendre pourquoi 1986 spécifiquement. Pourtant croyez-moi, j’ai passé un bon mois à chercher.

    Avec son intrigue pleine d’implications historiques et politiques, son discours sur l’importance de l’organisation collective et de la révolte, et son parti pris affiché contre un capitalisme qui ronge la démocratie, Rencana Besar est une série bien à gauche, c’est le moins qu’on puisse dire. Par conséquent, vous serez modérément surprise d’apprendre que Rencana Besar a été l’une de mes séries préférées cette année. Elle a su parfaitement allier une solide dose de suspense, quelques retournements de situation réussis, et un propos sans concession sur les maux de notre monde, dans un format compact, efficace mais jamais superficiel. Être plongée dans l’Histoire indonésienne, et en particulier l’Histoire des mouvements sociaux indonésien, s’est en outre avéré passionnant ! C’est un sujet qu’on n’a, en tant qu’Occidentales, l’occasion d’approcher que par le biais de la fiction importée, vu qu’on nous parle très peu ces sujets sur les bancs d’école ou dans les médias ; et même sous la forme de la fiction, c’est très récent. Donc profitons-en !
    Qui plus est, ce qui apparaît en regardant des séries comme Rencana Besar, c’est que nos problèmes s’inscrivent dans un contexte national qui nous est propre, mais ne nous sont pas vraiment uniques. Et que le capitalisme, lui, a très bien su s’organiser pour se sortir indemne de toutes les crises, voire les manufacturer. Du coup, qu’est-ce qu’on fait ?

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